Chapitre 9
— C'est bien la première fois que Jedusor s'intéresse à une fille, petite veinarde, lui dit Emma. J'aimerais bien qu'il me dévore des yeux comme ça. Ou qu'il me dévore tout court !
— Tu veux que tous les garçons te dévorent, Emma, rigola Cindella. Tu es incorrigible !
— Mais regarde-moi toutes ces beautés ! C'est comme les gâteaux, j'aimerais tous les goûter.
— Même Broke ?
— Vous êtes vraiment mauvaise langue les filles, Broke est très gentil. Ce n'est pas mon style, mais c'est pas une raison de se moquer de lui, ronchonna Emma.
Ginny les laissa à leurs querelles, plongeant dans ses pensées. Elle sentait encore le poids du regard de Jedusor et cela la mettait grandement mal à l'aise. Qu'avait-il vu pour s'intéresser à elle de la sorte ? Qu'avait-il deviné ?
Sous les piapias de ses camarades, Ginny retourna en cours. Elle croisa Gerald, qui vint rapidement aux nouvelles avant de devoir rappeler à l'ordre un groupe de Troisième années qui se chamaillaient, et Drago qui lui lança un regard indéchiffrable.
— Je confirme, ton demi-frère est vraiment mon style de garçon, souffla Emma en souriant devant le regard noir que lui lança Ginny. On se met derrière pour ce cours-là ? Je déteste Défense contre les Forces du Mal.
— Mais moi, j'adore, s'exclama Ginny.
— Ah bon ? Tu connais ce cours ?
— Euh... Eh bien ma mère me... l'enseignait, oui, prononça la rousse en marmonnant.
Elle avait fait une erreur, parler de son passé. Les tremblements dans sa voix furent, heureusement, pris pour de l'émotion par Emma qui passa son bras autour de ses épaules.
— Bon d'accord, on se met au milieu, mais juste parce que c'est toi hein ! lui sourit son amie.
— Nous on va au fond, pas question de se rapprocher du professeur, déclarèrent les jumelles en même temps.
Ginny fronça les sourcils. Ce cours ne pouvait pas être si horrible, si ? Avec un peu de chance, Jedusor s'assiérait aussi au fond et elle n'aurait pas besoin de supporter sa vue. Malheureusement, Ginny se trompait bien sur son compte. Une fois installée avec Emma, attendant le professeur le grimoire ouvert à la page du sommaire, quelle ne fut pas sa surprise quand une voix retentit près d'elles.
— Bonjour Emma, susurra Jedusor. Et Ginerva, c'est bien ça ?
Ginny sentit son sang quitter son visage et une peur glacée s'insinua en elle. Elle aurait voulu se cacher loin ou s'écrouler en sanglots sous sa couette. Au lieu de quoi, elle planta son regard dans celui de son ennemi. Il semblait jeune, si jeune, et si sympathique. Tout en lui transpirait la sincérité, alors qu'elle savait parfaitement qu'il ouvrirait cette année-là la chambre des secrets, tuant Mimi Geignarde sans même s'en vouloir un seul instant.
— Ginny McNotting. Et tu es ?
— Tom Jedusor, préfet des Serpentards, enchanté.
La rouquine hocha la tête puis se détourna, comme si cela ne l'intéressait pas.
— Emma, aurais-tu l'amabilité de me laisser ta place s'il-te-plaît ? demanda-t-il alors.
Ginny, tourna la tête vers eux et vit le sourire charmeur de Jedusor. Elle sut avant même qu'Emma ne dise quoi que ce soit que cette dernière était sous le charme et lui céderait la place. Elle enfonça ses ongles dans sa paume et mordit ses lèvres pour ne pas hurler. Elle ne voulait pas de ce monstre à côté d'elle.
— Tu sembles en colère, constata Jedusor une fois installé confortablement.
— Je n'aime pas qu'on utilise mes amis pour obtenir ce que l'on souhaite. Et je n'aime pas qu'on m'impose sa présence.
— Quel caractère enflammé ! rigola-t-il.
Son rire était cristallin, pur, comme celui d'un enfant. Comment était-il possible qu'un être aussi vil semble si innocent ? Sa fossette tressaillit, et, une fois son rire calmé, Jedusor lui envoya un sourire éblouissant. Le même qu'elle avait aperçu dans son double, celui du journal, quand elle avait onze ans. Celui qui lui avait fait perdre pied, celui à qui elle avait fait confiance. Elle ne se laisserait plus avoir désormais. La rousse détourna le regard et attendit le professeur.
— A ta place, je n'attendrais pas autant de notre professeur. Elle est... Etrange. Fascinante, pour certains, mais monstrueuse pour la plupart, lui glissa le préfet des Serpentards.
— Je pensais m'être faite comprendre, renchérit Ginny. Je ne souhaite pas te parler.
— Aaaah... soupira Jedusor en mettant une main sur son front. Vous êtes étranges, les Macnotting ! Ton frère ne m'a pas adressé la parole et tremblait quand j'ai voulu m'approcher de lui, et toi tu ne me traites pas mieux qu'une bouse de dragon. Sans compter que vous apparaissez du jour au lendemain. Le mystère vous colle à la peau.
Si Ginny avait été capable d'utiliser le sortilège de mort, elle l'aurait sans doute fait à cet instant tant la haine la consumait. Elle prit quelques longues inspirations pour se calmer, avant de se tourner vers son ennemi. Il avait remarqué sa bouffée de colère et semblait sincèrement peiné. Mais elle savait qu'au fond, il ne ressentait rien.
— De un, ce n'est pas mon frère mais mon demi-frère. De deux, Jedusor, c'est quoi ton problème ? J'ai perdu ma mère, nous avons perdu notre foyer et nous devons nous adapter à Poudlard, et toi tu trouves ça étrange qu'on veuille pas te parler le premier jour ?
— Hum... Je vois... Désolé, je suis orphelin depuis ma naissance, j'ai du mal à saisir... L'attachement à un parent.
Il semblait sincère, si sincère que Ginny eut un instant pitié de lui. Heureusement, la professeure entra à ce moment-là, lui permettant de clôturer la conversation.
Les cheveux en pétard sous son chapeau de sorcière, les yeux tournoyant dans ses orbites comme si tout objet dans la pièce était un maléfice, et les vêtements débraillés, elle semblait complètement folle.
— Les loups-garous ! tonna-t-elle soudain, avant même d'atteindre son bureau. Ces misérables vermines, ces monstres tout droit sortis d'une malédiction puissante ! Non mes chers petits, personne n'a encore pu lever le sort de ces pauvres sorciers et humains transformés. Une morsure et POUF ! Vous êtes perdus à tout jamais, cédant à votre part bestiale ! Perdus, oui, PERDUS ! Votre ami se fait croquer ? Jamais plus, oh non, vous ne le reconnaitrez, faites votre deuil, c'est comme s'il était mort.
Coincée sur sa chaise, Ginny ne put s'empêcher de lever les yeux au ciel. Cette sorcière avait de la bouse de dragon à la place du cerveau, comment ses camarades pouvaient-ils en avoir peur ?
— VOUS ! cria-t-elle alors, en montrant de la baguette Ginny. Vous vous moquez de moi, n'est-ce pas ? 15 points en moins pour Poufsouffle ! Vous êtes nouvelle, mais personne, non, non, personne ne se moque de moi ! Ce que je vous apprends vous permet de rester en vie ! Vous m'êtes redevables, n'oubliez pas, je me chargerais de vous le rappeler. A moins que vous ne préfériez les loups-garous et leurs crocs!
Le professeur Galatea Têtenjoy se détourna d'elle et continua ses insanités en criant et gesticulant. Ginny ne moufta pas et resta calme, concentrée sur son souvenir de Rémus Lupin, de sa douceur et de sa malédiction. D'ailleurs, comment se faisait-il qu'ils les étudient ? Les loups-garous étaient au programme des troisième années, pas des quatrièmes années. La jeune sorcière parcourut son manuel avec un serrement au cœur. Il était moins fourni et plus vieux que celui qu'elle avait étudié dans le présent, mais traitait plus ou moins des mêmes sujets : les sortilèges impardonnables et les maléfices.
— Nous ne suivrons jamais le programme, tu sais ? lui chuchota Jedusor avec un sourire.
« Il semble si... Normal. » pensa un instant Ginny avant de se reprendre et de le foudroyer du regard. Il allait ouvrir la chambre des secrets cette année même. Elle ne pouvait se laisser abuser.
— Quel dommage ! J'aurais bien eu besoin d'un Impero pour te faire taire, dit-elle dans un grognement.
— Une poufsouffle véhémente, on aura tout vu, s'esclaffa-t-il doucement. Rassure-moi, tu n'es pas comme ça avec tous tes camarades, si ?
— Seulement avec ceux qui m'énervent.
Jedusor soupira et continua de parler innocemment jusqu'à la fin du cours, ce qui eut le don de mettre Ginny sur les nerfs. Il ne se taisait jamais, et apparaissait si sympathique qu'elle avait déjà du mal à croire qu'il deviendrait horrible. Non, rectification : qu'il était déjà devenu quelqu'un d'horrible.
La professeure Têtenjoy hurla une dernière obscénité puis, enfin, la fin du cours fut annoncé. La sorcière rousse ne salua pas le serpentard, qui pourtant semblait vouloir continuer de discuter, et sauta littéralement sur ses amies poufsouffles. Ces dernières pouffèrent de rire devant son expression, sauf Emma qui semblait très étonnée.
— On aurait dit que tu étais assise à côté d'un Magyar à Pointes ! s'exclama Cindella, proche du fou rire. Alors qu'on était tous effrayés par la professeure, toi tu semblais n'avoir en tête qu'un duel avec Jedusor !
— Qu'est-ce que j'aimerais échanger quelques sorts avec lui, murmura rêveusement Emma.
— Mais vous ne voyez pas à quel point il est faux ? s'énerva l'ancienne rouge et or. Il est tout mielleux, à vouloir qu'on se confie à lui. Je déteste ça !
— Jedusor, mielleux ? Il a toujours été sympathique pour un serpentard.
— Je comprends Ginny, intervint alors Joline en passant la main dans ses cheveux blonds. J'ai entendu dire qu'il avait menacé certains membres de sa maison. Et vous ne voyez pas ses amis ? On dirait plus des gardes du corps qu'autre chose.
Sa sœur lui lança un regard perplexe tandis qu'Emma continuait à avoir une expression rêveuse.
— Je suis sûre que si c'est vrai, il avait des bonnes raisons, dit la brune en souriant. Et puis, un côté sombre, c'est si sexy.
Les sœurs jumelles explosèrent de rire, avant de taquiner Emma sur son amour des beaux garçons. Ginny les regarda, un faux sourire étirant ses lèvres. Elle était inquiète du pouvoir de Jedusor sur ses camarades. Seule Joline semblait lucide. Soudain, coupant court à ses pensées, un frisson lui parcourut l'échine. Ginny se retourna et découvrit Tom qui la regardait. Il eut l'air étonné qu'elle l'ait pris en flagrant délit, mais lui envoya un sourire étincelant. Tremblante, Ginny se reconcentra sur ses amies. Avant l'étonnement qui avait peint le visage du futur Seigneur des Ténèbres, elle avait décelé un regard de prédateur. Et elle était sa proie.
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