Chapitre 6.
"J'habite de temps en temps une de mes plaies. Chaque minute, je change d'appartement" - Aimée Césaire.
J-273
[Pdv: Carrie]
"Et si on vivait en profitant de la vie tant que l'on peut.
Et si on vivait en consommant sans se retenir.
Et si on vivait sans problèmes, et sans préoccupations.
Et si on vivait.
La vie, c'est si court et si long en même temps. On s'imagine tous vivre pour toujours, on croit tellement fort au fait que l'on a le temps, qu'il est de notre côté. Mais il file de manière incontrôlable et personne ne peut lutter contre cela. Et le pire dans tout ça, c'est que le temps, c'est nous qui l'avons inventé. L'humain a inventé le temps pour se repérer, et au final on en est victime. Comme a chacune des fois où l'on a mit des choses en place, le revers de la médaille et toujours négatif pas vrai ? Si vous saviez ce que j'aurais fait de tout ce temps perdu. Tout ce temps où l'on m'a laissé pourrir dans des recoins infâmes. Si vous saviez le temps que j'ai dépensé au milieu du noir, je ne savais plus si l'endroit le plus sombre n'était pas mon esprit.
On a vite appelé ça "les boîtes". Tout du moins, je les avais appelé comme cela, un mot simple pour un endroit on ne peut plus simple. Je me suis vite rendue compte que ma vision simple d'esprit de cet endroit avait été vite partagé avec les autres, toutes aussi simples d'esprit. L'âge moyen ici, c'était six ans. Six ans. C'est aussi le temps que l'on passait là-dedans au maximum, après on y succombait, au temps.
Tout ceci n'est ni fictif, ni vrai, ceci est un point de vue. Un point de vue sur ce que vivent des centaines de filles, ce qu'ignorent des milliers de personnes et ce qu'essaie de cacher un petit groupe de personne à la tête du pays. J'ai fait partie de ces filles, puis j'ai tenté de faire partie des gens qui essaient d'ignorer, en vain. Mais j'ai jamais réussi à atteindre l'élite de la nation. Personne n'écoute une jeune fille de dix-neuf ans, sans travail, et en plus de ça en cavale.
Sauf que.
Si vous lisez ceci, c'est que quelque part, vous m'avez entendue."
C'était les premiers mots que j'avais gribouillé sur le dos d'une enveloppe. D'ailleurs, c'était l'une des rares choses que j'avais fait ces derniers temps. Je me suis calmée sur les sorties, j'envoie Lola déposer mes colis pour Selena, et je ne sors plus. Je ne sais pas si affronter le problème de pleine face est une si bonne idée finalement. Isaac est toujours adorable avec moi et en ce moment il me laisse un peu plus tranquille dans le sens où je pense avoir acquis un peu de confiance de sa part. Je ne demandais que cela. Et je crois qu'il a réussit à obtenir un peu de ma confiance aussi. Tout du moins, je crois.
A ce sujet, lui et Lola se rapprochent pas mal j'ai l'impression. En tout cas, ils se font des sorties au restaurant, tous les deux. C'est déjà pas mal. Et puis il y a moi. J'écris au dos d'enveloppes histoire de m'occuper. Je ne sais pas à qui se destine exactement ce "vous". Je ne sais pas si j'essaie de communiquer avec moi-même, ou avec mes possibles lecteurs. Qui tomberait sur cela ? Absolument personne. Pourtant je vouvoie celui qui me lit, sûrement une manière de me rassurer sur le fait que quelqu'un pourrait vouloir m'écouter. Je crois que je me sens seule. Un petit peu.
Je veux dire, je vis chez Isaac, mais c'est pas pareil, je suis pas chez moi. Et ce n'est pas de sa faute, je veux dire, il a tout fait pour que je me sente comme chez moi, il m'a tout donné vraiment. Mais c'est pas chez moi, je le répète. J'ai l'impression d'être à l'hôtel, ou de profiter de quelqu'un qui a eut la gentillesse de m'abriter. Et même si je le vois tous les soirs, je mange avec lui, je discute avec lui, et puis ma brosse à dent est dans sa salle de bain, je peux pas être plus "chez moi" normalement. Pourtant je me sens comme une étrangère. Je me sens étrangère à moi-même, pour dire la vérité. A l'intérieur tout est vide, et sale, je m'en sens pas moins heureuse lorsque je suis avec lui, je veux dire dès que je le vois j'agis comme si tout allait parce-qu'au moment précis où je lui parle, et bien je ne pense pas au fait que je sois seule. Il suffit que je monte dans ma chambre pour que tout ce que j'avais exprimé en façade disparaisse. Je redeviens pâle, et vide. Oui c'est ça, le vide.
C'est triste de se dire que même sortie de la boîte, le vide et bien en fait, il est à l'intérieur. Il me manque un truc que j'avais cru retrouver lorsqu'il était là, avec moi. J'avais l'impression d'avoir trouvé quelque chose qui me remplissait. De joie, de rire, même la colère me manque. Puis plus que tout, c'est lui qui me manque.
[Pdv: Zayn]
Le soir il faisait un peu plus frais que la journée. Non. Non, les nuits étaient froides, même glacées. Aussi froide et sombre que mon esprit sûrement. Ca faisait bientôt deux semaines que la rue était devenue ma maison. Pas le choix quand on veut éviter les problèmes. Puis surtout l'éviter elle, je crois que c'était mon plus gros problème. Et ma plus grande hantise. Ou alors c'est peut-être moi mon plus grand problème.
J'avais commencé à voir certaines personnes à qui je n'aurais jamais, jamais, dû demander de l'aide. Mais je l'ai fait, j'ai merdé peut-être, mais j'avais plus le choix. Quatre jours sans bouffe, et je pouvais y laisser ma vie au milieu du froid. Alors, j'ai vite trouvé comment survivre quelques temps. Juste assez pour pouvoir vivre "décemment".
"J'arrêterai quand tout ira bien". C'est ce qu'on se dit tous pas vrai ? On se rassure avec ça alors que l'on sait que pour sortir de cette galère, c'est très compliqué. T'en dois toujours une à quelqu'un, pour service rendu, et vice-versa. Et puis, j'en suis sorti une fois, c'était plutôt simple, mais en sortir une deuxième fois: c'est proche de l'impossible. Mais je l'ai fait, et maintenant je regrette.
Je me suis fait du fric rapidement c'est vrai, mais plus les nuits avançaient et plus je le regrettais. Car plus tu te fais de la thune et plus t'es en contact avec les gros poissons. Au début c'était deux-trois accros, des junkie aux moyens limités et avec qui je ne risquais pas grand chose. Puis c'était des patrons de boîte, puis des grandes entreprises, on final je me retrouve à négocier avec de petits gangs, tout ceux contre qui je me suis toujours battu. Je commence à sympathiser avec l'ennemi, et ça, ça ne présage jamais rien de bon.
Et puis au début, ce n'était que de l'herbe de mauvaise qualité, aujourd'hui on me demande plus de choses, plus de moyens, et malheureusement pour moi si ma gueule tourne un peu trop je vais finir par me faire repérer plus que je ne le voulais au départ. Ce soir, j'ai décidé de ne rien faire "d'illégal" même si à ce stade même le fait de vivre de ma personne est devenu illégal. Je porte des montres, des vêtements, payés avec de l'argent sale. Je vais chez le coiffeur, je paye les courses et l'hôtel avec de l'argent sale. Même me trimballer tout nu, et retourner vivre dehors ne laverai pas le fait que la crasse est désormais bien imprégnée sur mon corps. Difficile de laver autant de merde. Pourtant je continue à faire comme si tout allait bien, parce-que les expressions de façades priment sur ce que tu ressens à l'intérieur ici. On ne fait attention qu'à ton apparence, et mieux vaut ne pas paraître trop riche et trop bien non plus.
Tout le monde s'en fou de savoir ta vie, personne ne te demande si ça va, les échanges quant à la parole ne se limitent qu'à des "tu as ce que je t'ai demandé ? Oui ? Prends le cash". C'est tout.
Ca ne m'aurait pas gêné auparavant. Et quand je parle d'avant, je parle de la période post-elle. Oui, elle, on en revient toujours à elle, toujours au même putain de problème, elle, elle, elle. Je marchais dans la rue en pensant à tout cela, pourquoi m'énervais-je autant ? Je décidais de sortir mon paquet de clope pour me persuader qu'en fumer une me calmerait. La rue était mal éclairée, et j'étais tellement concentré à savoir dans quel sens il fallait que je la mette dans ma bouche, que je n'avais pas réalisé sur le coup que mon épaule en avait percuté une autre. Ce n'est qu'après un "hé" plus ou moins sur de lui, que je réalisais que c'était bien à moi que l'on parlait. Je m'étais retourné doucement, en allumant ma clope à l'aide de mon briquet. Le jaune, son préféré, à elle, enfin bon.
?- Hé, je crois qu'on se connaît non ? Me demandait-il en s'approchant un peu plus de moi.
En plus de ça pas de bol, j'étais posté pile en dessous du seul lampadaire de la rue, et lui avait la chance d'être dans l'ombre. Vu que je commençais à plisser les yeux pour pouvoir distinguer ne serait qu'un œil, le mec s'était déplacé sous la lumière jaune.
Zayn- Je crois pas, non.
Et puis ce n'était jamais bon lorsque les conversations commençaient de cette façon. Ce n'est jamais bon que l'on ne me reconnaisse et que l'on puisse avoir l'occasion de m'associer à elle. Personne n'est censé me reconnaître, et encore moins me connaître, et s'il me connaît vraiment alors c'est qu'il traîne dans de mauvais endroits.
?- Si, si insista-t-il, j'en suis sûr mec, rajouta-t-il en me pointant du doigt, les yeux plissés.
J'avais haussé les épaules et m'étais retourné en traînant des pieds, toujours en direction de l'hôtel, ma destination première. Puis je m'étais éloigné, d'à peine quoi ? Deux mètres pas plus, et il lui en fallut peu pour s'en souvenir.
?- Zayn Malik...
Je m'étais arrêté net, comme foudroyé. Pourtant j'étais sûr de ne connaître ce mec, ni d'Adam ni d'Eve, mais lui apparemment me connaissait. Ca faisait d'ailleurs très longtemps que l'on ne m'avait pas appelé par mon vrai nom.
Ici, c'est Nubes. Oui je sais, ça craint, et ça ne me plait vraiment pas non plus.
Je m'étais donc retourné lentement, puis lui avait lancé:
Zayn- Qui es-tu, d'où tu connais mon nom, qui t'envoie, je ne t'ai jamais vu.
?- Oulaaa, dit-il en rigolant et en s'approchant amicalement, il me tendit une main que je serrait en retour.
?- Mec, tu te rappelles pas de moi, on était ensemble au collège !
Vu le peu de temps que j'ai passé au collège, non ça me dit sacrément rien.
?- Jake Coopers, l'équipe de football, tout ça.
Ah ouais, l'équipe de foot. Par contre, toi, toujours rien.
Zayn- Non, tu me dis vraiment rien, désolé mec.
Jake- Roooh, allez quoi, tu te souviens pas de moi sérieux ! Monsieur Smithers, nous en faisait voir de toutes les couleurs !
Possible, possible. C'est tellement loin.
Jake- Raconte moi, qu'est-ce que tu fais dans la vie ?
T'es vraiment insistant mec, on est en plein milieu d'une rue sombre, il fait nuit c'est tard, et tu penses à me taper la discut' sur ma carrière professionnelle. D'ailleurs, que vais-je répondre à cela ? Mentons, mentons, puisque toute ma vie n'est qu'un tissu de mensonge, continuons de coudre.
Zayn- Oh, j'accumule les jobs à mi-temps, serveur, caissier, rien de bien glorieux. Et toi, ça se passe ?
Jake- T'étais tellement bon au foot, que t'en aurais pu en faire ton métier, en tout cas c'est ce que Smithers disait.
C'est vrai, malheureusement pour moi, tout ne s'est pas passé comme prévu, et puis Smithers, il ne m'en voudra pas maintenant.
Jake- J'ai crée ma chaine de restaurant dans le Michigan, rien de bien spécial non plus. Bon, je te laisse, j'espère re-croiser Smithers dans la semaine et lui donner de tes nouvelles, à un de ces jours.
Ah bon ? Croiser Smithers ? Ce type doit être sacrément doué. C'est marrant mais je m'en doutais qu'un truc clochait. Sa tête ne me revenait pas, et je savais qu'il y avait un truc pas net. Ce soir, cette rue, cette heure, puis cette question, jamais rien de bon. Qui es-tu Jake. Qui es-tu vraiment ? Et pourquoi en connaît-tu autant sur ma personne ? Smithers est mort il y a deux ans déjà Coopers, et tu devrais le savoir, surtout si tu compte le re-croiser.
[Pdv: Extérieur]
?- Mais qu'est-ce qui t'as pris Jake ! Tu es un amateur, un putain d'amateur ! Le coupe de Smithers bordel, il est mort, t'es qu'un débutant !
Jake- Avec un peu de chance il ne le sait pas.
?- On a pas le droit a des coups de chance Coopers ! Puis qu'est-ce qui t'as pris de dire ton vrai prénom bordel ! S'il te voit à la télé prochainement t'es mort ! Barres-toi vite fait de mon bureau, dégage !
Jake- Mais.
?- DÉGAGE J'AI DIS !
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YO TOUT LE MONDE C'EST QUEENIE !
D'abord so sorry pour cette siiii longue absence j'ai l'impression que ça fait une éternité, mais en même temps je me dis vu le nombre de lecteurs que j'ai perdu pas trop de monde m'en voudra ahah ! Voilà une petite update, j'espère que ça vous plaira ! J'essaie de reprendre le rythme mais c'est tellement dur avec la fac ! Xx C
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