[10]
« Mascarade ! »
Alertée par cette soudaine exclamation brisant le silence de la salle commune, Hermione Granger quitta son livre des yeux pour le poser sur son camarade de promotion assis à l'autre bout de la pièce. Elle ne s'était pas rendue dans ce lieu hors d'atteinte de ses amis pour entendre Malefoy parler seul. Elle espérait toujours retrouver ce calme nécessaire pour rédiger un parchemin de métamorphose ou se plonger dans un livre énorme sans que ses proches ne la déconcentrent. S'il y avait bien un avantage à partager le même oxygène de Drago Malefoy, c'était bien qu'il ne cherchait jamais à lui adresser la parole. Mais si elle en croyait les deux iris céruléens rivés sur sa silhouette, il cherchait bien à entamer une discussion avec elle.
« Quoi mascarade ? souffla-t-elle d'un ton agacé. »
Le jeune adulte se redressa et franchit la distance qui séparait la table et le canapé en quelques foulées. Il s'installa sur une chaise sans se défaire de son insupportable sourire en coin. Elle eut envie de se replonger dans son bouquin pour éviter son regard insistant. Il s'amusait à la rendre mal à l'aise depuis cette soirée où elle l'avait observé de ses prunelles distraites. Puis elle ne savait pas ce qu'il lui voulait en cette nuit d'octobre. Cela ne pouvait pas être plus important que son devoir de métamorphose.
« Le bal d'Halloween, précisa-t-il. On va l'appeler comme ça et tout le monde viendra avec un masque.
— Je n'étais pas sourde la première fois que tu en as parlé, s'agaça-t-elle. Si tu n'as rien de plus intéressant à raconter, j'aimerais me remettre à travailler. »
Elle crut l'entendre murmurer quelques mots à propos de l'ennui qu'elle provoquait chez lui. La jeune femme refusait de lui porter la moindre attention. Ses mots désagréables et ses remarques hautaines ne l'atteindraient pas. Malefoy possédait peut-être une gueule d'ange, mais ce n'était pas suffisant pour qu'elle accepte de mettre de côté un parchemin aussi important que celui-là.
« J'avais pensé à autre chose, ajouta-t-il. Puisque tu es incapable de trouver la moindre idée de soirée amusante.
— Tu te répètes encore, souffla-t-elle avec lassitude. A croire que tu deviens sénile. »
Hermione ignora le regard mauvais qu'il lui adressa pour ajouter quelques points clé sur son brouillon. Il continuait de la provoquer et elle ne se laisserait pas avoir par ses petits jeux idiots. Elle s'apprêtait à tourner la page de son livre lorsque les doigts fins du serpentard pincèrent les pages et éloignèrent l'ouvrage de la portée de ses mains. Ses yeux colériques se posèrent sur lui et elle reçut son stupide sourire en coin comme une insulte. Comment une personne pouvait-elle se montrer aussi insupportable ? Ce n'était pas humain.
« Je suppose que je suis obligée de t'écouter, grommela-t-elle, se reculant sur l'assise de sa chaise et croisant les bras contre sa poitrine.
— Dix points pour Gryffondor ! se moqua-t-il. Digne de l'élève la plus brillante de Poudlard.
— Si ton but est de m'énerver, ça ne marchera pas. »
Son rictus insupportable s'accentua. Il ne cessa de s'élargir à mesure que l'agacement de la jeune femme s'intensifiait. Malefoy jouait avec ses nerfs et il s'amusait de cette situation. Ce n'était pas la première fois qu'il se plaisait à la provoquer ou à la mettre dans l'embarras. Il appréciait le rougissement de ses joues et ses œillades meurtrières. Hermione ne comprenait pas son envie de bal masqué. Pourquoi était-ce si important pour lui ? La soirée ne durerait que quelques heures et l'amusement ne serait pas infini. La nuit se terminerait tôt ou tard et toutes les cendrillons disparaîtraient aux douze coups de minuit.
« Raconte-moi ton idée, abdiqua-t-elle.
— Hermione Granger serait prête à abandonner un devoir de métamorphose ? ironisa-t-il. Qui êtes-vous et qu'avez-vous fait de Granger ?
— Dépêche-toi où je pars travailler à la bibliothèque. »
Un rire clair s'échappa des lèvres du sorcier aux cheveux clairs et Hermione ne sut comment réagir. Jamais elle n'avait vraiment entendu ce son de la part de son camarade de classe. Ses ricanements se moquaient des autres. Ils rabaissaient ses opposants et ennemis. Ils n'accentuaient jamais une réelle hilarité. Drago Malefoy ne blaguait jamais si la personne en face de lui ne terminait pas poignardé en plein cœur par ses mots acérés. Il agissait si étrangement qu'elle aurait pu lui retourner sa question idiote.
« Je pensais à des masques ensorcelés, commença-t-il. Un enchantement devrait pouvoir rendre méconnaissables tous ceux qui en porteront.
— Et tu connais un sortilège capable de faire ça ? l'interrogea-t-elle.
— Je pensais que tu étais la sorcière la plus brillante de notre génération, renchérit-il sans se défaire de son sourire. Tu ne vas pas me dire que tu ne mérites pas ton titre, Granger ? Puis il doit bien y avoir quelques pistes de solutions dans la bibliothèque, ajouta-t-il sans lui laisser le temps de répondre. Et personne ne connaît mieux la bibliothèque que toi. »
Un sortilège capable de rendre méconnaissable toute personne portant un accessoire particulier. Hermione connaissait quelques enchantements pour répondre aux envies de son camarade, mais ils ne duraient jamais plus de quelques heures. La jeune femme se mordit les lèvres dans sa réflexion. Pourquoi se démenait-il autant pour une simple nuit ? La famille Malefoy se distinguait par cette envie de se faire remarquer. Ils appréciaient se retrouver au centre de l'attention et son camarade souhaitait l'oubli de son nom pour une nuit entière.
« Pourquoi tu tiens autant à ton bal masqué ? finit-elle par lui demander. »
Les prunelles orageuses de son collègue se posèrent sur elle et provoquèrent le rosissement de ses pommettes. Elle avait l'impression qu'il cherchait à sonder son âme et elle ne savait pas quoi penser de cette situation. Son cœur manqua un battement alors qu'il rapprochait sa chaise de la sienne. Même le crissement désagréable des pieds contre le parquet ne parvint pas à lui arracher une grimace d'inconfort. Chaque parcelle de son corps se focalisa sur la présence de Drago Malefoy à seulement quelques centimètres d'elle. Elle ne savait pas ce qu'il lui voulait. Il pouvait bien souhaiter cracher son venin aux visages comme les gens de sa maison savaient si bien le faire. Mais il ne prononça pas le moindre mot. Il resta là, son visage si proche du sien qu'elle sentait son souffle chaud s'écraser contre sa peau et lui arracher des frissons. Elle se perdit dans ses yeux clairs et les battements de son propre cœur résonnèrent dans ses oreilles. Pourquoi devait-il être si beau ? N'aurait-il pas pu être ce serpentard désagréable à regarder comme ses deux sous-fifres l'avaient si longtemps été ?
« Parce que tout le monde porte un masque Granger, souffla-t-il. Et que tu le veuilles ou non, tu n'es pas une exception à la règle. »
La réponse lui déplut. Elle lui déplut tellement qu'elle ressentit le besoin de revenir à la charge tout en sachant qu'elle n'obtiendrait aucune réponse supplémentaire. Malefoy n'ignorait pas la frustration que de tels mots provoquaient chez elle. Son stupide sourire en coin ajouta une preuve à la longue liste des preuves que la jeune femme collectionnait depuis qu'il lui avait adressé la parole pour la première fois. La liste était si longue qu'elle aurait pu gravir une montagne. Toute cette situation amusait Malefoy.
« Et je suis pressé de voir qui se cache derrière le masque de la parfaite et brillante Hermione Granger. »
Sur ces derniers mots, il se redressa et il disparut de la salle commune. Hermione resta immobile sur sa chaise durant plusieurs minutes, incapable de calmer les battements effrénés de son cœur et de faire baisser la température de son visage. Que venait-il de se passer ? Elle ne parvenait pas à se l'expliquer. Elle ne comprenait plus Malefoy. Il ne rentrait plus dans les petites cases de son esprit. S'il n'avait pas détesté tout ce qu'elle représentait, elle aurait pu croire qu'il flirtait ouvertement avec elle. Il ne le pouvait pas. La présence d'une personne née de parents moldus lui provoquait certainement de l'urticaire. Les vacances ne possédaient pas le pouvoir de changer les gens. Mais comment expliquer ses sourires et ses moues amusées en sa présence ? Hermione n'en avait pas la moindre idée et cela la frustrait au plus haut point.
j'espère que vous avez apprécié la lecture de ce chapitre :)
on se retrouve bientôt pour la suite !
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top