Média : Mexican Moon – Concrete Blonde

Samedi 14 septembre 2019

Nous sommes à quelques heures du mariage de Mickael et Elena. Mes parents étant invités, ma mère a souhaité que l'on se fasse un après-midi mère-fille pour se préparer pour l'événement. Nous avons rendez-vous dans le salon de beauté où elle a l'habitude d'aller pour se faire chouchouter. Je la rejoins à la maison et trouve une housse pendue au porte-manteaux de l'entrée. Toute excitée, je découvre la tenue que mes parents m'offrent pour l'occasion et ne peut pas résister à la tentation de l'essayer alors je pars dans mon ancienne chambre pour l'enfiler.

Je suis encore une fois ébahie par leur choix, la robe est superbe et me correspond parfaitement, à la fois romantique et sexy. Sa forme patineuse est très élégante mais ce qui est le plus beau ce sont les ornements de dentelle ivoire cousus sur la tulle transparente. L'ensemble est léger, aérien comme si les motifs floraux étaient peints sur ma peau. Je ne peux bien évidement pas porter de soutien-gorge mais le haut de la robe est corseté pour souligner et mettre en valeur le galbe de ma poitrine et la finesse de ma taille. Le bas est doublé de soie ivoire donnant un reflet nacré à la dentelle. Il y a également une étole en soie de la même couleur pour pouvoir me couvrir les épaules. Je fais un petit défilé à mes parents et les embrasse chaleureusement pour les remercier de prendre autant soin de moi. Je vais remettre la tenue dans sa housse, puis ma mère et moi partons pour notre séance de mise en beauté.

De retour chez mes parents, je vais finir ma préparation et revêt enfin cette merveilleuse robe. J'ai passé un excellent après-midi avec ma mère, notre complicité m'a ressourcée en plus de prendre le temps de me faire belle. L'esthéticienne m'a fait un magnifique maquillage dégradé marron qui sublime la couleur noisette de mes iris. Je lui ai demandé d'attacher mes cheveux en un chignon flou pour casser le côté sophistiqué de ma mise en beauté et de ma tenue.

Comme Mickael et Elena ont souhaité s'unir selon leur tradition familiale, nous sommes à présent tous sur le parvis de l'Église St Pierre à attendre la mariée. Nina est à mes côtés, elle est très belle dans sa longue robe style bohème rose poudrée au décolleté vertigineux avec ses longs cheveux lâchés en belles ondulations. Mon frère qui est le témoin de Mickael a sorti son costume et son nœud papillon noirs avec une chemise blanche, il est extrêmement élégant et il fait déjà tourner les têtes des jeunes invitées des proches des mariés.

Quant à Mickael, il est à tomber dans son costume trois pièces gris avec sa chemise blanche entrouverte. Il regarde la route à guetter l'arrivée de sa promise, entouré de son père et de ses deux petits frères jumeaux. Je l'observe avec nostalgie du temps où c'était moi qu'il surveillait, à l'affût de la moindre seconde de libre pour venir me susurrer des mots torrides à l'oreille. A présent, c'est à la vue d'Elena qui descend de la voiture que son regard pétille et que son sourire s'élargit pour faire apparaître ses belles dents blanches.

La cérémonie est très émouvante, Elena est tellement belle, une vraie princesse dans sa robe longue à traîne ivoire parsemée de perles et son voile que Mickael soulève délicatement pour pouvoir enfin la découvrir. Je ne peux pas retenir une larme de couler le long de ma joue au moment de l'échange des vœux. Une page se tourne définitivement pour moi alors que ces deux-là vont convoler vers un avenir que je leur souhaite radieux.

A la sortie de l'église, nous formons tous un convoi pour accompagner les jeunes mariés jusqu'au lieu des festivités. Le père de Mickael a réservé la salle d'un restaurant mexicain. L'endroit respire l'allégresse et l'amour avec les énormes boules de papier aux couleurs vives qui ornent le plafond, les guirlandes lumineuses qui traversent la salle de part en part et les bouquets multicolores qui décorent les tables.

Un immense buffet garni d'enchiladas, tacos, ceviche et autres spécialités mexicaines plus appétissantes les unes que les autres, est installé à proximité des cuisines. Du côté du bar, des grandes fontaines avec divers cocktails à base de tequila, rhum ou Mezcal sont mises à disposition, ce magnifique camaïeu de boissons colorées donne envie de tous les déguster.

La soirée est très réussie, chacun mange, danse, chante comme il le souhaite dans un esprit simple et familial digne d'une bodega. J'ai été approché par un bon nombre d'invités soit pour me féliciter pour les alliances, il faudra d'ailleurs que je remercie Mickael car il me fait un bon coup de publicité, soit par de jeunes hommes pour m'inviter à danser.

Je me suis laissée tentée par la dégustation de chacun des cocktails et je ne suis pas la seule vue l'allégresse de Nina, son exubérance ne choque personne, au contraire elle semble communicative compte tenu de l'attroupement hilare autour de Nate et elle. Comme mes parents sont rentrés, Alessandro se lâche pour danser langoureusement avec une belle mexicaine à la peau basanée. Il a été devancé par Martin qui a déjà succombé aux charmes d'une jolie brunette dans une bachata plus que suggestive. Pour ma part, j'ai pris un peu de recul et observe la scène de fête qui se déroule devant mes yeux en sirotant un énième verre de cocktail.

J'aperçois Elena qui se dirige gracieusement vers moi et prend place sur le banc à mes côtés.

— Ça va Anna, la fête te plait ?

— Oui c'est parfait, la complimenté-je.

Elle me regarde en souriant puis se penche vers moi et me glisse à l'oreille :

— Merci d'avoir pris soin de lui.

Je lui fais face étonnée mais elle ajoute :

— La bouteille de parfum dans ta salle d'eau, c'est moi qui lui ai offerte, m'avoue-t-elle en me faisant un clin d'œil.

Puis elle se lève et retourne dans la foule. Je la regarde s'éloigner complètement hébétée. Elle sait. Je me sens terriblement gênée par cette révélation.

Pour dissimuler ma honte, je vais jusqu'au bar pour me servir un remontant et m'éclipse à l'extérieur. J'ai terriblement besoin de fumer une cigarette pour évacuer toute cette tension en moi. Lorsque j'attrape mon paquet, un morceau de carton tombe de mon sac. Je le ramasse pour ne pas qu'il s'envole, je le jetterai à la poubelle plus tard. Avant de le glisser dans ma pochette, je le regarde et découvre que c'est la carte de visite de Robin. C'est vrai qu'il me l'a donnée hier, j'avais oublié ce détail. Je l'observe, la retourne et distingue un petit mot d'une belle écriture manuscrite légèrement penchée sur la droite « Vos désirs sont des ordres Bella ». Je reste stupéfaite en lisant cette petite phrase, il avait donc prévu de me donner sa carte puisqu'il a écrit mon surnom. Je ne sais pas si je dois m'en réjouir ou me méfier de cette mise en scène.

Je m'installe à une table sur la terrasse et allume ma cigarette. Après quelques bouffées, je me sens déjà plus détendue. J'ai toujours la carte de visite de Robin entre les doigts, je l'étudie attentivement, le graphisme épuré, le logo en vernis sélectif mais surtout ces lettres calligraphiées. Je ne suis pas graphologue cependant je reconnais que son écriture est fine, soignée, élégante, comme lui.

Après quelques minutes à rêvasser, je sens soudain la fatigue s'abattre sur moi, certainement le contrecoup émotionnel et l'abus de cocktails. Je saisis mon téléphone et je commence à écrire un SMS :

De Annabella : « Je désire rentrer chez moi. AA »

Puis j'appuie sur Envoyer sans réfléchir. Dans les secondes qui suivent, mon téléphone se met à vibrer.

De Robin : « Vos désirs sont des ordres Bella, vous êtes où ? RV. ».

Surprise par sa réponse si rapide et surtout prise à mon propre piège j'hésite à lui répondre, puis je décide de jouer jusqu'au bout et lui donne l'adresse du restaurant. Je lève les yeux au ciel, c'est la pleine lune cette nuit, j'admire la luminescence de cet objet céleste en fumant une autre cigarette lorsqu'une magnifique Tesla Roadster noire se gare dans la cour du restaurant. Aussitôt, Robin se matérialise devant moi toujours aussi impeccable même à cette heure tardive dans son costume noir et sa chemise blanche. Il progresse de sa démarche féline en me fixant de son regard charmeur puis prend une chaise et s'assoit à côté de moi.

— Me voilà Bella ! Où voulez-vous que je vous dépose ? argue-t-il avec son sourire de séducteur.

Sans un mot, j'envoie un SMS à Nina et vais m'installer dans sa voiture.