... to Be Tolerant Toward Of Other
We Wish You to Be Tolerant Toward Of Other
by yabaj91
J'étais planté là, devant sa porte, indécise. Deux questions tournaient en boucle dans ma tête depuis maintenant trois jours :
"Devrais-je le faire?" ou "Ne suis-je pas plutôt entrain de le condamner "
Je n'arrêtais pas de me poser ces questions depuis que j'avais pris la résolution de venir le voir. Quand je pense qu'il y a encore quelques jours si on m'avait dit que je serais ici pour lui demander à lui après tout ce que je lui avais fait un service, j'aurais répondu préférer mourir. Même à cet instant, dans ce froid hivernal, je n'arrivais pas à me débarrasser de ce qui avait toujours été pour moi la fondation de ma personne, mes principes, même pas pour lui. Pour mon fils.
Quelques jours plus tôt.
Arrêtée face à la fenêtre, le regard perdu dans le vide, j'essayais d'assimiler les propos tenus par le médecin. Je sentis un liquide chaud coulé le long de ma joue que j'essuyai vite, car il n'était pas dans mes habitudes de me laisser aller à ce genre d'émotion. Je serrai mon chapelet contre ma poitrine, priant pour que le médecin entre et me dise qu'il s'était trompé et que mon fils vivrait. Comme si le seigneur avait entendu mes prières, je vis la porte s'ouvrir et se refermer. Je pivotai vers la porte, mais déchantai rapidement lorsque je vis la silhouette de ma fille s'approchant de moi.
-Raoul et moi venons de parler au médecin. Selon lui, il n'y a pas d'espoir. Pedro est condamné.
Je vis ma fille, Paola, s'approcher de moi et prendre mes mais entre les siennes. J'étais incapable d'effectuer le moindre mouvement face à cette marque d'affection à laquelle ni ma fille ni moi n'étions habituées.
-Vous n'avez pas à vous en faire pour lui, il s'y est préparé depuis un moment déjà. Il a même demandé à ce qu'on organise une petite fête pour lui ici, à l'hôpital...
Je pris une profonde inspiration car je ne voulais pas flancher devant Paola et me mettre à pleurer. Je hochai donc la tête pour lui signifier mon consentement.
-......Et comme c'est son dernier Noël, je me disais que tu pourrais faire une exception et permettre que lui et ses amis viennent.
Je me raidis et toisai ma fille. Comment pouvait-elle me parler de lui? Ce suppôt de Satan , qui avait dévergondé mon fils, écarté du chemin que Dieu avait tracé pour lui ce qui lui avait valu ce cancer comme châtiment.
-Jamais ! Vous m'entendez? Et ne vous avisez plus de me parler de cette chose, tranchais-je catégorique.
-Pour une fois, ne pouvez vous pas faire abstraction de vos foutus principes et penser en priorité au bonheur de votre fils qui se meurt.
- Raison de plus. Je veux que pendant ses derniers instants il puisse vivre en parfaite communion avec le seigneur de sorte qu'il lui pardonne ces mois de péché où il a vécu avec ce suppôt de Satan.
- Ne voyez vous pas que plus que le cancer c'est votre attitude qui aura plus vite raison des derniers instants de mon frère. Mère je vous en prie, rien qu'une nuit.
-Ce sujet est clos. Je ne veux plus en entendre parler.
Je vis des larmes emplir le magnifique regard de Paola avant qu'elle n'éclate en sanglot.
-Pour une fois, rien qu'une fois, soyez une bonne mère, parvînt-elle à dire entre deux sanglots avant de s'en aller.
Je m'agrippai désespérément au rebord du fauteuil dans lequel je m'étais assise quelques instants plus tôt avec ma fille.
Comment pouvait-elle prétendre que je n'ai pas été une bonne mère ? N'avais-je pas fait passer leur bien-être avant tout ?
Je sentis mes pensées dériver vers ce jour fatidique où Pedro m'avait annoncé s'être laissé prendre dans les filets de ce monstre. Ce jour fatidique où il me dit porter cette abomination en lui.
Je lui avais dit, je l'avait prévenu que Dieu ne pardonnerait pas pareille chose et qu'il serait puni. Je lui avais dit que c'était les flammes de l'enfer qui l'attendraient. Je me rappelais de chacune des paroles que nous avons échangées, mais surtout les siennes :
-Si Dieu, le miséricordieux, le Dieu d'amour qui tu nous as appris à adorer, voudrait me faire pourrir en enfer parce que j'aime, alors qu'il en soit ainsi.
Ce sont les dernières paroles que nous avons échangées avant qu'il ne le suive. L'annonce de son cancer fut un signe pour moi. Le signe que Dieu voulait me permettre de ramener mon fils sur le droit chemin. J'avais espéré et j'avais prié dans ce sens pendant des mois pour qu'après cette épreuve, il nous revienne. Au lieu de quoi...
Je regardai par la fenêtre et le vis assis sur un banc en face de l' immeuble espérant des nouvelles qu'il n'aura jamais. Un mélange de pitié et de rage empli mes poumons.
Ne comprenait-il pas que sa simple présence est une offense dont je ne peux souffrir ?
J'avais joué de mes relations pour qu'il ne puisse mettre les pieds dans cet hôpital. J'étais allée jusqu'à changer de ville pour ne plus avoir à le voir. Cependant ce jeune homme, telle une vermine, finissait toujours par réapparaître.
J'aperçus la silhouette de Raoul, mon dernier fils, se diriger vers lui. Je ne laisserai pas cette chose faire à mon Raoulito ce qu'elle a fait à mon Pedrito. Jamais. Je sortis de la pièce bien décidée à l'éloigner de mon fils. Arrivée dans le hall, je les vis s'assoir sur le banc. Je ne sus pas ce que Raoul lui dit mais le vis s'effondrer au sol et Raoul essayer de le consoler. J'accélérai le pas pour les séparer mais il dut me voir car ils se détachèrent avant que je n'arrive jusqu'à eux.
-Éloignez vous immédiatement de mon fils espèce de dégénéré, crachais-je haineuse, une fois à leur niveau.
-Je vous en prie, doña Ines, s'il vous reste une once d'humanité laissez moi le voir, par pitié.
Je restai un moment choquée face à ses mots, à la souffrance qui se lisait sur son visage. Il avait l'air d'être anéanti par la situation, comme nous tous d'ailleurs. Pendant un moment, une infime seconde, je fus tenter de le laisser voir mon fils, parce que je savais qu'il partageait notre souffrance. Pendant une infime seconde je ne vis qu'un homme amoureux désespérant de voir la personne qu'il aime. Mon cœur se déchira et les larmes me montèrent aux yeux. Pendant une infime seconde j'avais hésité, mais je ne pus pas, c'était au-dessus de mes forces.
"C'était mal", essayais-je de me convaincre. Je ne pouvais plus rien faire pour mon bébé, mais je pouvais l'empêcher de commettre encore plus de péchés.
-Jamais ! Et je vous prierai de vous éloigner de Raoul à l'avenir si vous ne voulez pas que j'appelle la police.
Je vis son visage se décomposer et tout espoir s'envoler. Mon fils auprès de moi se raidit.
-De quoi êtes vous donc faite ? Vous me détestez donc tant, au point de laisser votre fils mourir malheureux ?
-Il n'est point question de vous mais plutôt de ce qui est bien et de ce qui n'est pas bien et ça, ce n'est pas bien. Maintenant allez vous en ou j'appelle la police.
Comme un automate, je le vis se retourner et s'en aller. Je me Tournai vers Raoul prête à le gronder mais ce que je vis dans son regard me laissa sans voix.
-Vous êtes l'être le plus cruel, le plus sadique mais en même temps le plus pathétique que je connaisse. Que Dieu vous vienne en aide, me lança t-il avec un mélange de tristesse et de mépris.
Le lendemain.
-Je veux que ce Noël soit le plus merveilleux qu'il n'ait jamais vécu alors ne lésinez pas sur les moyens, dis-je à l'organisatrice que nous avions engagée pour l'événement.
Je me dirigeai vers le lit de Pedro pour le prendre dans mes bras. Je ne m'habituerais jamais à le voir ainsi, faible, amaigri, le regard éteint.
-Vous savez ce qui me rendrait véritablement heureux et ce n'est pas vos millions qui pourront me l'acheter, mais juste un peu de tolérance, me répondit-il en me rendant mon baiser.
Je fis celle qui n'avait rien entendu et continuai à parler décoration. C'était ainsi depuis hier. Mes enfants me parlent à peine et ne manquent pas d'une occasion pour me traiter de mauvaise mère.
Quelques heures étaient passées, et l'organisatrice était partie car Pedro commençait à se sentir fatigué. L'atmosphère était électrique alors j'essayai de la détendre en paraissant joyeuse.
- Cette fête sera une réussite, j'en suis convaincue, dis-je avec un entrain forcé.
-Non je ne crois pas ,me répondit Paola légèrement énervée.
-Je sais que vous êtes en colère contre moi. Mais sachez que tout ce que je fais, je le fais pour vous. Et quand vous vous en rendrez compte vous me supplierez de vous pardonner.
-Eux peut-être mais moi je serai déjà mort.
J'ouvris la bouche pour essayer de répondre mais aucun son n'en sortit.
Que pouvais-je bien répondre à cela?
Dans la soirée.
-Mes enfants me détestent Lucia, ils m'évitent comme si j'avais la peste. Pourquoi ne comprennent-ils pas que ce qu'il me demande est mal?
Lucia, ma sœur aînée me regarda avec compassion. Elle et moi avons toujours été très proches et personne ne me comprenait mieux qu'elle.
-Lorsque père a été retrouvé mort avec sa maîtresse, et que mère a insinué que c'était le châtiment que Dieu lui avait infligé pour le punir de son infidélité, tu n'as plus été la même.
-Je ne vois pas le rapport.
-Tu t'es enfermée dans la religion, appliquant avec rigueur tout ce qui y était écrit. Tu t'es tellement acharnée à vouloir être une bonne chrétienne que tu as fini par oublier l'essentiel : l'amour.
Elle fit une pause et me regarder dans les yeux pour que je saisisse toute la portée de ses mots.
-L'amour pour mes enfants ne devrait pas être une excuse pour me détourner de Dieu.
-L'amour de Dieu ne devrait pas être l'outil qui te servira à détruire tes enfants. Il devrait plutôt être l'instrument qui vous lie.
-C'est l'enfer qui nous attend si je participe ou laisse faire une telle chose.
-Je ne sais pas s'il ira en enfer ou non. Mais ce que je sais c'est que si Pedro était mon fils, je n'hésiterais pas à le suivre en enfer pour le rendre heureux une dernière fois.
J'étais à la chapelle de l'hôpital , espérant un signe. La phrase de de Pedro pendant que nous parlions de sa fête, ma discussion avec ma sœur, mais surtout mon hésitation face à la requête de l'autre, ne cessaient de me hanter. Je ne pouvais m'empêcher de m'interroger sur mes actions, ce que je n'avais pas fait depuis longtemps. C'est la raison pour laquelle je suis ici, à prier. C'était le moyen pour moi de me ressourcer, de me conforter dans ma résolution et d'écarter une bonne fois pour toute tous ces doutes.
-Excusez-moi de vous déranger madame, mais cela fait un moment que je vous vois prier avec ferveur en soupirant comme si vous étiez partagée. Peut-être que si vous en parliez cela vous allégera un peu?
Je vis l'homme, habillé d'une soutane, me sourire avec gentillesse.
-Je suis le père Vicente, c'est moi qui suis en charge de la chapelle. Vous pouvez parler sans crainte mon enfant. Je vous écouterai sans vous juger.
J'hésitai un instant car je n'avais pas envie que tout le monde sache que j'avais un fils homosexuel, même si je savais au fond de moi certains devaient s'en douter vu la manière dont j'avais fait chasser l'autre d'ici. Et puis je me dis que c'était peut-être le signe que j'avais demandé au seigneur. Un de ses envoyés pour effacer tous les doutes qui avaient assaillis mon être ces deux derniers jours.
-Mon père, dis-je enfin décider à parlé. Mon fils va bientôt mourir. Lui comme le reste de la famille avons fini par accepter la chose et voulons faire en sorte qu'il soit heureux pendant ces derniers instants.
-Alors où est donc le problème mon enfant si vous avez fini par accepter la volonté du seigneur ?
-Ce qu'il y'a c'est que mon fils m'a dit très clairement ce qu'il voudrait pour ces derniers instants, mais je ne peux pas le permettre. C'est mal! Ai-je fini par dire dans un élan de désespoir.
Le père Vicente fronça les sourcils perplexe, alors je décidai d'être plus claire.
-Mon fils est ...
Je me retournai pour m'assurer que personne ne nous écoutait avant de reprendre :
-......gay, terminai-je dans un murmure la tête baissée.
Il leva les sourcils pour signifier son incompréhension.
-Mon fils est gay et il ne veux que je lui permette de passer ses derniers moments avec l'autre, mais je ne peux pas.
- Pourquoi ?
Sa question me laissa à mon tour sans voix.
-Parce que... Parce que.... Bégayais-je. Parce que l'autre est un homme et qu'il serra condamné aux flammes de l'enfer s'il persiste, ai-je tenté de répondre.
-Parce qu'il veut mourir auprès de la personne qu'il aime ?
-Mais il aime un homme, criais-je, irritée. Il ne doit pas aimer un homme et en tant que bonne chrétienne je ne peux pas permettre une telle chose.
Le prêtre soupira longuement avant de reprendre la parole :
-Et en tant que mère? Priveriez-vous votre fils de son désir le plus cher ? De plus ne serait-il pas prétentieux de votre part de prétendre accomplir la parole du seigneur à travers pareils actes ?
- Mais la bible est très claire à ce sujet, mon père! Ai-je fini par m'écrier, sentant mes résolutions vaciller.
-La bible nous apprend à aimer notre prochain. D'ailleurs en tant que bonne chrétienne vous devriez savoir que l'église catholique préconise qu'en tant que créature de Dieu l'homosexuel mérite l'amour de son prochain, sa compréhension et sa compassion. Il ne nous revient pas à nous de le juger ou le condamner, mais plutôt de l'aimer, de le tolérer et le respecter.
Dire que je ne m'attendais pas à de tels propos sortant de la bouche d'un prêtre est un doux euphémisme. Je restai immobile un moment, semblant méditer sur ses paroles.
-Donc vous me dites d'accueillir dans ma famille un.... Un....un homosexuel, lui dis-je dérouter.
-Ce que je vous dis c'est que vous pouvez être une bonne mère et une bonne chrétienne. La haine, fut-elle dirigée contre le plus pire des êtres, ne conduira jamais personne au paradis.
Présent, soir de Noël 22h30
J'étais assise sur l'un des bancs qui se trouvaient dans la cour de l'hôpital, par ce froid hivernal. Je me sentais gelée, mais je n'en avais cure. Je préférais ça plutôt que de supporter la tristesse de mon fils.
La fête a été un échec total. Pedro ne parlait pas, son regard n'était que tristesse et déception. Paola et Raoul n'avaient fait aucun mystère du mépris que je leur inspirais. Moi même je me détestais d'infliger ça à mon fils. Dire que j'aurais pu faire de ce jour l'un des plus beaux de sa vie. Si Adolpho feu mon époux avait été là, lui n'aurait pas hésiter à le faire.
Noël n'était elle pas l'un des meilleurs moments que nous vivions chaque année ?
De son vivant, nous attendions cette période avec impatience. Il disait que c'était l'occasion qu'il avait de nous montrer combien nous étions importants à ses yeux et combien il nous aimait. Depuis Noël étais devenue le jour où nous nous efforcions à vouloir nous faire plaisir les uns aux autres. Et aujourd'hui, j'avais lamentablement échoué.
J'étais si près du but, j'aurais pu..... Mais je n'y suis pas arrivée. Je n'y suis pas arrivée. J'ai passé toute mon après midi à essayer de le faire, d'inviter l'autre, d'essayer de faire passé mon fils avant mes préjugés , d'être une bonne Mère, mais je n'y suis pas arrivée.
D'un geste rageur, j'essayai mes larmes. Je n'avais pas le droit de m'apitoyer sur moi alors que je suis la seule responsable du désespoir de mon fils. J'avais enlevé tout espoir d'un dernier merveilleux Noël à Pedro et mis fin l'une des plus agréables des coutumes de notre famille.
Tout ça pour quoi ? Pour le protéger ? Mais de qui?
Lui n'avait pas hésité à tout abandonner pour le suivre. Alors que moi....
J'étais là à ressasser mes regrets lorsque j'appercus la silhouette de Raoul qui parlait avec un autre homme. Mon cœur rata un battement lorsque que je reconnus l'autre. Je me levai d'un bond et fonçai comme si ma vie en dépendait dans leur direction.
-Vous! Ai- je crié. Décidément vous êtes l'être le plus borné qu'il m'ait été donné de voir.
-Mère je vous en prie c'est Noël et tout ce qu'il voulait c'est lui remettre son cadeau....
-Vous me connaissez mal si vous pensez que je vais permettre que vous donniez cette chose à votre frère, dis-je, interrompant mon fils.
- Avec ça vous me dites borné ! Non mais c'est l'hôpital qui se fout de la charité.
-Je ne vous permet pas....
-Vous n'avez rien à me permettre, tempêta l'autre. Vous êtes la femme la plus méchante, la plus mesquine, la plus rancunière qu'il m'ait été donné de voir. Vous n'arrivez pas à me pardonner d'avoir emmené Pedro loin de vous et de vos principes à la noix, alors vous me punissez. Vous savez quoi? Vous y arrivez brio.
Sa voix se brisa en un sanglot rageur qui témoignait de son impuissance face à la situation qu'il vivait, avant de continuer :
-Parce qu'il ne se passe pas un seul jour sans que mon cœur ne se brise en pensant que c'est peut-être le dernier qu'il vit et que je ne suis pas à ses côtés, que je ne verrais peut-être plus ses magnifiques yeux bruns, son sourire envoûtant. Que je ne sentirais peut-être plus son parfum, que je n'entendrai plus sa voix. Et tout ça, ça me tue. Ça me tue.
Son visage était déchiré par la souffrance. Certes la souffrance de perdre l'amour de sa vie, mais aussi celle de ne pas être là quand ça arrivera. Je ressentis ce que j'avais ressenti quelques jours plus tôt quand j'avais vu cette même détresse, profonde et sincère dans ses yeux, ici même, à cette même place. Mais cette fois-ci, je décidai de suivre mon cœur plus qu'autre chose. Je fis quelques pas vers lui et le pris dans mes bras. Il me serra contre lui en me demandant pardon.
-Pardon doña Inès. Pardon..... Pardon...
Nous sommes restés là, l'un dans mes bras de l'autre à verser des torrents de larmes. Nous n'avions pas besoin de mot pour exprimer ce que nous ressentions. Nous avions nos larmes pour cela. C'est à ce moment que je compris... Je compris pourquoi je n'y étais pas arrivée dans l'après-midi... Je compris que là, à cet instant, tout ce qui comptait, c'était l'amour que nous ressentions pour Pedro. C'était ça là le plus important. Et que Dieu me pardonne si c'est un péché, mais j'étais bien décidé à faire triompher cet amour face à tout.
Je pris une grande inspiration avant de me détacher de lui, pris mon fils dans mes bras et nous nous dirigeâmes vers l'entrée. Une fois devant l'entrée, je retournai et le vis immobile au milieu de la cour entrain de nous observer.
-J'ai des mouchoirs dans la chambre de Pedro, dis-je. Enfin si vous voulez sécher vos larmes.
Il ne se le fit pas dire deux fois et s'empressa d'entrer, comme s'il avait peur que je change d'avis.
Mon fils me souris et me serra à nouveau dans ses bras.
-Vous n'auriez pas pu nous donner meilleure preuve d'amour, me chuchota Raoul. Il faut croire que nous sommes tous devenus des madeleines dans cette famille, ajouta t-il en essuyant ses joues.
-Mon amour réveille-toi ! J'ai une surprise pour toi.
-Je pense que j'ai eu mon lot de surprise pour aujourd'hui. Alors gardez en pour le nouvel an.....Du moins si je vis jusque là.
-Tu ne devrais pas parler à ta mère ainsi.
Pedro bondit presque de son lit, en entendant cette voix. Toute trace de sommeil s'étant subitement envolé.
-Mon.... Mon... Amour ! S'exclama le malade ayant trouvé un regain de vitalité. Mais qu'est-ce tu fait là ?
-Ta mère me permet de te voir, fit l'autre, Luis, d'une voix étranglée par l'émotion.
-C'est vrai maman? M'interrogea Pedro comme s'il avait peine à le croire.
J'hochai la tête incapable de parler. J'étais émue par ce que je voyais. Bien-sûr c'était toujours un Pedro malade et condamné. Mais c'était un condamné avec les yeux qui brillaient.... Un malade avec un sourire magnifique aux lèvres.... Un malade heureux.
Toute à ma contemplation, je vis trop tard leurs lèvres se rencontrer. Je fîs un pas vers eux et posai ma main sur l'épaule de Luis, pour le détacher de mon fils. Sûrement, un mes réflexes d'homophobe. Il faut croire qu'on ne change pas complètement en quelques jours.
Toutes les personnes présentes se tournaient vers moi étonnées. L'atmosphère semblait s'être quelque peu refroidie. C'est à ce moment là que Paola dit en riant:
-Je crois qu'il y a certaines choses que mère n'est pas encore prête à voir. Laissons lui du temps.
-D'ailleurs je pense que le contraire m'aurait fait fuir, renchérit Luis en me faisant un clin d'œil.
Du temps. J'en avais très peu, peut-être, mais que je comptais mettre à profit pour rattraper toutes mes erreurs et être la meilleure mère qui soit.
Je lui rendis la pareil. Un lien que ni lui ni moi n'étions encore prêts à analyser s'était tissé entre nous. Mais d'un accord tacite, nous préférions nous consacrer à Pedro. Pris d'une impulsion je lançai :
-Tu sais Luis, dis-je, mon stock de mouchoirs est à ta disposition au cas où tu en aurais besoin.
-Comptez sur moi, doña Inès, pour ne plus m'en séparer.... Du stock je veux dire, ajouta Luis en levant un sourcil.
Luis et moi nous regardions un moment avant d'éclater de rire sous le regard ahuri de mes trois enfants.
A cet instant, il n'y avait pas d'amis fortunés, ni de cadeaux de luxe. Le "qu'en dira t'on "n'avait aucune espèce d'importance. A cet instant là, il n'y avait moi, une mère homophobe, mon fils malade et homosexuel avec son amoureux (j'arrivais enfin à le dire), mon deuxième fils moralisateur et ma fille aînée. Nous échangions, nous riions et nous nous amusions comme des fous. Je n'aurais pas pu rêver meilleur Noël. Même Adolpho n'aurait pas pu faire mieux. Nous respirions le bonheur et c'est tout ce qui comptait.
D'ailleurs, n'est-ce pas ce que souhaite le seigneur notre Dieu à tous ses enfants ?
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