Kenyan ~ 8
- Vraiment ? Qu'elle ne t'appartienne ? grognai-je intérieurement à mon loup.
Je n'avais pas forcément aimé le ton qu'il avait pris. Si je voulais tenter une approche courtoise et lente avec Elya, lui, c'était tout le contraire.
Une vraie bête.
- Parfaitement ! Et tu es du même avis que moi ! finit-il par me répondre avant de se taire, visiblement fâché.
Je retournais sur le lit avec nonchalance, boudant. Il avait pris le dessus alors que je gérais la situation. Maintenant Elya va être méfiante et ce n'était pas le but.
Bien au contraire.
Je dus rester plus de temps que je ne le croyais à réfléchir sur le lit, car Elya avait déjà finis sa douche et me lançait un regard désapprobateur.
Avec son habit de nuit basique, elle pointa du doigt ma fade couchette.
- C'est là que tu dors. L'arrivée de ton frère t'aurait-elle fait oublier ta position inférieure ici, que tu dois... m'obéir ? lâcha-t-elle d'un ton plus que narquois à mon égard.
Avec lenteur, je me levais, pris mon livre et passa à côté d'elle.
- Bonne nuit, Elya, murmurai-je en passant tout près de ses cheveux humides.
Elle ne se figea pas mais croisa les bras sur son torse, me présentant son profil. Je m'installais dans ma couchette bruyamment, m'étirant et bâillant à la fois. Je ne mettais jamais ce qui était censé me servir de couette vu son origine.
Au bord du sommeil, j'entendis un souffle dans le vent qui me suivit dans mes rêves.
- Kenyan, viens...
Le lendemain fut bruyant.
- Kenyan ! Habille-toi ! me réveilla la voix mélodieuse d'Elya.
Encore dans le gaz, je ne compris pas sa requête. Jusqu'à ce que je pose le regard sur mon attribut dressé. J'avalais de travers avant de me décomposer. Mais je préférais taquiner plutôt que de cacher l'origine de mon réveil brutal.
- Ho... Parce que ça te dérange peut-être ? De voir un homme dans toute sa splendeur ? haussai-je un sourcil encore allongé, adoptant une pose masculine et virile.
Je regrettais aussitôt mon audace en me retrouvant couvert de givre sur place.
- Abruti !
Et Elya me laissa ainsi dans la chambre.
Le givre se dissipa au bout de dix, interminables, minutes. Je pris de l'élan pour aller sous l'eau chaude puis voyant que ma troisième jambe ne redescendait pas, j'optai pour de l'eau froide qui eut l'effet escompté.
Après ce passage à la salle d'eau plus que rapide, je pris des vêtements propres et descendit.
Elya était déjà attablée, une mine ronchonne sur le visage. Syfia à ses côtés bataillait pour savoir ce qui la rendait ainsi. Je ne cachais pas mon sourire.
- Tu souris car je t'ai beaucoup manqué ? brisa l'atmosphère Boris venant passer son bras sur mes épaules.
- Dans tes rêves oui ! lui répondis-je plutôt de bonne humeur, en m'échappant de sa prise.
- Tu me blesses, tu ne veux pas faire un câlin à ton Bobo adoré ? usa-t-il comme réplique, en abordant le surnom que je lui donnais enfant.
- C'est pas fini vos niaiseries ? s'agaça Taze avant de finir son déjeuner.
Je n'y fis pas attention et allais m'asseoir à côté de Dany encore à moitié endormi sur la table. Je lui fis une tape dans le dos pour le réveiller. Je n'eus pour réponse qu'un grognement plaintif.
- Fiche-moi la paix loup...
- Je peux lui envoyer de l'eau en pleine figure si ça peut aider, proposa Luc en face de moi, à côté de Quinn, sans aucune émotion particulière.
Cette phrase eut le don de faire se relever immédiatement Dany.
- Pas la peine, je suis réveillé ! s'enthousiasma-t-il.
Le reste du déjeuner se fit dans une bonne ambiance générale. Jusqu'à ce que Boris se lève et demande l'attention générale.
- J'aurais une petite question pour vous les dragonniers et dragonnières. Pourquoi tant d'hospitalité ? Nos espèces sont ennemies depuis des siècles et vous allez me dire que vous avez accepté, gentiment, les loups qui sont rentrés sur votre territoire, les bras grands ouverts ? J'ai du mal à croire en votre honnêteté, interrogea mon aîné faisant planer de l'animosité dans l'air.
- Vous obéissez à un roi... Nous c'est à une dirigeante. Crois-moi le loup, je ne vous aimerais jamais, lui répondit Taze avant de s'engager vers la sortie.
Lorsqu'il ouvrit la porte, Myriel s'effondra à ses pieds.
- Et apparemment, je ne suis pas le seul, conclu Taze en enjambant la louve.
Je réagis immédiatement, m'élançais et la pris dans mes bras. Elle avait été mise à tabac mais elle respirait et son cœur battait, certes lentement, mais rien d'inquiétant dans la première mesure.
Son habit était en lambeaux, des plaies béantes et des brûlures parsemées son corps. L'un de ses yeux avait été gravement touché et saignait abondamment. Elle était inconsciente et avait dû marcher longtemps pour arriver jusqu'ici. Vu l'état de son corps, elle n'avait fait que retarder l'échéance d'un malaise. Son poignet gauche avait une tournure plus que douteuse et ses jambes étaient ensanglantées. Pris d'un frisson d'angoisse, je me fermais au monde extérieur et couru jusqu'à la chambre la plus proche.
Je devais vérifier, si ceux qui avaient fait ça, s'ils l'avaient...
Je m'enfermais dans la salle de bain, d'une chambre agencée similairement à celle d'Elya.
J'installais Myriel dans la baignoire tentant de ne pas trembler. J'enlevais ses vêtements et soufflais de soulagement, on ne l'avait pas dépravé. Une fois les restes de tissus jetés, j'actionnais le jet d'eau.
Ce dernier lui permit de se réveiller et elle paniqua dans mes bras.
- Kenyan ?! C'est toi ?! Lâchez-moi, arrêt...
Alors que j'essayais de la calmer par une étreinte, elle se rendormit dans mes bras. Je me retournais vivement face à Syfia qui avait dû faire usage de son pouvoir.
- Je lui donne l'illusion d'un sommeil profond, ainsi elle ne sentira pas la douleur. Maintenant, si tu me le permets, j'aimerais m'occuper d'elle, demanda-t-elle respectueuse. De plus, les autres loups ont besoin de toi.
Je hochais la tête et lui laissa Myriel, pendant que mon loup se pencha pour effleurer la conscience de la louve. Cette dernière était recroquevillée et effrayée c'était pour ça que je n'avais rien senti, rien perçu de son attaque. Lorsqu'elle sentit la présence de mon loup, elle couina, respirant enfin normalement et continua de soigner sa moitié.
Je sortis de nouveau jusqu'au hall, mon sang-froid n'allait pas faire l'enfeu, j'allais bientôt imploser.
Un silence pesant s'était abattu. Les loups présents étaient pétrifiés et furieux alors que les dragonniers n'affichaient aucune expression, comme indifférents.
- Elle va s'en sortir, mais elle aura des séquelles importantes..., ce fut les seuls mots que je pus prononcer, avant de chercher les auteurs de cet acte grâce à mon odorat.
J'étais déjà sur le palier, lorsqu'une main glaciale se posa doucement sur mon bras.
- La venger ne te servira à rien, tu es en infériorité ici, même toi. De plus, elle a sûrement besoin de toi à ses côtés pour se rétablir. Réfléchis Kenyan, tu n'es pas une brute qui fonce tête baissée. Pense au bien de tes loups en premier, essaya de me faire reprendre mes esprits Elya.
- Tu sais très bien ce dont je suis capable..., laissai-je mon loup reprendre le dessus, n'étant plus capable de percevoir la réalité, aveuglé par ma colère.
- Justement, ça ne résoudra rien, tenta-t-elle de nouveau.
Je me tus. Je finis finalement par me détacher de son bras et partit dehors, elle ne me retint pas. Mon loup sortit de sa cage aussitôt, déchirant les habits. Il fut rejoint rapidement par son frère. Tous deux se défoulèrent une grande partie de la journée, jusqu'à l'épuisement, n'ayant pas retrouver les coupables.
- Que vas-tu faire ? demanda Boris sous son apparence humaine que je repris aussi.
- Rentrons.
Il ne rechigna pas et nous rentrâmes, trouvant des vêtements disposés à même le sol, sûrement le fait de Quinn.
Mon sang ne fit qu'un tour lorsque je sentis la présence de Vépia.
- J'en ai pour deux minutes, je te rattraperai, lançai-je à Boris avant de déguerpir.
Je débouchais sur la fameuse maison privée de Vépia. Des dragonniers totalement drogués s'y baladaient un peu partout avec ou sans vêtements, mais je n'en avais rien à faire.
Une seule personne m'intéressait.
Et je la trouvais tranquillement au bord de sa piscine privatisée.
- Ho ! Kenyan ! Comment ça va ? demanda-t-elle avec gaieté.
- Cette question en est-elle vraiment une ? rétorquai-je d'une voix sourde et entourée de haine.
Elle sembla réfléchir avant de mettre ses mains sur sa bouche, comme une enfant qui aurait dit une bêtise.
- Elle est déjà arrivée ? Pourtant j'avais envoyé mes hommes la traquer loin d'ici...
Je peinais à y croire. Alors c'était elle qui avait fait ça. Je me retins de justesse de la frapper, de lui rendre coup pour coup ce qu'elle avait fait à Myriel.
J'aiguisais l'épée de Deltris. C'était ma punition pour n'avoir pas respecté ses fichues règles.
Qu'est-ce qu'il pouvait être casse-pied quand il s'y mettait lui aussi.
Du grabuge sur le terrain principal m'interpella.
- C'est une femme ! Elle n'a pas le droit d'être ici !
En entendant ses mots, je me rapprochais pour voir la dîtes individue. Son casque qui était censé cacher sa véritable identité était à terre. Ses cheveux marron coupés très courts ne touchaient que peu sa peau mâte. Elle avait déjà récolté d'une blessure superficielle au bras. La foule autour commençait déjà à lui jeter des pierres mais n'arrêtait pas le combat qui se jouait.
- Et alors ? Un combat une fois commencé ne peut pas être stoppé. Demoiselle ou non, l'un d'eux devra gagner, déclara Deltris pour faire taire la cohue.
Il avait le regard curieux et était...content ?
Était-il fier qu'une femme s'introduise dans ce camp exclusivement masculin pour montrer sa valeur ?
Oui sûrement.
Mon ouïe lupine m'indiqua une conversation entre deux loups qui regardaient la scène, choqués.
- C'est Myriel ! Mais qu'est-ce qu'elle fait là ?! dit l'un.
- Tu crois qu'elle a mal pris ma réflexion ce matin ? continua l'autre.
Je devinais facilement qu'ils étaient ses frères et je pouvais donc en déduire son identité complète.
Myriel Heyre, seule fille d'une lignée de dix garçons, ça se retenait !
Cela ne m'étonnait pas qu'elle eut envie de prouver sa combativité. Miella avait parfois ce genre de comportement aussi.
Je me concentrais sur le duel qui se présentait sous mes yeux. Elle se prenait de puissant coup par l'un des soldats dont je n'avais pas retenu le nom. Elle ne faisait qu'esquiver sans faiblir, même si son souffle se faisait irrégulier. Soudain, je remarquais un léger relâchement chez son adversaire, qu'elle nota elle aussi. Elle lui asséna un puissant coup de dague sous la poitrine avec souplesse. Il hurla de douleur avant de se transformer en loup. Elle réussit à ne pas se faire attraper, mais y laissa son armure qui lui trancha l'épaule en s'envolant.
Pourquoi ne se transformait-elle pas aussi ?
Puis, elle roula au sol esquivant là aussi le coup. Elle ramassa un arc et une flèche qu'elle décocha dans la seconde. Le loup encore dos à elle fut touché au bas du dos et s'affaissa immédiatement. Le haut de son corps était encore en mouvement mais aucune contre-attaque n'était possible.
Deltris sonna la fin du combat et ordonna à tous de retourner à leurs occupations, certains prirent le blesser pour l'emmener aux soins. Une fois que la foule fut moins dense, Myriel s'écroula au sol, en nage.
Je m'approchais, elle ne releva pas la tête.
- C'est juste une flèche paralysante, il ne va pas perdre l'usage de ses jambes, m'expliqua-t-elle comme pour se justifier.
- Et c'était très bien joué ! la félicitai-je à mon tour.
Ma remarque eut le bonheur de lui faire lever le regard sur moi. Elle me reconnut immédiatement et tenta de se relever pour me saluer en tant que prince. Elle le fit avec succès et je pus passer mes doigts sur sa nuque.
- Tu t'es bien battue.
- Merci, articula-t-elle en me regardant dans les yeux.
Et j'y lus une conviction sans faille, une dévotion éternelle et une étincelle de soldat.
J'y pensais depuis déjà quelques temps et je crois qu'enfin j'avais trouvé mon sniper.
Après Dany, je ferais d'elle un membre de mon armée personnelle.
- Myriel c'est ça ? Raconte-moi un peu le but de ta venue...
Je serrais les poings, remplis de haine.
- Pourquoi ? grognai-je d'une voix d'outre tombe, à ce moment précis mon loup et moi étions en symbiose.
Elle sortit ses pieds de l'eau, claqua des doigts pour qu'on lui apporte une nuisette et se rapprocha de moi. Elle voulut me toucher mais je m'éloignais. Sa vue me répugnait.
- Tu es trop lent, m'asséna-t-elle. Je veux Elya demain soir. Ou un autre de tes précieux loups goûtera à mon jeu de chasse.
Elle se retourna, consciente que j'avais compris le message.
Mon cœur ne voulait plus de ce stupide accord, mais mon esprit lui, préparait déjà un plan pour attirer Elya au point de rendez-vous demain.
Et qu'elle rentre dans la gueule du grand méchant loup.
* * *
Ma pauvre petite Myriel :'( C'était un chapitre assez concentré sur elle, j'espère qu'il vous a plu ^-^
Pensez-vous que Kenyan va aller au bout du plan ? :0
Je ne donne pas de date précise pour la parution des chapitres, donc ne vous attendez pas à en avoir un lundi prochain ;) Ça dépend vraiment du temps que j'ai et de mon niveau de fatigue XD.
Bisous ♡
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top