Inconscience
La routine quotidienne de Zhou Zi Shu s'installa. Plusieurs fois par jour, il distillait un peu de son énergie intérieure à Lao Wen pour maintenir ses méridiens actifs. Le reste de son temps, il le passait à étudier les deux livres . Il s'était installé dans la chambre froide ainsi il pouvait toujours avoir un œil sur lui.
Selon le livre des 6 arts martiaux , il devait travailler sur son moi intérieur et agir sur les trois composantes qui le définissait : le Jing ou l'essence, le Qi ou souffle et le Shen ou l'esprit.
Pour chacun d'entre eux , il existait des exercices qui lui permettaient de les développer.
En plus de ces composantes spirituelles, il devait aussi entretenir et fortifier son corps et en garder la pureté . C'est pour cela que la nourriture terrestre était prohibée ! Il avait donc appris à pratiquer l'inédie et a se passer d'aliments.
L'étude, la méditation, l'exercice physique et les soins de transfert devinrent son quotidien.
Tous les soirs avant de se coucher à son tour, il lisait à Lao Wen plusieurs chapitres des livres issus de la vallée des guérisseurs. Il se souvenait avoir entendu son âme sœur regretter de ne pas avoir mieux retenu les enseignements de son père au sujet de l'art médical. Une fois sa lecture finie, il se glissait dans le lit à ses côtés et se serrait contre lui afin de maintenir sa température corporelle.
Au fil des jours, cela lui avait permis de constater que son corps se réchauffait progressivement. Bien sûr, c'était infime. Mais chaque élévation de chaleur était la preuve qu'il se battait pour survivre et que son corps assimilait l'énergie qu'il lui donnait.
Les jours puis les semaines passèrent. L'état de Lao Wen évoluait lentement. Zhou Zi Shu avait pris l'habitude de lui parler, même s'il savait qu'il ne l'entendait pas. Il lui raconta son quotidien après son départ lorsqu'ils étaient enfants, puis plus tard comment il avait créé les « Fenêtres du ciel . Il lui parla de sa vie en tant que chef de cette organisation. Il lui fit part de son désespoir de voir mourir les uns après les autres les membres du Manoir des 4 Saisons jusqu'au moment où lui aussi ne l'avait plus supporté. Il avait pris la décision de s'infliger à lui-même le supplice des 7 clous ...
Le transfert d'énergie pour ce soir était suffisant. Il allongea doucement le corps inerte de Lao Wen et disposa ses cheveux de manière à ce que son apparence soit parfaite. Il remonta la couverture sur lui . Quand ce fut fait, il caressa du bout du doigt sa joue. Il aimait sentir la douceur de sa peau. Avant de se lever pour retourner au travail, il déposa sur son front un léger baiser.
Lao Wen ne comprenait pas ce qu'il lui arrivait. Il lui semblait entendre une voix au loin ... celle d'A-Xu ! Que disait-il ? Il avait du mal à le comprendre. Il sentait le froid autour de lui mais paradoxalement , une énergie brûlante lui parcourait le corps. C'est alors qu'il comprit et que les derniers évènements lui revinrent en mémoire.
Sa décision d'utiliser son énergie intérieur pour réparer les méridiens de Zhou Zi Shu en sachant que cela lui coûterait probablement la vie! Mais celle de son âme sœur était plus importante que tout à ses yeux et d'une certaine façon, c'était sa manière à lui de demander pardon pour toutes les atrocités qu'il avait commises au nom de sa vengeance !
Malgré la piètre opinion qu'il avait de lui, Zhou Zi Shu était une âme pure et belle qui méritait de vivre et si c'était le prix à payer, il l'acceptait avec joie ! Il espérait seulement que dans une autre vie , ils se retrouveraient et qu'il aurait la force de se montrer digne de mériter son amour !
Il avait envie de pleurer et de crier mais il n'y arrivait pas. Il était encore dans cet entre deux mondes, pas tout à fait endormi ni complètement réveillé.
Il sentit l'énergie diminuée , la brûlure s'atténuer. Des mains se posèrent au niveau de ses épaules pour l'allonger. Sa tête fut déposée délicatement sur un oreiller. Il senti que l'on arrangeait ses cheveux et que l'on rabattait une couverture sur lui.
Un doigt caressa sa joue comme le frôlement des ailes d'une libellule. Son cœur se gonfla de bonheur. Il savait qu'À-Xu le considérait comme son cadet, son ami , son frère mais était-il possible qu'il soit un peu plus pour lui ? Il fallait qu'il se réveille ! Il devait sortir du carcan obscur et glacé dans lequel il se trouvait.
Il ne savait pas depuis combien de temps il était inconscient, mais une chose était sûre , A-Xu ne l'avait pas abandonné. Alors que ses méridiens auraient dû se rompre et l'entraîner dans la mort, il sentait sa force intérieure les parcourir ! Son âme sœur avait dû trouver une solution ! Il devait se concentrer .... et le rejoindre.
Les lèvres d'A-Xu se posèrent sur son front.
« Je te laisse un instant, je dois préparer les herbes pour ton traitement des jours à venir. Je n'en ai pas pour longtemps. Je te rejoins juste après ».
Il le sentit se lever du lit. Qu'avait-il dit ? Je te rejoins ? Est ce qu'il voulait dire ... dans le lit ?
A-Xu !!!! tu n'aurais pas profité de mon corps sans ma permission quand même !!!!
C'était plus ma façon de faire !!!!
J'eus envie de rire mais aucun son ne sortit de ma gorge une fois de plus ! Il fallait vraiment que je me réveille ! J'avais des questions à lui poser, des explications à lui demander et un aveu à lui faire.
Je concentrais toute la force intérieure dont je disposais pour vaincre les limbes de l'inconscience dans laquelle je me noyais. Progressivement, le brouillard s'éclaircit. La nécessité se fit pour moi de prendre une grande inspiration au moment où j'ouvris les yeux.
Je me trouvais dans un lit. Des tentures blanches ornées de flocons se trouvaient au-dessus de moi et redescendaient au niveau de ma tête et de mes pieds. Je me tournais légèrement vers la droite et je fus aveuglé par la lumière d'une bougie. Je levais la main pour me protéger les yeux. Quand ils furent habitués, je regardais plus en détail mon environnement. Je me trouvais dans une sorte de caverne. Nous étions donc toujours coincés dans l'armurerie.
La cavité était organisée comme une chambre. Une grande porte faisait face à la couche où je me trouvais. Plusieurs braseros apportaient chaleur et lumière. Une table de travail submergée de livres se trouvait sur ma droite. Ce devait être là qu'A-Xu étudiait. Une autre table munie de deux petits bancs se trouvait sur la gauche. Une théière et des tasses étaient posés dessus. Juste à côté, une sorte de comptoir et devant ... A-Xu.
Il me tournait le dos. Je le regardais . Il était vêtu de blanc et de bleu, ce qui lui conférait une aura surnaturelle et divine. Dans ses cheveux, je vis le pic de jade qui servait de clé pour l'armurerie ... il le portait . Une fois de plus mon cœur rata un battement car je n'osais croire à tous ces petits riens qui me faisait espérer un sentiment plus profond de sa part. Je voulu l'appeler et lui dire que j'étais réveillé, mais une boule d'émotions empêchait tout son de sortir de ma gorge.
Je me relevais péniblement. Mon corps avait du mal à suivre les ordres que je lui donnais. J'avais dû rester alité un grand nombre de jours. Une fois en position assise. Je concentrais ma force intérieure pour réactiver mes muscles et me permettre de me lever.
Quand je sentis que mon corps répondait mieux , je basculais mes pieds vers le sol.
Un frisson me remonta depuis la plante jusqu'au cou en suivant mon épine dorsale . Je constatais que celui-ci était extrêmement froid. En m'appuyant sur le rebord du lit ,je réussis à me lever. Je n'avais que quelques pas à faire jusqu'à mon âme sœur.
Zhou Zi Shu avait quitté le lit où Lao Wen dormait. Cela faisait presque quatre mois qu'ils se trouvaient enfermé dans ces lieux. Quatre mois qu' il espérait chaque jour voir s'ouvrir les yeux de celui qu'il savait maintenant aimer. Il en avait eu conscience petit à petit au fil des semaines à prendre soin de lui. Ce qu'il avait pris pour un sentiment fraternel dans un premier temps, était bien plus profond , il s'en rendait compte à présent. Il comprenait la déchirure qu'il avait ressenti dans son cœur ainsi que le sentiment de vide lorsqu'il avait compris ce qu'avait fait Lao Wen pour lui.
Lao Wen .... Sa complexité lui posait encore quelques problèmes. On ne savait jamais vraiment lorsqu'il était sérieux ou non ! Il était tellement habitué à se cacher et à jouer la comédie que c'était devenue une partie intégrante de sa personnalité !
C'est pour cela qu'il avait peur de son réveille au même titre qu'il l'espérait.
Il savait que lorsque cela arriverait, il y aurait des explications à fournir, des questions à poser et un aveu à faire...
Il essayait de se concentrer sur les herbes qu'il était en train de piller pour l'élixir de son âme sœur, quand deux bras lui encerclèrent la taille et le torse d'un homme se colla à son dos. Une voix rauque qui n'avait émis aucun son depuis quatre mois souffla à son oreille.
« A-Xu ... »
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top