5. Aslander
Son corps ne cessait de craquer et c'était un son qui me tétanisait à chaque fois. Ses yeux étaient fous. Elle me semblait posséder en cet instant ; sinon, comment son corps aurait-il pu bouger en des angles aussi inhumains ? J'avais mal, rien qu'en la regardant. Si mal que je ne respirais plus. Que je souffrais avec elle. Je me tenais dans un coin de la pièce et je l'observais souffrir. Hurler que la douleur cesse. Hurler que sa vie cesse.
Sa raison s'en était allée. Envolée loin, très loin. Elle chutait dans un abysse sombre et froid ou personne ne semblait pouvoir la retenir. Pas même moi, son propre fils.
Elle gémit. Elle cria. Elle supplia. Encore et encore. Ses larmes dévalaient ses joues et cette douleur qu'elle devait ressentir, je la vivais aussi. Elle vibrait en moi, elle annihilait tout. Je voulais partir. Je ne voulais pas rester là et voir ma mère dans cet état, mais je ne pouvais bouger.
— Non... ahemia. Ahemia...
Elle appelait mon père. Qui n'était pas là. Ce mot d'amour, elle ne l'utilisait que pour lui. Et il n'était pas à ses côtés.
Elle avait mal et elle était seule. Lâchement abandonnée. Et je ne pouvais pas en supporter davantage. Je ne pouvais plus rester là sans rien faire.
Ça me brisait, petit à petit. De voir sa folie, ça me terrassait. Je voulais fuir. Je ne voulais pas l'abandonner. J'avais cette impression de ne rien savoir sur elle. Absolument rien.
— Ahemia ! Ahemia !
Je me retrouvai à côté d'elle, ma main agrippant très fort la sienne. Je m'y accrochai. Elle chercha à me voir, mais sa folie l'en empêchait. Ses yeux bougeaient dans tous les sens. Ne lui laissant aucun répit. Que percevait-elle encore du monde qui l'entourait ? Se souvenait-elle qu'elle avait un fils ? En cet instant, en lui tenant la main, savait-elle qui j'étais ? Je me penchai sur ce visage qui autrefois, avait été vénéré pour sa beauté. Aujourd'hui, ne restait qu'un spectre de ce qu'elle avait pu être.
Une ombre palpable.
Sa main glaciale se posa sur ma joue.
— Tu dois... tu dois pren... prendre soin de notre... garçon... il... c'est un homme, mais... on nous l'a... enlevé, Ahemia... malade... il était malade... mon garçon... pas vu... si grand, si beau... Ahemia...
Je reniflai. Je n'avais pas eu assez de temps avec elle. À peine nous étions-nous retrouvés que les grands Dieux la rappelaient à eux.
— Aime-le, Ahemia... aime-le comme je l'aurais... fai... voulu...
Elle vint appuyer son front moite contre le mien :
— Aslander. Aslander. Mon Ani...
Je pleurais. J'avais mal dans ma poitrine, si mal que je suffoquais soudainement. Comment pouvait-elle m'aimer à ce point en m'ayant connue si peu ? Comment ?
— Tu es le fils des Dieux. Tu es mon tout petit garçon. Ani...
Je pleurais. Ne pouvant plus m'arrêter. Elle me tenait si fermement, comme si elle avait peur de finir seule si elle me lâchait.
La solitude allait l'engloutir aussi sûrement que le mal qui la rongeait. Qui la dévorait si sûrement que ce n'était plus qu'une question de temps. Lorsqu'elle mourrait, allais-je moi aussi ressentir ce vide ?
Cette tristesse ? La même que lorsque Salil était parti.
— Ani... Ani...
Une main sur mon épaule me ramena dans la réalité en même temps que l'orage semblait se déchainer au-dehors. Il était arrivé vite, sans prévenir.
Je levai la tête pour croiser le regard de Tamsyn. Elle semblait soucieuse ; le pli entre ses deux yeux en attestait.
— Tu étais loin, dit-elle.
Je tapotai sa main avant d'attraper ses doigts.
— Je pensais à ma mère.
Je n'étais pas quelqu'un de pudique. Surtout pas avec une femme qui me connaissait aussi bien.
— Les cauchemars reviennent ?
Je secouai la tête et me relevai. Je m'avançai vers la grande fenêtre et observai la pluie. Elle tombait avec force, inondant presque la terre.
— J'ai du mal à me remémorer son visage tant il s'estompe avec le temps. Mais je me souviens d'elle. Lorsque la folie était là et qu'elle en était ravagée.
Tamsyn garda un instant le silence. J'avais les mains croisées dans mon dos, le regard porté bien au-delà de ce que j'avais sous les yeux.
— La maladie frappe parfois nos corps et nos moitiés. Tu le sais mieux que quiconque. Nous vivons longtemps, mais la mort finit toujours par venir.
Oui. Je le savais. Je l'avais vécu. Et à chaque fois que je repensais à tout ça, le souvenir de Salil jaillissait. Et ça me faisait du mal.
— Ta mère ne pouvait pas vivre plus longtemps.
Le temps, à l'extérieur, était à l'image de mon esprit. Je percevais la respiration laborieuse de Siobhane, son souffle quasi erratique.
— Est-elle malade ? finis-je par demander.
— Aucun cancer. Aucun mal ne ravage son corps. Mais elle ne va pas bien. La fièvre la fait délirer.
J'entendais la voix de ma mère. Encore et encore. Comme un appel. Bien plus qu'un murmure. L'état de Siobhane ravivait quelque chose. Je revoyais ma mère, son corps craquant, son esprit aliéné.
— Un sortilège ? soufflai-je.
Aucun mal ne pouvait échapper à Tamsyn. Ainsi, si elle disait qu'il n'y avait rien, c'est qu'il n'y avait rien. C'était aussi simple que ça. J'avais une foi incommensurable en elle et rien ne changerait jamais ça.
— Je ne pourrais le certifier. Son corps porte les stigmates d'une longue, très longue vie.
Je me tournais vers ma Guérisseuse en chef.
— Elle parait humaine.
— Elle l'est, répondit-elle. D'une étrange façon, elle l'est.
Ce n'était pas dénué de sens. Pas dans un monde tel que le nôtre. Mais le mystère demeurait et je n'étais pas sûr d'aimer ça. Siobhane était bien plus que ce qu'elle paraissait être. Mais qu'est-ce que ça signifiait vraiment ?
— Ton pronostic ?
Tamsyn attrapa son bloc-notes et le parcourut des yeux.
— Je te passe le jargon médical ; elle ne va pas bien. Son corps est éprouvé et épuisé. Mais il ne montre aucune trace d'une maladie quelconque. Je ne peux rien faire pour elle.
Pourquoi être venu si elle savait son temps précieux ? Pour sauver un enfant ? Vraiment ? Mais... pourquoi ? Ça n'avait aucun sens, même pour moi.
— Lander.
Je me concentrais sur Tam.
— Pourquoi cette dureté envers elle ? Peut-être que cette tâche est importante pour elle. Peut-être qu'elle en a besoin pour avancer.
Je secouai la tête.
— Il n'y a aucun enfant à sauver. Nous le savons tous les deux.
— Peut-être, mais elle le croit. Si elle avait besoin de ça pour tenir, qui sommes-nous pour le lui enlever ?
— Ça ne marche pas ainsi, répondis-je. Les tribus sont cachées et protégées pour des raisons précises. Elle ne peut pas débarquer et exiger.
Tamsyn pinça ses lèvres et lâcha un soupir qui voulait dire bien des choses.
— Je ne l'ai pas entendu exiger, Lander.
— Ne jouons pas avec les mots, Tamsyn, répliquai-je, presque cinglant.
— Tu es l'Empereur ; tu connais le poids des mots. Alors, ne t'amuse pas à ça avec moi.
Je souris. Tam n'avait rien à craindre de moi lorsqu'elle disait clairement ce qu'elle pensait. Comme maintenant.
— Veux-tu qu'elle te supplie ? Qu'elle ploie devant toi pour que tu l'entendes enfin ?
— Je ne suis pas mon père.
Une bouffée de colère m'étouffa un instant. Je n'étais pas un despote.
Je. N'étais. Pas. Mon. Père.
Tamsyn ne répondit rien à cela. Qu'aurait-elle pu répondre ?
Je passais à côté d'elle et me retrouvai à côté du lit où Siobhane reposait.
Elle gémissait dans son sommeil, transpirant et s'agitant face à des démons invisibles pour nous.
Son visage était crispé, mais sa beauté était toujours là.
Je repoussai une mèche de son front et ses paupières papillonnèrent.
— Fais... pleu... fais pleuvoir des... fleurs... des... fl... fleurs...
Elle avait la voix enrouée, cassée. Comme après avoir trop crié. Elle ne m'avait pas l'air de souffrir. Juste d'avoir été entrainée par la fièvre.
Aimait-elle les fleurs ?
— Tu ne devrais pas la toucher, dit Tamsyn dans mon dos.
— Ça va, répondis-je, plus pour moi-même.
Qu'est-ce que je risquais ? Qu'est-ce que Siobhane risquait-elle de voir dans son état de toute manière ?
— Des... fleurs... dans la... cham... des... Ani... Ani.
Un électrochoc. Une brûlure. Je voulus retirer ma main, mais elle l'attrapa au vol et la serra très, très fort.
Ses pupilles voilées par la fièvre se posèrent sur moi :
— J'ai... j'ai couchez avec... vous, elle gloussa, dans... dans ma tête.
Je clignai des yeux, surpris. Et ne pus m'empêcher de sourire :
— Comment était-ce ?
Son gloussement se fit plus fort. Elle retomba sur ses oreillers et gémis. J'attrapai le linge immergé dans la bassine d'eau et tamponnai son front avec. Je l'avais fait des milliers de fois avec les enfants.
Siobhane se mit à sangloter.
— P... pardon... Alo... Aloysius, par...
Mon geste se suspendit au-dessus de son visage. Que venait-elle de dire ? Un soupir. Et elle sombra de nouveau.
Je lâchai le linge dans la bassine et me reculai.
— Lander ?
Tamsyn m'appela, mais j'étais déjà dehors. La pluie me trempa en quelques secondes. Au-dessus de ma tête, le cri de l'aigle résonna et porta au loin. Je passais le couvert des arbres et mon loup déchira mon corps en même temps que mes vêtements. Pattes au sol, il détala. Slalomant entre les arbres, il foulait la terre comme les premiers loups l'avaient fait. Courant si vite qu'il n'était plus qu'une ombre.
Bientôt, nous sentîmes la magie sous nos pattes. Bientôt, elle fut prégnante tout autour de nous. Nous débouchâmes devant des marches qui s'enfonçaient dans le sol. Mon loup s'ébroua, trempé, et les dévala.
Il faisait nuit noire ici. Un lent clapotis résonnait, se répandant en un écho régulier. Agaçant, presque. Ma moitié s'avança, ses griffes glissant sur les dalles.
Des flammes surgirent, illuminant une immense pièce avec en son centre, un bassin. Je repris la place et me retrouvai, nu, les poils dressés.
Je marchai vers le bassin et m'y émergeai jusque la taille. Il y eut comme une ondulation et un lent frisson remonta tout mon corps.
— J'étais en train de gagner une partie, bougonna une voix. Tu me fais venir au pire des moments possibles. Et comme d'habitude, tu es nu. Serait-ce une sorte d'invitation, Empereur ?
L'homme éclata de rire et se montra enfin.
Ce n'était pas vraiment lui ; plutôt une projection. Même s'il avait quitté son sommeil depuis quelques années maintenant, il venait rarement ici. Vraiment s'entend. Aloysius ne changeait pas.
— Tu nous as vu un millier de fois dans le plus simple appareil Arthur et moi, vieux bougre.
— Je concède, dit-il tout sourire. Il me manque terriblement.
Oui, à moi aussi. Mais avec ma mère dans la tête, je n'avais aucune envie de me rappeler un vieil ami perdu depuis bien longtemps. Un frère, même.
— Comment se porte ton fils ?
Les yeux d'Aloysius pétillèrent. Il semblait fier de l'homme qu'était devenu celui qu'il n'avait pas vu grandir. C'était déjà ça.
— Tu demandes cela par politesse, n'est-ce pas ?
Je souris :
— J'ai beaucoup de respect pour lui, mais s'il osait mettre un pied ici, je le tuerais de mes propres mains.
Cela ne sembla pas le peiner, bien loin de là.
— Tu pourrais essayer, Empereur. Essayer.
Je secouai la tête. Nous n'étions pas là pour parler d'Elijah.
— Il y a une femme ici.
Aloysius regarda autour de lui :
— Plait-il ?
— Elle vient du territoire de Dean Campbell. Une personne étrange. Certains de mes hommes pensent qu'elle est une Aviela.
— Oh ?
Il cachait mal son sourire. Son amusement.
— Mais tu sais déjà tout ça, je me trompe ?
Il haussa les épaules et ses bijoux cliquetèrent à mes oreilles. C'était un son familier.
— Ma chère Siobhane n'a pas encore été dévorée par les tiens ? C'est une bonne chose.
Ainsi donc, il la connaissait bel et bien. Mais me dirait-il qui elle était si je lui demandais ? Avec Aloysius, ce n'était jamais acquis d'avance.
— Qui est-elle ?
Son regard croisa le mien. Et une certaine ressemblance passa.
— Ma sœur, répondit-il. Enfin, pas tout à fait.
De l'honnêteté de sa part ? Une réponse aussi facile ? Si elle était sa sœur, alors oui, elle avait autre chose qu'une humaine.
Une Mage ?
Je repensais à ma conversation avec Tamsyn. À l'état de Siobhane. À la réponse d'Aloysius.
— Que lui as-tu fait ? soufflai-je, dans un murmure.
Le visage d'Aloysius se ferma. Il se crispa sous le coup d'une émotion vivace.
— J'ai été un père déplorable. Et un frère stupide. Je répare mes erreurs. J'apprends d'elles. J'ai voulu sauver Siobhane.
— De quoi ?
— D'elle-même.
Je fronçai les sourcils, ne comprenant pas ce qu'il sous-entendait par là.
— Mais je ne suis pas un Dieu. La portée de mon bras est limitée. Cela a toujours été.
Je me souvenais de la peine d'Aloysius lorsqu'Arthur était mort. De cette douleur qui nous avait terrassé lui et moi. Surtout lui.
— Elle voit des choses.
— Oui.
— Tout ce qu'elle... perçoit est-il la réalité ?
Aloysius pencha la tête sur le côté.
— Tu es sceptique.
— Je devrais me fier à elle ? Sans la connaitre ? Allons, tu me connais mieux que ça.
Aloysius haussa les épaules et jeta un coup d'œil sur le côté, pensif.
— Ce que dispense Siobhane doit être entendu. Là est le prix qu'elle paye pour ses péchés.
Était-elle malade à cause de ses... visions ? De son pouvoir ?
— Quelle en sera l'issue ? demandai-je.
Une à une, les flammes s'éteignirent.
— Tout dépendra du chemin que vous choisirez d'emprunter.
Et la présence d'Aloysius se dissipa.
Arzhel parlait. Je voyais sa bouche bouger sans s'arrêter, encore et encore. Mais je n'entendais rien. Absolument rien. Le vide intersidéral.
Je le fixai d'un œil morne, complètement éteint. J'avais même du mal à garder les yeux ouverts tant il... m'ennuyait. Ce n'était pas sa faute. Pas entièrement. Ma joue appuyant contre mon poing risquait à tout moment de glisser et de me trahir.
Arzhel avait une voix apaisante. Trop. C'était dur de lutter. Je me redressai, cherchant une position inconfortable, histoire d'être sûr de ne pas finir par m'endormir sous le nez de mon Conseiller.
Tâche ardue. Mission impossible, même. Ce qu'il disait était important, mais aujourd'hui, je n'avais pas la tête à ça.
Mon loup se dressa en moi à l'instant où une ombre se faufilait dans la salle du trône.
— Sauver par le gong, marmonnai-je avant de recevoir un boulet de canon sur les cuisses.
— Aslander !
La voix d'Eryn résonna à mes oreilles en une douce mélodie. Elle colla un baiser bien baveux sur ma joue, y laissant même un peu de morve. On repassera pour la classe et la propreté.
Eryn était un petit monstre de six ans. Elle ne parlait pas beaucoup et elle ne jurait que par Piers. Il avait le don de se mettre tous les enfants dans la poche celui-là. En même temps, c'était à lui que revenait la tâche de surveiller chacun d'entre eux. J'avais conscience d'avoir mis un poids énorme sur ses épaules, mais il le fallait.
La cause était juste. Elle en valait la peine, qu'importe la souffrance engendrée. Et ça, Piers le comprenait.
— Qu'est-ce que tu fais là, petit monstre ? demandai-je.
Je vis Arzhel lever les yeux au ciel tout en souriant. Même lui ne pouvait rien faire contre les enfants. Nous étions tous faibles face à eux. Même mes hommes les plus durs aux premiers abords.
— Ze joue à casse-casse avec Piers.
Je hochai la tête et jetai un coup d'œil autour de moi :
— Tu devrais aller derrière ces rideaux, là-bas. Ou derrière Arzhel.
La fillette sourit de toutes les dents qui lui manquaient et se faufila entre les jambes d'Arzhel. Elle était aussi visible qu'un éléphant derrière une brindille, mais comme toujours, Piers se laisserait prendre au jeu. Ce dernier apparut donc au bout de quelques minutes et ses yeux passèrent sur Eryn sans la voir.
— Vous n'auriez pas vu un petit démon tout plein de bave ? demanda-t-il, très fort.
Eryn gloussa et plaqua une main sur sa bouche. Arzhel haussa les épaules et se gratta le menton.
— On a vu passer une petite princesse, mais rien qui ressemblait à un démon.
Je hochai la tête :
— On les mange les démons ici.
— Z'suis pas une princesse, moi ! cria alors Eryn en se campant devant Arzhel et en enfonçant ses poings contre ses hanches.
— Oh ?
Nous penchâmes tous les trois la tête pour la regarder.
Elle rougit et regarda ses pieds.
— C'est nul les princesses, d'abord. C'est Hadrien qui l'a dit. Moi, veux être un chevalier ! Le chevalier d'Aslander !
Je me levai et marchai jusqu'à elle. Elle leva ses grands yeux et sa tête.
— Comme Lynn et Elhe, ajouta-t-elle d'une petite voix.
Je m'accroupis devant la fillette, un sourire tendre aux lèvres.
— On ne devient pas chevalier parce qu'on le veut, Eryn. Il faut le mériter. Tu comprends ce mot ?
Elle fit la moue.
— Piers il dit que si ze veux qu'il arrête les guilis, il faut que ze le mérite. Mais ze sais pas ce que ça veut dire.
Je réfléchis un instant, mais Arzhel fut plus rapide que moi :
— Par exemple, si tu es sage et que tu écoutes bien, tu auras le droit de manger des bonbons avec Aslander.
Eryn me regarda et hocha la tête :
— Zesuis sage. On peut manger des bonbons moi et toi ?
— Toi et moi, la corrigea Piers, par habitude.
J'éclatai de rire.
— On ira en acheter demain, tu es d'accord ?
La fillette hocha vigoureusement la tête.
— Avec Siobhane ? Hadrien et Elisia l'ont vu et Eli dit qu'elle est cro, cro jolie, c'est vrai ? Moi, ze veux la voir aussi !
Piers, dans mon champ de vision se crispa et sa mâchoire se crispa.
— Elle est un peu malade pour l'instant, avouai-je. Mais si elle va mieux, elle viendra avec nous, c'est promis.
Je me relevai et soufflai à Eryn d'aller trouver une autre cachette. Elle détala plus vite qu'un lapin. Je me retrouvai avec mes deux hommes. Un Arzhel amusé et un Piers qui ne semblait pas content. Je me tournai vers ce dernier.
— Quelque chose te contrarie ?
— Une Aviela n'a rien à faire ici. Siad aurait dû la tuer au moment où il a compris ce qu'elle était !
Sa voix était pleine de venin.
— Nous n'avons aucune preuve, dit Arzhel, voix de la raison.
— Parce que ce qu'elle a fait à Siad ne suffit pas ? Elle a vu son histoire. Son passé !
— Mais elle ne lui a rien pris en le faisant.
C'était vrai. Piers secoua la tête.
— Je refuse qu'elle m'approche ou qu'elle touche les enfants. Tu m'as confié la tâche de les surveiller et de les protéger, dit-il, me fixant. Alors, laisse-moi le faire comme je l'entends.
Je hochai la tête :
— Tu agiras comme tu l'entendras lorsque les enfants seront sous ta responsabilité, Piers. Mais lorsqu'ils seront avec moi, j'agirais comme je le voudrais. Est-ce clair ?
Mon homme sembla s'en contenter. Avant qu'il ne quitte la salle du trône, je l'appelais.
— Plus de bâton, dis-je simplement.
Son sourire se fit immense, mauvais.
— Je ne peux rien promettre, Sire.
Et il disparut, allant à la recherche d'Eryn.
Malheureusement pour moi, Arzhel décida qu'il n'en avait pas fini et il se remit à parler.
Grands Dieux, la journée allait être longue...
Il fut question du suivi de l'attaque sur le territoire de Thatcher, puis des affaires en cours au niveau du Pays. J'avais des milliers de personnes travaillant pour moi et faisant tout pour que notre système fonctionne comme il se devait. Je restais néanmoins celui qui prenait les décisions et ainsi, j'étais informé de tout. Du plus insignifiant au plus vital. Il en allait ainsi. Comment les choses auraient-elles pu être autrement ? Je travaillais avec le Prime depuis sa prise de poste et j'avais agi de la même façon avec ses prédécesseurs. Ce n'était pas une question de cohabitation, loin de là. Tout avait été pensé pour que les Hommes et les lycans ne forment qu'un seul peuple. Ce n'était pas toujours facile. Il y avait des difficultés, mais dans quel pays n'y en avait-il pas ? Nous faisions avec les moyens du bord.
Personne n'était laissé de côté. Tout le monde était écouté et entendu.
Je représentais mon peuple et pour ce faire, j'avais besoin d'être proche de lui. J'étais un lycan avant d'être un souverain. Je connaissais nos besoins.
Les hommes n'étaient pas nos proies. Pas plus que nous ne devions être la cible de tous leurs maux.
Nous avancions ensemble et si le navire coulait ; tout le monde sombrait avec lui. Personne n'était en danger. Parce que nous faisions de notre mieux pour que tout le monde soit en sécurité.
C'était aussi simple que ça.
Siobhane était debout, réajustant les vêtements propres que Tamsyn lui avait fait apporter. Elle semblait aller beaucoup mieux, comme si son mal-être n'avait été qu'un simple souvenir. Ses épaules se tendirent quand elle me vit et cela ne fit qu'attiser mon envie de la bousculer un peu.
Et d'en savoir plus. Après ma discussion avec Aloysius, cela me paraissait normal.
— Je suis heureux de voir que vous vous portez mieux, dis-je, avec sincérité.
— Et je suis désolée que vous ayez dû me voir dans un état pareil.
Elle paraissait gênée. Ce que je pouvais comprendre. Je l'observai un instant, oscillant entre l'envie d'exiger un peu d'honnêteté de sa part et l'envie de la titiller.
Mon loup prit la décision à ma place et s'avança sur elle tel le prédateur sur sa proie. Lorsqu'elle le sentit, Siobhane se tendit encore plus, si c'était possible.
— Vous étiez fiévreuse, vous en souvenez-vous ?
Elle secoua la tête. J'étais dans son dos. Presque collé à elle.
Son parfum était... délicieusement appréciable. Entêtant n'était pas le mot. Inoubliable ?
— P... pas du tout.
C'était trop facile.
— Vous avez dit des choses intéressantes. Vraiment très enrichissantes, même.
Ses joues rosirent.
— Ah... oui ?
Ce n'était qu'un couinement.
— Vous avez dit, et je tiens à préciser que je ne fais que reprendre vos mots, que vous aviez couché avec moi. Dans votre tête.
Elle fit volte-face, outrée.
— Comment osez-vous !
Mais son ton était tremblotant. Pas très assuré.
— Vous niez donc, Siobhane ?
— Je... je ne... vous...
Elle peinait à trouver ses mots. Mais son expression parlait pour elle. Mon loup aurait pu en ronronner de plaisir. Il aimait ce genre d'attention, ce genre de pensées. Qui pouvait l'en blâmer ?
— Nous sommes des adultes. Nous n'avons pas besoin de nous justifier lorsqu'il s'agit d'envie. De besoin. Et il ne s'agissait que d'un rêve après tout.
— Ce n'était pas juste un... Argh !
Le bruit qui jaillit de sa bouche était le signe de son agacement. À mon encontre.
— Vous êtes vraiment...
— Oui ? Dite-moi ?
— Agaçant !
Ça venait du cœur. Et ça me fit rire. Parce que oui, avec elle, je l'étais.
— C'est plus fort que vous, n'est-ce pas ?
Je haussai les épaules et me redressai.
— Je me soigne comme je peux. Mais il faut dire que vous me tendez la perche aussi, Siobhane.
— Loin de là !
Elle soupira et secoua la tête.
— Killian et Curtis sont toujours ici ?
— Pour quelques heures, oui. Ils doivent repartir dans la soirée. Second et Main ne font pas bon ménage loin de leur Alpha.
— Vous ne me renvoyez pas avec eux ?
Question pertinente. J'aurais dû le faire. À bien y regarder, sa présence ici n'avait aucun sens, surtout avec moi l'écoutant à peine. Mais...
— Non. Je pense que vous avez quelque chose à accomplir ici. Que je ne comprends pas, certes, mais qui compte pour vous. N'est-ce pas ?
Son front se plissa.
— Pourquoi ce revirement soudain ?
Je lui tournai le dos et pris la direction de la sortie. La pluie de la veille avait laissé place à un soleil timide. Il était à peine neuf heures, mais déjà, une belle journée s'annonçait.
— J'ai eu une conversation intéressante avec un vieil ami. Une personne que nous avons en commun, semblerait-il.
Je sus que j'avais piqué sa curiosité lorsqu'elle se retrouva à marcher à mes côtés.
— De qui parlez-vous ?
Je baissai mes yeux sur son visage, tentais de la sonder.
— Aloysius.
La surprise. Le choc. Qui l'ébranla. Qui la figea. Sa bouche s'ouvrit. Se referma.
— Vous... il est venu ici ?
Je secouai la tête, me remis en route.
— Aloysius ne vient jamais physiquement ici. Plus depuis longtemps.
Je ne voyais aucune raison de lui mentir.
— Que... que vous a-t-il dit ?
— Qu'aurait-il dû me dire ?
Elle pinça les lèvres, pâle, mais pas malade.
— Pouvons-nous cesser ce jeu ? tempêta-t-elle alors.
Elle s'était arrêtée sur le chemin, me foudroyant du regard, une étincelle étrange dans les yeux.
— Il a dit que ce que vous dispensiez devait être entendu. Que là était le prix a payé pour vos péchés.
Elle eut un rire sans joie et marmonna quelque chose que je ne compris pas. Elle inspira. Longuement.
— Lui faites-vous confiance ?
— Bien-sûr, dis-je, sans aucune hésitation. Bien que parfois, je me demande ce qu'il peut bien manigancer. Soyons honnête l'un envers l'autre, Siobhane, voulez-vous.
— Comment le pourrions-nous quand vous semblez si réfractaire ?
Je balayai sa phrase d'un geste de la main.
— Je ne peux pas me laisser dicter par des impressions ou par des jugements, Siobhane. Je suis l'Empereur et j'ai besoin de protéger mon peuple. Je peux paraître borné, à la limite de l'impolitesse. Je peux vous paraître d'une arrogance rare. Mais je sais écouter. Je me dois d'écouter. Comprenez-vous ?
— Vous ne le faites pas avec moi. Vous ne voulez rien entendre sortant de ma bouche.
— Vous êtes humaine maintenant, mais vous ne l'avez pas toujours été. Je suppose que vous connaissez les Seekers. Leurs pouvoirs. L'horreur que chacun représente.
— Je ne suis pas...
— Je sais. Je le sais. Néanmoins, vous débarquez ici et vous êtes capable d'entrer dans la tête de mon homme pour y voir sa vie. À ma place, quelle aurait été votre réaction ? Soyez honnête, Siobhane. Soyons-le ensemble.
Elle ne dit rien et je pris cela pour une réponse de sa part.
Je lui fis signe pour que nous continuions à marcher. Elle gardait une distance de sécurité.
— La confiance est un des fondements de la réussite de ce pays. La confiance est ce qui régit mon existence. Je dois pouvoir compter sur chacune des personnes présentes autour de moi. Sans aucun doute, sans aucune peur. J'ai besoin de connaitre les gens. Pour voir leur honnêteté, pour voir la profondeur de leur sentiment.
Je levai la tête un instant pour observer le ciel au-dessus de nos têtes. Je regardai les oiseaux. Je goutai la saveur du vent sur ma peau.
— Je vais vous écouter. Je vais cesser de vous ignorer. Mais vous devez répondre à une seule question.
Là encore, son silence.
— Puis-je me fier à vous ?
Je la regardai. Plongeai dans son regard.
— On ne peut mentir lorsqu'il s'agit d'enfants, répondit-elle.
Et là était ce que je voulais entendre.
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* *
*
Salut les adaktives !!!! 🤙😚 comment que vous allez ? 😊 avec Ada on est.... Enfin en vacances !!!!!!! Bon alors oui je sais que pour beaucoup ça va être la rentrée mais eh ! Chacun son tour 😋🙊 je vais pouvoir écrire lire et... Avancer mon mémoire 😂 ça c'est largement moins fun mais tout peut pas être parfait me direz-vous... Rip à moi-même 😔
Mais parlons un peu de ce pdv ! Un peu de la maman d'Ani (ouais ouais je sais ça fait plus Anakin qu'Aslander... Et alors ? 😋) et Siobhane qui n'a pas l'air bien et qui balance à notre Kaizer qu'elle couche avec lui dans sa tête !!! 🤣🤣🤣 elle est pas folle dis donc !
Petite discussion avec Aloysius qui oui n'est autre que le papa de notre Elijah 😍😍😍😍 la plupart avait bien deviner preuve que vous suivez tellement bien notre univers 🤗 on vous aime pour ça 😘
On avance tout doucement et c'est pareil pour notre Empereur qui se décide enfin à écouter Siobhane. Merci Aloysius ? 😁
En espérant que cette suite vous a fait plaisir 😉 on se dit à très vite les filles 😘
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