Chapitre 12 - Hanse
En arrivant, Hanse reste figé un instant, les yeux écarquillés devant les murs tapissés de posters de groupes de métal. Il avance prudemment dans la pièce, encore choqué de découvrir que ce dernier écoute ce genre de musique, il est surtout agréablement surpris.
Loin d'imaginer que le premier de la classe, l'intello à lunettes, toujours impeccable dans son uniforme et irréprochable au lycée, cachait un côté aussi rebelle. Hanse esquisse un sourire et s'apprête à se tourner vers lui. Mais à ce moment précis, il entend son hôte s'agiter près de l'embrasure de la porte.
— Euh, je vais nous ramener une table pliante, et puis des coussins... J'veux dire, pour bosser... Ça sera plus confortable...
Surpris de voir Seungsik s'enfuir aussitôt arrivé dans sa chambre, Hanse profite d'avoir quelques instants seul ici pour observer plus en détails la pièce. Après que ses yeux se soient posés sur tous les posters accrochés aux murs, c'est avec une certaine surprise qu'il découvre un immense terrarium.
Il s'approche alors lentement, un peu hésitant, mais une fois devant le terrarium, il ne distingue aucun animal à l'intérieur. Il ne voit que des souches d'arbre et une lampe chauffante. Hanse continue d'explorer le reste de sa chambre et tombe sur un portfolio à moitié ouvert sur une étagère.
Même s'il sait pertinemment qu'il ne devrait pas fouiller dans des affaires qui ne lui appartiennent pas, Hanse est incapable de résister à sa curiosité. Il prend alors le portfolio dans ses mains et commence à feuilleter les dessins de Seungsik. La plupart des croquis présents sont des paysages ou des petits animaux qu'Hanse trouve particulièrement réussis.
Tandis qu'il continue machinalement à faire défiler les dessins, un premier croquis attire son attention et le fige d'un coup net.
Ce dessin ne représente ni paysage, ni animal, mais il ne laisse aucun doute sur l'intérêt particulier que Seungsik lui a porté. Le premier représente le torse nu d'un homme, le second dessin s'attarde sur la musculature du dos d'un homme, le troisième quant à lui n'est rien d'autre qu'une verge au repos.
Hanse se sent soudain extrêmement gêné en observant à quel point Seungsik a pris soin de dessiner dans les moindres détails ce sexe d'homme, et sans même s'en rendre compte, il sent une étrange chaleur commencer à l'envahir.
Au même instant, il entend du mouvement dans le couloir, alors dans un geste vif, il repose le portfolio sur l'étagère et revient se positionner au milieu de la pièce avant que Seungsik n'apparaisse à nouveau devant lui.
— Euh... Excuse-moi... J'peux utiliser ta salle de bain ?
Quittant avec empressement la chambre, comme un criminel qui s'enfuit d'une scène de crime, il arrive devant le lavabo de la salle de bain et passe rapidement de l'eau sur son visage pour tenter de remettre un peu d'ordre dans ses pensées. Il songe alors que Seungsik aurait très bien pu dessiner ce genre de corps, dans un but uniquement artistique. Néanmoins, il arrive difficilement à comprendre et à contenir l'embarras qui continue de ronger son esprit.
— Bon, je vois que tu as tout préparé, on se met au boulot ? propose Hanse en revenant dans la chambre.
Sans vraiment comprendre pourquoi, il remarque que Seungsik semble un peu plus distant et sérieux, alors il décide d'en faire autant et d'apporter toute sa concentration sur leur projet en binôme.
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De retour chez lui après une après-midi passée à travailler sérieusement avec Seungsik, Hanse tente d'oublier cette gêne palpable qu'il a pu ressentir après la découverte du portfolio de ce dernier. Tandis qu'il est en train de faire la vaisselle après avoir partagé un repas avec Hanbi, il remarque sa mère qui s'approche de lui.
— Attends, je rêve ou t'as encore fait un nouveau tatouage sans nous le dire ?! s'agace Siyoon en découvrant le bras d'Hanse découvert.
— Ah, ouais... Ça fait déjà plusieurs semaines que je l'ai celui-là. C'est marrant que tu le remarques que maintenant.
— Ça n'a rien de drôle, Hanse ! Cache-le vite avant que Woosung ne le voie !
— N'importe quoi, j'vais pas me cacher pour lui ! rétorque Hanse en haussant la voix, agacée devant la réaction de sa mère.
— Qui veut cacher quoi à qui ? demande Woosung en arrivant dans l'immense salon.
— Tiens, regarde ! lance Hanse en désignant le tatouage sur son bras. Tu vas faire quoi ? J'suis pas ton chien, moi ! Tu peux pas m'interdire ou me forcer à quoi que ce soit.
— Chérie, laisse-nous régler ça entre nous, tu veux bien ? Je te rejoins dans notre chambre dans deux minutes.
— Ouais, c'est ça, obéis-lui bien surtout, crache Hanse en voyant sa mère s'en aller sous les ordres de son mari.
— Ce tatouage, tu l'as payé avec mon argent, alors-
— Ton argent, ton argent ! T'as que ça à la bouche, putain ! s'énerve Hanse en voyant son beau-père avancer doucement dans sa direction. Vas-y, m'approche même pas !
— Tu t'énerves tout seul, Hanse, ça devient vraiment ridicule, poursuit calmement Woosung en fixant le tatouage d'Hanse. Franchement, c'est ça l'exemple que tu veux donner à Hanbi ? Fumer, répondre à tes parents et dépenser mon argent dans des tatouages stupides et inutiles ? Arrête un peu de tout faire pour décevoir ta mère.
Emporté par un mélange de colère et d'indignation, Hanse se dirige vers la porte et s'apprête à quitter la maison avant de se retourner et de faire face à Woosung.
— T'es qu'un putain de pervers narcissique manipulateur. T'as réussi à avoir ma mère, mais moi tu m'auras jamais, conclut Hanse avant de claquer la porte derrière lui.
Dans son élan de colère, Hanse part sans sa veste et ne réfléchit pas vraiment à ce qu'il est en train de faire. Mais au bout de quelques minutes de marche sous les lampadaires qui éclairent faiblement les trottoirs de la ville, il décide de sortir son téléphone portable de la poche de son pantalon et de rentrer une adresse dans son GPS.
Après plus de quarante minutes de marche et enfin arrivé à destination, il envoie un message à Seungsik.
En voyant Seungsik venir lui ouvrir la porte en pyjama, Hanse se rend subitement compte du ridicule de la situation.
— J'suis désolé, putain... J'aurais pas dû venir et t'embêter. J'suis sûr que t'étais sur le point de dormir en plus.
— J'allais bientôt dormir, oui, mais t'excuse pas, vas-y rentre. Tu dois être frigorifié, la nuit est tombée depuis un moment et t'es juste en t-shirt.
En acceptant d'entrer chez Seungsik, il sent la chaleur de l'appartement réchauffer ses bras peu à peu. Il suit alors son hôte sans un bruit jusqu'à sa chambre, avant de le voir fouiller dans son armoire.
— Tiens, enfile déjà ce gilet et explique-moi ce qui t'arrive.
— C'est rien de grave, j'me suis juste pris la tête encore une fois avec mon beau-père. Mais ce qui me gave, c'est de voir à quel point ma mère se soumet à lui... J'suis monté en pression comme un con et j'me suis barré. J'ai pas vraiment réfléchi, mais j'me suis souvenu du nom de l'arrêt de bus pas loin d'ici et j'ai noté l'adresse dans mon GPS.
— D'accord, j'comprends que tu sois parti après la dispute... Mais, pourquoi t'es pas allé au dortoir du lycée juste à côté de chez toi ? demande Seungsik d'une voix calme et rassurante. C'est le soir, il n'y a plus de bus, t'as dû marcher un long moment pour arriver ici.
— Oh... Ouais, c'est vrai. J'aurais peut-être dû aller au bahut. J'suis désolé, j'voulais pas t'embêter, j'ai pas vraiment réfléchi et-
— Hey, c'est vraiment pas un problème. Tout va bien, détends-toi, le coupe doucement Seungsik en souriant. Tu veux rester ici pour la nuit ?
— Euh, bah... Ouais, si ça t'ennuie pas trop ? Promis, je partirai demain matin avant que tes mères se réveillent.
Il observe alors Seungsik se lever doucement et retourner en direction de son armoire avant de revenir vers lui avec un sourire rassurant.
— Dans ce cas, c'est carrément un pyjama qu'il te faut. Enfile ça et je vais chercher un futon pour installer mon lit au sol.
— Nan, t'es fou. J'vais pas te laisser dormir au sol alors que t'es chez toi.
— Hanse, j'ai que mon petit lit... Alors, sauf si ça convient de dormir avec moi, j'vois pas d'autres options.
— Ouais... Ouais, ça me convient.
Alors que ses mots sont sortis tout seuls de sa bouche, Hanse se rend enfin compte qu'il est chez Seungsik, alors qu'il fait nuit, et qu'il s'apprête à partager son lit avec lui. Lorsqu'il attrape le pyjama de Seungsik afin de l'enfiler, il voit ce dernier détourner les yeux un instant en s'installant dans son lit. Au moment où il termine de s'habiller, il fait signe à Seungsik qu'il peut se retourner.
— Je prendrais pas beaucoup de place, c'est promis, murmure Hanse en rejoignant Seungsik sous les draps.
Enfin allongé, Hanse prend un instant pour réaliser ce qui est en train de se produire. Partager son lit avec quelqu'un est une grande première pour lui, alors pour essayer de calmer les pulsations de son cœur, il décide de discuter un peu avec Seungsik.
— Comment tu te sens ? J'veux dire, ton poignet, ça va mieux ou t'as encore mal ?
— J'ai presque plus aucune douleur, t'inquiète pas. Je m'inquiète plus pour mon moral que pour mon poignet.
— T'as envie d'en parler un peu ?
Installé le dos collé au mur, il profite de la lumière des lampadaires provenant de la rue qui éclairent la chambre, afin de regarder discrètement Seungsik. Ce dernier est allongé sur le dos et fixe le plafond sans bouger.
— Tu sais... Au sujet de Chan... J'ai peur que ce soit à cause de moi que ces rumeurs se sont répandues... Et peut-être aussi que tu ne devrais pas traîner autant avec moi, tu sais...
— N'importe quoi. J'vois pas pourquoi je devrais arrêter de traîner avec toi, juste parce que-
— Hanse, je suis gay, déclare doucement Seungsik, les yeux toujours fixés sur le plafond au-dessus de lui... J'ai peur que ça finisse par te causer des ennuis...
— Tu sais, je crois que je l'avais compris depuis un moment. Et pourtant, regarde, ça ne m'a pas empêché de venir ici ce soir.
— En fait, j'te dis ça... Mais j'en sais trop rien, j'ai jamais, tu sais... J'ai jamais rien fait avec personne... Enfin, si, j'ai été avec Haruna pendant un temps, mais même là, on s'est juste embrassés. Je crois que ça me rassurait de renvoyer une image d'hétéro. Mais au fond, je sais pas trop quoi en penser, parce que, ben... j'ai jamais vraiment vécu d'expériences... Enfin, bref, je suis désolé, je fais que parler.
— Seungsik, tu te souviens quand je t'ai parlé des avances de Serim, le soir de mon bad trip ?
— T'étais pas rentré dans les détails, mais oui, je me souviens.
— Ce jour-là, après avoir insisté pour que je goûte à sa drogue, il a posé sa main... Tu sais, juste-là... Et il a commencé à vraiment insister sur cette zone, avant de monter sur mes genoux, avoue péniblement Hanse, la voix tremblante d'émotions. En toute honnêteté, j'dois reconnaître qu'une part de moi était vraiment excité... Si je l'ai repoussé, c'est pas parce que c'est un mec, mais parce que c'est un putain d'enfoiré abusif... Enfin, du coup j'en sais trop rien, mais ça trotte pas mal dans ma tête ces derniers temps.
— Je vois... Au final, tu sais pas vraiment quoi en penser, c'est ça ?
— Ouais... J'dois avoir l'air d'un paumé, hein ?
— Tu sais, j'crois surtout qu'on a un âge où on se pose tous beaucoup de questions. Mais c'est bien d'en parler, ça permet parfois d'y voir plus clair. Merci de t'être confié, Hanse.
Hanse aperçoit alors, dans la pénombre de la pièce, le corps de Seungsik pivoté sur lui-même afin de lui faire face, en s'allongeant sur le côté. Alors qu'il distingue brièvement le visage de Seungsik à moitié enfoui dans son oreiller, une forte chaleur vient à nouveau s'emparer de son ventre et de ses joues.
Mais cette fois-ci, il ressent principalement une agréable sensation de sécurité et d'apaisement.
— Merci de me laisser squatter ici pour la nuit, Seungsik.
— De rien, dors bien.
À ces mots, Hanse ferme lentement les yeux, se laissant envelopper par une douce sensation d'apaisement qui l'entraîne doucement vers le sommeil. Avant de sombrer pour de bon, il sent la main de Seungsik venir se faufiler sous l'oreiller et frôler délicatement la sienne. Mais tandis qu'un agréable frisson parcourt son corps, Hanse décide de ne pas bouger d'un millimètre et de laisser la main de Seungsik collée à la sienne sous ses oreillers. Pour encore une minute, pour une heure, ou bien pour toute la nuit.
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