Chapitre 1.
« J'obtiendrai ton sourire, le seul témoin de ma victoire » - Nekfeu
J-364
[Pdv : Carrie]
J'avais passé un temps fou à lui expliquer la situation, sans trop m'attarder sur les détails non plus et l'expression de son faciès n'avait pas bougé d'un poil. Il était à moitié sérieux, à moitié passif. Je ne savais même pas s'il m'écoutait vraiment en fait.
Carrie- Tu comprends ? Dis-je presque d'un ton suppliant.
Il s'était contenté d'hocher la tête, puis il était retourné à la cuisine en essuyant son verre à l'aide d'un torchon. Je ne savais qu'en penser et son manque de réaction me fit presque m'inquiéter. J'espérais bien qu'il avait compris, je ne voulais pas tout réexpliquer une deuxième fois. Pour m'assurer qu'il n'ignorait pas le problème, je l'avais difficilement suivi jusque dans la cuisine en me tenant le flanc. Je m'appuyais contre l'embrasure de la porte et il s'était retourné doucement, comme s'il s'attendait à ce que je revienne.
Carrie- Tu sais, si tu veux que je parte d'ici, je peux partir.
Isaac- Non, reste.
Carrie- Alors, pourquoi tu ne réagis pas ?
Isaac- Les médias grossissent toujours tout, et puis j'estime que tu ne me mentirais pas dans une position aussi délicate que la tienne. Tu as quand même tout à perdre, ton foyer, ta tranquillité, et même ta vie. Dit-il en pointant du doigt ma blessure.
Isaac- Tu m'as dit la vérité, je te fais confiance sur ça. Maintenant je cherche un moyen de t'aider, ça va être dur pour toi dehors.
Carrie- Pourquoi tu veux absolument m'aider, à tout prix ?
Isaac- Parce-que je suis gentil.
Carrie- Non, la vraie raison Isaac.
Isaac- Parce-que je t'aime bien, j'ai l'impression de pouvoir faire quelque chose pour toi et je déteste m'ennuyer. Alors bon, pourquoi pas t'aider.
Il m'avait sourit d'un air compatissant, et j'avais souris à mon tour. Je le trouvais très compréhensif pour un garçon qui n'avait pas l'air d'aimer les problèmes tant que ça. C'est peut-être pour ça qu'il m'aide au fond, il trouve quelque chose à faire de plus que de travailler dans des bureaux à longueur de temps.
Aujourd'hui tout s'était déroulé à une lenteur impressionnante, et honnêtement je ne savais pas quoi faire de ces pauvres journées dans ma vie. Ni quoi faire de mes nuits en fait.
Le soir, à l'heure du dîner, Isaac avait changé mon pansement, encore une fois. J'avais eu du mal avec le désinfectant, comme ce matin, mais je prenais de plus en plus sur moi parce-que je savais qu'un jour ou l'autre la douleur allait finir par passer, autant commencer maintenant.
Nous avions dîné sans un mot, et seul le bruit des dessins animés comblait ce silence. Ce silence n'était pas dérageant, et au contraire il se valait mérité, presque comme une récompense. Je ne sais pas de quoi je pourrais me féliciter, peut-être d'être tombée sur quelqu'un aussi compréhensif que lui.
Je suis sûre que si j'avais rencontré une fille comme moi, avec un histoire pareille, j'aurais même pas pris la peine de l'écouter à partir de la deuxième phrase, et je l'aurais foutue dehors en moins de deux secondes.
Après notre repas devant la télévision, il me proposa quelques trucs à faire dans la semaine, pendant qu'il ne serait pas là, vu qu'il repartait travailler le lendemain.
Bon, il ne fallait pas trop rêver au niveau de la confiance, et je trouve ça plutôt normal qu'il envoie quelqu'un pour rester avec moi. Ce sera un de ses « collègues », il me tiendra compagnie dans trois jours, et pendant ces trois jours avant qu'il arrive je vais devoir me débrouiller toute seule. Je me suis dit qu'aux premiers abords ça n'allait pas être trop difficile, puis quand je me suis rappelée ma situation j'ai tout de suite déchanté.
Pour récapituler, je suis blessée physiquement, mentalement mais bon ça tout le monde le sait j'imagine, je ne peux pas trop prendre de risque en sortant, il ne faudrait pas qu'on me reconnaisse ou encore pire qu'on veuille me tuer. Autrement dit, les sorties à ce niveau c'est totalement interdit, mais je trouverai forcément une solution pour pouvoir prendre l'air et accomplir quelques trucs qui me tiennent à cœur. Je n'oublie pas que dans moins d'un an il faudra que je me montre une nouvelle fois et à partir de ce jour, plus rien ne sera facile. Encore moins qu'en ce moment.
En bref, de longs mois de réflexion, de manipulation, et de mensonges m'attendent. Pour changer. Et le pire dans tout ça, c'est que ça devient presque excitant, alors que je ne devrais pas me réjouir. Mais alors pas du tout.
Je me demande bien comment les autres vivent mon absence, s'ils croient que je suis toujours de ce monde, ou pas. S'ils pensent à moi, s'ils m'oublient -et ce serait mieux pour eux qu'ils le fassent au plus vite d'ailleurs-. S'ils refont leurs vies, s'ils ont évolués, s'ils s'en sortent. Et si ce n'est pas maintenant de toutes façons, ils finiront par s'en sortir un jour ou l'autre. Peut-être que je pourrais discrètement leur donner un coup de main, histoire d'être là pour eux sans qu'ils ne le sachent vraiment. Peut-être que je pourrais faire les choses bien, pour une fois.
/Time/
Isaac- Tu ne peux pas sortir.
Carrie- Et pourquoi pas !
Isaac- Parce-que c'est trop risqué !
Carrie- Une fois qu'ils m'auront posé toutes leurs questions je serai tranquille une fois pour toute bon sang ! Dis-je en haussant le ton.
Isaac- Et alors, tu crois qu'ils vont te laisser pour autant ? Ça ne va être que le début de la fin Carrie ! Dit-il un peu plus fort que moi.
Carrie- Et si j'ai envie que ça se finisse ? Criais-je.
Isaac- Je croyais que t'avais fait promesse à je ne sais qui que tu revenais d'ici un an je me trompe ? Cria-t-il à son tour.
Isaac- Je croyais que cette personne comptais non ?! Continua-t-il.
La tension était électrique et mon corps s'était soudainement figé. C'est vrai, il avait raison j'avais fait cette promesse, et je me devais de la garder, pour lui. Soudain, je me rappelais de ce que j'avais fait il y a de cela deux jours. Fuir, partir, et laisser son corps quasiment inerte sur le sol. Je me repassais ces images en boucle comme si ça ne faisait pas assez mal jusqu'à présent. Je sentis les larmes me monter, mais le son de sa voix prenait le dessus sur tout ce qui m'entourait. « Don't Forget ? ». Je lui avais promis, et en omettant ceci, c'est comme si j'avais cassé la promesse que je lui avait faîte. Mes mains agrippèrent automatiquement mes cheveux pendant que quelques larmes coulaient le long de mes joues.
J'étais fatiguée de devoir me battre, fatiguée de ressentir cette douleur, fatiguée d'être oppressée, stressée à ce point. J'étais tout bonnement fatiguée, point à la ligne.
Je m'accroupis un instant, comme si je n'avais plus la force de supporter quoique ce soit dans la vie. Ma douleur au flanc avait soudainement disparue pour laisser place à une plus grande douleur, qui est celle logée dans mon cœur. Depuis toujours cette douleur est là, méprisante, et certainement plus forte que moi. Elle m'enveloppe, me protège, mais me détruit surtout de l'intérieur. Étrangement je m'étais dit que c'était tout ce que je méritais, on m'avait rendu la monnaie de ma pièce. C'était clairement plus dur que je ne le pensais : faire semblant.
Pourtant j'avais pris cette habitude depuis ma naissance, mais elle avait rapidement disparue les derniers temps où j'allais bien. Tout était naturel, j'étais sans carapace. Pas de grande fermeture d'esprit de ma part, j'agissais en mon âme et conscience, un peu comme si j'avais coupé les fils auxquels j'étais suspendue, moi, marionnette du théâtre qu'est ma vie.
Je sentis deux grandes mains chaudes m'envelopper et me coller contre son torse, et j'avais frissonné à ce contact. Le contact physique ne m'avait pas fait grande part de sa présence jusque là. Comment puis-je être si égoïste ?
Isaac- Tu n'es pas égoïste, tu es juste perdue.
Je l'avais regardé avec de grands yeux. S'il avait pu répondre c'est que j'avais sûrement dis ma dernière phrase à voix haute.
Isaac- On a qu'à retrouver le bon chemin ensemble, je t'aiderai je te l'ai déjà dit.
J'avais simplement hoché la tête, puis je m'étais rapidement relevée, carrément gênée d'avoir pu craquer aussi vite devant lui. Ce garçon qui m'était encore inconnu il y a de cela deux jours seulement. Je ne savais pas comment le remercier et la situation devenait plus qu'oppressante.
Non pas qu'Isaac me gêne non, c'est à l'intérieur de moi-même que je me sens oppressée, gênée. Comme si... Comme si j'avais besoin de me relâcher de quelque chose.
Mon repas, oui tiens, mon repas.
Je courus soudainement jusque les toilettes, laissant au passage Isaac en plan dans le salon, puis rendis mon déjeuner à l'intérieur de ceux-ci, les mains de part et d'autres de la cuvette. J'étais essoufflée, d'autres larmes perlèrent contre mes joues, et un haut-le-cœur me reprit. Après dix minutes de torture, le ventre vide, mes membres tremblants, le front en sueur, et une haleine horrible je ressorti des toilettes encore plus épuisée que ces derniers jours. Et honnêtement, je ne pensais même pas que c'était possible.
Je m'appuyais sur le mur juste à ma droite, de sorte à soutenir mon corps affaiblit, puis lorsque je ré-atteignis le salon, je vis Isaac me désigner du doigt le canapé.
Isaac- Tu t'allonges là-bas, tu te couvres avec la couverture, tu mets cette bouillotte sur ton ventre et tu prends ces cachets sans rechigner. M'ordonna-t-il.
Isaac- Y a la télécommande, y a tout, et tu me feras le plaisir de manger un morceaux quand tu te sentiras mieux. Je te lâcherai pas, ok ?
J'avais simplement hoché la tête, ne voulant pas rentrer une nouvelle fois dans un débat. Je me saisis faiblement de la bouillotte qu'il avait préparé, et Isaac m'accompagna jusque le divan en me soutenant légèrement par les aisselles. Je ne sais pas si je ne me suis pas endormie de suite après avoir pris mes médicaments et m'être installée sur le canapé.
/Time/
Isaac- Ça va mieux ?
Il m'avait demandé cela après m'avoir vu ouvrir les yeux faiblement. J'avais comme d'habitude prononcé aucun mot et m'étais contenté simplement d'un mouvement de la tête. Il m'avait souris faiblement, puis s'était rapproché de mes jambes en les posant sur ses genoux.
Isaac- J'ai eu une idée. Je sais que t'es fatiguée mais écoutes ça...
Il m'expliqua son plan de long en large et j'avais souris face à toute cette attention. Je ne comprenais toujours pas pourquoi il tenait tant à m'aider mais je le remerciais à chacune des minutes qu'il passait à m'expliquer ce qu'il avait prévu de faire. Voyant que cela me plaisait, cela l'avait fait sourire aussi. C'était presque drôle de savoir que pour lui, ma vie paraissait comme un jeu. Et vaut mieux la prendre comme telle, plutôt que comme moi je la prend.
Je trouvais cela fantastique de voir quelqu'un se démener autant pour une autre personne qu'il ne connaissait pas. L'ironie du sort et que j'ai eu du mal à faire confiance à des personnes que je connaissais depuis plus de temps que lui, alors qu'Isaac m'a tout de suite fait bonne impression dès la première minute où je suis montée dans sa voiture.
Je crois qu'à trop me méfier, j'avais aussi besoin de prendre ce risque là, celui de faire confiance une fois de temps à autre. Même si techniquement, je prends des risques tous les jours ne serait-ce qu'en me réveillant chaque matin depuis que je suis née. Ne jouons pas sur le fait qu'il y a eu des fois où je me levais la nuit, ou sur le fait qu'il y a des fois où je ne savais même pas quel jour ou quelle heure il était. Mais je me levais, c'était déjà ça.
Isaac repartait maintenant vaquer à ses occupations et moi je scrutais la télévision en quête d'un bon téléfilm. Les meilleurs sont ceux de Noël mais bon, ce n'est pas encore la période. Le téléfilm que j'avais finalement choisi parlait d'une jeune femme prête à tout pour réaliser son rêve mais qui ne pouvait rien faire sans ses amis. Classique. Et surtout bien trop cucul.
Mais c'était tout de même sympa, et cela m'avait fait pensé à une chose. Isaac ne pouvait pas tout faire pour moi, il fallait que je me débrouille aussi toute seule. Du moins, toute seule n'était qu'un bien grand mot, car au final je devais me débrouiller seule, pour ne plus l'être.
Je me saisis de mon téléphone et tapais machinalement son numéro que je connaissais par cœur depuis le temps. J'avais un peu stressé lorsque mes doigts tapaient sur le clavier pour écrire ce message, mais il fallait de toutes façons que je le fasse un jour ou l'autre alors pourquoi ne pas commencer dès maintenant. J'ai retapé une dizaine de fois le contenu de mon texto, comme si ça allait changer quelque chose au sens de mes phrases. J'avais peur que le message ne passe pas, que celui ou celle qui allait recevoir ce message ne comprenne pas de quoi il s'agissait. Pourtant, cela me paraissait évident en y réfléchissant. Cette personne était la bonne, c'était celle en qui j'avais le plus confiance en tout cas.
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A : Inconnu
Toi et moi, il faut qu'on parle et vite. 00 »
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