❦ 09.

Sous l'effet d'un excès d'effluves, Changbin fut secoué d'une violente quinte de toux.

« Encore de l'alcool », songea-t-il avec exaspération. C'était probablement l'odeur qu'il connaissait le mieux depuis son déménagement.

Il essaya alors d'y faire fi, et enfonça sa tête dans l'oreiller pour sentir ses propres exhalaisons plutôt que celles de la bière. Mais cette fois-ci, elles étaient bien plus prononcées qu'à l'accoutumée.

Le goût cuivré de la bile lui remonta dans la bouche, et le noiraud ne put réprimer un haut-le-cœur.

— C'en est assez ! s'écria-t-il alors en repoussant sa couette.

Armé de la ferme attention de sermonner sa mère pour lui mettre un peu de plomb dans le crâne, il enfila un pull propre et un pantalon avant de descendre les escaliers. À chaque pas qu'il faisait, les effluences étaient de plus en plus marquées. Pour échapper aux vertiges, le jeune homme retint son souffle le plus longtemps qu'il put, puis dévala les marches afin d'arriver plus rapidement en contrebas.

Sa mère était debout dans la cuisine, ce qui le prit légèrement au dépourvu. Il avait pensé la trouver complètement ivre, en train de se traîner sur le sol.

L'adolescent constata qu'il était à peine sept heures du matin. « Et elle commence déjà à boire », se désespéra-t-il.

La femme aux longs cheveux d'ébène embroussaillés se tenait dos à lui, un verre à la main. Plusieurs chopes de bière et une bouteille de vin étaient éparpillées sur la table.

— Maman ? parvint à articuler Changbin malgré sa vue qui se troublait de plus en plus. Tu as bu du vin ?

Elle fit volte-face avec brusquerie, comme si elle se sentait attaquée. Les traits de son visage ne parurent pas se radoucir en apercevant son fils ensommeillé. Son regard hagard sans cesse en quête d'un point de raccrochage plongea froidement dans le sien. Le jeune homme se sentit chanceler en y apercevant une brûlure haineuse.

— Va-t'en.

Sa voix atrocement placide et sèche aurait dû mettre en garde le noiraud. Mais il en avait assez de se laisser marcher sur les pieds par sa mère sous prétexte qu'elle était ivrogne. Il ne pouvait plus supporter toutes ces odeurs et son comportement belliqueux. Avec hardiesse, il lança :

— Tu ingères beaucoup trop d'alcool, et ça nuit autant à toi qu'à moi. Arrête de boire.

— Ton père..., commença-t-elle hargneusement.

— Papa est parti, et il ne reviendra pas. Je peux tout à fait comprendre que tu sois fâchée contre lui, mais maintenant, ça suffit. Ça fait deux putains de mois que je te supporte et que je te soutiens de mon mieux, mais tu ne fais aucun effort. Tu bousilles ta santé, et moi je suis fatigué. T'as même pas remarqué que je ne suis jamais à la maison. J'en peux plus, c'est terminé.

L'expression de la femme se durcit, son souffle devint lourd. Changbin se crispa face à ces signes bien loin d'être encourageants. Il avait livré son sac, il ne pouvait malheureusement rien faire de plus.

— Je le savais, t'es exactement comme ton père ! tempêta-t-elle à son plus grand désappointement. Tu vas m'abandonner, tout comme lui !

Le jeune homme serra les dents pour s'empêcher de répliquer des paroles qu'il regretterait amèrement.

Sa mère déposa son verre à pied d'un geste sec et but à même la bouteille.

— J'ai dit stop ! s'énerva le noiraud en s'approchant afin de la lui arracher.

La femme chercha aussitôt à la récupérer, mais ce faisant, elle lui échappa et se fracassa au sol. Le liquide zinzolin se répandit sur le carrelage, au plus grand soulagement de l'adolescent.

— Non ! tonna sa génitrice en poussant un hurlement de rage. Tu vas me le payer !

Elle se baissa pour se saisir d'un grand tesson de verre aux extrémités affûtées et se rapprocha de son fils, l'air menaçant.

Changbin recula pour échapper à son courroux, mais son dos finit par se heurter au mur derrière lui.

Pendant que Felix dormait paisiblement dans son lit, Jeewon fit la lessive. Elle avait promis à son neveu qu'elle laverait les vêtements sales qu'il avait cachés, et elle tint sa promesse.

Elle remonta ensuite à l'étage pour préparer le repas. Sachant qu'il ne mangeait pas beaucoup le matin, elle déposa simplement quelques fruits et un verre de jus d'orange sur la table.

La femme fut surprise d'entendre la sonnerie retentir dans la maison. Il était encore très tôt, et elle n'attendait personne.

Elle déverrouilla la porte et ouvrit à son visiteur.

— Changbin ? laissa-t-elle échapper. Gosh, qu'est-ce qu'elle t'a encore fait ?!

— Rien de grave, Noona, ne t'inquiète pas...

Madame Lee le tira à l'intérieur et le fit asseoir à la table de la cuisine.

— Rien de grave ?! explosa-t-elle. Mais regarde-toi !

La chevelure du noiraud, collée sur son crâne, était imbibée de vin. À cause de la douleur, il avait replié contre lui ses bras maculés de sang visqueux. Son visage n'était guère en meilleur état, étant strié de petites plaies et parsemé d'ecchymoses.

Jeewon s'efforça de lui ôter son pull avec douceur pour ne pas le faire plus de mal. En apercevant les lacérations sanguinolentes sur son torse, elle étouffa un cri d'horreur.

— Bordel de merde...

Changbin ne l'avait jamais entendue jurer auparavant.

S'arrachant à sa torpeur, la femme prit aussitôt les choses en main et repoussa ses remontrances à plus tard.

— Tu peux marcher ? demanda-t-elle.

— Ouais...

Madame Lee aida très lentement l'adolescent à se relever, puis le conduisit à la salle de bain en le soutenant. Elle fit couler un fond d'eau dans la baignoire et le jeune homme alla s'y asseoir, toujours vêtu de son pantalon.

En usant du jet, elle le débarrassa du sang et de la matière poisseuse de sa chevelure. Puis elle lui tendit un linge pour qu'il puisse se sécher.

Changbin prit ensuite place sur le banc et Jeewon revint quelques instants plus tard avec de quoi désinfecter ses plaies. Sans chercher à masquer son déplaisir, elle se planta devant lui, les mains sur les hanches.

— Qu'est-ce qui s'est passé, cette fois ? soupira-t-elle.

— J'ai essayé de la raisonner, marmonna l'adolescent. Et je l'ai peut-être légèrement mise en colère...

— Bin, c'est terminé, cette histoire. Si tu ne me laisses pas rapporter ça à la police pour qu'elle règle cette affaire, je me verrai forcée de t'abriter chez moi jusqu'à ce qu'elle prenne conscience de ses actes.

Alerté par des bruits soudains en contrebas, Felix se leva et descendit silencieusement les escaliers. Il écarquilla les yeux en reconnaissant la voix du noiraud. Il gravit les marches en sens inverse à pas feutrés et se changea en vitesse pendant que sa tante conversait avec son visiteur.

Au moment où il allait faire connaître sa présence, il se souvint que Changbin ignorait qu'il habitait chez Jeewon. « C'est sûr qu'il fera le lien », songea-t-il. En dernier recours, il traversa le couloir et sortit de la maison.

L'Australien ferma la porte et appuya sur la sonnette. Comment personne ne vint, il réitéra le geste plusieurs fois, jusqu'à ce que Madame Lee ouvre sèchement la porte.

— Je suis occ... Felix ? s'étonna-t-elle. Qu'est-ce que...

— J'ai vu que Changbin était là..., bredouilla l'adolescent en fixant le sol. Alors, j'ai pensé que... enfin... je...

— Ah il ne sait pas que tu habites ici, d'accord...

Elle fit mine de réfléchir un instant, le sourire aux lèvres.

— Je vous laisse entre vous. Je vais en profiter pour aller au commissariat. Je suis sûre qu'il préférerait largement se faire soigner par toi que par une vieille femme de mon genre.

Le jeune homme ouvrit la bouche pour manifester son étonnement et lui faire part de ses interrogations, mais ses joues se colorèrent de cramoisi.

— Changbin ! cria Jeewon vers l'intérieur de la demeure. Je vais voir la police !

— Non ! riposta une voix nasillarde et tremblante.

— Te voir aussi mal en point me crève le cœur, Bin ! Tu as fait ce que tu as pu, mais ce n'était pas suffisant. Je te laisse, tu as de la visite !

Puis, la femme se tourna vers son neveu toujours figé, et le gratifia d'un clin d'œil. Elle déverrouilla sa voiture.

— Au fait, très belle jupe.

Avant que Felix n'ait pu protester, elle pénétra dans le véhicule et démarra.

« Mais c'est pas possible... », soupira-t-il. D'ailleurs, pourquoi avait-il quitté la sécurité de sa chambre pour à nouveau se faire passer pour une fille ? « J'ai trop envie de revoir Binnie. Mais c'est à mes risques et périls... »

L'Australien s'engouffra par la porte et la referma d'une main tremblante. Il se dirigea vers la salle de bain, là où il pouvait entendre le souffle rauque d'une autre personne. Il s'immobilisa sur le seuil et risqua un regard sur Changbin.

Il s'empourpra violemment lorsqu'il constata que celui-ci était torse-nu. Sentant son courage s'envoler, il fit un pas en arrière.

— Lexie ? s'enquit alors le blessé.

« Trop tard », se désespéra Felix. Il avait complètement oublié le don olfactif de son aîné. Il s'approcha alors à petits pas en gardant son regard vissé en direction du sol.

— Qu'est-ce que tu fais là ?

— Je... J'étais venue rendre visite à Jeewon...

Le noiraud ne rétorqua pas, même s'il savait que ce n'était pas la vérité. Les effluves odoriférants de sa belle étaient bien trop présents partout dans la maison pour qu'il croie à une simple visite.

En tripotant nerveusement le tissu de sa jupe noire, l'Australien osa finalement lever les yeux sur son vis-à-vis.

— Oh my God ! s'étrangla-t-il. Qu'est-ce qui t'est arrivé ?

Il posa une de ses petites mains sur sa peau meurtrie, profondément inquiet. Changbin frémit, faisant de son mieux pour ne pas montrer que ce contact ne le laissait pas indifférent.

— C'est... ma mère...

Felix opina du chef en se souvenant des paroles qu'ils avaient échangées.

— C'est horrible...

Les larmes lui montèrent aux yeux.

— Oh mais non, ne pleure pas ! Je vais bien, je te le jure. Je suis juste un peu amoché.

— Je vais te soigner, décida le plus jeune en essuyant vivement ses perles salées.

Alors qu'il déposait du désinfectant sur un coton, il fronça les sourcils.

— Tu sens l'alcool, on dirait.

— Ouais, elle m'a poussé dans une flaque de vin, expliqua le noiraud. Jeewon m'a débarrassé d'une grande partie de l'odeur avec l'eau, mais celle dans mes cheveux s'obstine à y rester.

— Je te les laverai, si tu veux.

Aussitôt après avoir prononcé cette phrase, Felix se sentit rougir. « Qu'est-ce qui me prend ? » se réprimanda-t-il intérieurement.

Il posa délicatement un des cotons imbibés d'antiseptique sur le visage de Changbin, ce qui arracha une grimace à ce dernier. Il passa ensuite doucement sur les stries et les hématomes, les sourcils froncés sous la concentration. L'aîné oublia sa douleur lorsqu'il remarqua leur proximité.

— Tu ne penses pas que ce serait mieux si je t'amenais à l'hôpital ? questionna finalement l'androgyne. Ça m'a l'air profond...

— Non, t'inquiète pas. J'ai déjà vu pire, et c'était avant d'avoir rencontré Noona. Je me suis débrouillé tout seul. Et puis, puisque ma mère ne payera jamais les frais, je refuse de demander ce service à Jeewon.

— C'est pas bon pour toi... Pourquoi tu refuses de requérir de l'aide chez la police ?

— Je... Je n'en sais rien, avoua le noiraud. Je suis trop attaché à ma mère, j'imagine.

— Elle met ta vie en danger, Binnie. Jeewon a raison d'avoir eu peur. Je m'inquiète pour toi, tu sais.

— Je suis content de voir que tu es de plus en plus à l'aise en ma présence.

Pour manifester sa désapprobation, Felix appuya plus fort sur une de ses ecchymoses. Le Coréen lâcha une plainte sourde, sans toutefois se départir de son doux sourire.

— Je suis sérieux... se, bredouilla l'Australien en se rattrapant à la dernière seconde.

En remarquant son erreur, il baissa vivement la tête en retenant son souffle. Heureusement pour lui, Changbin ne semblait pas l'avoir relevée. « Prudence, Lix, se sermonna le plus jeune. Tu es bien trop hardi, aujourd'hui... »

Après avoir désinfecté les meurtrissures de son visage, il s'attaqua aux deux lacérations sur son torse. Il fit tout son possible pour ne pas trop examiner son corps, mais il ne put s'empêcher de s'empourprer en apercevant les courbes que formaient ses muscles développés.

Quant au noiraud, il ne se lassait pas d'observer la mine appliquée de son vis-à-vis. Ou plutôt, ses yeux, car elle portait son masque habituel qui cachait son visage. En l'examinant attentivement, il vit que ses oreilles rougies la trahissaient, mais il cacha son amusement.

— A-Au fait..., balbutia son cadet en se redressant brusquement. Pourquoi tu ne te soignes pas toi-même ?

— Parce que j'en suis incapable, évidemment.

Pas convaincu le moins du monde, Felix désinfecta docilement les entailles sur ses bras, puis y étala de la pommade.

— Je ne sais pas quoi faire de plus, soupira-t-il finalement.

— Ça suffira, souffla doucement Changbin. Merci, Floette.

— Bon... alors... si tu n'y arrives pas, je peux te laver les cheveux ?

Ses propos ressemblaient plus à une interrogation qu'à une affirmation, mais le noiraud n'en tint pas compte. Il opina du chef et se leva. Ses jambes vacillèrent, et l'Australien le rattrapa de justesse. Leur soudaine proximité les fit rougir furieusement. Ils détournèrent le regard, embarrassés.

Felix posa délicatement ses petites mains sur les bras musclés du plus petit pour l'aider à avancer jusqu'à la baignoire. Celui-ci y prit place à nouveau, car de toute façon, son pantalon était déjà mouillé.

Pendant quelques minutes, le plus jeune resta paralysé. Pourtant, intérieurement, il avait l'impression d'exploser. Il exhala un profond soupir.

Il trempa la chevelure de Changbin en faisant bien attention de ne pas mouiller ses plaies, puis appliqua son shampoing favori sur les doigts. Mécaniquement, il passa doucement ces derniers entre ses mèches soyeuses.

Le noiraud réprima son envie de lui dire à quel point elle sentait bon. Ses légers contacts finirent par le détendre, et il ferma les yeux. Les pensées qui le tourmentaient à propos de sa mère s'apaisèrent progressivement.

— T'endors pas, hein.

— Ça risque pas, rétorqua l'aîné. C'est bien trop agréable pour que je rate ça.

Felix secoua la tête d'un air faussement agacé, mais ne put empêcher à un sourire de venir s'emparer de ses lèvres.

Une fois qu'il eut terminé, il rinça délicatement les cheveux d'ébène de son vis-à-vis, s'étonnant de leur douceur. Il se saisit d'un linge et frotta les mèches humides pour les sécher, puis aida Changbin à quitter la baignoire pour le faire asseoir sur le tapis.

— Je reviens tout de suite, prévint l'Australien en quittant momentanément la salle.

Il monta à l'étage et fouilla dans ses affaires jusqu'à dégoter un hoodie et un training, les deux entièrement noirs. Il revint vers son aîné et les lui tendit, sans remarquer qu'il avait agi comme s'il était chez lui.

En s'en saisissant, le noiraud décolla ses bras de son corps. C'est alors que l'androgyne aperçut une grosse marque amarante s'étalant sur son ventre.

— Qu'est-ce que c'est ?

— Oh... c'est une vieille blessure...

— Elle a l'air de te faire mal, s'affligea Felix en y approchant une main.

Changbin eut un mouvement de recul qui ne lui échappa pas.

— Pourquoi tu ne m'as pas laissé m'en occuper, avant ?

— Parce que ça ne me soulagera pas, soupira son interlocuteur. Mais avec le temps, elle finira bien par s'estomper.

Dépité, le plus jeune le laissa enfiler ses vêtements en regardant ailleurs. Le fait de le voir dans des habits trop grands pour lui ne lui arracha pas même un sourire.

Le noiraud remarqua rapidement sa mine morose.

— Ne t'inquiète pas, Floette. Je vais bien, je te jure.

Felix acquiesça, profondément inquiet. Il réfléchit un instant, puis lui tendit la main.

— Viens, il te faut te reposer.

Son aîné l'agrippa dans la sienne sans hésitation et se laissa entraîner. Sans le savoir, Lexie attesta ses suppositions, car elle l'emmena au salon comme si elle savait parfaitement où il se trouvait.

— Tu viens souvent chez Jeewon, n'est-ce pas ?

L'Australien se raidit. Sans répondre, il prit place sur le canapé et alluma la télévision. Son ami s'assit à ses côtés en réprimant une grimace de douleur.

— Réponds-moi, insista doucement ce dernier.

— O-Ouais..., bredouilla l'autre d'une voix presque inaudible.

Changbin resta un long moment songeur. Felix, quant à lui, avait l'impression d'être démasqué. Son souffle se faisait de plus en plus court sous la panique qui l'avait submergé. Pourtant, son vis-à-vis ne dit rien, il était perdu dans ses pensées.

Le plus jeune se sentait oppressé par un vil sentiment d'affolement. Malgré lui, ses yeux se remplirent de larmes.

Ce fut ses reniflements qui arrachèrent le noiraud à son monde intérieur.

— Eh, Lexie..., murmura-t-il.

Il se rapprocha d'elle malgré la souffrance que lui apportait le moindre mouvement, et saisit doucement ses petites mains.

— Je demandais par simple curiosité, tu sais... Je suis désolé, s'excusa-t-il.

Felix évita son regard. Finalement, il s'était affolé pour rien.

— Je voulais juste connaître la vérité...

« Si tu savais... », s'attrista l'androgyne en forçant un sourire.

Le noiraud savait toutefois qu'il était factice. Ses prunelles restèrent affreusement ternes, dénuées de leur éternelle étincelle d'allégresse.

Le visage cramoisi sous le regard de son ami, l'Australien chercha à échapper à son embarras. Il passa les différentes chaînes de la télévision, à la recherche d'un film. Lorsqu'il en trouva finalement un, il s'adossa contre le dossier du sofa.

Changbin essaya de se concentrer sur l'écran, mais bien vite, ses pensées partirent à la dérive. Il se creusa désespérément les méninges pour tenter de découvrir ce que Lexie pouvait bien lui cacher.

Après une demi-heure, la tête de celle-ci atterrit sur son épaule. Il aperçut alors avec surprise qu'elle s'était endormie. « Trop mignon... », s'attendrit-il.

Le jeune homme l'examina un instant, se sentant fondre. Soudain, il fronça les sourcils, et tourna son visage en direction de sa chevelure sombre.

Il ne sentait absolument rien, comme si elle était artificielle.

« Une perruque ? » se demanda-t-il, intrigué.

Sa curiosité était piquée. Changbin tendit la main vers le front de l'endormie et souleva délicatement les mèches noires. Sans surprise, il aperçut aussitôt les épingles qui rattachaient la chevelure falsifiée à son crâne.

À présent, il hésitait. Il avait terriblement envie de l'ôter, mais en même temps, il ne voulait pas perdre sa confiance. Il était bien placé pour connaître sa timidité maladive et ses accès de panique.

Indécis, le noiraud passa un de ses doigts sous la perruque. Il effleura soudain quelque chose d'infiniment soyeux qui n'appartenait pas aux cheveux sombres.

— Oh..., lâcha-t-il en comprenant ce que cela signifiait.

Il ne parvenait plus à résister à sa curiosité inextinguible. Changbin décrocha avec douceur la perruque pour dégager les véritables cheveux de Lexie.

Il en resta pantois, ses yeux s'écarquillèrent.

Émerveillé, il glissa ses doigts dans la courte chevelure rose tendre et l'ébouriffa. Elle était terriblement douce !

— Tu es sans conteste quelqu'un d'incroyable, Floette... Pourquoi cacher de si beaux cheveux ?

Les mèches rosacées aussi légères que de la soie balayaient son front en offrant un magnifique contraste avec son fard à paupière d'un bleu électrique.

Le regard du jeune homme tomba sur le masque qui couvrait son visage jusqu'au nez, incertain. S'il pouvait redonner à Lexie un semblant de confiance, devrait-il saisir cette occasion ? « Elle va me détester... Non, elle ne pourrait pas... Mais... »

Changbin exhala un profond soupir de frustration.

— Je donnerais tout pour voir ton visage, Lexie..., murmura-t-il.

Mais moment où il allait ôter l'un des cordons, son vis-à-vis papillonna des paupières. Avant qu'il n'ait pu réagir, elle les avait ouverts, surprise de le voir à quelques centimètres de son visage.

— Binnie ? bredouilla Felix.

Ses longues mèches falsifiées ne lui obstruaient plus la vue. Surpris par son absence, il chercha alors sa perruque des yeux, et la découvrit sur le sol.

— Je suis désolé ! s'excusa précipitamment Changbin.

L'Australien ne bougea pas, mais ses yeux sombres se remplirent de larmes.

Affligé et désemparé, le noiraud enroula ses bras autour de sa taille et le tira contre lui. Le plus jeune ne répondit pas à l'étreinte, il se mit à sangloter.

L'aîné se maudit intérieurement. Une de ses mains se glissa jusque dans ses cheveux roses qu'il caressa avec tendresse.

— Pleure pas, Floette...

— Tu me détestes, maintenant ?

— Quoi ? Mais non ! Pourquoi ça ?

Felix comprit que Changbin ne s'était rendu compte de rien. Il ne répondit pas, essayant de calmer ses pleurs. La présence du noiraud contre lui était infiniment réconfortante, même s'il avait peur.

— Tu es fâchée contre moi ?

— Non... pourquoi je le serais ? balbutia l'autre.

— Tu vois, c'est la même chose pour moi. Et puis, comment pourrais-je te détester ?

Rassuré en comprenant qu'il n'allait pas lui demander d'explication, Felix leva la tête vers lui en reniflant. Il baissa aussitôt le regard en remarquant que le noiraud le couvait du sien.

— Tout va bien, tu n'as pas besoin de te cacher, lui dit tendrement Changbin. Je suis désolé de l'avoir enlevée sans ta permission...

— C-C'est pas grave...

Ils passèrent le restant de l'après-midi enlacés sur le canapé. L'Australien faisait bien attention à ne pas appuyer sur ses plaies pour éviter qu'elles ne s'ouvrent à nouveau, le visage plongé dans la nuque de son aîné. Son souffle chaud faisait frissonner celui-ci, qui caressait toujours sa chevelure.

Avant que le film ne finisse, ils s'endormirent, blottis l'un contre l'autre.

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C'est qui la gogole qui a dû couper son chapitre en deux parce qu'il était trop long ? Oui c'est moi mdrrr

J'écris trooop-

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