Chapitre 1
Chapitre 1
- On ne peut pas arranger ça, Peter, lui dit Bruce, Professeur Hulk, ou quel que soit son nom maintenant, la douleur inscrite dans chaque trait de son visage.
- Comment ça, on ne peut pas l'arranger ? Comment vous pouvez dire ça ? Vous venez juste de me dire qu'on savait voyager dans le temps, maintenant ! Pourquoi on ne pourrait pas s'en servir pour tout arranger ? cria-t-il presque à l'autre homme.
- Fiston, il faut que tu essaies de te calmer, dit Captain America.
- Me calmer ? claqua-t-il. Vous voulez que je me calme ? Mr. Stark est – est...
L'émotion l'empêcha de continuer quand son souffle se coupa. Il ne pouvait même pas dire le mot. Ne pouvait pas penser à ce qui s'était passé quelques heures plus tôt. Mais en même temps, il n'arrivait pas non plus à chasser de son esprit le regard vacillant de Mr. Stark.
Il lança un regard autour de la seule pièce du Complexe que la bataille avait épargnée, cherchant de l'aide, mais tous les Avengers baissèrent la tête. Aucun d'eux ne voulait croiser son regard.
- S'il-vous-plait.
Il changea de tactique, pas vraiment fier de supplier.
- S'il-vous-plait. Il-il faut... il faut qu'on fasse quelque chose. Il faut qu'on le ramène !
- Il est parti, petit, dit doucement l'homme que Peter reconnut comme étant Hawkeye.
Peter secoua la tête presque violemment. Il refusait d'accepter ça.
- Il-il ne peut pas être parti. On peut voyager dans le temps ! On peut revenir en arrière. On peut le sauver, implora-t-il.
Ça semblait être une solution évidente. Alors pourquoi ne le faisaient-ils pas ? Pourquoi attendaient-ils ? Pourquoi personne ne voulait le regarder ?
Personne ne dit rien. Pas même le Professeur Hulk.
- Pourquoi personne ne m'écoute ? s'écria-t-il et il donna un coup dans les béchers en verre alignés sur la table devant lui.
Il se brisèrent en une cacophonie de bruits sur le sol. Cela n'apaisa pas sa frustration, mais la destruction satisfaisait quelque chose d'autre en lui.
- Whoa, dit Antman en haussant les sourcils.
- Mon Dieu, petit, dit Hawkeye en faisant un pas dans sa direction.
- On t'écoute, Peter, dit Captain America, en essayant de le calmer.
Et quand Hawkeye s'arrêta, le Captain traversa la pièce sans hésitation jusqu'à se retrouver directement devant lui.
Peter refusa de reculer, il croisa le regard de l'homme sans flancher en laissant exploser sa colère.
- Non, vous n'écoutez pas, accusa-t-il.
Captain America leva les mains et agrippa ses épaules avec un petit soupir, l'épuisement inscrit dans chacun de ses traits. Ils étaient tous épuisés. Et blessés. Et tous dans le même état de choc. Tout comme Peter. En l'espace d'une après-midi, il avait apparemment perdu les cinq dernières années de sa vie avec son mentor.
- Si, on t'écoute, répéta l'homme. Mais il n'y a... rien qu'on puisse faire.
- On peut retourner dans le temps, dit Peter avec désespoir.
Pourquoi personne ne comprenait ce qu'il disait ?
- On pourrait, acquiesça solennellement Captain America, et puis il continua lentement et précautionneusement, comme s'il était un enfant. Mais ça ne changerait rien. Tu comprends ? On ne peut pas changer le passé. C'est fini.
Peter fronça les sourcils. Avec tout ce qui s'était passé depuis que Thanos et son armée avaient été réduits en poussières, et Tony... personne n'avait pris la peine de lui expliquer comment ils les avaient ramenés. Il avait seulement entendu une brève explication à propos du voyage dans le temps pour ramener les pierres d'Infinité du passé, pour pouvoir claquer des doigts et les ramener dans le présent.
- Mais vous... vous êtes retournés dans le passé pour ramener les pierres et nous faire revenir, essaya d'expliquer Peter, alors qu'il essayait de comprendre. Pourquoi on ne peut pas retourner en arrière et le sauver ? On pourrait retourner dans le passé et faire en sorte que Thanos ne vienne jamais sur Terre en premier lieu. Et alors Mr. Stark n'aurait même jamais eu besoin de claquer des doigts.
- C'est compliqué, dit Cap avec une grimace.
La colère de Peter grandit. Il repoussa sèchement les mains de Captain America et fit un pas en arrière.
- Ne faites pas ça ! Ne me dites pas que c'est compliqué en espérant que je vais simplement l'accepter ! Je suis pas un gamin !
- Steve a raison, intervint le Professeur Hulk. Ce n'est pas comme ça que fonctionne le voyage dans le temps. On ne peut pas remonter dans le temps et changer quelque chose dans la chronologie. Tout ce qui s'est passé demeure dans le passé. C'est immuable. Tout ce qu'on change dans le passé crée juste une nouvelle réalité alternative. Alors même si, de quelque manière que ce soit, on trouvait comment remonter le temps et sauver Tony, quand on reviendrait ici, dans notre temps présent actuel... rien n'aurait changé. Tony existerait de nouveau, mais dans une réalité alternative. Pas dans celle-ci. Pas dans la nôtre.
Peter sentit le sang déserter son visage. Non.
- Il doit y avoir un autre moyen, dit-il en regardant de nouveau Steve avec un air suppliant.
- Il n'y en a pas. Il est parti, lui répondit Captain America sans ménagement, mais Peter put voir combien les mots le blessaient.
- Alors... alors quoi ? C'est juste... comme ça ?
Peter pouvait entendre l'hystérie dans sa voix, mais il ne s'en soucia pas.
- Après tout ce qu'il a fait, après qu'il ait sauvé tout le monde, après qu'il nous ait sauvés, vous n'allez même pas essayer ?
Steve le regarda tristement. Aucun des Avengers ne dit rien. Leur silence était une réponse suffisante.
- Non, murmura-t-il, sa voix se brisant et ses yeux se remplissant de larmes.
Pour la première fois, il se rendit compte qu'il était entouré d'étrangers. Il ne connaissait aucun des Avengers à part Rhodey. Et il n'était pas là. Il était avec Pepper, avec... avec Mr. Stark... Il n'avait aucun soutien vers qui se tourner.
Peter secoua la tête alors que son visage se tordait de désespoir.
- C'est pas juste, réussit-t-il à dire en dépit de sa gorge horriblement serrée.
Les larmes roulaient sur ses joues et il sentit le goût du sel quand certaines d'entre elles s'écrasèrent à la commissure de ses lèvres.
- Je sais, acquiesça doucement Steve. Ce n'est pas juste.
Oh mon Dieu. Mr. Stark était vraiment parti. Il était mort. Des dizaines d'années bien avant son heure. L'esprit le plus brillant et le plus novateur de leur temps, éteint.
Peter fit de nouveau un pas tremblant en arrière, et il serait tombé si Steve ne s'était pas penché vers lui et n'avait pas attrapé son bras pour le stabiliser.
Plus il essayait de contenir sa douleur, plus cela manquait de la faire éclater. Il laissa échapper de courtes respirations. Il ne reverrait plus jamais Mr. Stark. Ne lui parlerait plus jamais. Ne rirait plus avec lui. Ne travaillerait plus au labo avec lui.
Il ne pouvait plus respirer.
- Je sais, dit doucement Captain America, comme s'il essayait de le réconforter, mais Peter ne parvint pas à déchiffrer l'expression de l'homme à travers ses larmes.
Un sanglot brisé éclata finalement dans sa poitrine et il se pencha vers l'avant, comme si le poids de son chagrin allait le faire s'effondrer. Il faillit heurter le sol jonché de verre brisé, mais Steve resserra sa prise sur lui et l'attira contre sa poitrine. Peter ne s'était pas attendu à ça.
Il considéra le fait de s'éloigner, parce qu'une part de lui était toujours en colère, mais une autre part, plus importante, était tellement douloureuse qu'il avait l'impression qu'un énorme trou noir avait déchiré sa poitrine. Il avait besoin de réconfort, mais si ça venait de quelqu'un qui lui était presque étranger. Il enroula ses bras autour de l'homme et le serra désespérément, comme s'il était la seule chose qui le retenait sur terre.
- Je sais, répéta-t-il dans un murmure.
Peter perdit le peu de contrôle qui lui restait et sanglota contre la poitrine de Captain America.
*
Au cours de sa crise de larmes dans les bras de l'homme, le reste des Avengers était parti pour leur laisser un semblant d'intimité. Il n'avait aucune idée de combien de temps il avait pleuré, mais ça lui avait semblé long.
A un moment donné, Steve les avait assis par terre. L'homme resta avec lui jusqu'à ce que Peter se calme assez pour lui dire qu'il pouvait partir. Qu'il allait bien. Même si c'était un mensonge. Mais il ne voulait pas que Captain America se sente obligé de s'occuper de lui alors qu'il avait probablement un million d'autres choses à faire. Steve fut réticent à partir, mais il finit par abandonner face à l'insistance de Peter, probablement parce qu'il pensait que Peter voulait être seul.
Une fois que Steve partit, Peter décida qu'il ne pouvait pas rester dans cette petite pièce. C'était trop étouffant. Il ne pouvait pas respirer ici. Alors il s'enfuit à l'extérieur. Au milieu des décombres et du carnage. La vue de toute cette destruction était presque réconfortante. Cela apaisa quelque chose en lui de se confronter à quelque chose qui reflétait exactement la dévastation qu'il ressentait dans son âme.
Parce que Mr. Stark était parti.
Même si Peter l'avait vu de ses propres yeux, il ne pouvait toujours pas le croire.
Tony avait toujours semblé au-delà de la vie elle-même. Invincible.
Peter avait pensé que l'homme serait toujours là. Au cours de ces dernières années, Mr. Stark était devenu un pilier de force et de soutien pour lui. Il était passé de mentor pour superhéros pour Spider-Man à une figure d'accompagnement pour Peter Parker, puis à quelque chose d'encore plus fort. Quelque chose avec plus de potentiel. Quelque chose sur laquelle Peter avait eu peur de mettre un nom, parce qu'il avait eu peur que ça lui porte malheur. Mais ça n'avait plus d'importance maintenant. Parce que maintenant, il n'était plus là.
Il n'y aurait plus de jours de labo, ou de week-ends au Complexe. Il ne se battrait plus aux côtés d'Iron Man. Tony avait sauvé le monde, l'univers, même. Mais il avait donné sa vie pour le faire. Peter savait qu'il aurait dû être fier, qu'il aurait dû être heureux qu'ils aient vaincu Thanos, mais tout ce qu'il sentait était la perte. C'était égoïste, et il savait que personne d'autre ne serait d'accord, mais il ne pensait pas que le fait de perdre Tony valait ce qu'il leur avait offert en partant. Pas alors que Peter avait l'impression que son monde s'était écroulé.
Des larmes silencieuses roulèrent sur ses joues.
Pourquoi personne d'autre n'avait claqué des doigts ? Pourquoi ça avait dû être lui ?
La mort de Mr. Stark avait laissé derrière lui une plaie béante, un nerf à vif. Ça faisait mal. Il ne pouvait pas le supporter, alors il se ferma. Il s'éteignit. Il se força à arrêter de penser, à arrêter de ressentir, à tout arrêter.
Il regarda fixement l'horizon. Le temps passa mais il ne s'en rendit pas compte. Il resta assis si longtemps que son corps devint engourdi. Mais il ne le sentit pas. Il ne sentait rien. Peut-être qu'ils l'oublieraient tous et qu'il resterait assis sur ce rocher pour toujours.
- Peter.
Peter cligna des yeux et il vit Dr. Strange debout devant lui. Il continua à regarder à travers lui, pas encore prêt à retourner à cette nouvelle version de la réalité.
Dr. Strange fronça les sourcils et releva son menton avec ses doigts pour le forcer à le regarder dans les yeux. Peter croisa son regard soucieux.
- Il y a quelqu'un qui veut te voir, lui dit-il.
Peter cligna de nouveau des yeux mais ne répondit pas. Il ne demanda pas qui c'était. Il s'en fichait.
- Viens, le pressa Dr. Strange, agrippant son épaule et l'attirant vers lui.
Il ne résista pas. Il laissa l'homme l'éloigner du rocher et le ramener vers le Complexe.
Ils marchèrent à travers les débris, jusqu'à un morceau de pelouse intact. Les Avengers, aux côtés de nombreuses autres personnes que Peter ne reconnaissait pas, mais qui avaient participé aux combats, flânaient ici, dispersés en plusieurs petits groupes, discutant avec les uns et les autres.
Les yeux de Peter trouvèrent Steve. Sam se tenait près de lui, mais Steve parlait à une femme qui était dos à Peter. Elle portait des vêtements civils et il ne se rappelait pas l'avoir vu durant le combat, mais l'arrière de sa tête lui semblait étrangement familier.
Steve le remarqua et lui fit un petit sourire. Il dit quelque chose à la femme à qui il parlait et le pointa du doigt.
Peter fronça les sourcils.
La femme se retourna et Peter prit une brusque inspiration. May. C'était May. Ses yeux s'écarquillèrent quand elle le vit. Et puis elle courut dans sa direction. Elle s'arrêta en arrivant devant lui, agrippa ses épaules et le regarda, de haut en bas.
- Oh mon Dieu, murmura-t-elle, et la seconde suivante, elle le serra douloureusement contre elle. Tu es là. Tu es vraiment là.
Cela lui prit un long moment assez embarrassant pour comprendre et enrouler ses bras autour d'elle pour l'enlacer. Pour lui, peu de temps était passé depuis qu'il l'avait vue pour la dernière fois. Il s'était levé, avait pris son petit-déjeuner avec elle, était parti pour sa sorti scolaire au Musée, qui avait été interrompu par un voyage dans l'espace avec Mr. Stark et Dr. Strange, où il avait combattu Thanos et apparemment disparu. Quand il était revenu sur Titan avec Dr. Strange et les Gardiens de la Galaxie, il avait eu l'impression d'avoir seulement cligné des yeux. Comme si rien ne s'était passé entre temps. Comme si c'était le même jour et qu'il avait vu May seulement ce matin. Mais apparemment, il avait disparu pendant cinq ans. Il n'avait pas vraiment eu le temps d'y penser avant que Dr. Strange ne les téléporte sur Terre depuis Titan pour plonger dans une autre bataille contre Thanos et son armée. Peter n'arrivait pas à assimiler tout ce qui s'était passé encore.
May le tenait toujours. Elle pleurait.
- Je suis désolé, marmonna-t-il.
Et il l'était. Il était désolé de l'avoir laissée. Désolé de ne pas ressentir le même sentiment de soulagement qu'elle. Désolé de ne pas avoir le courage d'être heureux de la voir.
- Ce n'est pas ta faute, dit-elle en s'écartant de lui pour prendre son visage entre ses mains. Je suis juste heureuse que tu sois de retour, bébé. Tu m'as tellement manqué.
Il ne pouvait même pas dire qu'elle lui avait manqué aussi. Peu de temps s'était écoulé pour lui. Ce n'était évidemment pas le cas pour elle. Son visage semblait plus vieux, plus marqué, et elle avait quelques mèches grises dans les cheveux.
Elle attira son visage vers le sien et embrassa son front à plusieurs reprises avant de le prendre de nouveau dans ses bras.
- Je pensais que je ne te reverrais plus jamais. Je t'aime. Je t'aime tellement, lui dit-elle.
- Je t'aime aussi.
Il arrivait au moins à lui dire ça en retour.
Elle le tint contre lui pendant un petit moment encore avant de prendre une profonde inspiration et de s'écarter. Elle essuya son visage et lui fit un sourire triste.
- Pardon, s'excusa-t-elle de pleurer. Je n'arrive toujours pas à y croire. J'ai l'impression de rêver.
Peter comprenait, sauf que lui avait l'impression que c'était un cauchemar.
- Tu es là, dit-elle en posant une main sur sa joue, la caressant avec son pouce. Tu es vraiment là. Tu vas bien.
Elle fronça les sourcils.
- Tu vas bien, pas vrai ? Tu n'es pas blessé ?
Il secoua la tête, délogeant sa main. Il avait été frappé durant le combat, mais il n'était pas sérieusement blessé.
- Bien. C'est bien, souffla-t-elle en jetant un œil autour d'elle. Je m'inquiète juste. Enfin... cet endroit est complètement dévasté.
- Ouais, acquiesça-t-il. Mais on a gagné.
- Je sais, sourit-elle.
Elle essaya de le prendre de nouveau dans ses bras mais il fit un pas en arrière. Elle fronça les sourcils, ayant l'air perplexe et un peu blessée.
- On a gagné, mais...
Il déglutit difficilement et essaya d'expliquer.
- Mr. Stark...
Il ne pouvait pas le dire. Il n'en avait pas besoin. L'expression de May était significative. Elle savait déjà.
- Oh, chéri. Je-je sais. J'ai entendu ça, murmura-t-elle.
Le visage de Peter se fissura. Elle s'approcha de lui de nouveau, et cette fois il la laissa faire. Elle le serra fort contre elle et le barrage qu'il avait construit pour contenir ses émotions explosa. Il se mit à sangloter incontrôlablement dans ses bras.
- Il-il est parti, dit-il entre deux sanglots.
- Je sais, mais il t'a sauvé, répondit doucement May, et elle embrassa sa tempe. Il a sauvé tout le monde. C'est... c'est comme ça qu'il voulait partir.
Peter pleura seulement plus fort. Parce qu'il ne voulait pas que Mr. Stark s'en aille. Il voulait que l'homme soit ici avec lui. Une partie traitresse de lui-même voulait que ce soit Mr. Stark qui le serre dans ses bras en ce moment au lieu de May. Qu'il l'enlace pour célébrer leur victoire, plutôt que pour se lamenter d'une perte aussi insondable.
Ça ne valait pas le coup. Il n'en valait pas le coup. La moitié de l'univers n'en valait pas le coup. Pas si ça impliquait de perdre Tony Stark.
- Ça va aller, bébé. Ça va aller. Je suis là. Je suis là avec toi, murmura May, essayant de le rassurer.
Et il savait qu'elle était avec lui. Qu'elle serait toujours là pour lui. Et quelques temps plus tôt, ça aurait suffi.
Le souvenir du visage riant de Mr. Stark apparut soudainement dans ses pensées. Il ferma les yeux.
Ce n'était plus suffisant.
*
Le trajet en voiture jusqu'à la maison fut silencieux, et tout du long, Peter n'avait cessé de surprendre May en train de le regarder comme s'il était un spectre qui allait disparaitre. Il se rendit compte que son absence avait été insupportablement douloureuse pour elle, mais il ne savait pas quoi faire à propos de ça.
L'appartement n'était pas le même qu'avant. May avait déménagé après « l'Eclipse », comme tout le monde l'appelait, dans un appartement avec une seule chambre. Au moins, c'était toujours dans le Queens. Peter ne savait pas comment il aurait pu le supporter si ça n'avait pas été le cas. Pour lui, tout avait été complètement normal quand il était parti ce matin-là pour aller à l'école, et maintenant il vivait dans un appartement différent et Mr. Stark était –
Il secoua la tête et se reconcentra sur le nouvel appartement autour de lui. La configuration des pièces était similaire à l'ancien appartement, mais la cuisine était plus grande, tout comme la pièce à vivre.
- Je vais aller te chercher quelque chose à boire, lui dit May.
Dieu merci pour May. Si quelque chose lui était arrivé pendant qu'il avait disparu et qu'il était revenu dans un monde sans elle, sans elle ni Mr. Stark, il pensait qu'il n'aurait pas survécu. Il survivait à peine déjà.
- Merci, marmonna-t-il en réponse, mais quand il se retourna, elle était déjà dans la cuisine, sortant des verres du placard et il était toujours debout devant la porte d'entrée.
Il cligna des yeux. Étrangement, le monde autour de lui semblait tourner au ralenti, comme s'il essayait de marcher et de parler et d'exister dans une atmosphère faite de mélasse.
Il fit un pas en avant, puis un autre, même si le premier avait été difficile. Il cligna de nouveau des yeux et, soudainement, il se tenait debout dans le salon. Au moins le mobilier était toujours le même, mais tout le reste était différent. May avait une nouvelle télévision et une couverture qu'il n'avait jamais vue auparavant. Et il y avait une plante sur la petite table près de la fenêtre, mais depuis qu'il la connaissait, May n'avait pourtant jamais été capable de garder une plante en vie. Le mobilier était agencé différemment de ce qu'il avait l'habitude. Et toutes les décorations étaient différentes. Notamment les photos. A la place des livres, les étagères étaient remplies de cadres photos. La plupart de lui.
L'une d'elles attira son attention et son souffle se coupa. Il prit le cadre dans ses mains et l'examina de plus près. C'était l'une de ses photos préférées de lui et Mr. Stark. Ms. Potts l'avait prise. Ils étaient ensemble dans l'atelier, Mr. Stark assis dans sa chaise de bureau, les bras croisés, avec un sourire amusé sur son visage alors qu'il écoutait Peter, qui était perché sur le bureau devant lui, alors qu'il lui parlait en gesticulant de façon animée avec ses bras. Peter ne se souvenait même pas de quoi il lui avait parlé. Il regarda Mr. Stark de plus près sur la photo. Il portait un t-shirt Black Sabbath et un jean sombre, et observait Peter comme s'il lui avait décroché la lune.
Mr. Stark ne le regarderait plus jamais comme ça. La douleur le frappa durement. Il reposa la photo et se frotta les yeux. Mon Dieu. Il ne pouvait pas pleurer de nouveau. Il avait l'impression de n'avoir fait que ça au cours des dernières heures. Il réussit à se reprendre.
- Tu vas bien, bébé ? demanda May en se rapprochant de lui.
Elle plaça une main réconfortante sur son épaule et posa le verre d'eau sur l'étagère, juste à côté de la photo qu'il regardait.
Il haussa les épaules. Il ne pensait pas pouvoir parler et n'avait pas le courage de mentir. Parce qu'il n'allait pas bien. Il ne pensait pas qu'il irait bien de nouveau. Il se demanda quel terrible crime il avait dû commettre dans une vie antérieure qui avait eu pour conséquence que toutes les figures masculines importantes de sa vie lui étaient arrachées.
- Tu sais, tu lui manquais, dit May.
Peter prit une inspiration douloureuse. Il tourna un regard interrogateur dans sa direction, toujours pas prêt à parler.
May lui fit un petit sourire triste.
- Quand tu n'étais pas là, il avait l'habitude de m'appeler, parfois au milieu de la nuit, et on parlait de toi. On se racontait des histoires à l'un et l'autre. J'en avais plus que lui, mais il en avait toujours de très bonnes. Tu ne m'as jamais raconté cette fois où tu t'es retrouvé emmêlé dans tes propres toiles et t'es retrouvé la tête à l'envers au sommet d'un building, et où il a dû venir te délivrer.
- Il t'a raconté ça ?
La question s'échappa de ses lèvres avec surprise. Bravo pour le Code des Superhéros. Apparemment, ça ne s'étendait pas après la mort.
- On s'est dit beaucoup de choses, lui dit May et elle posa une main sur sa joue. Il t'aimait.
- Il t'a dit ça ? demanda Peter.
Aussi proche qu'il fût devenu de Mr. Stark après qu'il ait refusé son offre de devenir un Avenger, son mentor n'avait jamais très ouvert quand il s'agissait de formuler ses émotions. Mais pour être honnête, Peter non plus.
May lui sourit tristement en lui répondant.
- Il n'en a pas eu besoin, chéri. C'était évident.
Peter regarda ailleurs. Il ne pouvait supporter la force de son regard. Il pouvait à peine supporter la vérité des mots.
- Je ne sais pas si je peux le faire, admit-il.
May l'attira contre elle. Il n'avait même pas réalisé qu'il s'était remis à pleurer.
- Je sais que ça fait mal, bébé, mais on traversera ça ensemble, ok ? murmura May dans ses cheveux.
Il secoua la tête.
- Je peux pas faire ça de nouveau.
Il ne savait pas comment survivre à ça. Comment faire face à une perte brutale de nouveau. C'était comme avec ses parents et Ben, sauf que cette fois c'était Mr. Stark.
May s'écarta et plongea son regard dans le sien avec sérieux.
- Si tu peux. Tu es fort. Tu es la personne la plus forte que je connaisse. Tu peux le faire.
Peter ferma les yeux et se laissa aller dans ses bras. Il voulait la croire. Il voulait croire que ça irait bien. Que la douleur s'atténuerait avec le temps, qu'un jour il se réveillerait et qu'il serait capable d'être lui-même à nouveau, d'être heureux à nouveau, mais il ne pensait pas que ce serait le cas.
Il avait traversé tellement de choses, mais ça... ça, c'était la chose de trop. Il pouvait le sentir avec une certitude douloureuse. Ça l'avait brisé d'une façon irréparable. Cette dernière perte était insurmontable. Et il le savait. Mais May ne le savait pas, alors il la laissa le tenir contre elle et essayer de le réconforter parce que peut-être qu'au moins, ça le ferait se sentir mieux.
Il savait qu'il n'y avait plus rien au monde qui le ferait se sentir mieux, lui.
*
Cette nuit-là, Peter était allongé sur le canapé et regardait par la fenêtre. Le problème avec le fait qu'il n'y ait qu'une chambre dans l'appartement, c'était qu'il n'y avait aussi qu'un lit. May allait commencer à chercher un nouvel appartement le lendemain, mais pour le moment, ils devaient faire avec ce qu'ils avaient. Elle avait essayé de le convaincre de dormir dans le lit ou de le partager avec elle, mais il avait refusé. Ce n'était pas comme s'il allait vraiment dormir, de toute façon, même s'il n'allait pas lui dire ça.
Il ne pouvait pas arrêter de rejouer les actions qui s'étaient déroulées durant le combat, encore, et encore. Pourquoi n'avait-il pas été plus près de Mr. Stark quand il l'avait aidé à se relever ? L'homme l'avait pris dans ses bras. C'était la première fois qu'ils faisaient ça. S'il avait su à ce moment-là que ce serait aussi la dernière fois, Peter ne l'aurait jamais laissé partir.
Un sanglot déchirant se bloqua dans sa gorge. Il porta une main à sa bouche pour essayer de l'étouffer. Il ne voulait pas réveiller May à deux heures du matin après qu'elle ait passé la journée à s'occuper de lui. Il se rendait compte qu'elle avait traversé beaucoup de choses, elle aussi. La résurrection miraculeuse de son neveu et la mort de Mr. Stark, un homme duquel elle était apparemment devenue proche, qui était devenu son ami pendant que Peter avait disparu.
Il aurait pu faire plus. Il renifla et s'étrangla avec la douleur qui lui brûlait la gorge. Il aurait dû faire plus. Il avait eu le gantelet dans sa main pendant un moment. Il aurait dû être celui qui claquait des doigts. Mais en même temps, il n'avait pas pensé à utiliser le gantelet. Tout ce à quoi il avait pensé, c'était qu'il fallait qu'il l'éloigne de Thanos.
S'il avait su ce qu'il savait maintenant, il aurait claqué des doigts. Sans la moindre hésitation. Pour sauver Mr. Stark. Avec ses pouvoirs de guérison, peut-être qu'il aurait survécu.
Et si non, tant pis.
Au moins, il n'aurait pas eu à vivre avec le souvenir des yeux vides de Mr. Stark qui lui brûlait les rétines.
Et il avait déjà disparu pendant cinq ans. May était déjà allée de l'avant. S'il avait claqué des doigts et en était mort, alors au lieu de revenir avec ceux qui avaient été éclipsés, il serait juste resté disparu. Ça n'aurait pas été une nouvelle perte, et ça aurait valu le coup si ça impliquait que Mr. Stark puisse continuer à vivre. Qu'était sa vie en comparaison de celle de Mr. Stark ? il n'y avait pas doute possible.
Mais au lieu de ça, Mr. Stark avait claqué des doigts. Il avait sauvé tout le monde. Et en avait payé le prix ultime. Et maintenant Peter allait devoir vivre dans un monde sans lui. Pourquoi cela semblait-il tellement inconcevable ? Tellement impossible ?
Ils avaient gagné mais Mr. Stark avait disparu. Il était parti. Parti pour toujours.
Peter haleta et se retourna, pressant son visage contre le siège du canapé. Secoué par de violents sanglots.
Si c'était ça, gagner, pourquoi se sentait-il comme s'il avait perdu ?
*
Note de l'auteur : alors... j'ai vu Endgame. J'ai passé la semaine dans un brouillard dépressif à essayer d'assimiler tout ça, et j'ai décidé que non. Non. Je vais pas faire ça. Je vais pas accepter ça. Je refuse. Alors j'ai passé les deux dernières semaines à écrire ça pour essayer de réparer l'incroyable bordel que les frères Russo ont décidé de laisser derrière eux. Juste pour vous prévenir, ce sera de pire en pire et puis ça ira mieux, mais je vous promets que ça ira vraiment mieux !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top