Chapitre 8
Alban se met à cracher du sang. En essayant de prendre son pouls, je pu constater qu'il était très faible. Trop faible même. Il s'épuise et je ne peux rien faire à par attendre et pleurer. Malgré ma vision floue, je distingue des masses noires d'élèves dans le hall essayant de voir ce qu'il se passait. Les voix des étudiants forment un brouhaha qui cogne dans ma tête. Les rumeurs enflent rapidement. Apparemment, mon ami serait complètement ivre et en train de faire un coma éthylique. Je ne peux malheureusement pas les contredire car je suis incapable de parler. Les entendre parler en mal de lui et dire de mauvaises choses sur son compte me blesse car je suis incapable de le défendre alors qu'il git à mes côtés, immobile, silencieux. Je me réfugie à ses côtés, tel un chien abandonné. Je le protège des mauvaises langues comme il me protège du froid imposé par ces spectateurs. Nous faisons face, mais nous sommes en piteux état.
Une voix grave se détache des autres. Un mouvement de foule se fait devant moi, devant mes yeux embués. Un homme s'accroupi en face de moi et me touche l'avant-bras comme pour me rassurer avant de se tourner vers mon ami.
-Prend la fille, je m'occupe d'Alban, dit-il.
-Elle s'appelle Aglaé !
-Peut importe, il faut agir vite.
Tandis que l'on m'arrache Alban de mes bras, un autre homme se poste en face de moi. Il essuie les armes sur mes joues, parle doucement comme pour me rassurer. Mes larmes séchées, je peux voir très clairement autour de moi. La foule d'il y a quelques minutes auparavant s'est dissipée comme si aucun accident n'était arrivé. Les élèves se demandent même ce qu'ils font dans le hall au lieu d'être en cours. Ils sont hagards, désorientés. Ne comprenant pas, je me tourne vers la personne en face de moi.
-Lucas ?
-On a fait au plus vite.
-Où est Alban ?
-Gabriel l'a emmené. Il est en sécurité maintenant.
Le garçon de la fraternité me sourit pour accompagner ses mots mais je ne le crois pas. On l'a emmené loin de moi alors qu'il est au plus mal. Il a besoins de secours et de soins le plus rapidement possible. Il était en détresse respiratoire et son pouls était très faible aussi. Je ne fais pas médecine mais je sais d'avance qu'il n'est pas en sécurité tant qu'il n'est pas à l'hôpital en train de se faire ausculter avec une armada de médecin autour de lui pour comprendre ce qui lui arrivait. Dans ma tête les pires scénarios se jouaient. Je panique. Des mains froides se collent de part et d'autre de mon visage. Lucas se tient à quelques centimètres de moi, ses yeux fixés dans les miens. Il m'intime d'inspirer et d'expirer profondément mais cela fait tourner le monde autour de moi. Je cligne des paupières pour éviter de m'évanouir. Je veux me lever et mon corps refuse. Lucas me soutient m'évitant une chute. Je fais une seconde tentative. Une fois debout sur mes deux pieds, je lui demande où est Alban. Son ami regarde son téléphone et me demande de le suivre. Je lui emboite le pas, remarquant un sac à dos noir sur ses épaules.
Nous suivons le dédale de couloirs de l'université, passant devant de nombreuses salles et amphis. Il se stoppe devant une porte grise à côté des toilettes pour hommes. Il toque une fois, deux fois rapidement puis une nouvelle fois. La poignée s'abaisse pour laisser passer la tête de son ami aux cheveux longs.
-Qu'est ce qu'elle fait là ?
-Elle s'inquiète, je ne pouvais pas la laisser seule sans réponse.
-Entrer.
Il ouvre la porte un peu plus grande pour nous laisser passer. Lucas entre le premier et enlève son sac de sur son dos et le pose sur une table. Quand je rentre à mon tour, je vois Alban allongé sur un ilot de tables rassemblées au milieu de la pièce. Je me précipite vers lui. La lumière crue de la salle de classe rend son teint blafard. Je remarque de suite que son pull lui a été retiré ainsi que ses chaussures. Il est torse nu dans une salle où le chauffage fait des caprices. Il a les yeux fermés et le sang qui maculait son visage a séché. J'ai l'impression qu'il dort sauf que sa poitrine ne se soulève pas au rythme d'une respiration. Il ne bouge pas du tout même.
-Il faut l'emmener à l'hôpital de toute urgence, je fais à l'égard des étudiants.
-Pas besoin, on va s'occuper de lui, me fait Gabriel en sortant des boites du sac à dos de Lucas.
-Il ne respire plus !
-Je sais.
-Il...
-Lucas, fait-la sortir !
Le dénommé Lucas, s'approche de moi et me pousse gentiment vers la porte close de la salle. Je passe alors devant le Monsieur-je-donne-des-ordres et vois tout de suite le contenu des boites. Des flacons transparents contenant un liquide verdâtre et des seringues sont parfaitement bien rangés. Dans une autre boite, un défibrillateur à instructions vocales que Gabriel prend dans ses mains pour le placer aux côtés d'Alban.
-Que vas-tu faire, je demande en me détournant de Lucas.
-Rien qui ne te concerne.
-C'est mon ami.
-Je croyais que tu étais simplement une camarade de promo en option politique.
Il me coupe l'herbe sous le pied. Je ne sais pas quoi lui répondre mais je reste inquiète. Ne s'occupant plus de moi, il pose les électrodes sur le buste d'Alban de part et d'autre de son cœur. Je l'observe faire alors que Lucas essaie toujours de me mettre dehors. Je lui fais comprendre que je ne veux pas sortir. Il souffle alors et rejoint son ami de l'autre côté du juriste. Il lui tend une seringue vide que son ami se dépêche de rempli d'un des contenus de flacon. Il fait vide d'air comme s'il avait fait ça toute sa vie. Et dirige l'aiguille vers une veine apparente au niveau de l'épaule du blond. Il appuie sur le piston et le liquide verdâtre se diffuse dans le corps inerte. Une voix robotisée féminine indique que défibrillateur va choquer et qu'il faut s'écarte, ce que font les garçons alors que moi je me rapproche. Le corps se soulève et retombe dans un bruit sec. On attend quelques secondes, avide de savoir si ça a fonctionné. La voix reprend ses instructions et la même chose se produit. Alban ne bouge pas. Lucas transpire, son front brille à la lumière alors que Gabriel tremble. Ses mains sont fébriles qu'il n'arrive pas à planter une nouvelle aiguille dans le flacon. Il s'y reprend à plusieurs reprises.
Le processus se répète trois fois et rien ne se passe à chaque fois. Alban est toujours immobile sur les tables. Les garçons semblent désœuvrés. Je regarde mes mains et sens mon pouvoir crépiter au bout de mes doigts. Un courant électrique parcours ma colonne vertébrale.
-Il faut un choc électrique plus violent pour faire diffuser l'antidote dans les veines, murmure alors Lucas.
-Nous n'avons qu'un défibrillateur, et d'habitude ça fonctionne, s'insurge son interlocuteur.
-C'est par ce qu'il est resté trop longtemps avec l'aconit dans le corps.
-Tu crois que je ne suis pas au courant.
-De l'eau, je dis. Il faut de l'eau, c'est un très bon conducteur.
-Quoi ?
-Il faut que son corps soit mouillé et l'électricité sera plus importante car c'est un conducteur.
-Essayons, Gabriel.
Je sors de la salle et ouvre la porte des toilettes pour garçons. Un étudiant est debout devant un urinoir et me demande de sortir en m'insultant. Je lui fais un geste obscène tout en ouvrant une toilette pour prendre une poubelle vide que je rempli d'eau. Pendant tout ce temps, le gars n'ose même pas faire pipi et se rhabillé et continue de me crier dessus et de m'insulter. Quand l'eau arrive en haut. Je sors des toilettes et toque à la porte grise adjacente. Lucas m'ouvre alors que son ami est en train de préparer plusieurs seringues. J'apporte la poubelle pleine d'eau sur la table où est transposé le matériel.
-Ça ne va pas aggraver la situation ?
-Il fallait y penser avant, mais non, me fait Gabriel.
Je fouille dans mon sac de cours pour y trouver un paquet de mouchoirs en papier. J'en prends plusieurs que je trempe dans l'eau et que j'essors sur le torse d'Alban. Je réitère l'opération jusqu'à ce que ses amis jugent la teneur en eau sur son corps assez importante. Les électrodes sont à nouveau placés autour de son cœur et cette fois l'injection se fait directement au niveau de son organe vital. L'électrocardiogramme allumé, la voix robotisée s'élève.
-Aglaé, écarte-toi, s'il te plait, me demande Lucas.
Je fais semblant de m'éloigner mais au moment où le courant électrique est envoyé, je saisie la main de mon ami en murmurant rapidement un sortilège qui libère l'électricité au bout de mes doigts. Au deuxième choc, je refais la même chose. Le corps allongé sur la table tressaute mais ce n'est pas suffisant. Il faudrait que je place mes mains au niveau de son pectoral gauche. Alors que la voix entonne le décompte du troisième choc, je monte sur la table sous les exclamations des comparses d'Alban. Quand « un » retentit, je plaque mes mains gelées sur son torse. Je sens le courant électrique traverser ma colonne vertébrale, longer les os, courir sur ma peau avant de se déverser dans mes paumes. Le choc est violent pour lui comme pour moi. J'en tombe même des tables.
-Quelle petite sotte !
Gabriel m'attrape par le coude pour me relever. Ses cheveux retombent sur ses yeux et d'un geste rageur, il les coince derrière son oreille.
-Tu aurais pu faire un arrêt cardiaque ! Tu es inconsciente ma parole !
Il continue de m'engueuler mais Lucas coupe court à son monologue. D'un seul homme nous nous tournons vers lui. Alban est assis sur les tables, blanc comme un linge. De joie, je lui saute dessus et le serre dans mes bras. Il resserre mon étreinte en passant ses bras le long de mon dos.
-Bon sang, j'ai eu si peur, je lui dis doucement.
Alors que je m'écarte, les deux étudiants lui tape virilement dans le dos.
-Fais attention à ce que tu manges mec ! Surtout quand ça ne viens pas de la fraternité ou du restaurant universitaire.
-Je serais prudent, Gabriel.
-Qui t'a donné ce gâteau ?
-Elle s'appelle Coleen Malhunter. Elle était à la soirée de la fraternité jeudi soir. Elle m'a parlé et m'a paru louche comme fille, je fais d'une petite voix.
-Très bien, je dirais à Hugo et à Thomas de faire des recherches sur elle. Merci quant même Aglaé pour ton aide. Cependant, si j'entends quoi que ce soit comme rumeur sur ce que tu as vu, tu seras en mauvaise posture.
La menace de Gabriel me passe au-dessus car nous savons tous dans cette salle que ce qui viens de se passer n'avais rien de normal et puis j'ai utilisé ma magie devant des humains, alors pour rien au monde j'irais me vanter de ce qui viens de se passer. Alors que les garçons rangent leur matériel, j'aide Alban à se rhabiller. Il semble courbaturer et chaque mouvement lui fait mal, cela se voit sur son visage.
-C'est quoi l'aconit, je lui demande tout bas pour ne pas être entendu.
-Une simple plante qui quand elle est distillé peut devenir un poison.
-Comment tu savais ce que c'était ?
-Oh, euh... Et bien...
Il passe sa main dans ses cheveux et fuis mon regard. Il va m'inventer un mensonge.
-Il en a déjà ingérer l'année dernière alors il connait les effets, grogne Gabriel juste derrière moi. Merci de nous avoir aidé, maintenant il est temps pour toi de partir. Nous on ramène Alban à la fraternité pour qu'il se repose.
Je me tourne vers le concerné qui me sourit gentiment. J'attrape donc mon sac où sont mis bourre et balle les affaires et sort de la salle de classe sans demander mon reste. Dans le couloir, un courant d'air froid me fait frissonner. Je mets mon manteau et mon écharpe. Une fois dans le hall, j'aperçois Coleen qui est toujours en train de vendre des gâteaux. Je m'approche d'elle furibonde.
-A cause de toi Alban a failli mourir étouffer !
-Failli, donc il ne l'est pas, dit-elle avec un grand sourire.
-Je sais qui tu es alors...
-Moi aussi, je sais ce que tu es Aglaé. Et je n'ai pas peur de toi. Cependant, à cause de toi, je n'ai pas pu réaliser mon projet alors sache que si tu te mets encore une fois en travers de mon chemin, je vais finir par te chasser.
-Tu crois pouvoir me chasser, comme tu chasses les loups ?
-Tout à fait.
Elle posa une de ses mains contre une des miennes. Le froid de sa bague me fit sursauter au départ, puis la chaleur commence à se répandre jusqu'à me brûler la peau fine de la main. D'instinct, je veux enlever ma main mais elle raffermit sa prise. Je gémis de douleur et gesticule pour échapper à sa poigne. Quand elle décide de me lâcher, elle ricane.
-J'ai quelques gâteaux à base de poudre de fer pour toi. Alors si tu ne veux pas y goûter, ne contrecarre pas mes plans.
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