J'hésite un instant à ouvrir la conversation, vraiment stressée par leur possibles réponses. J'ai peur de ce qu'elles vont me dire, et je me demande si ce sera vraiment ce que je veux entendre. En même temps, je sais moi-même pas ce que j'ai envie d'entendre... Je respire un grand coup et me jette à l'eau.

@Hope- Déjà, je suis d'accord avec Brook, c'est super que t'ai réussi à en parler, et encore plus avec tes grands-parents ; je sais que ton grand-père avait du mal à en parler... ensuite, je suis aussi d'accord avec elle quand elle dit qu'il faudrait que tu parles à ta mère. Mais bon, c'est toi qui doit prendre une décision. Je sais que le fait que ce soit ta mère n'excuse rien pour toi, donc je sais pas quoi te dire... mais en même temps si tu fais pas le premier pas, et qu'elle le fait pas non plus, tu pourrais finir par vraiment en souffrir, et c'est déjà très dur actuellement pour toi. Après, peut-être que déjà contacter tes frères et ton père ça pourrait t'aider à aller vers elle ? Bref tout ça pour dire qu'on te soutiendra quoi que tu décides !

@Brook- C'est beaucoup plus beau la façon dont tu le dis x)

@Hope- Tu crois ? j'ai juste plus développé, non ?

@Brook- Haha oui, sûrement

@Abigaëlle- Je crois que tu l'as compris, pas la peine de répéter que c'est bien que t'en ai parlé avec tes grands parents, ensuite, je comprends vraiment ton point de vue, elle t'a fait vivre des trucs horribles, on était là pour le voir, et tu t'es même sentie obligée de partir après l'accident. Mais n'empêche qu'après tout ce temps, et même si je suis d'accord avec toi : c'est elle qui est en tort, je peux pas m'empêcher de penser comme Hope, tu vas finir par en souffrir vraiment vraiment vraiment beaucoup si ça continue, parce qu'après tout ça reste ta mère, et mine de rien à cause de ça tu t'es aussi éloignée de tes frères et de ton père... donc même si c'est normalement pas pardonnable, peut -être que ce serait mieux pour toi si tu allait lui parler... mais bon dans tous les cas elles ont raison c'est à toi de voir ce que tu veux faire.

Alors elles pensent que c'est dangereux pour moi ? Leurs raisonnements se tiennent, et je les trouve même plutôt justes. Mais je sais pas si c'est vraiment ça que je veux... Bon, c'est vrai que me famille me manque, mais j'ai l'impression d'assez bien m'en sortir, jusque là. Je sais pas quoi leur répondre. Et je sais pas quoi penser. J'ai envie que tout redevienne comme avant, mais j'ai pas envie de pardonner à ma mère. C'est trop douloureux de me dire que je suis la seule à faire un pas en avant. Et si elle refusait la main que je lui tendait ? J'ai beaucoup trop peur de sa réaction pour faire quoi que ce soit. Je reste un moment, interdite, à regarder mon portable, avant de simplement répondre :

Moi- Vraiment, merci de m'avoir répondu, et je pense que je vais d'abord bien y réfléchir avant de faire quoi que ce soit...

***

Le soleil brille par la fenêtre de mon salon, alors que je m'accoude à elle, mon visage reposant dans le creux de mes mains. Ça fait déjà quatre jours. On est dimanche matin, et j'ai toujours rien décidé. Enfin en tout cas j'ai pas envoyé de message à Music66, j'ai pas contacté Isaac et Luke pour l'exposé, et je sais pas du tout quoi faire des conseils que m'ont donné le filles. C'est toujours pareil avec moi, je ne sais jamais rien faire de moi même, c'est épuisant.

Il fais frais, mais le ciel est pas couvert, pour une fois. Alors malgré les petits frissons qui parcourent mon corps, je suis contente de sentir la chaleur du soleil sur mon visage. Je sens que Hime meurt d'envie de sortir par ce beau temps, et je vais pas pouvoir échapper à une très longue promenade aujourd'hui.

Peut-être que par la même occasion, je vais enfin finir par faire mon choix, au moins pour une des décisions qu'il faut que je prenne ? Ce serait vraiment bien si c'était le cas. Il serait aussi temps que je poste un truc sur Siquy, parce que là ça fait une éternité depuis le dernier article.

Je soupire, puis me décide à aller me préparer pour sortir. Je m'habille rapidement, et chaudement, enfile à Hime son harnais, avant de partir.

Quand je sors de mon immeuble, je me rend compte qu'il fait vraiment beau. Ce serait bien d'aller au Jardin des Tuileries... Bon, c'est à au moins 25 min de marche, mais je dois bien ça à Hime, qui supporte de rester enfermer toute la journée dans un minuscule appartement.

Le trajet est donc aussi long que je pensais, mais sortir et réfléchir au grand air de cette façon a vraiment du bon. Ça m'a aéré la tête, et je souris en regardant Hime courir un peu partout. En plus, ce Jardin était vraiment magnifique. Je déambule parmi les statues, les observe. Je regarde les gens, aussi. Non pas que ça m'aide à quoi que ce soit, mais je trouve ça amusant de m'asseoir sur un banc, de regarder les gens passer et d'imaginer la vie qu'ils ont. D'imaginer leurs problèmes, leurs joies, et leurs peines. Et sans vraiment m'en apercevoir, j'ai l'idée de mon prochain post.

« Ses cheveux blonds bougent au gré du vent, et la lumière éclatante du soleil les fait briller comme des milliers d'étoiles. Elle regarde le ciel, et se perd dans les profondeurs de son cœur, tandis que ses yeux se perdent dans l'immensité du ciel. Il fait beau aujourd'hui. Elle a décidé de sortir de chez elle sur un coup de tête, comme il lui arrive souvent de le faire, et elle se demande ce qu'elle va bien pouvoir faire. Elle s'est laissé guidé par ses pas, sans vraiment prendre le temps de voir où elle allait. Ça aussi, elle le fait fréquemment.

Elle n'a pas conscience des regards que provoquent la vue de sa personne. Elle ne se voit pas telle qu'elle est. Trop grosse peut-être, et certainement pas assez jolie pour tout le monde. Son petit nez couvert de tache de rousseur se retrousse, il fait plus froid qu'elle ne l'aurait cru. Ses yeux de biches semblent chercher quelqu'un, ou quelque chose, qu'elle a perdue depuis pourtant un certain moment maintenant. Mais sans savoir pourquoi, elle continue quand même à le chercher. C'est ici qu'elle l'a rencontré pour la première fois, et ce n'est pas étrange si c'est ici que ses pieds l'ont amenés. À chaque fois, ce sont des endroits où elles se sont vues.

Un homme, sur sa gauche, la regarde, se rendant peut-être compte de cet étrange sentiment de tristesse qui se dégage d'elle. Mais il ne fait rien, il passe simplement son chemin, il doit retourner travailler. Ça l'aide à avancer, à ne pas penser à tout ce qui l'entoure et qu'il ne veut pas voir. Il porte un costume, comme presque tous les jours. Il y est obligé. Il n'a jamais aimé ça pourtant. Il tire inconsciemment sur la manche de sa veste, l'air mal à l'aise. Lui non plus, il ne se sent pas à sa place dans son corps.

Il regarde ses pieds en marchant, perdu dans ses pensées. Il est préoccupé, et ça ce voit. Une vieille dame, assise sur un banc devant lequel il passe, semble s'en rendre compte. Elle lève la tête, et le regarde passer, l'air triste. Il ressemble à quelqu'un qu'elle a connu. Il semblait toujours préoccupé, lui aussi, et chaque jour il portait un costume dans lequel il se sentait étriqué. Un léger sourire passe sur son visage, à ce simple souvenir. Ils étaient jeunes à cette époque là, un moment de sa vie qu'elle aurait aimé ne jamais quitter. »

C'est pas aussi bien que ce que je pensais que j'allais écrire, et c'est même différent de ce que je voulais faire à la base. Mais bon, c'est pas archi-nul non plus, alors je publie rapidement mon article, avant de retourner à mon observation. Peut-être que plus tard, comme cette dame, je sourirais en pensant à mon passé ? Enfin, si ça se trouve, dans la vrai vie, elle ne pensait pas du tout à son passé, et elle se moquait du type qui avait l'air pressé et qui est passé devant elle.

Quoi qu'il en soit, j'ai pris ma décision.

Moi- Salut, j'espère que je te dérange pas, et ce que je vais te demander va vraiment te sembler bizarre, on se connaît pas en même temps... mais est-ce que je peux te parler ? Comme à quelqu'un qui pourrait me donner des conseils, ou un truc comme ça

Étrangement, le message a été plus facile à écrire que je ne le pensais. J'ai plus qu'à attendre la réponse de Musi66, maintenant.

Le reste de la journée, je la passe dehors avec Hime. J'ai rapidement mangé dans une boulangerie, puis on s'est baladées un peu partout. Si ça peut rendre heureuse Hime, alors je passe sous silence mon mal de pieds. C'est vers 15 h que j'estime qu'on s'est assez promenées, et je décide de rentrer à la maison.

À peine arrivée, et assise sur le canapé, mon portable se met à vibrer sur la table basse. La LED rouge se met à clignoter, et mon cœur est encore une fois le premier à réagir. Stressée, je déverrouille rapidement mon portable, et découvre le message de Music66 :

@Music66- Oui, oui y a pas de soucis tu peux me parler x)

@Music66- Ton message fait vraiment peur quand même, tu t'en rends compte ?

Moi- Haha désolée, je m'en suis seulement rendue compte après l'avoir envoyé ! En tout cas merci !

Son message arrive avant même que je pose mon portable à côté de moi.

@Music66- De rien ;) Tu veux me parler de quoi du coup ?

Moi- Bon en fait c'est bizarre, mais j'ai trois amies avec lesquelles je suis super proche, et je leur ai demandé conseil pour un truc, mais elles m'ont répondue exactement ce que je pensais qu'elles allaient répondre.

@Music66- ... Je crois que j'ai compris, mais j'en suis pas tout à fait certain

Je ris, un peu gênée. J'ai jamais été très bonne pour expliquer les choses.

Moi- Désolée x)

@Music66- Non mais c'est pas grave, continue !

Moi- Du coup ce que je voulais c'était un avis extérieur, qui n'ait pas vu tous mes états d'âmes suite à ce qui s'est passé. Et puis mes grands parents sont du même avis qu'elles, accessoirement x)

@Music66- Tu veux un regard nouveau sur la situation, en gros ?

Moi- Ouais, on peu dire ça comme ça.

@Music66- OK, ça me va comme rôle, tu peux m'expliquer l'histoire

Je passe mon pouce sur mon tatouage lunaire et mordais l'intérieur de mes joues : je suis trop contente qu'il accepte aussi facilement ! Bon par contre je vais devoir tout lui expliquer, et ça s'avère compliqué. Très compliqué. Et très long, aussi. J'ai un peu peur qu'il me juge, ou qu'il me regarde différemment, ou même qu'il parvienne pas à saisir mon point de vue... De toute façon, quoi que j'en dise maintenant, c'est trop tard. Je prend une grande inspiration, et commence à taper sur mon clavier.