|-Chapitre 52-|
_.Chapitre 52._
Je m'étire dans mon lit et finis par m'affaler sur mon matelas à nouveau.
Une nouvelle semaine de cours commence et j'espère qu'elle sera calme pour une fois.
Je sors de mon lit et me précipite dans la salle de bain pour enfiler l'horrible uniforme qui me sert de vêtements puis ressort pour mettre mon sac sur mon dos et sortir de ma chambre.
Je me faufile parmi la horde d'élèves qui marche en se frottant les yeux et en ruminant dans leurs barbes qu'ils détestent les lundis.
Je baisse mon regard sur ma tenue qui ne change jamais, cette ridicule jupe et ses chaussures cirées pour nous rappeler de quelle classe sociale nous sommes.
Pourquoi doit-on toujours porter quelque chose pour prouver notre supposée supériorité ?
Le Wesley Game a été inventé pour creuser un fossé plus profond entre les « riches » et les « autres », pour diviser la société en deux parties distinctes et c'est cette division que j'ai toujours détesté.
Malgré cela je ne me plaindrai pas sur le fait d'avoir de l'argent, ce serait juste hypocrite et je ne veux pas me voiler la face en disant que je pourrais me passer de cet argent.
Faire partie de la Wesley School m'a vraiment ouvert les yeux, en dépit de ses airs supérieurs et intouchable, les élèves friqués sont pareils que le reste de la population. Je trouve que cette école ne fait qu'accentuer nos points faibles et d'une certaine manière cela peut nous être bénéfique.
Mais je n'ai jamais été aussi confuse dans mon esprit que je ne le suis maintenant.
Je n'ai pas reparlé avec Grant depuis son étrange réaction de Samedi mais j'espère que cela n'a pas jeté un froid entre nous, je ne pense pas que je supporterai une énième dispute ridiculement inutile.
Lorsque j'aperçois Phil qui pianote sur son téléphone en mâchant un chewing-gum attablé avec son meilleur acolyte Dustin, je ne réfléchis pas plus et je les rejoins rapidement.
Dès qu'ils me voient, ils me saluent directement et Phil me propose un chewing-gum que je refuse.
J'ai vraiment l'impression que les jours passent au ralenti depuis que je suis arrivée dans cette école.
— Encore une nouvelle semaine, soupire Dustin en frottant son visage encore endormi avec sa main.
— J'ai hâte de pouvoir rentrer, ajoutais-je.
— Encore faut-il qu'il nous autorise à rentrer chez nous, se plaint Dustin.
— Ils ne vont pas nous laisser rentrer pour les vacances, intervient Phil en soupirant.
Nous nous tournons vers lui.
— Comment tu sais ? Lui demandais-je.
— C'est Grant qui me l'a dit, me répond-il.
Je hoche la tête, une étrange sensation dans mon ventre se formant à l'entente de son nom.
— Vous pensez qu'ils ont prévu quelque chose de pire que la sortie en forêt ? Nous demande Dustin en se remémorant de mauvais souvenir.
Je ne l'ai même pas croisé durant cette dure journée, nous avions pensé qu'il lui était arrivé quelque chose et heureusement c'était plus de peur que de mal.
— Je ne vois pas ce qui pourrait être pire, rétorque Phil en secouant la tête.
— Ils sont très créatifs, dis-je en me rappelant de l'ingéniosité dont a fait preuve la directrice pour me torturer.
Les talons de la directrice résonnent dans la pièce et le brouhaha cesse immédiatement lorsqu'elle prend le micro en main.
— Bonjour à tous, bienvenue pour une nouvelle semaine, vous avez sûrement tous appris la mauvaise nouvelle. Nous avons effectivement perdu un membre de cette magnifique équipe qui vous accompagne depuis le début de l'année pour vous aider. C'était une personne chérit de tous, qui ne faisait de mal à personne et qui restera pour nous tous un exemple. Comme vous devez tous le deviner, nous avons énormément de choses à traiter, vous avez donc quartier libre, nous dit-elle d'une voix funeste sans réellement le penser.
Je jette un coup d'œil autour de moi pour remarquer que tout le monde est secoué par la nouvelle. Personne ne sait de qui elle parlait.
— De quoi parle-t-elle ! M'exclamais-je en lançant un regard paniqué à mes deux amis.
Ils haussent les épaules aussi perdus que moi.
Je me redresse et enjambe le banc sur lequel j'étais assise pour attraper ensuite mon sac et le mettre sur mon dos.
Je jette des coups d'œil un peu partout pour tenter de comprendre ce qu'il se passe mais seuls des visages pétrifiés et des murmures m'irritant les tympans me parviennent.
— On a qu'à demander à Grant, suggère Phil.
Je me tourne vers lui et en une fraction de seconde j'ai l'impression de voir mon monde s'effondrer.
Je vois l'éclat des yeux de Phil s'évaporer pour ne laisser qu'un simple visage livide.
Il pense à la même chose que moi.
Je secoue la tête et déglutis avant de me précipiter vers Phil pour lui attraper le bras et le tirer vers moi.
— On va le trouver et lui demander ce qu'il se passe, ok ? Dis-je d'un air convaincu.
Mon esprit ne veut pas mettre de mots sur les pensées qui m'accablent.
C'est tout simplement impossible, il n'a juste pas le droit de nous abandonner, de m'abandonner.
Je pourrais supporter n'importe quelles disputes à la seule et simple condition que je puisse le voir en vie.
Il doit être en vie.
Je tire le bras de Phil vers moi et me faufile à travers la foule d'élèves qui tente tant bien que mal de trouver une réponse à la question que nous nous posons tous.
Je traverse le couloir et me dirige à contrecœur vers le hall. C'est la seule personne qui puisse nous aider à mettre les choses au clair.
Lorsque je l'aperçois en train de trier des feuilles, je prends mon courage à deux mains et lâche le bras de Phil pour me diriger d'un pas décidé vers elle.
Je m'arrête à quelques mètres de son bureau et me racle la gorge pour attirer ton attention.
— Quoi ? me demande-t-elle en tentant de cacher l'agacement qu'elle éprouve.
— J'aimerai savoir si tu sais où est Grant, lui demandais-je.
Elle relève directement sa tête et me fusille du regard lorsque je prononce le prénom de son petit ami.
— Et pourquoi je te le dirai ? Je ne ferai pas la même erreur deux fois. Je ne sais pas ce que tu as en tête mais je ne t'aiderai pas cette fois, je ne suis pas bête, me répond-elle en me fixant d'un air supérieur.
— C'est... C'est juste pour Phil son frère, il a besoin de lui demander un truc urgent, mentais-je en désignant Phil qui nous regarde quelques mètres derrière nous.
Elle fronce les sourcils, considérant la situation avant de relever la tête à nouveau vers moi.
— Je peux savoir ce que tu attends de mon petit ami ? Me demande-t-elle en insistant sur les deux derniers mots.
— Mais rien du tout, on partage juste nos clopes ensemble, dis-je en tentant d'être décontractée.
Elle soupire et jette un coup d'œil à Phil avant de revenir sur moi.
— Il doit sûrement être dans sa chambre à cette heure là. Je n'ai pas besoin de te montrer le chemin, me dit-elle d'un air accusateur.
Je hoche la tête et me précipite vers Phil pour ensuite le tirer à nouveau en direction du couloir des chambres du Staff.
Lorsque nous arrivons enfin dans le couloir, je marche d'un pas rapide et toque lourdement contre la porte.
S'il n'était pas sur l'estrade comme il l'est d'habitude j'espère que c'est juste un ordre de la directrice.
Je fixe la porte qui reste fermée, je sens mon cœur s'accélérer alors que la peur et l'inquiétude s'insinuent dans mes veines.
Je jette un coup d'œil nerveux à Phil qui hausse les épaules, aussi inquiet que moi.
Je toque à nouveau beaucoup plus fort, me retenant de ne pas faire valser la porte.
Les minutes s'écoulent et Phil tente de me faire quitter les lieux mais je ne peux pas.
Il est sûrement là.
Je finis par laisser la raison me guider et recule de quelques pas, pour ensuite faire marche arrière.
Ma gorge se serre alors que nous nous éloignons.
Un bruit de porte qui s'ouvre nous fait sursauter.
Je me retourne rapidement pour voir la tête de Grant dépassée de l'entrebâillement de la porte.
Il se frotte les yeux et regarde des deux côtés avant de nous voir.
Je me tourne vers Phil et lui conseille d'aller le voir.
Si nous ne nous sommes pas revus depuis l'incident de samedi, c'est qu'il y a une raison. Je préfère donc les laisser entre frères.
J'ai déjà eu ma dose de sensations fortes pour la journée.
Je regarde Phil se diriger vers son frère et je finis par revenir dans le hall pour rejoindre Dustin qui discute dans avec des élèves.
Je suis vraiment soulagée qu'il ne soit rien arrivé à Grant.
Lorsque Dustin me voit, il me pose de nombreuses questions mais je suis pétrifiée par ce que j'ai eu l'audace de pensée.
Comment ai-je pu imaginer qu'il soit mort ?
Ma plus grande peur a toujours été que les personnes que j'aime le plus me quittent alors que nous nous sommes disputés avant.
On ne dit jamais assez à quel point elles sont importantes pour nous mais lorsque c'est fini, tout nous revient en pleine face.
Une main sur mon épaule me fait revenir à la réalité.
— Ca va ? Me demande-t-il.
— Oui, ne t'en fais pas. Tu as des infos ? Le questionnais-je en retour.
Il hausse les épaules.
— Aucune idée, nous n'avons trouvé aucune personne manquante, me répond-il.
Je regarde autour de moi, essayant de comprendre la situation.
— Et si c'était un jeu ? Une épreuve ? Dis-je en me tournant vers Dustin.
Il me regarde quelques instants, analysant ce que je viens de dire puis hoche la tête.
— Ca se tient, mais qu'est ce qu'on doit faire ? Me demande-t-il.
— Je n'en sais rien, on a qu'à attendre Phil. Grant lui aura peut être dit quelques informations supplémentaires, suggérais-je.
— Ca marche, on a qu'à l'attendre dans notre chambre, il nous rejoindra, propose-t-il.
Je hoche la tête et je le suis en direction de sa chambre.
Je crois que c'est la première fois que je vais dans leur chambre.
A ma grande surprise elle n'est pas sens dessus dessous.
— Bienvenue ! Me dit-il en s'asseyant sur ce que je devine être son lit.
Je m'assois à côté de lui.
— On a qu'à faire une liste de ce qui travaille dans l'école ? Me propose Dustin.
— Si tu veux, répondais-je.
Il attrape une feuille et un crayon puis commence à écrire.
— Je ne sais pas du tout de quelle équipe elle parlait par contre, me dit-il.
— La façon dont elle le disait me faisait penser au Staff après c'est sûrement un leurre, répondais-je.
— On a qu'à commencer par ça alors, il y a qui ? Me demande-t-il.
— Caillie, commençais-je.
Il note son prénom sur la feuille puis attend que je continue.
— Jessica, continuais-je la gorge serrée en prononçant ce prénom.
J'énonce quelques prénoms et Dustin se tourne vers moi en me lançant un regard que je ne peux éviter.
— Et Grant, soupirais-je.
Il écrit son nom.
— Tu peux déjà barrer Grant et Caillie, lui dis-je.
Il fait directement ce que je viens de lui dire.
Nous passons le reste de la matinée à écrire toutes les personnes que nous connaissons lorsqu'une annonce nous coupe.
C'est la voix de la directrice qui résonne dans les hauts parleurs situés à chaque coin des couloirs.
— Le repas est servi.
Nous quittons la chambre de Dustin pour rejoindre tous les élèves dans la cantine à nouveau où nos plats sont effectivement servis.
Nous nous installons à une table et Phil ne tarde pas à nous rejoindre.
— Alors, lui demandais-je.
— Son réveil n'a pas marché c'est tout, m'explique Phil.
Je hoche la tête.
— Hum, est ce qu'il t'a dit autre chose ? Tentais-je.
— Non pourquoi ? Me demande-t-il.
Je secoue la tête.
— Non pour rien, répondais-je en reportant mon regard sur mon assiette.
Je pensais qu'il aurait demandé à Phil pourquoi je ne suis pas restée avec eux mais au moins ça me prouve que j'ai eu raison de les laisser entre frères.
La directrice refait son apparition sur la scène et nous sourit tous.
— Bonjour, j'espère que vous n'êtes pas trop abattu par la nouvelle. Commence-t-elle.
Tout le monde la fixe, espérant qu'elle lève le mystère et réponde à la question qui nous brûle tous les lèvres mais c'est trop demander.
— Mangez à votre faim, profitez bien, nous dit-elle en souriant malicieusement en désignant les nombreuses cloches disposées au milieu de nos tables.
Je remarque que Grant est derrière elle et fixe le sol d'un air honteux.
La directrice murmure une « bonne appétit » avant de quitter l'estrade d'un pas lent suivi de Grant.
Alors que Dustin s'apprête à relever la cloche, un cri strident résonne dans la pièce.
Nous nous tournons tous vers la source de ce bruit et plusieurs autres cris retentissent ensuite.
Tout le monde se précipite pour voir ce qu'il se passe et je me fige lorsque mon regard se pose sur la table où est censé manger la fille qui vient de crier.
La cloche est relevée et c'est une tête qui est disposée à l'intérieur.
Je la fixe complètement glacée par ce que je vois.
Une tête.
Je pose mon regard sur la directrice qui quitte définitivement la scène, un sourire mesquin au visage.
Son air faussement triste de ce matin et maintenant ce sourire ne laisse plus aucun doute.
Comment a-t-elle pu faire ça ?
Je me tourne vers Dustin qui regarde la tête qui trône au centre la table.
— Tu sais qui c'est ? Lui demandais-je.
Il hausse les épaules.
— Je ne l'ai jamais vu, me murmure-t-il.
Soudainement une idée me vient en tête.
Si la tête est sous une cloche, est ce que le reste du corps est aussi sous une cloche ?
Je déglutis.
Mais qui est assez monstrueux pour faire une chose pareille !
Je me dirige vers ma table et soulève la cloche.
Mes yeux rencontrent une main qui gise sur le plat.
Je réprime une envie de vomir et détourne le regard.
C'est juste répugnant.
Comment peut-on avoir l'audace de faire souffrir à ce point un être humain qui est mort ?
Pourquoi ne peut-on pas le laisser mourir en paix ?
Je secoue la tête et recouvre le morceau de chair avec la cloche.
Je jette des coups d'œil autour de moi, les autres cloches doivent sûrement contenir des morceaux du pauvre homme.
Et moi qui pensais que la directrice ne serait pas assez créative !
Peter monte sur la scène et attrape le micro.
— Je pense que plus personne n'a faim et que les émotions fortes ne sont plus d'actualité alors je propose que tout le monde soulève la cloche sur sa table. Faisons un puzzle ! Dit-il.
Certaines personnes lâchent des bruits de dégoûts alors que d'autres lui lancent du pain à la figure pour montrer leur mécontentement face au manque de sentiments dont fait preuve Peter.
Pour sa part, il ricane et se délecte de la réaction qu'a le reste des élèves.
— Non sans rire, levez tous vos cloches, reprend-il d'un ton plus sérieux.
Le calme revient progressivement dans la pièce et une personne se décide à soulever une cloche, dévoilant un pied plus blanc que neige.
Les autres élèves suivent et chaque cloche est soulevée jusqu'à la dernière.
Mais le nombre de cloches est beaucoup trop élevé pour être rempli par une partie du corps de la victime. Oui c'est très étrange de dire cela mais c'est la vérité.
Trois cloches sont vides.
Une inscription en rouge qui peut faire penser à du sang est écrite dans chacune des cloches.
La directrice n'a vraiment aucun sens moral.
Sur l'intérieur de la première cloche il y est inscrit le mot « qui », dans la deuxième « suis » et dans la dernière « je ».
« Qui suis-je »
Nous ne mettons pas longtemps à comprendre que la directrice veut que nous devinions quelle est l'identité de la victime.
Encore une de ses épreuves tordues qu'elle adore mettre en place.
Je fais signe à Dustin et Phil de quitter la foule d'élèves bouleversés pour se rendre dans un endroit plus calme.
Lorsque nous arrivons dans un couloir vide, je décide de prendre la parole et me tourne vers eux.
— Elle n'a donc vraiment aucune limite, soupirais-je.
— Comment veut-elle qu'on trouve l'identité d'une personne que nous n'avons jamais vue ? Murmure Phil.
— On peut demander à Grant ? Proposais-je.
— Ca marche, va chercher Grant et tu nous rejoins à la bibliothèque. Il y a sûrement des infos là bas, suggère Dustin.
Je hoche la tête et nous nous séparons en quelques secondes.
Je décide d'aller d'abord chercher le cuisinier, il doit sûrement être au courant puisque ces cloches sont sorties de sa cuisine.
J'espère qu'il n'est pas impliqué dans cette histoire mais je ne vois pas comment il ne pourrait pas l'être.
J'arrive devant la cuisine et tente de voir à travers les petites fenêtres de la porte mais je ne vois personne.
J'essaye d'ouvrir la porte et heureusement elle est ouverte.
J'entre à l'intérieur et tout est propre.
Comment peut-on nettoyer aussi vite les restes d'une décapitation de corps ?
Un bruit m'interpelle et je me tourne rapidement pour voir le cuisinier qui referme la porte de son frigo avant de me regarder surpris.
— Un truc à me demander ? Me demande-t-il.
Je hoche la tête et essaye de le regarder dans les yeux mais des images du pauvre corps éparpillé sur toutes les tables du réfectoire me reviennent en mémoire.
— C'est toi qui as fait à manger ? Lui dis-je.
Il secoue la tête négativement.
— Non, la directrice m'a dit qu'elle faisait venir un traiteur spécial et qu'elle n'avait pas besoin de mes services pour le repas du midi, m'explique-t-il.
Je soupire soulager de savoir que ce n'est pas lui l'auteur de cet acte barbare.
— Donc tu n'es pas au courant, soupirais-je.
— Au courant de quoi ? Me demande-t-il.
— Je te conseille d'aller voir ce qu'ils nous ont servis à manger, lui dis-je avant de quitter les lieux.
Je marche rapidement et tente de penser à un endroit où Grant pourrait être.
Il est parti avec la directrice, je devrais peut être tenter du côté des bureaux de l'administration.
Je me dirige donc vers les bureaux et arrive rapidement mais je ralentis en entendant la voix de Grant et celle d'autres personnes qui chuchotent.
Je m'approche à petit pas et me colle contre le mur.
Je me penche un peu pour voir 3 personnes dont Grant qui discutent entre eux.
Ils ne paraissent pas très amicaux et la discussion qu'ils ont à l'air de ne pas être quelque chose que tout le monde devrait entendre.
J'essaye tout de même de tendre l'oreille mais je n'arrive pas à entendre.
Je les fixe et je vois Grant tourner quelques secondes la tête dans ma direction d'un air perdu avant que ses yeux ne se posent sur moi.
Il fronce les sourcils et écarquille les yeux en me reconnaissant.
Il me fait les gros yeux et tente de me faire signe de partir mais ma curiosité m'empêche de faire ne serait-ce qu'un mouvement.
En voyant que je ne vais pas bouger, il dit quelques mots aux deux hommes avant de les quitter pour marcher dans ma direction.
Je me recule et me plaque contre le mur en coupant ma respiration.
Je sens que je vais m'en prendre plein la figure.
Il se place devant moi et mon cœur bat à tout rompre en le voyant se tenir plus beau que jamais.
Mais son expression me refroidit sur place.
— Qu'est ce que tu fais là ! S'exclame-t-il à voix basse.
— Je te cherchais, murmurais-je.
— Je ne veux pas te parler, va-t-en ! M'ordonne-t-il.
Ma gorge se serre en entendant sa réponse.
Il ne me permet pas de lui répondre car il me pousse en direction de l'escalier et me quitte sans un seul regard.
Je le regarde encore quelques instants, le voyant rejoindre les deux hommes.
Mes sentiments d'inquiétude au sujet de notre amitié étaient donc bien fondés.
Je lui tourne le dos et descends les escaliers pour rejoindre Phil et Dustin qui sont sûrement à la librairie.
Lorsque j'arrive, elle est bondée d'élèves qui jettent les livres dans tous les sens pour trouver une réponse à l'énigme qui nous préoccupe tous.
J'aperçois mes amis qui feuillettent des livres.
Je les rejoins et ils me fixent espérant que j'ai une information pour nous aider dans notre enquête mais je secoue la tête négativement.
En remarquant mon expression faciale, ils comprennent qu'il s'est passé quelque chose mais ne font aucune remarque.
— Nous avons trouvé ses livres qui parlent des fondateurs de l'école avec l'inauguration, m'explique Phil en me donnant deux livres.
Je hoche la tête et prends une chaise pour m'asseoir à côté d'eux.
J'ouvre le premier livre et analyse chaque page mais rien ne m'interpelle.
J'ai toujours les paroles crues de Grant en tête et je n'arrive pas à me concentrer pleinement dans ma tâche.
Les minutes passent, les heures s'écoulent sans qu'aucun de nous ne trouvent la moindre information.
Il est au alentour de 20 heures lorsque nous décidons de ranger tous les livres que nous avons pris.
La plupart des élèves ont quitté les lieux pour aller je ne sais où ce qui nous laisse plus de place pour circuler.
Je prends une pile de livres et accompagnée de Dustin, nous nous dirigeons vers la première étagère.
Je commence à glisser les livres aux endroits attendus tout en continuant de discuter avec mon ami.
Alors qu'il range le dernier livre de sa pile, je remarque qu'un morceau de papier vient d'y tomber.
Je le ramasse et remarque que c'est en réalité une petite photo d'époque qui se situe dans le jardin de l'école.
Il y a la directrice qui a l'air d'avoir quelques années en moins, des adolescents qui sont à côté d'elle et deux autres personnes qui ont l'air de faire partie du personnel.
La première chose qui capte mon attention est le visage familier d'une des personnes présente sur la photo.
Je reconnais parfaitement la tête de disposée sous la cloche de ce midi.
Je frémis en voyant cette personne sourire, être vivante et heureuse.
Elle n'aurait jamais pu se douter qu'elle finirait découpé en morceau et donner à manger à des élèves.
Le pauvre homme.
J'analyse ses vêtements et devine que c'est le jardinier avec ses bottes en caoutchouc et une salopette tachée mais rempli d'outil de jardinerie.
Je m'apprête à prévenir Dustin quand un autre visage capte mon attention.
Grant.
Il est sur la photo, il fait partie des adolescents présents à côté de la directrice, je remarque aussi Caillie à côté de lui.
— Tu as trouvé un truc ? Me demande Dustin.
Je secoue ma tête et fourre la photo dans ma poche.
— Euh... Oui, c'est le jardinier.
Nous nous empressons de chercher Phil pour ensuite sortir de la bibliothèque et se diriger dans le jardin.
La nuit est déjà tombée et lorsque nous arrivons nous pouvons voir tous les élèves qui sont déjà présents.
Ils cherchent tous à comprendre ce qui est arrivé au pauvre jardinier.
Je me tourne vers mes deux amis que j'arrive à peine à voir dans le noir.
— Qu'est ce qu'on doit faire ? Demandais-je.
Ils haussent les épaules.
— On a qu'à se séparer pour essayer de voir ce qu'il se passe, suggère Phil.
Je ne suis pas vraiment pour rester seul même si je suis en réalité entourée d'élèves mais je n'ai pas vraiment le choix puisque mes deux amis ont déjà disparu.
Je tourne autour de moi et décide d'aborder une fille.
— Tu sais ce qui se passe ? Lui demandais-je.
Elle hausse les épaules.
Je continue d'avancer et pose la même question une bonne dizaine de fois aux personnes que je croise.
J'ai toujours la même réponse ce qui ne m'avance guère.
Le vent froid ne me facilite pas la tâche.
Je crois apercevoir Phil, je décide de courir pour le rattraper alors qu'il s'enfonce dans la masse de personnes.
Je bouscule une personne et me tourne vers celle-ci pour m'excuser mais quand je croise le regard de Grant, je me fige.
Il me regarde à nouveau avec la même expression, comme s'il ne s'attendait pas à me voir ici.
Soudain quelque chose me frappe.
Je me rappelle des nombreuses fois où je trainais avec lui la nuit, de nos pauses clopes sur le toit de la cabane et surtout... du couvre-feu et des patrouilleurs.
— C'est un guet-apens, murmurais-je en relevant ma tête vers Grant qui me fixe pétrifié.
Je déglutis et m'apprête à prévenir tout le monde quand la sirène tant redoutée résonne dans tous le jardin.
C'est un piège !
Tout le monde commence à crier et à courir dans tous les sens.
Je tente de rester calme et cours sans m'arrêter.
Le vent me chatouille et fait valser mes cheveux alors que mes jambes bougent de plus en plus vite.
Mais je m'arrête.
Il faut que je trouve Phil et Dustin.
Je commence à faire demi-tour quand quelqu'un m'attrape le bras.
Je relève la tête pour voir Grant qui me tient par le bras.
J'essaye de retirer mon bras mais je n'arrive pas.
— Dépêche-toi, me dit-il.
Je regarde autour de moi pour voir qu'il y a Caillie, Jessica et tout le reste du Staff qui sont là et tente tant bien que mal de ralentir les élèves pour les mettre dans les filets des patrouilleurs.
Je me débats de plus belle.
Non, je ne peux pas me faire avoir.
Je me secoue et le frappe.
— Lâche-moi, tu ne m'emmèneras pas à eux ! Criais-je.
Il ne lâche pas sa prise et je commence à lui écraser le pied.
— Mais arrête ! S'exclame-t-il en essayant de me tirer.
— Non, laisse-moi tranquille, soupirais-je en me débattant.
Les sirènes m'agressent les tympans et la panique autour de moi ne fait qu'amplifier mon agacement.
— Arrête, on perd du temps, me répond-il.
Je secoue la tête.
— Je ne te laisserai pas m'emmener, m'énervais-je.
— Mais de quoi tu parles ?
— Tu veux me jeter à la gueule des patrouilleurs, j'ai tout compris ! M'exclamais-je.
Il secoue la tête.
— Non, j'essaye de te sauver.
Je ricane faussement.
— Tu ne vas pas me faire avaler ça !
— Je t'assure, dépêche-toi ça sera bientôt trop tard, me supplie-t-il.
Je lui lance un regard noir.
Il soupire puis se baisse avant de m'attraper les jambes et de me faire basculer sur son épaule.
Je lâche un cri de surprise et le frappe alors qu'il commence à courir.
Je vois que l'on s'éloigne des patrouilleurs et je n'arrive pas à croire qu'il veuille vraiment m'aider.
Il me repose après quelques minutes et je vois une porte en bois.
C'est un passage que nous avons déjà utilisé auparavant pour échapper aux patrouilleurs.
Je me rappelle qu'il m'avait demandé si je lui faisais confiance cette nuit là.
Mais peut être qu'à l'autre bout il y a la directrice qui m'attend.
Après son comportement complètement étrange, je ne peux pas lui faire confiance.
— Viens, me dit-il en se dirigeant vers la porte.
— Non, répondais-je en croisant mes bras sur ma poitrine.
Il se tourne vers moi.
— Aller !
Je secoue la tête.
— Qui me dit que ce n'est pas un piège ? Dis-je.
Il soupire.
— Ce n'en est pas un ! S'énerve-t-il.
— Comment te croire ? Tu es la personne la plus lunatique je connaisse. Tu me dis que tu es heureux que je sois à nouveau ton amie pour ensuite me traiter comme une vulgaire groupie deux jours plus tard, déclarais-je.
— Mais je voulais juste t'éviter des ennuies, me répond-il.
— Dis plutôt que je t'agaçais !
Il lève les yeux au ciel.
— On en parlera après mais s'il te plait suis-moi, me dit-il.
— Non.
Il fait un pas vers moi et m'attrape le bras pour me tirer vers la porte.
Je fais quelques pas puis m'arrête.
— Tu me fais confiance ? Me demande-t-il.
Je secoue la tête négativement.
Je vois qu'il est blessé par ma réponse mais je ne veux pas prendre de risque.
— Pourquoi ?
— Parce que tu ne me dis pas tout, je ne peux pas avoir confiance en quelqu'un qui change de comportement tous les quarts d'heures et ne me dit pas tout sur lui, lui dis-je en me rappelant de la photo.
— Je suis désolée mais ce n'était pas la bonne période, me répond-il.
Je lâche un rire plein d'ironie.
— Pas la bonne période ! Mais tu te moques de moi j'espère ! Et tu penses vraiment gagner ma confiance de la sorte, m'énervais-je.
— Je ne faisais que te protéger, ce que je fais encore et que j'aimerai faire si tu veux bien entrer avec moi dans ce passage, me dit-il en désignant la porte.
Je secoue la tête.
— Bien sûr me protéger et puis quoi d'autre ! Comment pourrais-je penser que tu veuilles vraiment me protéger après ce que j'a... Commençais-je en criant.
Il plaque ses lèvres contre les miennes, me coupant dans mon monologue.
J'écarquille les yeux, surprise par ce qu'il vient de faire.
Il presse ses lèvres contre les miennes et je finis par fermer les yeux en posant mes mains sur son torse.
Il me colle à lui en m'entourant de ses bras.
Je frémis lorsque ma bouche rencontre la sienne à nouveau.
Des frissons me parcourent l'échine et j'ai l'impression de n'être qu'une boule de nerfs alors que ses mains me serrent plus fort.
Je décolle mes lèvres des siennes et ouvre les yeux pour plonger mon regard dans ses deux orbes brûlants de désir.
Une de ses mains quitte ma taille pour venir se poser sur ma joue.
La chaleur de sa paume m'électrise alors que son regard me perce à jour.
Je lui jette un dernier regard avant de plonger vers ses lèvres pour retrouver cette sensation agréable.
Je me sens en sécurité et j'ai l'impression de me prendre une décharge lorsque sa langue rencontre la mienne.
Elles s'entremêlent ensemble.
Il n'y a plus de sirènes, plus d'élèves qui fuient en criant.
Juste nous.
Nos lèvres scellées.
Prochain chapitre : Dans la semaine.
Long chapitre comme promis, il y a sûrement des fautes vu qu'il est plus long et que j'étais fatiguée à la fin mais j'espère qu'il vous plait.
J'aimerai énormément d'avis dessus ♥
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