Graye ~ 4

Réna claqua la porte, et je faillis en soupirer.

Je ne me rendis compte que je fixais la porte close que lorsqu'Elya se racla la gorge.

- Graye... tu ne me cacherais pas quelque chose ?

Je voyais son sourire en coin se former avant que je ne lui donne ma réponse.

Je soupirais, pour de vrai cette fois, en m'installant plus confortablement dans mon siège.

- Depuis combien de temps tu sais ?continua ma sœur dans son interrogatoire.

- Je dirais que ça fait... deux ans, réfléchissai-je.

Elya fit les gros yeux et se rapprocha de moi.

- Deux ans que tu le sais et tu ne t'accordes que maintenant de l'aimer ? Il y avait un autre homme c'est ça ?  tenta-t-elle de trouver une explication à mon comportement.

- Non... il n'y avait personne..., soufflai-je ne la regardant pas dans les yeux.

Il y eut un léger silence puis Elya vint prendre mes mains dans les siennes aussi froides que son pouvoir de dragonnière.

- Graye... Je sais à quel point ton don de prêcheur te coûte mais... tu as le droit de vivre, m'éclaira-t-elle de son avis sur ma relation avec Réna.

Je me mordis la lèvre et serrai ses mains.

- Elya... Je ne peux pas la voir mourir, je ne peux pas.

Son expression faciale changea et je lus dans son regard qu'elle fera tout pour ne pas que Réna finisse comme dans ma vision sur le champ de bataille.

Décidant de changer de sujet pour en aborder un autre beaucoup plus intéressant, je lui posais une question.

- Et toi, tu comptes le dire quand à Kenyan ?

Elle comprit ce à quoi je faisais allusion dans la seconde et me pinça la peau du dos de ma main.

- Ce ne sont pas tes oignons, me taquina-t-elle avant de se relever. Je te tiens au courant de notre implication pour vaincre Vépia dans la soirée.

Je hochai la tête et commençai à m'imaginer dans mon lit, dormir comme un bébé, quand elle se retourna au dernier moment.

- Graye... Je l'aime bien.

Puis, elle partit sur son île tandis que je restais sur la mienne.

N'ayant ni la force d'aller m'expliquer avec Réna, ni la force de commencer à réfléchir à un plan d'attaque, je rejoignis ma chambre et tombais raide sur le matelas.

Un corps chaud et réconfortant se blottit contre moi et je resserrais mon étreinte dans celle de Johanna. Je m'étais de nouveau réveillé après avoir atterri ici, et cette fois moins dans le brouillard que plus tôt. Alors elle tâcha de m'expliquer plus en détails ce qu'elle avait déjà commencé tout à l'heure.

Johanna avait été la gérante de "l'auberge d'or" quand j'étais petit. Mais elle avait disparu aussitôt à l'arrivée de Syfia et Luc, laissant un simple mot pour adieu.

Ça m'avait blessé, car n'ayant pas de parents, Johanna s'en rapprochait le plus. Je savais qu'elle avait sa propre famille mais je ne l'avais jamais vu.

Jusqu'à aujourd'hui.

Autour de moi se profilait un salon. J'étais visiblement dans sa maison. Et derrière elle se tenait une fille de mon âge, je dirais ou un peu plus jeune. Elle avait de longs cheveux blancs qui encadraient son visage tandis que ses yeux bleus océan me fixèrent durement.

Je laissais retomber mon regard sur son clone miniature caché derrière elle, la seule différence était là longueur de leurs chevelures respectives. Si l'une les faisait pousser, l'autre préférait les couper courts.

- Graye... Je te présente mes filles. La plus grande c'est Aurora et la seconde plus jeune c'est Adki, m'informa Johanna.

Je les saluais toutes les deux d'un signe de tête et avec un sourire. Adki voulait s'approcher de moi, son regard étincelant de curiosité, mais sa sœur l'en empêcha en la gardant derrière sa jambe. Et sans un mot, Aurora entraîna sa sœur plus loin dans la maison, hors de ma vue.

Visiblement, toutes ici n'étaient pas ravies de me voir.

Johanna me sourit et pris place à côté de moi, prenant l'une de mes mains dans la sienne.

- Je sais que tu lis beaucoup Graye. Tu as sûrement dû croiser ça et là le terme "prêcheurs" ou "prêtresses".

Je hochais la tête suivant son récit.

- Mes filles sont toutes deux des prêtresses. Aurora peut modeler l'espace, c'est grâce à l'un de ses portails que j'ai pu t'amener ici. Quant à Adki, elle est la prêtresse des dragons. Sred est d'ailleurs en train de faire un petit somme grâce à ses soins, finit-elle de m'expliquer avec un clin d'œil.

Je sentais que j'allais me perdre dans peu de temps avec toutes ses informations soudaines.

- Si tu es ici Graye, c'est à cause de ton père. Il a disparu depuis quelques années déjà... J'ai des raisons de croire que tu as hérité de son gêne de prêcheur. Il était notre leader, ainsi tu es maintenant le nôtre, conclut Johanna, l'émotion voilant son visage.

- Tu es aussi une prêtresse ? en déduis-je si je suivais bien.

- Oui, la prêtresse du bois ! Tu ne t'es jamais demandé comme l'auberge était toujours propre sur Iré ? me donna-t-elle un petit coup de coude.

Je lâchais un sourire avant de continuer mes interrogations.

- Qui était mon père ?

Son regard dévia du mien et elle se releva. Quelque chose avait changé.

Mon père était-il un sujet épineux ? Je n'avais jamais connu mes parents, c'était donc normal que je me pose des questions.

- Nous en reparlerons plus tard d'accord ? En attendant, je veux vérifier si...

- Plus tard ? la coupai-je une violente intuition me frappant au visage.

- Graye... tu ne rentres pas sur Iré, m'acheva-t-elle avant qu'une perte de contrôle, de ce que je pouvais appeler maintenant mon côté prêcheur, ne me fasse voir les étoiles.

Une pression sur mon épaule me réveilla de mon sommeil agité. Je ne me souvenais pas de quoi j'avais rêvé, mais la sensation d'avoir peu dormi était présente.

Parce que lorsqu'on rêvait trop, notre cerveau ne se reposait pas assez, donc on était plus fatigués qu'après une bonne nuit sans rêves.

Je grognais mais me tournais pour faire face à celui qui m'avait réveillé.

- Papa ? m'étirai-je avant de lui demander ce qu'il faisait ici.

- Bien dormi ? On m'a dit que tu as eu une vision assez... chamboulante, baissa-t-il les yeux sur ses mains qui tenaient quelque chose.

Je lançais un regard à mon horloge et fus soulagé de voir que je n'étais pas en retard chez les métamorphes. Je me levai de mon lit et commençai à chercher de quoi m'habiller.

- En effet, papa de quoi veux-tu vraiment me parler ? brisai-je le silence imposé par mon paternel.

Il soupira tandis que je pris un tee-shirt.

- Graye... tu as vu toute sa vie c'est ça ?

Je hochais la tête, je n'avais pas vraiment envie de me rappeler ça. Les émotions de ma mère pouvaient de nouveau affluer en moi. Et je n'avais pas aimé ça.

Parce qu'elles avaient été trop vraies.

Trop sincères.

Et que de sa peine, je n'en voulais pas.

De ses raisons pour ses actes, je n'en avais rien à faire.

Je voulais la justice, qu'elle paie pour tout ce qu'elle avait fait.

Quand mon père m'avait annoncé l'identité de la seule femme qu'il avait aimée avant la mère d'Elya, je n'avais pas voulu y croire.

Parce que ça n'avait pas pu être possible.

Cela voulait dire que ma mère avait été sous mes yeux depuis tous ce temps et qu'elle ne m'avait jamais demandé à ses côtés, pour m'annoncer notre lien familial.

J'avais été si énervé face à ce constat qu'une vision avait bien failli me tuer. Mais seules des paroles d'une chanson m'étaient revenues en tête. Cette vision, je l'avais oublié et chaque jour, je me souvenais de la violence dont j'avais été atteint.

Cette vision, quoiqu'elle fut, était importante.

Et je l'avais oublié, comme si je n'avais pas pu la supporter.

J'avais néanmoins une hypothèse.

J'avais vu ma mort et mon esprit n'avait pas pu se résoudre à me renvoyer cette fin.

Je ne doutais pas un seul instant que je ne verrai pas ma mort arriver. Avec un pouvoir comme le mien, voir des catastrophes comme des miracles était quotidien.

Kenyan et Elya, dirigeants d'Iré.

Boris et Syfia, roi et reine d'Homus.

La torture continuelle de mon père encore prisonnier de Baltros Stras.

La mort de Réna.

Réna...

- Graye, laisse-moi te donner mon avis sur la relation que j'ai eu avec Vépia. Je ne vais pas me justifier sur la fin de cette dernière, je suis faible, j'ai fui, je l'ai lâchement abandonné sans même savoir qu'elle était enceinte.

- Cela aurait été différent ? l'interrogeai-je brusquement, dos à lui.

Il ne me répondit pas alors j'insistais.

- Si tu avais su sa condition, l'aurais-tu quand même abandonné ?

Cette fois, je me retournais, calme, le fixant de mes yeux dont j'avais hérité la même couleur que les siens.

Gris comme le nuage avant la tempête.

Gris comme l'humeur après une dispute.

Gris comme le juste milieu entre le blanc et le noir.

Gris comme l'argent opposé à l'or.

Gris la couleur qui vient toujours en second plan, toujours non-aimée, toujours si neutre. J'aimais bien cette couleur, elle ne me ressemblait pas en tous points, mais il y avait quelques similitudes.

- Non..., me confessa mon père. J'étais, à l'époque, le leadeur des prêcheurs, je me devais de retourner auprès d'eux. Du moins, c'est ce dont je me conforte en excuse. La vraie raison, c'est que je n'aimais plus Vépia. Et que je n'avais pas assez de courage pour le lui dire, me confia-t-il rempli de regrets.

Puis, il se leva et posa ses mains sur mes épaules.

- Je suis désolé Graye...

Je respirai un grand coup et finit par le prendre dans mes bras.

Ce serait gâcher ces moments avec mon père que de lui en vouloir maintenant.

C'était trop tard, autant ne pas s'embarrasser d'une rancœur auquel je n'aurais pas le temps d'y consacrer de l'attention.

Que je n'aurais pas le temps de nourrir jusqu'à en devenir fou.

Comme ma mère.

Il me raconta quelques souvenirs heureux qu'il partageait avec Vépia avant de me laisser pour que je finisse de me préparer.

Je soufflais.

C'était beaucoup à encaisser et pourtant, je devais être prêt à combattre rapidement.

Parce qu'elle n'attendrait pas que son fils soit sur pieds pour attaquer.

Je passais rapidement dans la salle de bain, soignant mon allure, replaçant mes cheveux et me donnant du courage pour affronter la colère de mon âme-sœur.

Lorsque je sortis de ma chambre, Aurora attendait sagement sur le seuil.

Si nos débuts avaient été difficiles dû à sa jalousie, aujourd'hui, je la considérais comme ma meilleure amie.

Elya l'était aussi mais c'était tout autant ma sœur, donc je voyais la situation différemment.

- Ça va ? me demanda-t-elle.

Je hochais la tête, pas très enclin à parler.

Adki arriva à sa suite et un Sred de taille miniature la suivait.

- Voilà, je l'ai rétréci comme demandé. Mais je ne crois pas qu'il soit très content, grimaça-t-elle tandis qu'une pluie de reproches par mon Similaire s'abattait à l'intérieur de ma tête.

- Merci Adki. Aurora, on peut y aller.

Nous traversâmes le portail et apparûmes dans le salon de Xandear. Sa mère nous accueillit ainsi que Miella. Elle me précisa que Xandear allait arriver et je l'en remerciai.

Je surpris un métamorphe regarder longuement Aurora, tandis que cette dernière évitait consciencieusement  de croiser ses yeux.

Prêcheur de la vision, mais aveugle quant aux rapprochements de ma seconde.

Elle m'en parlerait en temps voulu. En attendant une présence chaude dans la pièce attira toute mon attention.

Elle était magnifique, bien qu'habillée avec simplicité, ses longs cheveux roux étaient ramenés en chignon et ses yeux émeraude me fusillèrent de long en large.

Je la connaissais trop bien, elle allait me faire la gueule, en utilisant son langage.

Mais je saurais me faire pardonner Après cette réunion, j'irais lui déclarer ma flamme.

Enfin, si je pouvais dire ça ainsi.

*   *   *

Hey !

Je sais... on est pas lundi XD pardon 😭

Alors ce chapitre !

Assez calme... le calme avant la tempête comme on dit !

Un bout de passé de Graye

Une révélation de Khalen, qui aurait abandonné Vépia enceinte ou non :-/

Graye arrivera-t-il à se réconcilier avec Réna ?😏

Des bisouuuss ❤

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