Chapitre 20

 Au lendemain matin de leur arrivée, l'entièreté de la délégation de Trémiss s'était peu à peu levé et avait convergé vers une seule et même grande pièce. Si le palais était gigantesque au point de pouvoir accueillir une délégation par pays, elle était aussi assez grande pour que chacun puisse avoir une grande pièce à eux où ils pouvaient se réunir et prendre leurs repas entre eux.

De ce que Wendy vit en y pénétrant, cette grande salle qui leur était dédiée n'était pas non plus fermée aux autres délégations et les personnes extérieures pouvaient très bien les rejoindre s'ils y étaient les bienvenus. Ainsi, la lutalicienne y retrouva le père et la mère de la reine, mais aussi les Atoriens de la famille de Scyllia. Si l'objectif de ce sacre et de toutes ces invitations était de nouer des liens entre Istram et les autres pays, visiblement, certains étaient en train de se former sans que le pays hôte n'en fasse partie.

— Alors, bien dormi ? Questionna Enzo en la voyant approcher.

— Ça peut aller. Je pense que j'aurai été moins sereine sans un certain cadeau offert par le beau-père de ma sœur.

Sa façon de parler de la bague était vraiment détournée, elle le savait, mais elle savait aussi que le prince comprenait parfaitement de quoi elle voulait parler. Ça n'était pas qu'elle ne faisait pas confiance aux non-trémisséens qui se trouvaient à table, mais il y avait aussi des serviteurs qui s'afféraient un peu partout dans la salle et qui pouvaient très bien laisser traîner des oreilles indiscrètes.

Tout en s'installant à côté de lui, Wendy l'observa un petit instant avant de piocher dans ce qui se trouvait devant elle. Rien ne transparaissait sur son visage en rapport avec ce qui s'était passé la veille. Il agissait comme d'habitude, comme s'il n'y avait pas eu ce malentendu qui les avait menés à réellement se questionner sur leurs sentiments. Peut-être se forçait-il à oublier ou bien essayait-il de ne rien montrer face aux autres pour éviter que les rumeurs qu'il avait fini par confirmer pour la protéger ne s'amplifie et que même les Trémisséens ne se mettent à se poser des questions sur leur véracité. Ou bien, raison tout de suite plus logique, le prince ne voulait pas donner satisfaction à Elisabeth qui était déjà présente et assez proche pour les voir.

Quoi qu'il en soit, de son côté, si la Lutalicienne avait affirmé avoir plutôt bien dormi, c'était sans compter les heures qu'elle avait passé à se tourner et à se retourner dans son lit en réfléchissant à tout ça. Elle avait même réussi, en ressassant encore et encore cette idée de finir en couple avec Enzo, à attirer l'attention de Sixircun qui trouvait son comportement inhabituel. Empourprée jusqu'aux oreilles, elle avait prétexté qu'elle repensait au sort d'illusion qu'elle avait brisé. Fort heureusement, l'absence de lumière avait empêché le mange-magie de voir son visage et ainsi deviner qu'elle lui mentait.

Vu qu'Enzo agissait comme si de rien était, Wendy en fit de même et commença à détacher les grains de raisin de la grappe qu'elle avait dans son assiette tout en tendant l'oreille pour écouter ce qui se disait autour de la table. De ce qu'elle comprenait, il était question de savoir pourquoi le cousin de Scyllia était le représentant d'Atora sans que son roi n'ait fait le déplacement.

— D'ailleurs, je n'ai pas bien compris, grimaça Ana. Tu es grand inquisiteur ? C'est quoi en fait ?

— Non, je ne suis pas grand inquisiteur, juste inquisiteur, corrigea-t-il. Le grand inquisiteur est mon père.

— D'accord, mais c'est quoi un inquisiteur ?

— Pour faire simple, c'est un mélange entre un paladin qui tire ses pouvoirs des dieux et un mage qui fait appel à sa propre énergie.

— Chez nous, ceux qui utilisent la magie noire sans autorisation sont traqués par des chasseurs de mage, mais chez eux, il s'agissait historiquement d'un ordre de paladin qui s'en chargeait, expliqua le roi. Les inquisiteurs en étaient les hauts-gradés et le grand inquisiteur était le chef de cet ordre.

— L'ordre a perduré, mais leurs missions ont changé, ajouta l'inquisiteur. On peut considérer aujourd'hui qu'il s'agit d'un corps d'élite de l'armée, mais qui est assez indépendant et puissant pour se passer des ordres du roi.

— C'est cette indépendance qui leur a permis de rejoindre la guerre contre Istram malgré le refus de leur roi de nous venir en aide.

— En résumé, ils sont fidèles à leur roi, mais ne l'écoutent pas et n'en font qu'à leur tête... C'est une armée de Scyllia en fait ! S'esclaffa Enzo.

— Je n'aurai pas vu les choses de cette manière, mais c'est étonnamment bien résumé, rit l'inquisiteur.

— Ma garde du corps m'a parlé toute la soirée des paladins d'Atora parce que sa mère les avait vu combattre pendant la guerre et lui a raconté à quel point ils étaient forts. Je suis certaine qu'elle aimerait beaucoup s'entraîner avec toi. C'est possible ?

Portant son attention sur Elisabeth, Wendy remarqua qu'elle semblait embarrassée et qu'elle tentait vainement de le cacher et de rester stoïque. Apparemment, elle ne s'attendait pas à ce que la princesse demande une telle chose en son nom.

— Peut-être pas ici, j'aimerais éviter de me blesser ou de la détourner de sa mission, mais nous avions prévu de faire un petit détour à Trémiss pour rendre visite à la famille de Margaux avant de retourner chez nous. À ce moment-là, nous pourrons faire quelques passes si elle le souhaite. Nous y serons aussi plus tranquilles. Comme vous avez pu le voir hier, la moindre petite chose qui sorte de l'ordinaire attire de nombreux regards.

— Tu n'avais qu'à pas crier haut et fort qu'un duel allait avoir lieu aussi, lui reprocha sa femme. C'est surtout pour ça que toute la noblesse du continent s'est pressée dans la cour.

— Mieux valait que tout le monde le sache plutôt que l'attention soit tournée vers eux au moment où Enzo pointait son arme sur son adversaire à terre, se défendit-il.

— Plus qu'une garde du corps, vous avez l'air d'être très proches toutes les deux, remarqua le grand-père d'Ana.

— Oui, c'est une très bonne amie, confirma-t-elle.

— Si elle le souhaite, je pourrai aussi l'entraîner et lui donner quelques conseils, proposa-t-il.

— Mais bien sûr, soupira sa femme tout en levant les yeux au ciel.

— Quoi ? Tu ne me penses pas capable de lui apprendre deux ou trois choses ? Je suis un fier guerrier aux innombrables victoires !

— Peut-être avant, mais aujourd'hui le fier guerrier a toutes les chances de se bloquer le dos en essayant de dégainer son épée. Elle n'aura même pas besoin de sortir sa lame pour que le combat finisse dans le compte de tes défaites.

— Ma chérie, tu as vu comment ta mère me traite ? Se plaignit-il à la reine. Tu n'aurais pas une petite place pour moi chez vous ?

— Et puis quoi encore ? Tant que tu n'as pas abdiqué pour que ton fils monte sur le trône, tu as un pays à diriger.

— Mais ça ne changera rien. Tout le monde sait que je n'ai pas mon mot à dire et que c'est toi qui décides de tout.

— Encore à sortir ça ? C'est devenu la nouvelle phrase fétiche de ton père ! Dès que je ne suis pas d'accord avec lui et qu'il se rend compte que j'ai raison, il sort cette excuse pour ne pas admettre qu'il avait tort !

Si le commentaire du vieux roi pouvait donner l'impression qu'il s'agissait d'un réel reproche, l'intonation exagérée et le comportement de sa femme qui s'en offusqua avec bien trop d'aplomb montrait plutôt qu'il s'agissait de simples taquineries et que les deux s'en amusaient. Comme l'avait fait remarquer Enzo lorsqu'ils s'étaient présentés à eux la veille, ils étaient bien loin de l'image que l'on pouvait se faire d'eux au premier abord.

— Et toi Lucas, j'espère ne pas t'avoir mis dans une situation similaire à la mienne en te donnant la main de ma fille. Elles se ressemblent à bien des égards.

— Non, de notre côté, il est déjà rare que nous ne tombions pas d'accord, mais lorsque c'est le cas, nous en discutons, affirma le roi. Par contre, oui, je suis dans une situation similaire avec ma première conseillère, mais ça, ça date d'avant même mon accession au trône.

— C'est ça, fais le malin pendant que tu le peux ! S'exclama la duchesse Emvar depuis la table d'à côté. Tu vas voir quand on sera de retour chez nous !

— Ah oui, je pense voir à quoi tu fais allusion, murmura l'ancien roi.

Tout comme les chamailleries entre Enzo et sa garde du corps étaient connues de toute la noblesse de Trémiss, la relation entre la duchesse Emvar et le roi en était presque devenue légendaire. Ainsi, personne ne prit la menace au sérieux et tout le monde dans la grande salle s'en amusa.

— Vu que c'est elle qui m'a formée lors de mes premières années à Trémiss et que tu te dis satisfait de comment nous réglons les choses ensemble, c'est qu'elle n'est pas si tyrannique que ça, relativisa la reine.

— Voilà ! Écoute ta femme un peu ! Lança Elisabeth.

— Et toi Wendy, quelle reine seras-tu aux côtés d'Enzo ? Questionna le vieux roi.

Ne s'attendant pas à une telle question, la lutalicienne avala de travers et manqua de s'étouffer. Là encore, toute la délégation se mit à rire, Enzo étant le seul à avoir un tant soit peu de sollicitude en l'aidant à faire passer sa quinte de toux en lui tapotant le dos tout en lui tendant un verre d'eau.

— Je n'y ai pas vraiment réfléchi, finit-elle par avouer.

Et pour cause, devenir reine n'était pas dans ses projets d'avenir. Elle n'avait jamais souhaité obtenir une aussi haute fonction et se voyait bien plus mener une vie tranquille à tenir une boutique d'enchantement ou en restant à Lutalica pour assister Zuria.

— Ça sera une reine qui écoutera sa belle-sœur, sourit Ana. De toute façon, si elle écoute Enzo, je ne donne même pas dix ans au royaume avant qu'il ne s'effondre.

— Bien sûr, elle écoutera sûrement la future première diplomate quand elle sera là... Mais quelque chose me dit qu'elle sera très souvent partie en mission aux quatre coins du continent, fit mine de réfléchir Enzo.

Même si elle était le sujet de conversation actuel, Wendy avait l'impression de n'être que spectatrice, que tout le monde autour d'elle étaient en train de décider de son avenir sans même la consulter. Tout ceci tombait évidemment sous le coup de l'humour et elle-même en aurait ri si elle savait que ça n'avait aucune chance d'arriver. Cependant, avec ce qui s'était passé la veille, l'impossible s'était transformé en incertain et cela la mettait mal à l'aise.

Heureusement, ou malheureusement selon ce qui allait suivre, cette discussion allait sans aucun doute toucher à sa fin. Le futur empereur d'Istram venait tout juste d'entrer dans la grande salle et s'approchait de leur table, faisant s'installer le silence de plus en plus intensément à chacun de ses pas jusqu'à ce que la pièce y soit entièrement plongé.

— Bonjour, salua-t-il en s'inclinant respectueusement. J'espère que vous avez passé une bonne première nuit et que vous avez pu vous reposer convenablement après votre long voyage. Avez-vous besoin de quoi que ce soit en particulier ?

— Bonjour, salua le roi. En ce qui concerne notre confort, nous n'avons rien à y redire, vous savez recevoir. Il y a cependant une chose que vous pourriez effectivement faire pour nous. Serait-il possible d'en parler dans un endroit plus privé ?

— Bien sûr... répondit-il avec un embarras certain. J'allais moi-même vous le proposer. Souhaitez-vous attendre la fin de votre petit-déjeuner ou voulez-vous discuter maintenant ?

— Autant en finir maintenant.

Tandis qu'il donnait sa réponse et se levait, le roi lança un regard équivoque aux adolescents. Eux aussi étaient conviés à cette discussion privée. Ils se levèrent donc à leur tour et suivirent le couple royal sous les regards étonnés du reste de la délégation. Mise à part la duchesse Emvar et la garde royale, personne ne savait ce qui s'était passé la veille, leur étonnement face à la froideur de leur roi était donc compréhensible.

Afin d'avoir un maximum de tranquillité pour parler, le roi mena le futur empereur jusqu'à sa suite et l'invita à entrer. Il avait beau n'être qu'invité, il agissait comme s'il s'agissait de ses propres appartements, remarqua Wendy.

À l'intérieur, le roi indiqua au groupe d'adolescent de s'asseoir sur le divan et resta lui-même ainsi que la reine derrière eux. En face, le futur empereur s'était placé devant le fauteuil, mais restait tout de même debout.

— Si j'ai voulu vous voir au plus vite, c'est parce qu'il s'est passé quelque chose hier soir. En avez-vous été informé ?

— Possible, mais dites-moi tout de même de quoi il est question. J'aimerais m'assurer que nous parlons de la même chose.

Prenant d'abord une grande inspiration, le futur empereur expira longuement avant de se lancer. Son mal-être était perceptible. S'il voulait évoquer l'incident des imposteurs, soit il était gêné par ce qu'avait fait son fils, soit l'histoire qui lui avait été raconté s'éloignait grandement de la vérité et il cherchait comment annoncer au roi de Trémiss que des membres de sa délégation avait fait quelque chose de mal.

— Hier soir... commença-t-il avant de s'interrompre un instant pour chercher ses mots. Hier soir, mon fils et sa servante ont cherché à s'introduire dans la chambre de votre fils et de sa fiancée. Vous pensez bien que si son but était de s'excuser, je ne serai pas venu à votre rencontre pour en parler. Il voulait clairement leur nuire et, s'il a heureusement échoué, l'offense persiste. J'ose espérer que nous pourrons régler cela en bonne intelligence.

— Pour commencer, des excuses auraient peut-être été un premier pas, lança la reine. Pas les vôtres, mais celles de votre fils.

— Ça ne sera malheureusement pas possible, grimaça le futur empereur. En apprenant ce qu'il avait fait, je l'ai renvoyé à la maison. Non pas pour qu'il vous échappe, mais pour m'assurer qu'il ne vous nuira plus. Je ne comprends toujours pas ce qui lui a pris et pourquoi il vous en veut tant, mais sachez qu'une fois le sacre terminé, je m'occuperai de lui trouver une punition exemplaire.

Son ancien tortionnaire ne se trouvait donc plus dans les parages ? À choisir, Wendy préférait largement cela à le retrouver devant elle pour qu'il prononce des excuses qu'il ne pensait même pas. Devait-elle faire part de cette préférence ou laisser la discussion se dérouler ? Pour le moment, elle avait l'impression de n'être présente qu'en tant que témoin qui pouvait être appelé, mais qui ne devait pas intervenir.

— Je sais que je suis dans une position délicate pour demander la moindre faveur, mais pensez-vous que nous pouvions régler cela d'une manière personnelle et sans ébruiter l'incident plutôt qu'en impliquant nos nations ?

— Impliquer nos nations ? Qu'entendez-vous par là ? S'étonna le roi.

— Eh bien, demander des réparations auprès d'Istram. Bien sûr, je compte bien vous dédommager, mais en mon nom et sans impliquer qui que ce soit d'autres. Comprenez bien que, si mon premier acte en tant qu'empereur consiste à vider la trésorerie du pays pour les donner à un autre, je ne vais pas être empereur bien longtemps et je n'aurai pas l'occasion de stabiliser mon pays ou même renouer le dialogue avec les autres.

— Ne vous en faites pas pour ça, rassura le père d'Enzo. Nous aussi, nous préférons régler ça en privé. Vous dites que vous ne feriez pas long feu en prenant dans la trésorerie du pays, imaginez ce qu'il se passerait s'ils apprenaient que cet argent était destiné à Trémiss. Nous n'avons déjà pas une bonne réputation chez vous, ce serait un prétexte pour une nouvelle guerre, ce que nous ne voulons absolument pas.

— Voilà qui me rassure. Vous ne savez pas à quel point cette situation me met dans l'embarras et me pèse. De toutes les délégations, la vôtre était celle que j'avais le plus hâte de rencontrer. J'avais espoir de pouvoir renouer le dialogue avec votre nation et que cela bénéficierait à tout le monde. Après ça, j'ai l'impression que mes espoirs ne peuvent que tomber à l'eau.

— Ne soyez pas si défaitiste, sourit le roi. Ce qu'a fait votre fils est grave, mais cela reste la bêtise stupide d'un adolescent qui a agi seul avec sa servante. Une fois cette histoire réglée, nous pourrons parler de l'avenir commun de nos deux nations comme si rien ne s'était passé.

— Mais avant de passer à autre chose, peut-être que les principales victimes de cette... Farce... Ont quelque chose à dire ? ajouta la reine.

Visiblement, le futur empereur ne s'attendait pas à ce que cette discussion se passe aussi bien et que les Trémisséens soient aussi conciliants. Évoquer cet incident comme n'étant, au final, qu'une simple farce, minimisait grandement les possibles conséquences qui en découleraient.

Comme libéré d'entraves qui le maintenaient en position, le prochain dirigeant d'Istram finit par s'asseoir et à regarder les quatre adolescents installés face à lui, attendant leurs questions ou leurs remarques.

Pour Wendy, l'occasion était parfaite. Elle pouvait en apprendre plus sur la manière dont Henri avait pu apprendre la magie Lutalicienne. Il fallait qu'elle reste tout de même prudente et n'en révèle pas trop pour ne pas attirer l'attention.

— J'ai vu votre fils user de magie après le duel, mais son sort ressemblait à celui d'un débutant. S'est-il mis récemment à cette discipline ?

— Ce doit faire six mois, répondit le futur empereur. En réalité, il n'est que mon beau fils. Je me suis marié avec sa mère récemment et, voyant que lui et sa sœur causaient beaucoup de problèmes, je me suis dit que la discipline et l'engagement que demandait la magie allait pouvoir les canaliser. Si ma belle-fille s'en est rapidement désintéressée, lui a tout de même cherché à persévérer.

— Donc cela ne fait que six mois, résuma-t-elle en faisant mine de réfléchir un instant tandis qu'elle savait très bien quelles allaient être ses questions suivantes. Savez-vous qui lui enseigne la magie ?

— Moi-même, affirma-t-il avec un certain étonnement dans sa voix. Mais quel rapport avec l'incident ?

— Il se trouve que j'ai un certain don pour la magie et que, même si je ne suis encore qu'une apprentie, je la pratique depuis plusieurs années. Ce don m'a permis de détecter son sort d'illusion et de l'annuler. Ce sort était bien trop complexe pour qu'il en ait été le lanceur. Je me demande qui a bien pu l'aider ?

— Vous avez raison, réfléchit le nouveau mari de son ancienne maîtresse. Je n'y avais pas pensé moi-même. Si vous le souhaitez, je peux mener une enquête pour savoir qui peut bien se cacher derrière tout ceci.

Il pouvait mener autant d'enquêtes qu'il voulait, Wendy connaissait déjà ce troisième coupable. Il l'avait désigné en répondant à ses questions précédentes. Si Henri apprenait la magie auprès de lui, alors cela voulait dire que lui maîtrisait la magie Lutalicienne.

Plusieurs hypothèses lui vinrent alors à l'esprit. La première était qu'il avait appris cette magie dans un autre grimoire perdu, chose impensable à moins qu'il ait le même don qu'elle pour lire le lutalicien. Il pouvait aussi être lié à l'incident qui avait révélé Garada comme étant un traître. Ce Lutalicien qui avait pactisé avec Istram pouvait très bien leur avoir enseigné la manière dont les premiers mages en appelaient à leurs pouvoirs.

Non, il y avait peu de chances que cela soit vraiment le cas. Et pour cause, George qui avait pourtant dédié des années à cette magie était incapable de l'utiliser parce qu'elle entrait en contradiction avec les préceptes de la magie continentale. Sans apprendre les deux magies en parallèle, il était impossible pour un mage du continent d'apprendre cette magie-ci. Ou bien peut-être n'était-il pas mage lorsque Garada avait échangé son savoir ?

Enfin, une dernière hypothèse lui glaça le sang bien qu'elle ne laissa rien transparaître. Il existait bien un être qui se baladait quelque part sur le continent et qui maîtrisait toutes les arcanes de cette magie. Un être d'une grande puissance, mais aussi instable et qui avait, la dernière fois qu'elle l'avait vu, comme plan de dominer le monde. Devenir empereur de la nation la plus étendue n'était-il pas un bon début ? Ne se trouvait-elle pas, actuellement, devant Filloré ?

— Je veux bien que vous enquêtiez, mais pensez avant tout à votre sacre, répondit-elle finalement. Il ne faudrait pas que cette affaire vous impacte lors de la cérémonie. Me concernant, savoir que votre fils ne m'importunera plus me convient déjà amplement. En ce qui concerne Enzo, il faudra voir avec lui ainsi que le roi et la reine pour déterminer s'ils souhaitent obtenir une quelconque réparation.

— Je vous remercie. Après ce qu'il vous a fait, je ne peux qu'admirer votre grandeur d'âme, complimenta-t-il tout en s'inclinant légèrement.

Qu'importe ce qu'il pouvait dire. À présent, Wendy avait l'impression de se trouver devant le dragon fou. Il n'était pas question qu'elle se laisse endormir par de belles paroles. S'il était véritablement le frère de Zuria, elle se devait de le démasquer ou le monde serait bientôt en péril.  

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