13 🎧 Victorius

« VIVE LA PROMO 2018 ! »

Nous jetons tous nos écharpes dans les airs, souriant aux éclats et se libérant d'un poids énorme.

Ça y est, nous sommes diplômés.

Enfin.

Toutes ces heures passées à réviser, à rêver de dormir, à en perdre l'appétit... Tout était fini.

Et tout allait commencer.

C'est l'heure.

Les portes de l'amphithéâtre se ferment toutes en même temps, emprisonnant nos professeurs, les membres de l'administration de la fac et le président du département.

Nos camarades de deuxième année ont bien eu le message. Parfait.

Les caméras sont allumées, les projecteurs braqués sur eux alors que nous, les troisièmes années, nous sommes dans les gradins en train de les fixer.

Un flash. Une dernière photo prise par un officiel avant qu'il ne se rende compte de la situation dans laquelle nous venions de les mettre.

« Qu'est-ce qu'il se passe ? » demande le président en nous observant un à un.

Les autres se tournent vers moi, le major de promotion, me laissant monter sur un des bureaux avant d'ouvrir les bras et de sourire à pleine dent.

— Qu'est-ce qui vous prend ?! s'exclame le président.

— Mesdames, messieurs les membres de notre cher établissement. Nous les troisièmes années vous avons préparé une surprise pour conclure la fin de notre cursus.

— Descendez de là ! s'écrie une secrétaire.

— NOS BOURSES SONT VIDES ! Nos bourses, et pas nos couilles, nos bourses mesdames messieurs : elles sont vides. Depuis notre première année, vous avez refusé de nous verser nos bourses d'étudiants. Vous avez refusé de mettre le chauffage dans nos amphis pendant l'hiver et la climatisation pendant les partiels d'été. Vous avez refusé de traiter nos demandes administratives, poussant encore et toujours plus d'élèves à la mort. Car oui, nous avons compté. En trois ans, la promotion 2018 a perdu 143 élèves. Un quart sont à la rue, un autre quart suicidé, un autre à l'hôpital et quant au dernier, envoyé dans les camps de rebus de la société. Tout cela à cause de vous et de vos décisions politiques. Et si les professeurs étaient innocents...

— Vous avez perdu la tête jeune homme ! Descendez tout de suite !

— JE N'AI PAS FINI ! Parlons de nos professeurs. Les pervers qui matent mes camarades de la gent féminine sans se gêner. Qui les coincent dans les toilettes pour mieux les toucher et leur promettre une meilleure moyenne générale ? Les professeures qui n'ont pas honte de frapper les fesses des garçons, glissant des sous-entendus déplacés dans leurs oreilles pour mieux leur presser les couilles. Et puis les autres qui nous tyrannisent, qui nous jettent des bouquins à la gueule, qui nous crache dessus pendant les partiels et qui nous traite comme de la merde. Nous, la promotion 2018 avons tenu pour les générations futures et pour mettre un terme à ce régime de merde !

— À MORT LE SYSTÈME ! s'écrient mes camarades en sortant de leur sac à dos des battes de baseball.

— Que la nouvelle génération détruise les reliques du passé ! dis-je à mon tour en attrapant une des battes lancées par une camarade.

Ce soir, nous sommes victorieux. Nous écrasons, nous frappons fort, nous détruisons pour mieux construire et nous vengeons ceux tombés au combat.

Ce soir, je frappe cette connasse de secrétaire qui a volontairement égaré mon mémoire de recherche, repoussant ma soutenance de plusieurs mois.

Ce soir, je tabasse ce con de professeur qui m'a humilié devant toute l'université en me baissant mon pantalon à leur du déjeuner pour la simple raison que je l'avais corrigé sur un mot pendant son cours.

Ce soir, je me venge du président de notre département qui a ri après m'avoir avoué que le fait que je puisse posséder une bourse n'était qu'une blague, et cela après un an de combat.

Ce soir, je les tue tous. Pour mes camarades. Pour ce gars sympa au fond de la classe qui a fait un burn-out. Pour cette fille courageuse qui est traumatisée par son viol ce fameux mardi soir de décembre dans les toilettes du premier étage. Pour ce gars considéré comme un génie qui n'a jamais pu passer la première année pour une erreur administrative et volontaire. Pour cette fille que j'aimais et qui est maintenant à l'hôpital.

Ce soir, je suis victor-

« Allan ! Tu viens ? »

Je sursaute, de la bave ayant coulé de ma bouche alors que la moitié de la salle a quitté l'amphithéâtre. Le professeur d'économie est toujours en train de ranger ses affaires tout en parlant à une étudiante ayant une question sur ses travaux de recherche.

Mes amis m'attendent et discutent de la cérémonie de fin d'études prévue dans un mois. Une cérémonie qu'il faut rendre « inoubliable ».

Soudain, notre camarade pousse un cri. Nous nous tournons vers elle et découvrons la main du professeur sur ses fesses, l'autre sur sa nuque et l'attirant à ses lèvres. Je me lève d'un coup, prêt à lui casser la gueule lorsque mon ami me retient d'un air désolé.

« Vous avez un problème, Allan ? » me demande le prof d'un air malsain, retenant toujours notre camarade. « Ce serait dommage que le major de promotion 2018 n'obtienne pas son diplôme pour une simple erreur administrative, vous ne croyez pas ? »

Oui, la cérémonie serait inoubliable, croyez-moi.

« Aucun problème, monsieur. Vraiment aucun. »

Elle sera sanglante et victorieuse.



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