Introduction
https://youtu.be/bkWmDUuFifE
Juin 1989
Cher journal, voilà comment commence tous les journaux intimes. Cher journal, aujourd'hui il m'est arrivé une chose extraordinaire, cher journal, aujourd'hui est le plus beau jour de ma vie, cher journal,je crois que j'aime ce garçon, cher journal, aujourd'hui j'ai perdu mon chat, cher journal, aujourd'hui je me suis disputée avec ma meilleure amie, cette fille est une garce. On retrouve toujours la même chose dans un journal intime. Et ces choses, sont sensées rester intimes; personne ne doit les connaître mis à part nous-même.
Jim a acheté ce journal pour moi. Il m'a dit d'y écrire mes mémoires.
''Pourquoi ? '' lui avais-je demandé.
''Parce que nous les lirons. ''
''Nous ? ''
''Toi, moi, le monde entier. Le monde est à nous. ''
Nous voulons le monde et nous le voulons maintenant, avons-nous crier tout en haut de cette colline dans le désert d'Arizona. Le soleil se couchait à l'horizon, le vent se levait et amenait une brise légère qui caressait mes joues et soufflait sous ma jupe. Jim et moi, nous nous tenions la main et regardions le soleil terminer sa course derrière la vallée infinie. Un nouveau jour se terminait et un autre allait commencer. C'était encore un autre jour de liberté, de course contre la montre, le temps qu'ils nous trouvent.
''Ils finiront bien par nous rattraper '' avais-je soufflé à Jim tout en admirant les derniers rayons du soleil.
Jim ne répondit pas. Je jetai un coup d'œil vers lui et essayai de lire dans ses pensées. Il fronçait les yeux pour mieux voir au loin.
''Regarde '' me dit-il en pointant du doigt une chose mouvante très loin sur la droite, près d'un rocher. Je fronçais à mon tour les yeux et vis un coyote.
Ce n'était pas la première fois que j'en voyais un. Avec Jim, nous en avions déjà croisé quelques uns lors de notre périple à travers le désert. Saleté de coyote...
Quand j'étais petite, quand j'allais chez mon grand-père qui vit dans un ranch perdu dans le désert d'Arizona, deux coyotes avaient fouillé dans ses poubelles. De la fenêtre de ma chambre, je les regardai plonger leur museau dans les sacs poubelles.
Les chiens de Dieu; c'est comme ça que les amérindiens les appellent;soufflait mon grand-père qui se tenait près de moi. C'est le plus imprévisible des guides. Il joue des tours et se perd dans ses stratégies complexes. Il a de l'humour et nous apprend à rire de nos mésaventures.
J'avais cinq ans il me semble. Voir ce coyote, près de ce rocher, me donnait une idée.
''On pourrait rendre visite à mon grand-père. Il habite dans ce désert. '' dis-je à Jim.
Il se tourna complètement vers moi. '' Ce serait trop dangereux... Tuas raison quand tu dis qu'ils finiront par nous trouver. On doit éviter de rencontrer du monde, surtout nos proches. ''
''Mais il ne dira rien mon grand-père tu sais ! ''
Jim resta sur sa position et je savais que je ne pouvais pas le faire changer d'avis. J'aurais aimé voir mon grand-père pourtant. Il y a longtemps que je ne l'ai pas vu et voir sa petite-fille lui ferait plaisir. Mais quand Jim dit non c'est non. Je peux le faire changer d'avis parfois avec quelques tours de malice mais là, je sentais que je ne pourrais lui faire dire oui. Ça faisait longtemps que nous n'avions pas eu de vraie relation avec d'autre personne. A chaque fois que nous rencontrions un étranger c'était toujours des échanges très brefs et si jamais ils nous reconnaissaient Jim les faisait taire.
''Tu as peur ? '' m'avait-il demandé.
On ne peut pas mentir à Jim.
''Oui.'' lui soufflai-je. '' Et toi ? ''
Jim hocha la tête de haut en bas. '' Ils finiront par nous trouver et quand ça sera le cas, ça sera la fin. ''
Notre but est resté le même : quitter le pays, fuir le plus loin possible pour ne pas se faire prendre. Mais sans argent, c'est un peu compliqué. Où irons-nous fauchés comme nous sommes ?
''Mais on va s'en sortir June. Je te le promets. Nous voulons le monde et nous le voulons maintenant. Nous aurons le monde June... toi et moi. '' Jim fit un pas en avant et cria '' Nous voulons le monde et nous le voulons maintenant ! ''
Il me fit répéter cette phrase avec autant de puissance que lui dans la voix, ce qui fit hurler le coyote en contre bas. J'étais à présent plus sereine. Crier me détend; me libère de cette pression constante que Jim et moi avons sur notre épaule depuis maintenant des mois.
Jim revint vers moi et m'embrassa fougueusement en glissant sa main dans mes cheveux. '' Tu sais que je t'aime. '' souffla t-il entre deux baisers.
Oui je le savais. Quand j'avais peur, et c'était assez souvent le cas,Jim me le soufflait à l'oreille. Ça sonnait vrai... mais ça sonnait faux aussi. Vous croyez au coup de foudre ? Moi je n'y croyais pas; jusqu'à ce que je rencontre Jim.
'' Viens m'aider à débarrasser le coffre. '' Jim rejoignit la voiture et ouvrit le coffre. '' Putain de merde... ça pue là-dedans! Allez June dépêche-toi ! ''
Je regardai Jim un long moment et l'admirai. Il ressemblait à Tony Curtis oh non, plus tôt à James Dean... enfin, peut-être un mélange des deux. Il portait cette chemise hawaïenne rouge à fleurs blanches qu'il avait acheté à l'Armée du Salut; la même que Tony Montana dans Scarface qu'il a dit ! Toi tu seras Elvira, ajouta t-il. On aura une grande baraque avec une vingtaine de voitures et toi tu auras tellement de vêtements que tu n'auras jamais assez d'une vie pour tous les mettre ! Cette idée me plaisait et elle me plaît toujours; malgré les obstacles que nous avons rencontrés en chemin.
Le seul problème dans l'histoire, c'est qu'à la fin Al Pacino meurt dans le film.
''June putain tu te bouges un peu ! '' hurla t-il pour me sortir de mes rêveries.
Je le rejoignis rapidement et sentis déjà l'odeur fétide remplir mes narines. Il n'était là que depuis quelques heures pourtant.Peut-être qu'il faisait trop chaud... Je me pinçai le nez et regardai le cadavre dans le coffre. C'était celui d'un jeune homme.Sa mort résultait du simple fait de se trouver au mauvais endroit au mauvais moment. J'avais dit à Jim de le laisser partir en le blessant seulement. Mais lui, il a préféré le tuer. C'est plus simple il a dit. Sur le coup c'est toujours plus simple d'appuyer sur la gâchette mais après, les choses se gâtent. On pense jamais à l'après quand on retire la vie à quelqu'un. Qu'est-ce qu'il va m'arriver ? Où mettre le corps ? Le jeune homme n'avait pas les yeux clos et son regard vide me fixait.
''T'aurais pu au moins lui fermer les yeux... '' soufflai-je à Jim en attrapant les pieds du cadavre tandis que lui, soulevait ses bras.
Il était lourd. Plus lourd que je ne le pensais. Nous le retirions du coffre.
''On l'enterre où ? '' demandai-je.
On l'enterre pas. On va le jeter dans le ravin. Les coyotes le boufferont ce soir, Jim a dit.
J'avançai en tête vers le ravin en faisant attention où je m'étais les pieds. Nous balançâmes le corps au décompte de Jim et le regardâmes se fracasser contre les rochers dans un bruit désagréable qui me fit grincer des dents.
''On aurait pu l'enterrer... Peut-être que les coyotes ne vont pas le manger. '' soufflai-je.
Jim commença à faire demi-tour. '' Ils le feront t'inquiète pas. De toute façon personne ne se promène dans ce désert. ''
Jim referma le coffre et partit s'installer sur le siège conducteur.
Je regardai une dernière fois le ravin en me demandant combien de mètres il mesurait. Quel effet cela ferait de sauter dans le vide ?On volerait pendant quelques secondes et s'écraserait violemment contre le sol, démembré. Je chassai ces noires pensées et rejoignis Jim.
''Faudra retirer les taches de sang. '' dis-je en m'installant à côté de lui.
''On achètera de la javel et on frottera. ''
Il mit le contact, changea la station et reprit la route.
Je regardai derrière moi et vis le ravin s'effacer de mon champ de vision. Nous descendîmes la colline et continuâmes notre chemin à travers le désert aride et poussiéreux.
Jim a maintenant les yeux constamment sur la route invisible qu'il trace à travers l'immense étendue de sable. Parfois, il jette un coup d'œil vers moi et me sourit. Je lui rends alors son sourire. Je suis amoureuse de lui et lui, il l'est de moi. Tony Montana et Elvira, Bonnie et Clyde, Holly et Kit de Balade Sauvage, Roméo et Juliette, Jim et June.
C'est difficile d'écrire avec les secousses. l'arrière. C'était à une station essence que Jim a pris le journal. Pendant que l'employé faisait le plein, Jim est parti acheter quelques trucs. Ensuite,quand on est reparti, Jim m'a dit de regarder à l'arrière, dans le sac de course parce qu'il avait acheté un truc pour moi.
''Ça sert à quoi ? '' lui avais-je demandé en découvrant qu'ils'agissait d'un journal.
''Tu vas raconter ton histoire, notre histoire. ''
''Pour quoi faire ? ''
''Pour que tout le monde sache qui nous sommes. Jim et June, les nouveaux Bonnie et Clyde. ''
Je ne vois toujours pas le but mais écrire ça me détend et ça me fait passer le temps alors je commence aujourd'hui la rédaction de mes mémoires. Je regarde Jim quitter le désert et reprendre la route goudronneuse. J'aime Jim, c'est une certitude. Et il m'aime. Je le sais. Quand je le regarde, je repense à notre première rencontre. C'était magique et inoubliable. Un conte de fée ou presque. Jim n'est pas à prince charmant, il n'a pas de cheval, il n'est pas riche, ne possède ni château, ni famille. Moi je ne suis pas une princesse. En fait, notre histoire n'est pas un conte de fée mais plutôt un vieux polar, une romance moderne entre deux jeunes gens que tout sépare.
Cher journal, voici comment tout a commencé...
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top