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« Je ne sais pas comment tu fais pour réussir à suivre les cours du Professeur Binns, se plaignit Ron en sortant de la salle de classe dans laquelle il avait somnolé durant deux longues heures. On perd plusieurs années de rien juste en le regardant flotter au-dessus de son estrade. »


Ce type de commentaire suivait toujours les cours du plus mort de leur enseignant. Cette drôle d'habitude n'épargnait aucun élève et Hermione n'était pas une exception. Le rouquin se classait parmi les professionnels des plaintes envers les cours les plus ennuyants de toute l'école de sorcellerie et le garçon aux lunettes rondes se décrochait la mâchoire dans les minutes qui suivaient la libération tant attendue. Hermione les comprenait. Le Professeur Binns possédait cette voix éteinte digne des meilleurs fantômes et il relatait l'Histoire de la magie avec des phrases si longues qu'il devenait complexe de retrouver le sujet de départ. Plusieurs mois s'étaient écoulés avant que la jeune femme ne se fasse au rythme et au phrasé de son enseignant. Il lui rappelait parfois cette maîtresse de primaire qui ne s'exprimait que par des périphrases ennuyantes.


« Je suppose que c'est mon super pouvoir un peu nul, blagua-t-elle alors que les garçons l'entraînaient en direction de la Grande Salle.

— Et ça serait quoi ton super pourquoi ? La capacité de résister aux conversations barbantes ? proposa Harry.

— Super étudiante ! renchérit Ron avec un étrange enthousiasme. Elle ne s'endort jamais en cours et obtient toujours des Optimals. »


Les plaisanteries s'étendirent sur toute la durée de leur trajet et la jeune femme ne se défit pas une seule seconde de son sourire resplendissant. Personne ne parvenait à lui arracher des fous rires comme ceux-là après de longues heures de cours. Ils chassèrent sa fatigue et dissuadèrent le doux Morphée de pointer le bout de son nez. Elle se sentit en pleine forme lorsqu'ils franchirent le seuil de la Grande Salle.


La plus jeune des Weasley les accueillit par une exclamation enjouée qui attira de nombreux regards sur eux. Luna releva à peine les yeux de son magazine et elle les salua de son habituelle voix rêveuse lorsqu'ils s'installèrent autour de la table où des mets appétissants s'alignaient. Les oreilles de Neville, qui avait marché quelques pas derrière eux, se teintèrent d'une couleur si rouge que la sauce tomate paraissait bien pâle en comparaison. Être le centre de l'attention l'embarrassait toujours autant.


« Vous avez passé une bonne matinée ? les interrogea Hermione en se servant des légumes.

— Potion avec Slughorn, souffla Ginny. C'était intéressant jusqu'à ce qu'il commence à parler d'ingrédients rares. Ça m'a perdue.

— J'ai passé la matinée avec Hagrid, répondit Luna en déposant son magazine sur le bois de la table. Nous sommes allés nourrir les sombrals et avons discuté avec quelques centaures. »


L'expression de Neville répondit à sa question sans qu'il n'eût à prononcer le moindre mot. Il frotta ses paupières encore lourdes pour chasser les dernières traces de fatigue et il ne prit même pas à peine de camoufler un long bâillement derrière la paume de sa main. Les cours d'Histoire de la magie avaient cet effet sur tout le monde après tout. Ils continuèrent de discuter autour. Ron raconta quelques blagues qui arrachèrent des rires à tous et Harry montra avec fierté les œuvres — il les appelait ainsi mais ce n'était que des gribouillages dans une marge invisible ou des commentaires sur son envie de s'échapper de la salle de classe — que l'ennui lui avait inspirées.


« Vous avez réussi à vous mettre d'accord sur le thème de la soirée d'Halloween sans vous entre-tuer avec Malefoy ? s'enquit Ginny, ignorant la plainte de son copain lorsqu'elle lui vola une frite.

— Plus ou moins. On pensait partir sur un bal masqué.

— Classique mais amusant, commenta la rouquine. Du Malefoy tout craché. »


Les sourires se froncèrent autour de la table et provoquèrent l'hilarité de Ginny. Rares étaient les mots positifs pour décrire une personne comme Malefoy. Il n'était pas rare d'entendre des termes comme vantard, fouine, saleté de serpentard ou épine dans le pied pour le décrire. Mais personne ne l'avait jamais qualifié de personne amusante. Hermione s'était longtemps persuadée qu'il ne connaissait pas la définition du mot humour, mais la cohabitation dans la salle commune lui avait fait découvrir cette nouvelle facette du serpent. Le reptile possédait la capacité de blaguer et appréciait la mettre dans tous ses états.


« Quand on parle du loup, grommela Ron dont les yeux se posèrent sur une silhouette au-dessus de l'épaule de son ancienne amante.

— On en voit la queue, compléta Harry en esquissant une grimace. Ton meilleur ami est là, Hermione. »


La jeune femme eut à peine le temps de tourner la tête dans la direction que ses amis lui indiquaient que la silhouette du second préfet en chef se dessina dans son champ de vision. Elle dut relever la tête pour croiser la tempête féroce de son regard et elle ne parvint pas à réprimer sa grimace en remarquant ce même sourire en coin qu'il lui adressait depuis plusieurs semaines. Il la mettait hors d'elle. La jeune adulte sentit la gêne se propager sur ses joues alors qu'elle savait tous les regards de la Grande Salle posés sur ces deux silhouettes qui s'assortissaient mal. Ils formaient un duo bien étrange et les voir cohabiter dans un espace si restreint sans qu'ils ne prononcent la moindre insulte ou remarque sarcastique relevait du miracle. Les élèves s'interrogeaient.


« Granger, prononça-t-il d'une voix glaciale en plongeant ses prunelles dans les siennes. Toi, moi, la salle commune dans une heure. »


Puis il tourna les talons et rejoignit la table de la maison Serpentard sans qu'elle ne puisse articuler la moindre réponse. La bouche entrouverte dans une tentative de commentaire, elle l'observa adresser ce sourire en coin si particulier à ses camarades de maison et se mêler aux conversations en cours comme s'il ne s'était jamais absenté. Et elle, elle resta là, assise sur son banc, incapable de retirer les frissons que son regard provoquait chez elle. Malefoy s'était déplacé pour lui parler d'un rendez-vous dans la salle commune des préfets et son cerveau lui avait fait perdre toute capacité à réagir de façon logique.


« C'était quoi ça ? s'étonna Ronald, la bouche pleine de nourriture.

— Ne parle pas la bouche pleine, le réprimanda sa sœur. »


Hermione se retrouva incapable de reprendre le cours du repas tant la situation lui paraissait irréelle. Jamais les mots de son ancien amant n'avaient autant été le reflet de ses propres pensées.

C'était quoi ça ?



j'aime beaucoup ce chapitre ! il n'est pas très long mais je l'aime beaucoup.

on se retrouve beaucoup pour la suite :)

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