18 | Arzhel
Avant même de me réveiller, je sus que nous n'étions plus chez Acelin. Je sentais encore l'odeur de Rivqa sur moi, sûrement à cause des soins qu'elle m'avait donnés.
Je pris lentement conscience de mon environnement.
Ma peau qui me tirait sur mes tempes. Mes paupières encore douloureuses. Mes yeux qui vibraient.
Je les ouvrais avec précaution et vis que le traitement de Rivqa sur ma cornée avait fonctionné. Dommage qu'elle ne puisse utiliser ces compétences-là sur sa propre vue n'est-ce pas ?
Le visage de Nokomis endormie sur mon torse fut la première chose que je vis. Elle qui ne dormait pas souvent, je me refusais à la réveiller. Alors, j'attendis.
Immobile.
Je repris conscience de mes membres les uns après les autres. Mon torse était un peu engourdi, car tout le poids de Nokomis reposait à cet endroit. Il y avait du bruit dans le Deity, mais ça restait plutôt calme.
Aslander avait-il annoncé le Sommeil ? Tout le monde dormait-il déjà ?
Nokomis portait aussi des marques visibles sur son visage. Des marques qui resteraient sûrement semblables aux miennes, mais pas pour la même raison. Je pouvais sentir son pouvoir endormi au creux de son cœur. Comme un petit bourdonnement au fond de mon crâne. Elle avait utilisé son pouvoir. Il n'y avait pas d'autres explications.
Et elle avait presque encore une fois sacrifié notre amour pour me voir vivre.
Sans elle.
Comment pouvait-elle encore penser que je réussirais à vivre sans elle ?
Je ne sus si je m'étais crispé, ou si elle avait senti que je ne dormais plus, mais ses paupières papillonnèrent. Je lui souris avec tendresse et elle cligna des yeux.
— Zhel ? souffla-t-elle. Tu... tu es réveillé ? Comment te sens-tu ? Est-ce que tu me vois ? Est-ce que...
Je l'attirai contre ma bouche et l'embrassai sans un mot de plus. Elle soupira doucement contre mes lèvres. Je laissai mon lycan frotter notre nez contre le sien. Elle déposa plusieurs baisers sur mes lèvres avant que je ne la retienne.
— Je te vois, murmurai-je d'une voix rauque.
Elle sanglota avant de m'aider à me redresser. J'avais le corps douloureux et des crampes au bras. Preuve que Rivqa avait voulu stopper l'hémorragie et m'avait soigné presque trop vite.
— Ne refais jamais ça, Noko, chuchotai-je contre sa bouche.
Elle se mordit la lèvre.
— Ne me quitte plus jamais de cette façon. Je ne peux pas te laisser te sacrifier encore et encore. Tu comprends ?
Elle cligna des yeux et parut blesser.
— Je ne peux plus vivre sans toi, Noko. Je n'y arriverais plus. Je me suis assez battu contre moi-même. Contre toi. Contre nous. Je ne supporterais pas te perdre. Tu comprends ce que ça veut dire ? Que peu importe ce que tu pourrais faire qui me sauverait, je ne te survivrais pas. On doit survivre à deux maintenant.
Elle hocha la tête et ses larmes coulèrent sur ses joues. Je les essuyai doucement.
— J'ai trop abandonné pour te perdre toi aussi, ma Princesse, murmurai-je. Tu le comprends ? Je sais que c'est égoïste de parler de cette façon. Je le sais. Mais il faut que je commence à l'être si je ne veux pas te perdre encore une fois.
— Je t'aime, chuchota Nokomis. Je t'ai toujours aimé. Je préfère me sacrifier que te voir entre les mains de Vyara.
— Si tu te trouves entre ses mains, j'y suis aussi. Tu le sais ça ? Si l'un de nous deux ne lui échappe pas, l'autre périra. Que tu le veuilles ou non. Mon lycan était au bord du précipice avant qu'Evy ne prenne cette décision.
— Je suis désolée, sanglota Nokomis. Je suis désolée...
— Chut, soufflai-je. On ne s'excuse plus. On reste avec l'autre et on avance ensemble.
Elle se jeta à mon cou et nous restâmes un moment seulement tous les deux.
Après quelques ajustements et une bonne douche, Nokomis réussit à me traîner à la salle du trône. Je faisais semblant d'avoir besoin de m'appuyer sur elle et elle me soutenait sans vergogne.
— Ne fais pas trop le malade quand même, maugréa-t-elle quand ma tête heurta son front.
Nous rîmes sous cape avant que les Gardes nous libèrent le passage. Aslander nous rejoignit immédiatement pour me soutenir à son tour et je grommelai.
— Il aime que ce soit moi qui le porte, remarqua Nokomis.
Je souris et fis un clin d'œil à Aslander. Il regarda mon visage et sembla plein de regrets et de culpabilité.
— Ne fais pas ça, Kaizer, murmurai-je. Ou je me fâche.
— On t'attendait Conseiller ! s'exclama Gauvain au milieu de la petite foule.
Quelques têtes de Chevaliers se trouvaient là.
— Que se passe-t-il ? Pourquoi cet attroupement ? Je dors deux jours, une guerre est en cours et c'est tout ce que je trouve ? Une bande d'idiots regroupés à ne rien faire.
— Tais-toi vieux bougon, marmonna Gauvain. Tu te rappelles ce que je t'ai dit à propos de ma...
— Bite ! cria quelqu'un dans le lot.
— Bohort, tais-toi, marmonnai-je.
Des rires. Gauvain se racla la gorge et se dirigea vers un des seuls balcons de la salle du trône qui donnait directement sur la grande cour où on accueillait des évènements.
J'aperçus Warren et Dogan échanger quelques mots, visiblement inquiets. Liam tentait de distraire Elijah, mais celui-ci paraissait intrigué par les prochains évènements.
— Si vous voulez bien vous approcher, je vais vous présenter une femme qui me tient à cœur. Énormément.
— Tu peux juste dire que c'est ton anchor, ce n'est pas un gros mot, marmonna Siobhane.
Je retins un rire et pivotai vers le balcon quand un bruit étrange résonna à mes oreilles.
Je clignai des yeux face au soleil quand une silhouette se dessina.
— Est-ce que je suis devenu aveugle ? Fou ? soufflai-je. Ou est-ce qu'il y a un gros oiseau qui vient de se poser et j'ai plus de séquelles que prévu ?
Nokomis ne bougeait plus à mes côtés.
Gauvain se racla la gorge.
— Messieurs, dames, voici mon anchor. Une fae plutôt belle gosse.
La femme... La Valkyrie fusilla Gauvain du regard et lui claqua une bonne grosse tape à l'arrière de la tête. Ils se chamaillèrent un peu, mais tout le monde restait immobile.
Bon sang.
Bon sang !
Une Valkyrie ! Avec les deux ailes dans son dos !
Puis des sifflements moqueurs jaillirent devant la familiarité avec laquelle elle traitait Gauvain. C'était rare qu'une femme ait assez de caractère pour le faire.
La Valkyrie, une femme magnifique dotée d'une paire d'ailes immenses et irisées d'un doré éblouissant, s'approcha d'Aslander et moi.
— Enchanté Kaizer. Conseiller. Je suis Nettellia Walsh, Valkyrie de la Cour Sombre. Flic aussi à mes heures perdues. Je suis là pour vous aider. Et supporter cet idiot.
Elle se racla la gorge. Son visage n'avait aucun défaut.
— Pardon. Il le mérite.
— Une Valkyrie de la cour des faes d'Angleterre, souffla Aslander.
— Tu as perdu ton pari, marmonnai-je.
Nettelia éclata d'un rire mélodieux qui nous força tous à la regarder.
Les Faes possédaient nombre de qualité.
Mais Nettelia était bien plus impressionnante qu'un Fae.
Elle était une Valkyrie.
Une guerrière de l'Apocalypse dans certaines religions.
— Enchanté Nettelia, dis-je, ma main tendue. Bienvenue à la Cour de l'Empereur Valendyr. Nous sommes ravis de vous accueillir.
Elle me serra la main et jeta un coup d'œil à Gauvin.
— Je comprends mieux le onze, dit-elle.
Je haussai un sourcil.
— Beau gosse, s'amusa Gauvain avec un clin d'œil.
Nous avions de plus en plus allié avec nous.
Et un semblant d'espoir prenait place dans mon cœur.
J'avais retrouvé la femme que j'aimais.
Des alliés insoupçonnés arrivaient pour nous aider.
Même si la guerre était à nos portes, je me sentais plus fort que jamais.
J'étais prêt à me battre pour ma famille, pour la femme que j'aimais et pour tout le royaume que nous devions protéger.
La guerre était lancée.
Et nous allions en sortir vainqueurs.
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