11 🎧 Knock on wood

Nous nous regardons dans le blanc des yeux alors que « Knock on wood » passe sur la chaine hifi du salon.

Mes parents sont sortis faire les courses, mon petit frère est chez ses amis et moi je suis là, devant elle, les mains moites.

« Tu veux encore un peu de muffins au chocolat ? » demandé-je e, bégayant presque.

Elle secoue la tête timidement, redressant ses lunettes rondes sur son petit nez couvert de taches de rousseur. J'écarte de la table basse les deux coupelles contenant des miettes de notre goûter lorsque le téléphone fixe sonne.

Je me lève du canapé, dégringolant presque sur le tapis et courant presque jusqu'au combiné.

— Allo ? Lucas à l'appareil.

— C'est Steph ! Alors alors alors ??? Tu l'as fait ? Elle est chez toi ???

Mes joues rougissantes, j'attrape le téléphone fixe et tire sur le fil du combiné pour me retrouver assez loin dans la cuisine pour ne pas qu'elle m'entende.

— Pourquoi tu m'appelles ?! chuchoté-je tout en faisant comprendre ma colère dans mon ton.

— Avec Nico on se demande si tu l'as choppé.

— Laissez-moi tranquille !

— On veut une photo de son soutif ! On veut une preuve !

— Je sais même pas si elle a un soutif.

— Ben euh... demande lui. Ou touche-lui les seins.

— Non ! Et puis laissez-moi tranquille !

— Demain au collège, on va dire à tout le monde que t'as choppé Gladys !

— NON ! Arrêtez sinon je vous pète la gueule.

— Rooo ok ! Seulement si t'arrives à la convaincre de nous présenter ses copines.

— Ok, maintenant je raccroche.

— Pense à mettre une protection !

Je grogne en claquant le combiné avant de retourner dans le salon où la brune m'attend tout en jouant avec le chouchou retenant ses cheveux en une natte dont s'échappe une mèche rebelle.

En m'asseyant à ma place encore chaude, je m'excuse en un sourire gêné, ma jambe commençant à sautiller à cause du stress. Gladys secoue la tête au rythme de la musique en me souriant, ses dents devenues sublimes depuis qu'on lui a retiré son appareil dentaire.

Allez mon gars, c'est pas le moment de se dégonfler. Ça fait des mois qu'elle me plait et si je m'y mets pas maintenant, après avec les révisions du Brevet, ce sera mort.

« Tu vas aller à quel lycée ? Celui du centre-ville où plus loin ? » me demande-t-elle en me faisant sursauter au passage.

— Celui du centre-ville. Et toi ?

— Celui de la ville d'à côté. Ils ont une option théâtre que j'aimerais passer pour le Bac.

— Ah... Tu penses déjà loin ! Tu vas prendre quelle filière ? Moi j'aimerais faire ES.

— Littéraire. Je lis beaucoup et j'ai beaucoup aimé l'option d'introduction à la philosophie.

— D'accord...

Silence gênant. Je ne sais pas comment poursuivre la conversation. J'ai envie de lui dire que c'est dommage qu'on ne soit pas dans le même lycée, que j'ai beaucoup aimé son exposé sur le recyclage et son impact au dernier cours d'SVT, qu'elle est tellement mignonne avec sa petite barrette en forme de coccinelle dans les cheveux, qu-

...

Mes pensées s'interrompent. Mes joues deviennent écarlates. Mes mains hyper moites.

Ses lèvres.

Elle m'a embrassé.

Gladys m'a embrassé.

Je revis la scène au ralenti. Elle s'est rapprochée doucement de moi alors que je cherchais quoi lui dire, sa main a glissé jusqu'à la mienne et enfin sa bouche est venue faire ce que j'aurais mis des heures à tenter.

Elle est aussi rouge que moi, ses doigts tremblants lorsqu'elle rajuste ses lunettes alors que mes yeux sont écarquillés.

« T'es trop mignonne » dis-je simplement alors que mon cœur battait à tout rompre dans ma poitrine.

Je suis mon instinct et viens embrasser ses lèvres toutes roses, mes doigts glissant entre les siens et ma main de libre se posant sur sa nuque pour la rapprocher de moi.

Nous essayons de nous embrasser comme dans les films mais c'est baveux, maladroit mais chaud et provocant des picotements partout sur ma peau.

Je ne sais pas combien de temps passe mais j'aimerais que ce moment dure pour toujours. Nos bouches s'améliorent de minute en minute et sentir son parfum fruité est en train de...

Oh non, c'est tendu. J'espère qu'elle ne va pas le remarquer.

— Lucas... dit-elle alors que nous reprenons nos respirations, je... euh... je suis amoureuse de toi. J'étais trop contente quand tu m'as invité chez toi pour l'après-midi. En plus tes muffins sont super bons ! Je ne savais pas que tu cuisinais.

— C'est ma maman qui m'a appris... Et moi aussi je... Enfin... Tu me plais beaucoup. Est-ce que tu veux bien sortir avec moi ?

Gladys me donne sa réponse en hochant de la tête, un sourire heureux que je viens embrasser à nouveau. Oubliant ce que m'ont demandé les copains, oubliant la musique, oubliant tout le reste...

Oubliant même qu'il est 17h et que mes parents rentrent des courses.

Le bruit des clés dans la serrure et la porte s'ouvrant avec raffut, Gladys et moi nous nous écartons, laissant un espace important entre nous lorsque ma mère déboule avec deux gros sacs et nous sourit.

— Oh mais c'est la petite Gladys ! Tu as grandi dis-donc !

— Bonjour madame, répond-elle timidement.

— Ta maman m'a dit que tu avais du mal en anglais cette année. C'est pour ça que tu es là, non ? Pour que Lucas te donne un cours de langue ?

— MAMAN ! m'écrié-je au sous-entendu qui visiblement, à la tête de ma mère, était involontaire.

— Ne crie pas Lucas ! Tiens, va aider ton père à décharger le coffre. Gladys, tu restes avec nous ce soir ? Je te raccompagnerais.

— D-D'accord madame. Je dois prévenir mon papa.

— Le téléphone est là... Alors Lucas ? Tu te dépêches ?

— Attends euh... Ok. Dans deux secondes.

Ma mère hausse les sourcils avant de comprendre en voyant mon regard lorsque Gladys se lève pour aller composer le numéro de chez elle. Son sourire s'élargit quand elle part vers la cuisine tout en déclarant tout haut et sans gêne :

« Mon petit garçon est en train de devenir un homme ! »



Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top