Chapitre 26 : Getting Desperate

Warning : Je tiens à prévenir tout le monde que certains passages évoquent des envies suicidaires et des envies de se faire du mal. Si vous n'êtes pas à l'aise avec cela ou si vous êtes trigger par ce genre de passages je vous déconseille de lire. Il y aura d'autres moments comme cela au cours de cette fanfiction, je tenais à vous prévenir.

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Chapter 26 : Getting Desperate

Les voix des adultes s'intensifièrent autour de la table de la salle à manger, ils tous réclamaient de savoir ce qu'il s'était passé sur le toit quand deux petites silhouettes s'engouffrèrent dans le salon avec de grands cris.

— Papa, Papa ! J'ai eu un soleil ! s'écria une voix aiguë. La maîtresse m'a même applaudi !

Un petit garçon aux traits de lutin et au sourire joyeux se jeta sur Edgar. Il avait la chevelure rousse de son père et les yeux noisettes de sa mère. Quant à la deuxième silhouette, elle alla tirer sur la manche de sa mère avec insistance.

— Tu m'accompagnes à l'école demain, Maman ? plaida-t-elle avec de grands yeux larmoyants.

— Susan, John ! appela une voix aux accents exaspérés.

Susan arborait une abondante chevelure frisée rousse et les mêmes yeux que son père, le portrait craché d'Edgar.

— Et j'ai marqué un but tout seul à la récréation ! ajouta John. Alors tu dois m'accompagner Papa.

— Oh, je dois ? s'amusa son père.

John hocha résolument la tête alors que Susan croisait les mains en suppliant silencieusement sa mère.

— Je suis désolé, ils se sont tous réveillés et pendant que je recouchais Oliver ils en ont profité pour décamper, expliqua l'homme qui avait poursuivi les deux enfants.

Avec ses épis blonds et son visage lunaire, le seul trait en commun que Leopold Bones avait avec son frère aîné restait son nez brusque. Il s'arrêta devant Edgar et fit décoller John du sol à bout de bras.

— Allez viens, p'tit gnome !

— Je suis pas p'tit et je suis pas un gnome ! s'énerva John en se débattant.

— Oh que si, p'tit gnome, plaisanta Edgar. Je ne peux pas t'accompagner demain, John. Mais promis, je serais là vendredi soir pour la réunion avec ta maîtresse.

— Maîtresse ? s'étrangla Sirius.

— Institutrice, clarifia Benji.

— Ah !

— Tais-toi, Black, ordonna Edgar. Bon, allez vous recoucher vous deux !

— Tu viens nous raconter une histoire ? S'il te plaît ! S'il te plaît ! S'il te plaît !

— Et toi, Maman, tu viens à ma réunion ? demanda Susan.

— Oh, chérie... J'aimerais beaucoup, je t'assure, mais je serai en déplacement pour le travail. Il y eu un problème avec...

— Ah oui. Un problème, dit Susan en hochant la tête. Comme d'habitude, hein. C'est pas grave, Lisa et Leo seront là eux.

Ignorant la mine blessée de sa mère, Susan la dépassa et attrapa la main de son oncle. Leopold adressa un regard désolé à Cassiopeia qui se contenta d'embrasser la joue de sa fille. Susan essuya sa joue dès que sa mère se releva pour déposer un baiser sur les cheveux de son fils.

— Je serai là ce week-end, lui promit sa mère.

— C'est ce que tu as dit pour ma réunion avec Monsieur Cuthbert, marmonna Susan. Et ma compétition de natation. Et mon anniversaire.

— Allez, on va se coucher ! Demain c'est école et moi aussi je dois aller au travail ! déclara énergiquement Leopold.

— Papa, on jouera au foot ce week-end, hein ? s'exclama John.

— Promis, bonhomme.

— Et Maman, tu viens nous raconter une histoire ?

— J'arrive mon cœur, assura Cassiopeia.

John lui offrit un large sourire édenté en retour.

— Camille, tu viendras nous dire bonne nuit aussi ? demanda Susan juste avant de sortir.

— Promis, Susie, assura Camille.

— Light est fatiguée, ce n'est pas... commença Dorothy.

— Je te montrerai mon nouveau ballon ! cria John.

— Et moi j'ai eu un vingt en maths ! claironna Susan.

— Au lit, les monstres, grogna Leopold.

— Mais je suis pas fatigué !

— Et moi je suis grande !

— Non, tu es ridiculement petite.

— Mais c'est pas juste ! J'ai dix ans ! Bientôt onze.

— Et moi cinq !

— C'est tout petit cinq. Votre frère est déjà couché, alors ne faites pas trop de bruit dans le couloir.

— Camille regardera mes jouets avant les tiens Susie !

— En même temps tu casses tout mes jouets !

— Nooon.

— Siiii, imita Susan.

— C'est parce que t'as cassé mon ballon !

— Tu me l'avais envoyé dans la tête !

— C'était un accident !

— Mais taisez-vous les monstres...

— Vos enfants sont adorables, décréta Dorothy en refermant sa trousse. Mais avant d'aller admirer leurs jouets, sûrement magnifiques je n'en doute pas, Light va aller se changer dans une chambre pour que je puisse examiner ses côtes.

Camille grimaça et Dorothy l'aida à se relever lentement, pour ménager ses os fragiles. Une fois sur ses pieds, la Serpentard tangua légèrement sur ses jambes, les effets des dernières heures commençant à l'atteindre maintenant qu'elle était en sécurité. Elle s'appuya sur le bras de Dorothy pour sortir de la pièce et Sirius la suivit du regard jusqu'à ce qu'elle disparaisse à l'angle d'un couloir. Castiel était revenu une poignée de minutes auparavant, toujours aussi sombre mais plus calme. Il couvait lui aussi sa cousine du regard, songeur et mélancolique.

— Comment va-t-elle, Sirius ? s'enquit-il.

Le Gryffondor déglutit légèrement et se tourna vers l'Auror à regret. Katherine l'avait rejoins, virant Benji pour pouvoir s'asseoir à côté de son fiancé. Elle tenait la main du français et attendait elle aussi la réponse de Sirius qui se recroquevillait sur sa chaise.

— Sirius.

— Mal, avoua Sirius.

Castiel soupira en passant une main sur son visage, cherchant à reprendre contenance. Mais ses épaules avachies témoignaient d'un abattement qu'il peinait à dissimuler.

— Et je pense que ça va encore empirer. Elle... Elle a subi des chocs.

— Peut-être qu'elle devrait sortir quelques temps de Poudlard, suggéra Katherine. Passer un peu de temps avec Fleur pour commencer à faire son deuil...

— Hors de question, refusa Castiel. Elle ne va pas rester dans la même maison que Belvina Lestrange alors que Rodolphus et Rabastan ont essayé de la tuer ce soir.

— Tu me l'as déjà dit, ses parents la protègent...

— Pour combien de temps ? Elle est revenue en Angleterre, dans un an elle est majeure. Ils ne peuvent plus faire grand chose maintenant, elle est trop âgée. Pourquoi crois-tu qu'ils nous forcent à nous marier ? Je suis sa protection.

Sirius se redressa imperceptiblement, ses sourcils se fronçant alors qu'il comprenait peu à peu ce que Castiel insinuait.

— Camille ? Tu te maries avec Camille ? dit-il lentement.

— Elle ne te l'a pas dit ?

— Non. Elle ne me l'a pas dit, dit Sirius en fronçant les sourcils.

— Vous êtes cousins ! s'indigna Benji.

— Les parents de Black sont cousins, annonça Caradoc.

— Au second degré !

— Oh par tout les mages, maugréa Benji en s'affalant dans sa chaise.

— Merlin, c'est dégueulasse.

— Croyez-moi, ça ne m'enchante pas non plus, se renfrogna Sirius. Mais c'est comme ça chez les Black.

— Et toi et ton frère vous n'avez aucune séquelles ? s'étonna Yuri. Physiques ? Mentales ? Magiques ?

— Moi non. Mais je ne peux pas parler pour Regulus, tout n'a pas l'air de tourner rond chez lui.

— Si Camille était là, elle te frapperait pour avoir dit ça, fit remarquer Castiel avec désapprobation.

— Elle me frappe pour rien. Elle aime juste donner des coups.

— Ouaip et Rockwood en a fait les frais, lança une voix derrière la tablée.

Sirius et Katherine se retournèrent pour voir un adolescent à la chevelure aussi blonde qu'ébouriffée s'engouffrer d'un pas bondissant dans la salle. Si sa voix un peu aiguë ne les avait pas renseignés sur l'identité du blond, sa sacoche qu'il serrait comme un nourrisson le fit.

— J'ai du le ramasser en plusieurs fois, il s'est fait laminer ! s'exclama William. Bon il aurait sûrement réussi à étrangler Camille si Aleks n'avait pas fait exploser le balcon, mais elle s'en est plutôt bien sorti au final. Il a la mâchoire cassé et je ne suis pas sûr qu'il puisse un jour se reproduire ce qui est une super nouvelle selon mon humble avis. Ouh, des chips ! Vous parliez de quoi ?

— Par Merlin ! Tais-toi, tais-toi ! Deux heures que tu papotes dans tout les sens, j'en ai marre ! s'emporta Marlène en laissant tomber plusieurs sacs à terre. Marre !

— Trois heures en fait, corrigea William. Dites, vous auriez pas un truc à boire ? Je meurs de soif.

— Va le chercher toi-même. Cousins ? désespéra Benji. Je croyais que c'était juste cette folle de Skeeter qui l'avait inventé.

— Même Skeeter n'inventerait pas un mariage forcé incestueux. C'est tordu, soupira Yuri. Désolé Caz, mais là ta famille craint vraiment...

— Ils craignent depuis des années, rétorquèrent simultanément Castiel et Sirius.

— Pourquoi ? Tes parents aussi sont cousins, Castiel ? demanda Marlène en attrapant une chips.

Castiel échangea un regard avec le reste de la table puis se leva. Marlène l'interrogea du regard mais Light l'esquiva en marmonnant une excuse et se réfugia hors du salon. La Serdaigle alla s'asseoir à côté de sa sœur aînée qui la détailla avec minutie du regard. La blonde arborait quelques coupures et bleus au visage et sur ses bras, et un bandage noué autour de son front, mais au final semblait en bon état. Yuri finit par se lever également et intima à Sirius de le suivre.

Ils sortirent ensemble de la pièce alors que Marlène interrogeait sa grande sœur sur le comportement de Castiel. Yuri grimaça en entendant les questions avides de la jeune Serdaigle et poussa une porte en retenant un soupir bruyant.

— Pauvre Caz, déjà que sa situation n'est pas facile mais si McKinnon s'en mêle... Elle est capable d'aller régler ses comptes avec Ulysse et Charles Light.

— J'aimerais bien voir ça, marmonna distraitement Sirius. McKinnon contre les Light.

— Je ne comprends pas comment une lionne pareille a fini à Serdaigle.

— Serdaigle c'est la Maison familiale des McKinnon.

— Et c'est quoi ta Maison familiale, Black ?

Sirius dût lui accorder ce point alors que Yuri secouait la tête, un léger sourire flottant sur ses lèvres.

— Crois moi, ton sang ne détermine absolument pas ta Maison. Marlène aurait du finir à Gryffondor.

— Je ne comprend pas pourquoi Camille y est alors...

— Camille ? Elle a été répartie dans quelle Maison déjà ? demanda Yuri.

— Serpentard, lâcha Sirius d'un ton morne.

— Ça n'a pas l'air de t'enchanter.

— Juste... Je comprends pas, soupira Sirius. Je m'attendais pas forcément à Gryffondor, elle n'est pas audacieuse et pas super brave, avec ses résultats je pensais qu'elle irait au moins à Serdaigle. Voir à Poufsouffle, elle est d'une loyauté maladive...

— Ah mais Camille est un cas spécial je pense. Honnêtement avant que le Choixpeau ne se décide, je n'aurais parié sur aucune Maison. Elle est trop volatile, trop changeante. Serpentard c'est une bonne solution pour elle. Elle est ambitieuse, intelligente et loyale. Bon elle est aussi hypocrite, menteuse, arrogante...

— Tout va bien entre vous ? Ou alors elle a encore critiqué tes chapeaux ?

Yuri l'ignora, ce sourire mystérieux étirant toujours ses lèvres minces.

— Franche, parfois même méchante. Égoïste. Contradictoire. Elle pense trop. Et en même temps elle déteste obéir à certains ordres, elle déteste se conformer à certaines règles. Elle est pratique mais pas conventionnelle. Elle a un esprit froid, curieux... Je pense que c'est pour ça qu'elle s'entend si bien avec Caradoc. Et surtout pourquoi elle n'aime pas quand tu n'en fais qu'à ta tête.

— Je n'en fais pas qu'à ma tête.

— Ton nez s'allonge, Pinocchio.

— Pinot Quoi ?

— Rien, référence moldu. Tu es sûrement la personne qui déteste le plus obéir que je n'ai jamais rencontré, Black. La moitié des plaintes que j'entends c'est Alastor et Edgar qui râlent parce que tu ne les écoutes jamais.

Sirius dût à nouveau lui accorder un point alors qu'il se rendait compte avec embarras qu'effectivement il n'écoutait jamais ses supérieurs. Il passa une main sur son cou, gêné par ce constat alors Yuri le poussait dans une pièce peu éclairée.

— Va t'asseoir sur le lit. Bref tout ça pour dire que Light est une Serpentard, peut-être pas la Serpentard type mais elle doit bien s'intégrer là-bas.

— Ouais, dans la Maison de Voldemort...

— Par Merlin, vous voulez bien tous arrêter de rabâcher ça ? s'irrita soudainement Yuri. Gryffondor avait Jugson, Serdaigle avait Dolohov et Poufsouffle avait Minchum. On a tous nos détraqueurs, on a tous des parties sombres.

— Certains plus que d'autres, avança Sirius.

— Peut-être mais ce qui compte c'est ce qu'on fait nous, maintenant. On s'en fout du passé. Nous, on doit juste... On a pas à racheter les erreurs de nos prédécesseurs. Ne laisse pas les vieilles traditions t'atteindre, Sirius. Tu joues leur jeu, le prévint Yuri en lui jetant un t-shirt et un bas de pyjama. Si tu laisses Voldemort diviser le monde en Serpentards et Gryffondors, tu le laisses gagner.

Un muscle dans la mâchoire de Sirius tressauta alors qu'il attrapait le pull que lui tendait Yuri. Le Tireur d'Elite enfonça ses mains dans ses poches en attendant la réponse de Black.

— Le monde était déjà divisé avant Voldemort.

— Oui... Il l'était. Et c'est pour ça qu'il a réussi si facilement à commencer une guerre. Ne prends pas nos ancêtres en exemple, Sirius, déclara Yuri en secouant la tête. Ils cherchaient simplement à survivre. Maintenant on est perdu. On n'a plus de but et on s'accroche à un système basé sur la division et l'inégalité. Nous, on est là pour assurer cette égalité...

— Le WORLD est égalitaire ? C'est pour ça qu'il n'y a même pas dix nés-moldus qui en font parti ?

— Tu n'as même pas rencontré le quart de nos membres, Sirius. Le WORLD est une organisation mondiale.

— L'Ordre du Phénix se résume juste au Royaume-Uni et le nombre de nés-moldu qui en font parti est encore plus réduit, argumenta Sirius.

— L'Ordre n'en est qu'à ses débuts. Albus commence déjà à recruter d'autres personnes.

— D'autres sang-purs...

— Écoute, Black. Tu veux savoir pourquoi vous avez été choisi, il y a trois ans ? Toi, Light, Weasley, McKinnon, Brand ? Pour l'égalité des chances.

— On a été recruté parce que nos noms étaient influents, corrigea Sirius.

— Crois-moi, on n'aurait pas pris Light ou Weasley si c'était le cas. Les Light viennent tout juste de se remettre des scandales autour de Grindelwald et de la perte de leur fortune. Ça fait à peine trente ans qu'ils sont de nouveau influents et riches, et c'est surtout grâce à la renommée des Lestrange. On aurait pris un Yaxley, un Rosier ou le neveu de Dolohov si on avait voulu un sang-pur au nom résonnant. Mais non. On a pris Light, on t'a donné la chance d'apprendre à te battre Sirius. On a sauvé Brand, un sang-mêlé. On a pas perdu notre temps avec des gamins pour rien, on l'a fait pour vous donner une chance de vous écarter de votre famille. D'avoir votre propre opinion sur toute cette guerre. On vous a donné la possibilité de faire un choix. C'est bien plus que l'égalité qu'on vous a donné, c'est la liberté.

— Je me débrouillais parfaitement bien avant vous. J'avais déjà mon propre opinion, affirma Sirius.

— Vraiment ? Ça te dérangerais de me montrer ton dos rapidement alors ?

Sirius blêmit. Ses mains se crispèrent sur le t-shirt qu'il venait d'enfiler.

— Il n'y a rien sur mon dos, assura-t-il.

— Je sais, Black. Pour ce qu'il se passe chez toi. C'est la seule façon dont Albus a pu convaincre Fabian de t'entraîner. Le WORLD t'a appris à te défendre, non ? On essaie de te mettre sur un pied d'égalité avec tes parents et les Mangemorts. On te donne la possibilité de t'enfuir, non ?

— Prewett sait ? releva Sirius d'une voix éteinte.

— Tout le monde sait.

Sirius sentit son cœur tomber dans sa poitrine. Lui qui avait fait si attention durant toutes ses années à ne pas laisser échapper la moindre information sur ce sujet, lui qui avait fait si attention à leur dissimuler son dos... Ça n'avait servi à rien. Dumbledore lui avait promis qu'il ne dirait rien et le professeur avait tout balancé.

— C'est pour que tu puisses te défendre que tu es là au départ Sirius.

— Mais je suis resté.

— Mais tu es resté.

— C'est ça tout le but du WORLD ? Nous convaincre de nous battre contre Voldemort ? Tout ça c'est une mise en scène pour qu'on vous fasse confiance ?

— Le but du WORLD était de préserver la paix dans le monde, d'éviter un nouveau Grindelwald...

— Ça je sais, s'agaça Sirius. Et ce n'est pas un franc succès jusque là.

— Il est vrai qu'on a lamentablement échoué au Royaume-Uni, admit Yuri. Mais dire qu'on a été inutile c'est exagéré. On a arrêté pas mal de mages noirs. On a évité l'ascension de Suvorov en Russie, d'Otto Sidorski en Allemagne, de Thabet en Égypte... Honnêtement si je te ramenais Edgar il te ressortirait une liste bien plus longue. Beaucoup de sorciers noirs se sont sentis inspirés par les prouesses de Grindelwald.

— Pourquoi les seuls que Dumbledore n'arrivent pas à arrêter avant qu'ils deviennent puissants sont d'Angleterre ? soupira Sirius. Moi je pense qu'il aime secrètement le drama.

— Moi je pense qu'il commence peut-être à fatiguer.

— C'est Dumbledore.

— Albus reste un simple sorcier.

— Non. C'est Albus Dumbledore. Le plus puissant sorcier du monde, répéta Sirius.

— Il a plus de quatre-vingt ans...

— Pourquoi tu fais ça ? C'est notre premier atout ! Ne nous prive pas de notre premier atout ! s'indigna Sirius.

— Notre premier atout c'est vous maintenant les jeunes et l'Ordre.

— Il n'empêche qu'on a Dumbledore, grommela Sirius en enfilant son pull.

— Je vais t'envoyer Dorothy. Elle doit avoir fini avec Light et tu as bien besoin de te faire examiner...

— Je te renvoie le compliment.

— Réfléchis à ce que je t'ai dis, Sirius. Abandonne la rivalité Serpentard-Gryffondor. Si tu es là c'est parce qu'on a su en passer outre.

***

— Là j'ai eu juste un neuf mais c'est parce que les gens dans mon groupe faisait n'importe quoi, argumenta Susan en tournant une page de son cahier. Mais j'ai eu un dix-sept en chimie !

— En chimie ?

— C'est comme les Potions mais en moins bien. On avait fait un faux volcan avec Caroline pour notre projet, c'est pas aussi cool qu'une potion de force. Tu es forte en Potions ?

— Non. Mais à Ilvermony Evelyn rattrapait toute mes potions, se rappela Camille.

— Et à Poudlard ?

— Sirius fait exploser mes chaudrons, lui apprit Camille en fronçant les sourcils.

— Ça doit être drôle. J'aime bien Sirius.

— Évidemment, sourit Camille.

— Mais il est un peu idiot, avoua Susan.

Camille la fixa une seconde, seconde durant laquelle Susan réalisa qu'elle avait parlé à voix haute. La rousse se tourna craintivement vers la blonde, qui pinçait fortement les lèvres, puis qui éclata bruyamment de rire et du plaquer une main contre sa bouche pour masquer ses gloussements.

— C'est vrai, admit Camille en se calmant. Il fait tellement l'idiot qu'il en devient idiot. Mais il est assez fort en fait.

— Maman dit toujours qu'il est fort mais quand même stupide.

— Vraiment ? fit en Camille en replongeant dans son fou rire.

— Et Maugrey dit que c'est un incapable.

— Ils n'ont pas tort. Mais il a ses moments.

— Comme quoi ?

— Et bien... Il est très fort en Métamorphose. Un jour, il a même changé une table en lion.

— Un vrai lion ? s'extasia John.

— Tu es censé être couché toi, le rabroua Camille.

— Mais j'ai pas sommeil ! geignit John en roulant sur lui-même.

— J'ai trop hâte d'aller à Poudlard, soupira Susan.

— Moi aussi !

— En attendant, toi tu vas aller te coucher. Allez viens.

Camille se releva et tendit les bras. À contrecœur, John se laissa porter et la sorcière le hissa contre son torse. Le tenant contre elle, elle alla le déposer sur son lit.

— C'est pas juste, pourquoi Susie a le droit de rester ? se plaignit-il.

— Susie a six ans de plus que toi, le gnome. Elle a le droit de rester plus longtemps.

La Serpentard le déposa dans son lit aux couleurs de Poufsouffle alors que le petit garçon baillait dans sa main.

— Et moi qui croyais que tu n'avais pas sommeil, se moqua Camille en lui enlevant son pull.

— Je suis pas fatigué ! protesta John en clignant furieusement des yeux.

— Tu es crevé.

— Non ! Non je veux pas dormir !

— Allez, c'est que pour quelques heures...

— Mais quand je vais me réveiller, toi tu seras plus là ! gémit John. Et Papa et Maman seront partis... Si je reste debout, vous partirez pas.

Camille le fixa un instant avant qu'un sourire n'effleure ses lèvres. John semblait réellement convaincu que s'il ne dormait pas, ses parents ne le quitteraient pas.

— Promis, je viendrais te réveiller avant de partir Johny.

— La dernière fois tu ne l'as pas fait.

— J'ai oublié la dernière fois, admit Camille. Mais cette fois, je n'oublierai pas. Promis, juré.

— Si tu mens tu vas pourrir chez les dragons ?

— Si je mens je vais pourrir chez les dragons, promit Camille en retenant un sourire moqueur.

John soupira bruyamment avant d'hocher la tête.

— D'accord, alors je vais dormir.

— C'est bien, le gnome.

— Tu diras à Maman de venir me faire un bisou ? demanda timidement John en s'allongeant.

— Je te l'envoie dès que je la vois. Bonne nuit.

— Bonne nuit, Camille, bailla John en s'enfouissant sous les couvertures.

Camille éteignit la bougie sur sa table de chevet et observa sa silhouette minuscule enfouie sous son immense couverture jaune. Elle savait ce qu'on pouvait ressentir en voyant ses parents partir sans cesse. Son père n'était jamais là quand elle était petite. Mais même quand il était là, il était tellement distant qu'elle avait l'impression de parler à un oncle grincheux. Sa mère était la seule présence chaleureuse chez elle et encore elle était occupée en semaine avec son travail si prenant.

— Pourquoi tu es blessée ? lança la voix de Susan.

Camille se tourna pour faire face à Susan, habillée de son pyjama à fleurs, son cahier de notes pressé contre sa poitrine.

— Ton frère dort. Allez viens on va dans ta chambre, lui intima Camille.

— Tu esquives la question, releva Susan alors que la Serpentard fermait silencieusement la porte.

— Peut-être. Mais tu n'as pas à savoir pourquoi je suis blessée.

— Un peu quand même, tu es chez moi, avança Susan. Mais je sais déjà : c'est parce que vous vous êtes tous battus. Avec des Mangemorts.

— Ah, petit démon, rit Camille. Est-ce qu'on ne tient pas une future Serdaigle fouineuse ?

— Mon anniversaire est en mars, rappela Susan.

— Je sais, je sais. Tu as bientôt onze ans. Allez, au lit.

— Tu n'oublieras pas mon cadeau, hein ?

— Tu m'enverras une lettre pour me dire ce que tu veux, lui déclara la blonde en poussant la fillette dans le couloir.

— Et pour Noël ?

— Noël c'est un an sur deux.

— Pff... Elle fait quoi ta maman, toi ?

— Moi ?

— Ouais, est-ce que toi aussi elle est jamais là ? Ou c'est juste la mienne ? Elle ratait aussi tout tes anniversaires ? Et tes réunions ?

Camille observa le visage assombrit par le ressentiment de la petite fille, noyé derrière ses cheveux roux. Ses lèvres étaient tordues en une moue.

— Pourquoi elle est jamais là ? marmonna-t-elle. Elle s'en fiche de moi, hein ?

— Si elle n'est jamais là c'est parce qu'elle essaye de faire en sorte que vous soyez heureux et en paix plus tard. Je trouve ça plutôt cool...

— C'est pas cool ! Moi je veux ma mère, pas une super-héros. Tout mes amis, leur mère vient les chercher à la sortie de l'école. Moi c'est mon oncle ou ma tante parce que ma mère à moi, elle préfère travailler !

— Je pense qu'elle préférerait largement être avec vous mais elle n'a pas la choix Susan. Si tu veux tout savoir moi c'était mon père qui n'était jamais là.

— Il fait quoi ?

— Mon père ? C'est le Chef de la Brigade de Police Magique.

— Whoa !

— Ouais, c'est plutôt cool. Avant il était Auror, mais un Auror en relation avec la Coopération Magique Internationale. Alors il n'était jamais là, toujours à voyager, à se battre dans d'autres pays.

— Comme Maman.

— Ouais. Mais ta mère, elle essaie de se rattraper.

— Mal.

— Elle essaie, c'est ce qui compte. Moi, il n'a jamais essayé. Il nous a laissé à la charge de notre mère et après il nous parlait à peine. Et ma mère elle a recommencé à travailler après la naissance de ma petite sœur. Je la voyais plus beaucoup.

— Et tu leur as pardonné, toi ? Vous êtes plus proches maintenant ?

Camille se tut. Oui, elle leur avait pardonné leur absence. Non, elle n'était pas proche d'eux. Même sa mère lui apparaissait distante, inaccessible. À chaque fois qu'elle leur parlait elle sentait le gouffre qui les séparait. Parce qu'ils ne parlaient pas vraiment, ils évoquaient des sujets aussi futiles qu'inutiles et au fond ses parents ne la connaissaient absolument pas. Ils ne savaient rien de sa vie.

Ils ne savaient pas qu'elle avait un petit-ami, qu'elle avait intégré l'équipe de Quidditch, ni que la plupart de ses amis n'étaient ni sang-pur, ni traditionaliste. Tout simplement parce qu'elle n'était pas comme eux. Camille n'avait rien à voir avec les Light

Elle ne croyait pas à la pureté du sang, à la supériorité des sorciers, à la magnificence de Grindelwald... Mais jusqu'à hier soir, elle ne s'était jamais offusquée devant sa famille tout entière. Elle avait préféré les mépriser silencieusement et leur cracher dessus derrière leur dos plutôt que de s'affirmer. Au final Camille était juste une froussarde. Une fille à la santé ruinée. Une fille horrible pour bien des raisons. Une ignoble traître à son sang. Mais certainement pas une Light.

Elle se laissa tomber sur le lit de Susan, ses bras pendants et ses mains retombants sur son ventre.

— Est-ce que tu trouves que je suis une Light ? demanda brusquement Camille en se tournant vers Susan.

La petite fille haussa les épaules et s'assit à côté d'elle alors que la blonde se remettait à fixer le plafond, perplexe.

— Tu ressembles à Castiel, admit Susan. Pas à ta sœur par contre.

— Tu as déjà vu Sophie ?

— Ouaip, l'été dernier. Elle était venue avec le frère de Castiel et ton père pour parler à Papa. Il n'était pas content après.

— Sans blagues...

— Ton père fait peur.

Un rire amer s'échappa des lèvres de Camille qui se remit à fixer le plafond.

— Oh, tu n'as rien vu Susie.

— Mais vous avez les mêmes yeux. Très bleus.

— Tu trouves que je fais peur ?

— Non, pas vraiment. Enfin sauf que là tu es couverte de sang et de bleus donc oui tu fais peur. Et quand tu nous cries dessus pour qu'on arrête de se disputer moi et John.

— En même temps vous êtes insupportables quand vous vous criez dessus, râla Camille.

— En fait t'es une Bones. Pas une Light, sourit Susan.

Camille se tourna vers elle et se redressa sur ses coudes pour planter ses yeux clairs dans ceux sombres de la petite fille.

— En tout cas, moi je te considère comme ma sœur, avoua Susan.

— Vraiment ?

— Tu fais tout ce qu'une grande sœur fait. Tu m'envoie des lettres et des cadeaux, tu me grondes, tu regardes mes notes. On se dispute parfois. J'ai pas de grande sœur mais quand t'es là... J'ai l'impression d'en avoir une, continua Susan.

— Susie tu es une adorable fausse petite sœur.

— J'aurais le droit à un cadeau à Noël du coup ?

Camille cligna des yeux avant de s'étrangler d'indignement. Elle finit par éclater de rire devant le sourire innocent de Susan. Secouant légèrement la tête, la Serpentard tenta de se calmer.

— On verra, allez dodo ! dit-elle en se relevant. Espèce de saloperie.

— Une super fausse grande sœur m'offrirait un cadeau pour Noël, argumenta Susan.

— Et bien tu peux envoyer une lettre à Sophie et Fleur, elles confirmeront que je suis une sœur abominable.

Susan se glissa dans les couvertures et posa son cahier sur sa table de chevet. Elle tira ses couvertures bleues jusqu'au menton et fixa Camille de ses deux grands yeux.

— J'aime bien les Dragées Surprises, fit-elle timidement.

— Dodo, répéta Camille en se levant.

— Pas cool, soupira Susan. Tu me diras au revoir demain ?

— Oui, promis.

— Okay, bailla Susan.

— Dors Susie.

La fillette grogna des mots incompréhensibles en se tournant dans son lit, ramenant sa couverture sur sa tête.

— Tu vas me manquer, marmonna-t-elle.

— Toi aussi.

Camille tira sa couverture pour déposer un baiser sur son front et se releva. Mais Susan passa ses bras autour de son cou et l'attira dans un câlin à lui rompre les os.

— Tu vas faire attention ? chuchota-t-elle.

Camille passa un bras dans son dos et laissa la tête de la rousse retomber sur son épaule malgré la douleur qui s'était réveillée dans ses côtes.

— Oui, promis. Dors, Susie.

Susan se détacha à contrecœur et s'enfouit sous ses couvertures une nouvelle fois.

— Bonne nuit.

— Bonne nuit.

La Serpentard souffla la bougie et sortit de la pièce à pas plus discrets, laissant la porte entre ouverte en sortant. Susan n'aimait pas être dans le noir. La blonde se retourna pour partir et se retrouva face au torse d'Edgar.

— Camille, tu vas mieux ?

— Oui, oui. Enfin j'ai promis à Goldstein de revenir rapidement. Je couchais juste tes enfants comme me l'a demandé Cassie.

— Ils dorment ?

— John probablement mais sûrement pas Susie. Et John a réclamé sa mère.

— Évidemment, fit Edgar en fixant la porte de son aînée. Je vais aller dire bonne nuit à Susan.
Goldstein est au bout du couloir, à gauche.

Camille hocha la tête et s'en alla.

— Oh Camille ! l'interpella Edgar. Merci pour les enfant.

— De rien, d'habitude je n'aime pas les enfants mais eux ça va.

Edgar sourit avant de s'engouffrer dans la chambre de sa fille en l'appelant doucement.

Camille ne resta pas pour voir si cette rencontre allait bien se terminer et préféra rester concentrée sur son problème actuel : une médicomage qui ne cessait de la réprimander pour chacune de ses blessures et comment elle les avait reçues. Elle finit tout de même par rentrer dans la pièce, tirant sur le large t-shirt que Dorothy lui avait ordonné d'enfiler ainsi qu'un caleçon qui lui allait à peine. Elle fut agréablement surprise en entrant quand elle tomba sur la silhouette avachie de Caradoc dans un large fauteuil.

— Professeur Dearborn ?

— Ah Camille. Dorothy m'a demandé d'inspecter tes blessures.

— Pourquoi elle ne le fait pas elle ?

— Elle a été rappelé à Sainte-Mangouste par urgence. Ils croulent sous les blessés depuis hier soir. Des attaques ont lieu un peu partout dans Londres et Plymouth. Assis-toi.

Camille s'exécuta et alla s'asseoir au bord du lit, jouant toujours avec l'extrémité de son t-shirt, soudain consciente que c'était un homme qui allait l'examiner et non pas une femme. Elle préféra garder son malaise pour elle et ignora son ventre qui se tordit lorsque Caradoc la rejoignit, sa sacoche en main. Il la posa à côté d'elle sur lui et la fouilla pour en sortir un stéthoscope.

— On va commencer par l'examen de routine, puis je m'occuperai de tes plaies et de tes côtes. Mais d'abord est-ce que tu as mal quelque part ?

— Mes côtes, un peu à mon nez et à peu près tout mon visage. Mon coude aussi.

— Droit ou gauche ?

— Gauche.

— Bien comme tu es droitière, les dégâts seront moins importants. Tu peux me raconter comment tu t'es blessée ?

Camille du se retenir de reculer quand Caradoc enfila son stéthoscope et posa une main sur son dos. Il le posa sur son cœur et écouta ses battements tout en attendant sa réponse.

— Je me... Je me battais contre Rockwood. Enfin Augustus Rockwood, c'est...

— Je sais qui est Rockwood. Un employé de Dorcas, soupçonné d'usage de magie noire depuis quelques mois.

— Il y avait aussi Antonin Dolohov et un homme nommé Rolland, un Gendarme... Et puis Rabastan Lestrange. Son frère Rodolphus.

— Tes cousins, n'est-ce pas ?

— Ouais, mes cousins...

— Tousse. Bien. Donc ton nez et tes côtes ?

— Je me battais contre Rockwood et on a fini par abandonner nos baguettes. Il m'a cassé le nez et a essayé de m'étrangler...

— Ce qui explique les hématomes sur la gorge et les marques de strangulations, marmonna distraitement Caradoc en fouillant dans sa sacoche.

— Oui, dit Camille en se raclant la gorge. C'est Aleks qui m'a sauvé la vie, il a fait explosé le balcon où on était et on est tombé d'un étage... Rockwood m'a sûrement abîmé une ou deux côtes mais je m'en suis fêlée quelques unes à cause de la chute...

— Pas jute fêlées. Il y a en une qui était cassée, Dorothy l'a ressoudé dès qu'elle l'a remarqué. Heureusement.

— Comment va Aleks ? demanda subitement Camille. Je l'ai entendu crier, dites-moi qu'il va bien. Je pensais qu'il...

— Aleksander vivra. Maintenant je me concentre sur toi, l'interrompit Caradoc. Coude ?

— Je suis tombée dans une fontaine depuis le troisième étage et il a heurté le fond quand j'ai essayé de remonter.

— Peut-être fêlé également alors... Avec le choc et l'impact... Et les saignements sur les bras ?

— Des éclats de verres quand j'ai brisé le plafond de verre... William m'a réparé la cheville aussi.

— Oui, il s'améliore mais Dorothy m'a dit que ça restait brouillon. Ta cheville sera sûrement un peu fragile dans les prochains jours mais on va éviter de mettre une attelle, ça attire trop l'attention. Déjà que celle d'Aleksander va soulever des questions...

— Aleks a une attelle ?

— Dis-moi, t'es-tu cogné la tête ? Assez fort ?

— Oui, pendant ma chute et un peu plus tard dans la fontaine. Mais Aleks doit...

— Te sens-tu nauséeuse ? Une migraine particulièrement lancinante ? Des sensations de vertiges ?

— Ça dépend des moments. Surtout l'envie de vomir en fait et le monde tourne quand je me concentre trop.

— Peut-être une légère commotion cérébrale alors. Bois-ça. Tout d'un coup. Puis tu avaleras ces deux pilules, la jaune avant la blanche, sans les croquer. Je vais te chercher un verre d'eau pour les faire passer. La potion va réduire la douleur de tes côtes.

Camille observa le flacon et les pilules que le professeur de médicomagie lui avait tendu et déboucha la fiole précipitamment. La douleur n'était pas si gênante mais peut-être qu'elle l'empêcherait de voir le monde tanguer devant elle. Ou alors de s'interroger sur toute cette soirée. Elle l'avala d'un trait comme conseillé et esquissa une grimace, tirant la langue face au goût immonde de la potion. Quant aux pilules, Camille eut du mal à les avaler sans les croquer. Elle s'aida du verre d'eau que lui avait ramené Caradoc.

— Dorothy m'a dit qu'elle s'était déjà occupée de tes côtes. Mais tu devras aller voir Pomfresh cette semaine pour qu'elle puisse t'administrer tout les soins nécessaires. Les côtes sont fragiles, elles ne se réparent pas en une nuit contrairement aux bras.

— Mais alors pourquoi Aleks va porter une attelle ?

Elphias s'interrompit dans son geste, alors qu'il versait du désinfectant sur un bout de tissu avant de relever la tête pour fixer la Serpentard.

— Parce que du poignet jusqu'à l'épaule, le bras d'Aleksander est rongé par plusieurs sorts de magie noire. Les effets sont imprévisibles et dangereux. Il a failli perdre son bras gauche cette nuit, déclara Caradoc d'une voix neutre. Guérir les plaies empreintes de magie noire est beaucoup complexe que guérir un simple os cassé... Le poison coulait directement dans ses veines. J'ai du le saigner sans anesthésie pour retirer une partie de la magie noire qui coulait dans son sang et quand j'ai jeté un sort, son corps a réagi trop violemment. C'est pour ça qu'il a crié. J'ai du laisser Elphias s'en charger après. Je ne sais pas combien de temps il faudra pour qu'il reprenne le contrôle total de son bras. Peut-être qu'il n'y arrivera jamais. Quant à son œil, je ne suis pas sûr que ça parte...

— Son œil ?

— Un des effets indésirables d'un excès de magie noire. Les mélanges de malédictions et d'enchantements maléfiques peuvent créer des anomalies chez les victimes. Son œil gauche a perdu sa couleur.

— Comment ça sa couleur ?

— Je ne peux pas vraiment le décrire, tu le verras par toi-même quand il se réveillera.

— Mais c'est dangereux ? Il ira bien ?

— Il aura du mal à voir de cet œil au départ, la lumière sera un peu trop agressive pour lui. Heureusement qu'il pleut tout le temps à Poudlard, le soleil serait une torture pour lui la première semaine. Au bout d'une semaine, il aura recouvert la vue de cet œil si tout se passe bien. Bien sûr ce genre de cas reste spécial et délicat, on n'est jamais sûr de comment la magie noire affectera un organisme, surtout les yeux. Par exemple, tu aurais sûrement perdu la vue si tu avais été à sa place à cause de ta myopie. Et si l'organisme d'Aleksander n'était pas si familier à la magie noire, il serait mort à l'heure qu'il est.

Camille sentit un poing se refermer autour de sa gorge et sa nausée augmenta soudainement à la pensée de perdre Aleksander. Ses doigts se crispèrent sur ses cuisses et ses ongles s'enfoncèrent brièvement dans sa peau. L'idée de ne plus jamais le voir, de ne plus jamais pouvoir lui parler... Elle laissa échapper un reniflement alors qu'elle ne s'était même pas rendu compte que ses yeux s'étaient humidifiés.

— Mais il va bien, se rassura-t-elle.

— Je n'irai pas jusqu'à dire qu'il va bien. Il est en vie, il s'en est sortit de peu... Mais la douleur va revenir parfois. Le saisir sans qu'il puisse y faire quelque chose. Cette nuit va lui laisser des séquelles à vie.

— Est-ce que je peux faire quelque chose ? murmura Camille d'un air coupable.

— Bien sûr. Justement je voulais vous en parler à toi, Sirius et Marlène puisque vous êtes proches. Surtout toi. Il va peut-être faire des crises dans les semaines à venir si son bras est exposé à trop de magie. Emmenez-le immédiatement à l'infirmerie mais si vous n'arrivez pas l'atteindre pour une quelconque raison il faudra lui couper son avant-bras. Une coupure profonde pour que son sang puisse couler. La magie noire restante devrait s'échapper.

— Je croyais que vous l'aviez déjà débarrassé de la magie noire ?

— On ne se débarrasse pas de la magie noire. On la purge. Et ça ne se fait pas en une fois mais sur plusieurs années, la magie noire sait s'infiltrer profondément dans notre organisme et nous ronger de l'intérieur. Mais elle sait surtout se dissimuler à notre vue jusqu'à ce qu'elle agisse.

— Et du coup on doit saigner Aleks à chaque fois qu'il fait une crise ?

— Pas vous, l'infirmière. Je te le dis pour que tu sois parée à toute éventualité mais les saignées sont compliquées, il faut qu'elles soient effectuées par des spécialistes.

— Comment on saura s'il fait une crise ?

— Il le saura. Il aura des sensations de malaises, des vertiges, des difficultés pour marcher correctement, une migraine atroce, des démangeaisons dans son bras gauche, des sueurs froides. Et son œil gauche redeviendra progressivement aveugle...

— Vous ne pouvez vraiment rien faire pour l'œil ? s'enquit Camille.

— Je ne peux rien faire de plus que ce que j'ai déjà fait Camille, s'excusa-t-il en répandant une pommade odorante sur ses coupures de bras.

— Mais il y a forcément quelque chose ! On vit entourés de magie, Merlin !

— On ne peut pas guérir la magie noire définitivement. Et son œil... La première fois que j'en ai vu un comme ça, c'était le mage noir le plus puissant de l'histoire qui me regardait.

— Qui ? Grindelwald ?

— Je pense que je n'ai jamais été autant effrayé que quand son œil blanc m'a fixé... Il a du le développer suite à une surexposition à la magie noire, c'était tout bonnement terrifiant.

— Mais Aleks a reçu quelques sorts, Grindelwald était un mage noir ! Ils ne peuvent pas... Ça n'a aucun sens !

— La magie est absurde.

« La magie est absurde, Camille. »

— Non. Non, refusa-t-elle. La magie n'est pas absurde ! La magie est... La magie est magnifique et horrible mais pas absurde ! Il y a un sens à notre monde, on sort pas juste de l'imagination farfelue d'un pauvre moldu ! On est une civilisation avec des règles et des lois, on a des idées, on progresse chaque jour, ce n'est pas absurde ça ! On contrôle la magie, elle ne peut pas être absurde bordel ! Sinon nous aussi tout ce qu'on fait est absurde ? Il n'y a plus aucune logique, faisons n'importe quoi ?

Caradoc ne répondit pas et Camille s'extrait du lit, s'agitant dans tout les sens.

— Je fais des cours de théories de magie chaque jour, la magie n'est pas absurde ! Elle est ordonnée ! Elle est logique ! Dire qu'elle est absurde, c'est juste dire que vous faites n'importe quoi avec ! Ce n'est pas la magie qui est absurde, c'est vous !

— Camille, s'agaça Caradoc. Ne me...

— Je suis désolée, professeur. Mais il y a forcément une explication à l'œil d'Aleks !

— Ce qui est arrivé à l'œil d'Aleksander est une anomalie magique ! Et j'en suis sincèrement désolé mais il n'y a pas de contre-sort !

— On peut forcément le guérir si on peut l'infliger, s'emporta Camille.

— Si Grindelwald ne s'en est pas débarrassé, je doute que quiconque excepté Albus puisse guérir ce type de blessures. Et encore, je doute qu'Albus en soit capable !

— Mais Grindelwald l'a sûrement gardé de son plein gré ! Il l'a fait pour intimider, il s'en foutait de sa santé ! Vous n'allez pas laisser Aleks souffrir comme un...

— Light, appela Caradoc en se levant. Ça suffit.

— Mais Aleks...

— Non, tu te tais ! C'est là que tu laisses l'adulte parler maintenant, Light ! Parce que oui, tu restes une enfant, Camille ! Et je pense avoir vécu et vu assez d'horreurs pour t'affirmer que la magie est effectivement absurde parce que l'Homme l'est ! Et je sais que ce n'est pas quelque chose de guérissable parce qu'Abraxas Malefoy essaie de s'en débarrasser depuis deux décennies ! Il est même venu me supplier de l'aider. Parce que oui, c'est douloureux, ça va lui pourrir la vie mais c'est comme ça et on ne peut rien y faire. Tu crois vraiment que ça me fait plaisir ? Que je suis absurde ? Que je m'en fiche ? Ce n'est pas toi qui va devoir lui annoncer qu'il souffrira toute sa vie parce que ton cousin l'a torturé avec de la magie noire ! Ce n'est pas toi qui l'a vu se tordre de douleur alors que j'essayais de lui sauver la vie ! Ça fait déjà plusieurs heures que je me creuse la tête pour trouver des solutions pour qu'il puisse continuer à vivre normalement ! Bien sûr que je vais essayer de le guérir même si c'est impossible ! Je n'abandonnerai pas ce gamin. Tu peux m'aider si tu veux. Mais tu n'as aucun droit de me dire ce que tu m'as dit, de t'énerver sur moi ! La seule personne qui aura le droit sera Aleksander et c'est la seule personne dont j'accepterai la colère. Parce que milles gargouilles oui, il le méritera. Pas toi. Tu n'as pas le droit te plaindre ! Tu n'as pas le droit de te mettre en colère !

Caradoc se tenait à deux pas d'elle et pour la première fois Camille se sentait minuscule à côté de lui. D'autant plus qu'elle n'arrivait plus à retenir ses pleurs désormais et que les larmes coulaient à flot sur ses joues.

« Tu n'as pas le droit de te plaindre. »

Un hoquet s'échappa d'elle alors qu'elle essayait de calmer ses pleurs mais ses larmes redoublèrent et elle renifla bruyamment, ses bras serrés contre son ventre et ses yeux fixant obstinément le sol pour éviter le regard brûlant de Caradoc.

« ...parce que ton cousin l'a torturé avec de la magie noire ! »

Il aurait pu dire Lestrange, il aurait pu diriger sa colère contre le Mangemort responsable de la douleur d'Aleksander. Mais non, il l'avait dirigé contre elle. Il avait dit « ton cousin », appuyant exactement sur ce qu'elle redoutait. Sur sa famille.

Camille n'avait meme pas entendu la fin du discours de Caradoc, sa voix se mélangeant avec tant d'autres dans son esprit... Des éclairs vert dansant devant ses yeux, bordel elle haïssait le vert.

« Apprécie ta chance, n'essaie pas de te morfondre ! »

« Un Impardonnable, par Flamel, ils ont osé...»

« Tes cousines sont les premières d'une longue liste. »

«  Pourquoi tu la laisses te traiter comme ça ? Endoloris ! »

« Tu es une Light, tu es forcément avec eux ! »

« Je ne sais même pas pourquoi je suis comme ça, on n'était même pas si proche moi et Capucine... »

« Laisse-la tranquille sa cousine vient de mourir. »

— J'ai tué deux Mangemorts, murmura-t-elle.

« Tu t'es ruinée la santé pour nous aider ! »

— Je ne sais même qui c'était.

« Laisse ton esprit te guider, pas ton cœur. »

— Je les ai tué. Et je n'ai même pas regardé en arrière.

« Un jour vous nous rejoindrez, parce que c'est inscrit dans vos veines, c'est inscrit dans votre sang. »

— Sûrement parce que je suis une Light. Pas une Bones.

« Je te reconnais tu es une Light. »

« Tu es une Light, tu es forcément avec eux ! »

« Le nom c'est tout ce qui compte. »

« Tu peux pas te cacher de tes cousins Camille, on va te trouver ! Te sortir de ta cachette et tu viendras avec nous ! »

« Tu ne peux pas aimer les moldus, Camille ! Il n'y a pas de pourquoi, tu es ma fille, point ! Je n'accepterais jamais ça de ma fille, tu ne peux pas être une traître à ton sang, jamais. Compris ? Ce serait absurde. »

— Mais le monde est absurde. L'Homme est absurde apparemment, rien n'a plus aucun sens. Tuons des gens. Détruisons des vies. Mais y'a pas d'aller-retour possible après.

« Narcisse riait aux larmes tellement il te trouvait stupide ! »

« On devrait commencer un club toi, moi, Andy et Castiel ! Les moutons noirs ! »

« Toi je t'aime bien Capucine, t'es drôle. »

« Emma était tellement joyeuse et pleine de vie... Ça semble surréel d'être à son enterrement... C'est surréel. C'est... »

— Ils ne sont pas tous horribles.

« Je les hais, tous. Je les hais, je les hais, je les hais tellement ! »

« Tu dis que tu les détestes mais je t'ai vu sourire quand tu les as vu sur le quai. »

Camille se laissa tomber contre le lit, ses genoux repliés contre sa poitrine et son front reposant sur ses genoux. Les larmes continuaient de couler mais elle sentait qu'elles se tarissaient au fur et à mesure. Elle haïssait tellement Caradoc et tout les autres d'avoir raison. Bordel, elle se haïssait de s'haïr autant. Sirius n'aurait pas dû la sortir de cette maudite fontaine. Il aurait évité la mort à quatre personnes et Camille n'aurait pas si mal.

S'il l'avait simplement laissé dans cette maudite fontaine, elle n'aurait plus mal. Elle n'aurait plus rien. Plus de douleur, plus de Light, plus de guerre... Plus rien. Ce serait merveilleux.

Avant qu'elle n'ait pu se retenir, Camille frappa sa tête contre le lit de toutes ses forces. Elle heurta le bois du sommier et une vague de douleur déferla sur elle. Mais elle recommença, une fois, deux fois, trois fois... Jusqu'à ce que sa tête sonne et que le monde ne soit que tâches floues à ses yeux. Elle se laissa aller contre le lit, ses bras encerclant ses genoux. Elle enfonça ses ongles dans ses mollets de toutes ses forces, assez longtemps pour que ce soit douloureux, pas assez pour que le sang coule. Elle laissa un souffle tremblant échapper ses lèvres alors que ses larmes se tarissaient finalement.

Camille resta un instant dans cette position, exténuée par toute cette nuit. Elle finit par essuyer ses joues et ses yeux du revers de ses mains, reniflant bruyamment.

Caradoc avait quitté la pièce dès qu'il avait vu que Camille ne répondrait pas, maugréant qu'il préférait lui envoyer Castiel. Mais ce ne fut pas Castiel qui entra dans la pièce.

— Camille ? Caradoc m'a dit que je devais venir...

— Je suis désolé Edgar, sanglota-t-elle bruyamment. C'est de ma faute s'ils sont morts !

Camille ragea de voir que les larmes s'étaient à nouveau rassemblées dans ses yeux à la vue du Haut Juge. Edgar fut coupé dans son élan et resta figé au milieu de la pièce, à quelques pas de Camille. Son regard vert la scruta longuement avant qu'il ne la rejoigne près du lit, se laissant choir près d'elle. Elle lui tournait le dos, son menton reposant sur ses genoux et ses yeux brillants fixant résolument le mur blanc.

— Bien sûr que non ce n'est pas de ta faute, soupira Edgar. On se battait, les morts font partis des conséquences d'une guerre.

— J'en ai tué deux, deux Mangemorts, lâcha-t-elle d'une voix tremblante.

Edgar cligna des yeux et son regard quitta sa montre pour venir se poser sur la jeune fille.

— Je vais finir à Azkaban, gémit-elle.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? demanda plus durement Edgar, le regard sombre.

— C'était un accident... Je voulais rejoindre le toit mais ils essayaient de me faire tomber et m'envoyer des sorts alors j'ai riposté ! C'était un réflexe, j'ai juste riposté ! J'ai... J'en ai stupefixé un qui est tombé dans la vide. Il s'est écrasé sur la piste de danse, il y avait du sang partout... Et les autres... Ils se sont énervés après et j'ai expulsé un autre Mangemort. Il est tombé quelques mètres à côtés de l'autre... Je savais pas quoi faire... Je ne savais pas, j'ai eu peur, j'ai paniqué... Je suis désolée... J'ai juste continué à courir....

— Effectivement on a retrouvé deux corps sur la piste de danse.

Edgar soupira et fouilla son veston pour en sortir une cigarette et un briquet. Il alluma rapidement la cigarette et laissa un instant la flamme du briquet danser devant ses yeux avant de l'éteindre.

— Je ne t'en propose pas. Cassie me tuerait, commenta-t-il.

— Plus de cigare ? marmonna Camille.

— Ils prenaient trop de place, expliqua Edgar avant de prendre une grande inspiration. Les noms des Mangemorts étaient Samuel Delacour et Nathaniel Rowle. Les parents de Nathaniel étaient présent ce soir. Il a été envoyé en urgence médicale à Sainte Jeanne la Brûlée mais les médicomages ont dit qu'il ne survivrait pas jusqu'au matin. Il doit être mort à l'heure qu'il est. Les Rowle veulent porter plainte mais tu n'as rien à craindre.

— Pourquoi ? Je suis une meurtrière, c'est pas rien...

— Parce que même s'ils semblaient vraiment affectés par la perte de Nathaniel, son frère aîné va les décourager de lancer des poursuites judiciaires. Il vaut que mieux que les Aurors ne fouillent pas dans leur famille, il pourrait découvrir que les deux fils sont Mangemort.

— Le frère aussi, hein ? devina Camille avec un sourire forcé. Sang-purs ?

— Sang-mêlés influents, Thorfinn Rowle vient de décrocher un poste important à la Coopération Magique Internationale. Ce serait dommage que les Aurors lui demandent de relever sa manche. Alors il n'y aura pas de poursuite judiciaire et tu ne finiras pas à Azkaban, Camille. De toute façon même avec un procès tu n'aurais pas été condamnée parce que c'était de la légitime défense et que les seuls témoins sont des Mangemorts ou des apprentis mages noirs. Aucun n'est assez fou pour attirer l'attention sur eux après une attaque si importante. Les Aurors vont passer deux longs mois avant que tout se tasse. Cassie a déjà été appelé trois fois par Fleamont Potter, heureusement qu'Alastor peut la couvrir le temps qu'elle se remette de Castelobruxo...

— Elle va bien ?

— Moins bien qu'elle ne le laisse paraître. Elle ne sait jamais quand s'arrêter, s'agaça Edgar en recrachant une bouffée de fumée. Elle a reçu pas mal de sorts mais elle refuse de se reposer maintenant. Dire qu'elle vient à peine de se remettre de l'accouchement catastrophique d'Oliver... Elle en fait trop.

— Qu'est-ce qui s'est passé ? Avec Oliver ?

— Il est nait avec un mois d'avance. Nous nous étions pas suffisamment préparés... Mais Oliver et Cassie vont bien maintenant, c'est l'essentiel.

— Susan me l'a montré, il est adorable. Il me rappelle un peu Fleur à la naissance. Ils ont les les mêmes joues et les mêmes yeux, dit-elle en souriant.

— Sirius nous a dit que vous étiez tombés sur ta famille. Tu vas bien ?

— Ça pourrait aller mieux...

— Oui, je pense que ça pourrait aller mieux aussi. Mais après tout ce qui s'est passé je pensais que tu irais plus mal. Alors je vais répéter : est-ce que tu vas bien ?

— Oh dans ce cas, ria-t-elle d'un rire sans joie. Honnêtement ? Non. Je me sens horriblement mal. J'ai sûrement passé la pire soirée de ma vie. Hier tout allait bien et maintenant j'ai tué deux personnes et j'en ai vu deux autres mourir sous mes yeux, donc non je me sens comme une merde. Sans moi, personne serait mort et Capucine... Capucine serait toujours en vie. Elle et Narcisse se disputeraient encore, elle m'énerverait à sauter partout et rire trop fort mais au moins elle serait toujours là, hoqueta-t-elle. Dix-huit ans... Dix-huit. Ma cousine. Ma cousine... C'est la deuxième que Bellatrix Lestrange tue... Mais Capucine, elle, elle ne faisait pas partie du WORLD...

Le regard de Camille se perdit dans le vide et elle se blottit contre le bois du lit.

— Je comprends pas, murmura-t-elle. Capucine n'a jamais rien fait, elle n'aurait pas du mourir. Elle était insignifiante, sa vie ne valait rien à leurs yeux, elle n'aurait pas du être tué ! Ça n'a aucun sens. Et Lionel... J'aurais pu le sauver, Edgar. J'aurais pu mais il est mort alors que moi, je suis là...

— Lionel n'était pas tout à fait innocent dans cette histoire, la coupa Edgar. Il a aidé Dolohov et Rolland à trafiquer les sorts et à kidnapper les Bazin.

— Mais il l'a fait pour sauver sa petite sœur, gémit-elle. C'était juste une élève. Elle et moi on devait avoir le même âge et elle a perdu son grand frère devant ses yeux. Mais j'aurais pu le sauver, il ne voulait juste pas m'écouter bordel ! Il refusait de m'écouter parce que j'étais une Light. Il disait que je devais forcément être avec eux et qu'il ne pouvait pas me faire confiance. C'est vrai, hein ? Ils ne vont jamais me faire confiance, juste parce que je suis une Light ? Parce que Sirius est un Black ? On restera des ennemis à leurs yeux ? À quoi ça sert alors tout ça ? On risque notre vie pour eux mais ils ne nous font même pas confiance !

— On vous fait confiance nous, assura Edgar. Vous êtes là parce qu'on vous fait confiance.

— Et Fabian ? Il nous fait confiance lui ? Il nous déteste !

— Prewett est juste secoué par la mort de son père, Camille.

— Caradoc a peut-être raison alors je fais partie des chanceuses. Mais moi j'en ai quand même marre. Peut-être que Lionel a raison, j'ai juste pas de place ici. Avec mon nom c'est chez les Mangemorts que je vais finir avant la fin de la guerre.

Camille replongea dans la contemplation du mur, attendant qu'Edgar explose. Mais elle eut beau attendre longtemps, elle n'entendit que le froissement d'un vêtement. Edgar lui tapota l'épaule et elle se retourna pour voir qu'il lui proposait une cigarette.

— J'ai arrêté les cigares à la naissance d'Oliver parce que la fumée est très mauvaise pour les bébés. C'est Caradoc qui me l'a dit. Ça m'a surpris parce qu'il l'a dit parce qu'il s'inquiétait vraiment pour Oliver. Et Caradoc ne fait pas partie des personnes qui se soucient de la santé d'un bébé à première vue. Mais au fond, c'est un type bien. Il ne sait juste pas s'exprimer. Il est maladroit avec ça et quand il s'emporte il le regrette. Il est venu me voir dans la chambre de John pour me dire qu'il « avait merdé » et que tu avais besoin de moi. Alors je suis venu.

— John devait être déçu.

— Il dormait comme un bébé et Cassie a pris la suite. Et moi ça ne me dérangeait absolument pas de m'occuper toi. Tu m'impressionnes tu sais ? Réussir à rester concentrer sur la mission alors que tu avais vu ta cousine mourir, que tu avais reçu un Doloris, dit Edgar, sa voix se brisant à la fin de sa phrase. Tu es douée, tu es intelligente mais tu restes humaine. Tu aurais pu arrêter mais tu as continué. Tu es juste une gamine et pourtant tu ne t'es pas arrêté... Parce que tu voulais absolument continuer à te battre. Si ça ne prouve pas que tu es différente des autres Light alors je ne sais pas ce qu'il le fera... Tant pis si Lionel ne l'a pas vu. Ce qui compte ce n'est pas ce que les autres pensent, c'est le fait que tu saches que toi tu es dans le bon camp. Tu n'es pas une Mangemort. Nous te faisons confiance et... C'est pour ça que Cassie et moi on a quelque chose à te demander.

Camille se retourna finalement, son dos meurtri reposant toujours contre le lit et ses genoux repliés contre sa poitrine. Néanmoins elle réussit à soutenir le regard paisible et bienveillant d'Edgar.

— Cassie va me tuer de faire ça sans elle mais... Camille est-ce que tu veux être la marraine d'Oliver ? demanda-t-il très sérieusement.

— Marraine ? répéta-t-elle.

— Si Cassie ou moi... Si on venait à mourir, ce serait toi qui récupérerais la garde d'Oliver. Je sais que tu es encore jeune et que tu ne pourras pas signer les papiers avant tes dix-sept ans mais on tenait quand même à te proposer. Si tu ne sens pas capable ou si tu ne veux pas, tu n'es pas obligée d'accepter...

— Évidemment que j'accepte, sourit Camille. J'adore déjà Susie et John même si j'ai pour habitude de détester les enfants ! J'adorerais être la marraine d'Oliver !

— Bien, fit Edgar, rassuré. Parce qu'on avait demandé à Alastor d'être le parrain mais honnêtement je te fais plus confiance pour t'occuper d'un bébé...

— Grave erreur. Vous avez choisi Maugrey ? râla Camille. Je ne pourrais pas me reposer sur le parrain alors... Enfin de toute façon je doute d'avoir jamais la garde.

— Lors d'une guerre on n'est jamais trop prudent.

— Mais qui s'en prendrait aux célèbres Edgar et Cassiopeia Bones ?

— Ça me fait plaisir que tu aies une si grande estime de moi mais c'est justement parce qu'on est les Bones qu'on risque la mort. Savoir que toi et Alastor vous serez là en cas de problèmes, c'est nous retirer un énorme poids des épaules. 

— Et Susan et John ?

— Pour John c'est Leopold et Elyssa, Susan c'est ma sœur, Amelia, et Gideon. Je pense qu'ils seraient bien chez eux.

— Vous êtes sûrs pour moi ? Je suis petite et je vais sûrement me retrouver à la rue le jour de mes dix-sept ans, plaisanta-t-elle.

— On est sûrs, assura Edgar. Et le fait que tu aies refusé les cigarettes me confirme à quel point tu es responsable.

— Mais s'occuper d'un bébé...

— Tu pourras laisser la garde à Leo si jamais tu ne te sens pas prête. On en a parlé avant, lui et moi. Mais moi et Cassie, on te fait confiance, Camille. De toute façon on ne compte pas partir de sitôt. On va la gagner cette guerre, foi de Bones.

***

— Camille ? appela Sirius.

Personne ne lui répondit, mais il entendit un mouvement étouffé provenir de la salle de bain. Il toqua timidement à la porte puis l'ouvrit lentement. Passant la tête dans l'entre bâillement, son regard tomba sur une silhouette recroquevillée près des toilettes. Sirius s'empressa d'entrer et vint rejoindre la silhouette frissonnante de Camille, assise contre un mur. Il s'accroupit face à elle en essayant de capter son attention, mais la Serpentard ne lui adressa pas le moindre regard. Ses yeux hagards restèrent fixés sur la cuvette alors que sa main soutenait sa tête avec difficulté.

Elle ne portait qu'un large t-shirt, qui appartenait probablement à Edgar ou Leopold dans un temps plus lointain et un caleçon qui tombait sur ses hanches, dévoilant ses jambes. Elle aurait pu être gênée de dévoiler autant de peau à quelqu'un mais honnêtement étant malade elle devait s'en fichait de montrer ses jambes à qui que ce soit.

Sirius força son regard à ne pas dériver sur ses jambes, conscient que dans la situation c'était déplacé et que de toute façon ce n'était pas correct. Marlène le lui avait bien fait comprendre en troisième année quand ses yeux s'étaient attardés lorsque sa jupe s'était soulevée. Et au fil des ans et des gifles d'Evans pour James, Sirius avait compris qu'il devait respecter certaines règles élémentaires.

Camille frissonna et Sirius se rapprocha pour lui frotter le dos. Mais la blonde se dégagea et se recouvrit la bouche de sa main. Sirius se figea, mortifié.

— Désolé, murmura Camille. Je préfère que tu ne... Ne me touches pas pour l'instant ?

— D'accord, accepta-t-il avec gêne. Et... Euh tu as besoin d'autre chose ?

Elle ne répondit rien, une main pressée contre ses lèvres alors qu'elle pâlissait à vue d'œil.

— Tu peux rester ? marmonna-t-elle avec des joues rouges.

Sirius dût retenir le sourire qui naquit spontanément sur ses lèvres et s'empara de sa main qui reposait dans le vide. Il la tint un instant sans savoir quoi faire avant de serrer légèrement ses doigts.

— Tu n'arrives pas à dormir ?

Camille n'esquissa aucun geste pour répondre, son teint verdâtre constituait déjà une réponse suffisante. Sirius se fustigea mentalement de poser une question si stupide.

— Cauchemars ?

— Je ne sais pas... J'arrive pas à dormir, murmura-t-elle. J'ai vu quatre personnes mourir ce soir, j'ai peur de fermer les yeux...

Sirius déglutit légèrement. Elle avait vu quatre personnes mourir. Lui, rien. Pourquoi est-ce que c'était elle qui avait hérité de tout les moments durs ? Ou Aleks. Aleks qui délirait toujours à cause de la douleur et à qui on avait failli amputer le bras ce soir... Non, vraiment Sirius s'en sortait divinement bien par rapport à ses amis.

Camille se pencha soudainement en avant, vers la cuvette et émit un écœurant gargouillement avant de recracher le contenu de son estomac. Sirius grimaça avant d'attraper les cheveux de son amie pour les tirer en arrière. Il les lui tint d'une main, l'autre tenant sa main. Elle pleurait presque en vomissant et Sirius ressentit un pincement au cœur en la voyant dans cet état.

Son teint horriblement pâle faisait ressortir les cernes qui creusaient ses yeux, ses joues étaient toujours rougies par deux longues coupures que lui avaient infligé Bellatrix et Amycus et sa lèvre inférieure était coupée sur le côté gauche. Ses bleus s'estompaient lentement et sa bosse à la tempe semblait n'avoir diminuée que de moitié.

Elle faisait peur à voir.

Et pas seulement à cause de ses blessures, elle semble complètement vide et brisée. Ses yeux hagards et désespérés brillaient des larmes qui s'agglutinaient à ses cils.

Pour une fois, Sirius se demanda comment il se sentirait si jamais ils gagnaient la guerre.

Il n'était pas sûr de vouloir savoir.

Bien sûr, il serait heureux et soulagé. Mais combien de personne auraient-ils perdus ? La guerre venait à peine de commencer et Emma était déjà morte. Ils n'avaient pas de nouvelle de Brutus Fawley depuis plusieurs semaines. Spencer MacDonald était dans le coma depuis trois mois. Et les blessures se multipliaient. L'Ordre n'en était qu'à ses débuts et le W.O.R.L.D le soutenait comme il pouvait mais commençait à faiblir. Ce n'était pas une organisation habituée aux attaques répétées et aux missions solitaires. Voldemort cherchait à les déstabiliser et il réussissait brillamment.

Si Sirius gagnait, cela voudrait dire qu'il aurait perdu des êtres chers. On ne gagne pas sans sacrifices. Et il n'était pas prêt à faire ces sacrifices. Il n'était pas prêt à dire au revoir à James, il ne serait jamais prêt. Il ne pourrait pas saluer pour la dernière fois Remus ou Peter, il n'était pas capable de dire adieu à la fille qui vomissait dans les toilettes et à qui il tenait les cheveux... Mais surtout... Et Regulus dans tout ça ?

Il ne pouvait pas affronter son petit frère mais il ne pouvait pas non plus le perdre comme Camille avait perdu Emma et Capucine... Il ne pouvait pas abandonner Regulus, surtout pas si c'était aux mains de ses parents et de Bellatrix. Alors pourquoi n'arrivait-il pas à lui parler ?

Au fond il le savait, c'était pour lui qu'il était rentré cet été après s'être réfugié chez les Potter pendant une semaine. Il était revenu et il avait ignoré ses parents et même Regulus durant tout le mois d'août. Pourtant Sirius avait été soulagé en revoyant son frère debout devant lui, le même visage impassible le jugeant silencieusement.

Camille se recula, les mains tremblantes. Elle s'essuya la bouche avec le papier que lui tendit Sirius, murmurant un remerciement au passage. Elle garda son regard rivé sur le sol, les joues rougies par le froid et peut-être un peu par la gêne de savoir que Sirius avait assisté à cette scène. Finalement après une éternité de silence et de gêne un gloussement s'échappa des lèvres de Camille. Sirius la fixa avec incompréhension alors que la Serpentard se mettait à rire en pleurant silencieusement.

— Oh Merlin, je pleure comme une gamine aujourd'hui, ria-t-elle en essuyant ses joues avec ses mains.

— Tu vas bien ? s'enquit prudemment Sirius.

— Non, gloussa-t-elle. J'ai passé la pire nuit de ma vie ! Et Aleks est à moitié mort à l'heure qu'il est, désolé c'est pas drôle mais... Mais un peu quand même.

— Explique-moi alors, parce que moi je me sens pas vraiment d'humeur à rigoler.

— C'est juste tellement ironique, toute cette nuit ! Pendant des heures on a surveillé les Bazin et pourtant ils les ont capturés en un tour de baguette. Un claquement de doigts, clac ! Puis ils nous ont laissé récupérer les personnes qui ne les intéressaient pas et au final Julius n'est même pas mort... Parce que leurs vraies cibles c'étaient Ombeline et Lionel. On a failli crever pour rien ! Hi-la-rant ! Julius n'était pas leur cible et ils ont obtenu tout ce qu'ils voulaient ! Tout ! Ombeline, Lionel, le bâton de Merlin et le médaillon de Capucine ! Ils se sont échappés en récupérant tout ce qu'ils étaient supposés récupérer, nous narguant au passage avec Julius toujours en vie ! Et tu sais qui d'autre a disparu ? Le fils du Prévôt. Tout ce qu'on a fait, pour rien !

— Pour rien ?

— Pour rien, confirma Camille en riant. Je hais ma vie.

Sirius se laissa tomber à côté d'elle, le regard perdu dans le vide.

— Comment ils ont réagi au fait que tu aies tué deux hommes ? demanda-t-il avec curiosité.

— Caradoc n'a rien dit, j'avais l'impression qu'il s'en foutait complètement. Il m'a engueulé mais pas pour ça. Edgar n'a rien dit au départ. Mais il m'a regardé bizarrement avant de partir. C'est Castiel qui m'a fait le discours sur la vie et la mort, l'importance d'une vie, la fatalité de la mort... Avant de me dire que de toute façon dans ma situation ce n'était pas un meurtre. Mais c'est un meurtre. Nathaniel Rowle et Samuel Delacour sont morts.

— Alors tu vas finir à Azkaban ? railla Sirius. Entre l'élève modèle et moi le supposé délinquant j'aurais pas parié sur toi pour finir la première à Azkaban...

— Hé mais... Delacour. Mon cousin va se marier à une Delacour. C'était peut-être son frère. Je l'ai tué. J'ai peut-être tué le frère de ma belle-cousine, gloussa Camille. Désolé c'est nerveux... Finir à Azkaban serait toujours mieux que de subir les cris de Maugrey demain matin.

— Il va venir ? Putain, je vais me faire défoncer...

— On va tous se faire défoncer.

— Non mais Maugrey a un truc bizarre avec moi, il adore me crier dessus. Et bien sûr Aleks va y échapper parce que même Maugrey ne va pas engueuler un mec qui vient de frôler la mort.

— Cassiopeia a dit qu'elle m'engueulerait à la prochaine réunion et qu'elle laissait McGonagall le faire pour l'instant.

— J'avoue avoir plus peur de McGonagall que des Mangemorts.

— Là-dessus on est d'accord.

Camille appuya sa tête contre le mur et la tourna vers Sirius. Un genou replié contre sa poitrine, son autre jambe écartée devant lui, le Gryffondor retraçait les lignes des carreaux de la salle bain avec concentration. Il avait rassemblé ses mèches en un chignon au niveau de sa nuque pour dégager son visage et Camille laissa échapper un sourire en le contemplant.

— Pourquoi tu souris comme ça ? demanda Sirius sans même relever la tête. Gideon m'a encore collé un papier « Sirius is the new Black » dans le dos ?

— Non. Je pensais juste à ce que tu as dis dans la salle de bal. Et je me disais que dans cette tenue et avec mon visage défiguré je devais avoir l'air beaucoup moins jolie que durant le bal.

À sa décharge Sirius ne s'empourpra pas face à la pique.

— J'ai dis que tu étais jolie, j'attends toujours que tu retournes le compliment, commenta-t-il.

— Tu étais la plus jolie, Sirius, assura Camille.

Sirius ne retint pas le sourire victorieux qui fleurit immédiatement sur ses lèvres et laissa échapper un ricanement.

— Mais tu sais c'est pas vrai.

— Si je t'assures que tu étais le plus joli...

— Pas ça, ça évidement que c'est vrai. Mais ici tu es toujours jolie.

— Vraiment ?

— Oui, les traces de sangs et les gonflements sont très en vogue en ce moment.

— Je te déteste, rétorqua Camille en lui donnant un coup de pied dans la jambe. T'es qu'un enfoiré, Sirius.

— J'ai appris du maître, répondit Sirius en lui adressant un long regard.

— Va te faire foutre.

— Avec qui ?

— Avec Kreattur.

Sirius émir une grimace dégoûté qui arracha un éclat de rire à Camille.

— Comment va ton dos d'ailleurs ?

— Mon dos ? s'étonna Sirius.

— Dearborn m'a dit qu'il avait du soigner les plaies qui s'étaient réouvertes sur ton dos.

— Il n'est pas censé être tenu au secret médical lui ? marmonna Sirius.

— Le retour de l'esquive, murmura Camille.

— Ça va, ça va, grimaça Sirius. Je ne peux vraiment pas m'étirer et j'ai interdiction de dormir sur le dos pour quelques jours mais en soit ça va.

— Tu m'as pas dit qu'elles s'étaient réouvertes.

— Oh pardon, j'aurais du te le dire avant ou après qu'on se jette dans un portail archaïque et mortel ? Ou pendant qu'on se faisait charcuter ?

— T'aurais du me le dire dès qu'on était à l'abris dans le bar.

— Je ne voulais pas gâcher l'ambiance, ricana sombrement Sirius. Toi qui flirtais avec l'autre...

— Elle flirtait avec moi, j'ai rien fais.

— Je comprends pas, t'es censé avoir un copain...

— J'ai rien fais !

— Mais tu la trouvais jolie, t'allais prendre son numéro qu'importe ce que ça veut dire...

— Numéro de téléphone, glissa Camille.

Sirius la fusilla du regard.

— Je me tais, continue.

— T'es gay ou pas ? lâcha brutalement Sirius.

Camille savait que la question allait éventuellement tomber. Un jour ou l'autre, surtout après toutes les remarques peu subtiles d'Aleksander ou Marlène, Sirius aurait fini par l'interroger. Pourtant, la Serpentard ne put retenir la bouffée de panique qui la submergea en entendant son ami. Ses mains se crispèrent sur le tissu de son t-shirt alors que ses doigts se mettaient à jouer avec le bord. Le regard du Gryffondor s'y attarda quelques instants avant qu'il ne remonte les yeux pour la fixer.

— Alors ? la pressa Sirius. T'es homo ou pas ?

— Je... Pas vraiment, murmura-t-elle. Je sais pas...

Les sourcils de Sirius se froncèrent alors que la perplexité se peignait peu à peu sur ses traits fins. Se peignait. C'était ça. Sirius était un tableau, son visage était une oeuvre d'art. Tout œuvre d'art a ses défauts, Camille devait juste les trouver, humaniser son charme et son sourire éclatant. C'était juste Sirius, juste son ami, juste un garçon parmi d'autres...

— Tu es attirée par les mecs ? Ou par les filles ? demanda Sirius plus calmement.

— Je... Les mecs. Non, les filles. Je sais pas, moi ! Les deux ! Toi t'es attiré par quoi ?

— Les deux ? répéta Sirius. Ça existe ça ?

Camille reçut le « ça » en pleine figure. Mais elle encaissa sans broncher. Elle ne s'attendait pas à ce qu'il comprenne, elle-même ne comprenait pas ce qu'elle était.

— Evelyn m'a dit que oui, dit-elle prudemment. Mais... On aime les filles ou les garçons, non ? Pas les deux ?

— Je sais pas, déglutit Sirius. Tu penses que... Qu'on a le droit d'aimer les deux ?

Camille haussa les épaules avec gêne et indécision.

— Lévy m'a dit qu'on appelait ça « bisexualité »...

— Remus m'a déjà parlé de ça mais je savais pas ce que c'était, avoua Sirius.

— Bah c'est quand t'aimes les deux... Je crois...

— On a le droit de faire ça ?

— C'est légal depuis l'année dernière en Angleterre, les relations homosexuelles...

— Oui mais... Enfin... Comment tu sais que t'aimes les deux ? bafouilla Sirius, l'air perdu. T'es avec Hollander. C'est un mec.

— Ouais... Je... J'ai déjà embrassé une fille et... Je sais pas, j'ai bien aimé... Genre vraiment. Mais Tom aussi il...

— Je veux rien savoir de toi et Tom, grommela subitement Sirius en se renfrognant. Moi aussi j'ai bien aimé quand j'ai embrassé James pour rire, mais ça veut pas dire que je suis bisectuelle ! C'était juste un baiser, c'est censé être agréable, non ?

La Serpentard le fixa avec perplexité, ses sourcils froncés. Est-ce qu'il se rendait compte de ce qu'il disait ? Sirius passa une main dans ses cheveux et la blonde observa ses boucles sombres retomber sur son front.

— Bisexuel, corrigea machinalement la Serpentard. Et... T'as jamais été attiré par des gars ?

— Non. Enfin parfois j'en trouves certains beaux mais c'est tout. Ça veut pas dire que je suis machin !

— T'as jamais voulu aller plus loin avec un gars ?

— Non. Enfin... Mais non ! Je sais pas, okay ? On peut changer de sujet ? demanda Sirius, les joues rouges et les bras croisés.

— Ouais, on fait ça, s'empressa d'accepter Camille.

Les deux amis évitèrent de se regarder, leur conversation continuant à flotter dans leurs esprits agités. Sans surprise ce fut Sirius qui craqua le premier, il avait toujours détesté le silence.

— Mais du coup, toi t'as déjà voulu aller plus loin ?

Camille lui adressa un regard sombre qui se transforma en gêne en voyant l'air perdu de son ami.

— Oui, murmura-t-elle, mortifiée et les joues brûlantes. Je sais c'est mal mais j'arrive pas à ne pas... C'est...

— Ce n'est pas « mal », la rassura Sirius. Juste surprenant... Enfin, t'es Camille. Tu sors avec un gars. Ça semblait pas si étrange quand c'était pour Remus ou pour Aleks mais...

— Pour moi ça l'est, acheva Camille. Je sais. Moi aussi je trouve ça anormal... J'ai toujours aimé les gars depuis l'année dernière mais après j'ai... Je sais pas, je me suis interrogée... Et maintenant je crois que je suis... Je suis machin.

— Bisexuelle, corrigea Sirius.

— Tu m'en veux pas ? demanda Camille en rongeant son pouce avec anxiété.

— Tu aimes les filles et les gars ?

— Ouais. Ouais j'aime les deux je crois.

— Bien sûr que non, soupira Sirius. Tu croyais vraiment que j'allais t'en vouloir pour ça ? Tu ne peux pas le contrôler. Et même si tu pouvais je t'en voudrais pas. J'ai accepté Remus et Aleks, pourquoi je ne t'accepterais pas, toi ?

— Parce que... Je sais pas, ça sonne faux. Moi qui aime aussi les filles. Ça n'a pas de sens.

— Ça a autant de sens que les héritiers des Light et des Black qui se battent contre Voldemort.

— Touché.

— C'est pas grave que tu sois bisexuelle ou quoique ce soit. Tu restes Camille.

— Et c'est une bonne chose ? murmura-t-elle.

Les sourcils de Sirius se froncèrent à nouveau.

— Que quoi ?

— Est-ce que c'est une bonne chose que je restes Camille Light ? T'es ami avec une meurtrière Sirius. Avec une Serpentard. Avec une Light.

— Vous faites erreur mademoiselle. Moi je suis ami avec une fille pleine de ressources et intelligente qui a simplement réussi à survivre à une nuit sanglante. Avec une fille qui a fini dans la Maison qui lui convenait le mieux, déclara Sirius, se rappelant sa conversation avec Yuri. Avec une traître à son sang qui s'en balance de son nom. Avec Camille.

— C'est gentil. Mais tu embellis la réalité...

— On embellit tous la réalité, c'est notre façon de réussir à vivre dans un monde aussi pourri. Mais si j'embellis vraiment la réalité, je dirais que tu as été une héroïne quand tu as tué ces deux Mangemorts. Peut-être que c'est vrai. Peut-être que tu as sauvé la vie de leurs prochaines victimes. Mais tu n'es pas une héroïne. Tu es juste une survivante d'une attaque de Mangemorts comme Aleks, comme moi. On n'est pas des héros mais ça veut pas non plus dire qu'on est des personnes horribles. T'as quinze ans bon sang ! T'as rien à te reprocher, on est tous des victimes, toi plus que d'autres. D'accord, t'as tué deux hommes. C'était un accident, Merlin. Et c'étaient des meurtriers, des meurtriers qui voulaient te tuer toi aussi ! C'était de la légitime défense, tu n'as rien à te reprocher. Tu n'es pas une héroïne mais tu n'es pas non plus un monstre. Tu es juste une survivante.

— Je suis pas sûre de vouloir être une survivante alors, murmura Camille. C'est moche, c'est sanglant... Et je ne pense pas que j'aurais du survivre. Capucine aurait du. Mais moi ? Qu'est-ce que ça fait ?

— Je t'assure si tu meurs je t'en voudrais à tout jamais, menaça Sirius. Tu ne peux pas sauver tout le monde que tu te sois sauvé toi c'est le plus important...

— Mais non ! Ça ne l'est pas. Je sers à rien, je suis inutile. Ma famille me haïra quand ils sauront tout ce que je fais. Pas Capucine. T'aurais pas du me sortir de cette Fontaine, Sirius. T'aurais du me laisser crever au fond.

— Ne dis pas ça, dit Sirius en fronçant les sourcils. Ne dis jamais ça. Tu m'entends Camille ?

— Mais c'est vrai, bordel. Je serais mieux là-bas.

— Et nous ? Moi ? Tu crois que tu nous sers à rien ? Que moi je te hais ? C'est des conneries Camille, ne redis jamais ça, répéta Sirius, pâle et énervé.

— D'accord, accepta-t-elle finalement en laissant retomber ses mains sur ses cuisses.

— Comment tu peux penser ça ?

— D'accord, c'est bon j'y penserais plus ! Promis, d'accord ? Jamais, j'ai compris la leçon, assura Camille en se levant.

— Camille, appela Sirius en attrapant son poignet.

Camille fixa ses longs doigts enroulés autour de sa peau puis agita son bras pour le faire lâcher.

— Ça va, Sirius. Promis, ça va, répéta-t-elle, les yeux brûlants.

Mais Sirius ne la lâcha pas, son regard concerné et intransigeant examinant son visage marqué par la violence de la guerre et ses yeux hantés par plus de fantômes qu'elle ne laissait paraître. Il se leva, ses doigts ne lâchant jamais son poignet, et se posta face à elle.

— Je te promets, dit-elle d'une voix tremblante. Ça va. Maintenant, s'il te plaît, lâche moi.

— Non.

— Je ne veux pas en parler, Sirius, s'il te plaît, supplia-t-elle.

— On doit en parler Camille, c'est grave...

— C'est rien. Pas ce soir, s'il te plaît... Sirius je suis crevée. Pas ce soir.

— D'accord. Pas ce soir, accepta-t-il à contre-coeur. Mais demain. Tu ne peux pas me lâcher ça...

— Je sais que j'aurais pas du te le dire. Je suis désolée. Je vais me coucher.

— Non. Non, je vais pas te laisser seule.

— Mais t'as dit qu'on en parlerait pas maintenant ! désespéra Camille.

— Ouais mais tu crois vraiment que je vais te laisser seule après ce que tu viens de me balancer ? siffla Sirius. Hors de question.

— Tu vas devoir faire avec parce que moi je vais me coucher, ragea Camille en se dégageant finalement.

Sirius frotta sa main meurtrie mais réussit à s'interposer entre la porte et Camille avant qu'elle ne puisse sortir. La Serpentard en aurait pleuré de rage si elle n'avait pas estimé avoir déjà trop pleuré aujourd'hui. Son amour-propre avait pris un sacré coup avec ses crises de larmes devant Sirius puis Caradoc puis Edgar. Elle en avait marre de pleurer, elle avait besoin de se défouler maintenant.

— Tu vois, Sirius, là je suis assez énervée. Contre Voldemort, contre les Mangemorts, contre Capucine, contre Dearborn, contre moi-même... Alors si tu ne t'écartes pas maintenant, tu vas le regretter, menaça-t-elle en sortant sa baguette.

— Oh vas-y, je t'attends, Light. Tu es énervée mais me frapper, comme tu le rêves sûrement, ne va rien arranger. Tu veux dormir, moi aussi. Mais je refuses de te laisser seule, il ne manquerait plus que tu te foutes en l'air.

— Je ne vais pas me foutre en l'air.

— Tu penses que je vais te croire après ce que tu viens de me dire ? Je vais pas prendre de risques. Alors je vais chercher mes affaires et je dors par terre dans ta chambre, déclara Sirius, l'air très sérieux.

— Oh non. Non, non, non. Une nuit dans le même lit, ça m'a amplement suffit. Tu me laisses tranquille maintenant !

— Pour que tu sautes de la fenêtre ?

— Tu sais le nombre d'opportunités que j'ai eu de me jeter de la Tour d'Astronomie ? Et ben pourtant je suis toujours là.

— Tu crois vraiment que ça me rassures ça ? fit Sirius en pâlissant.

Camille détourna le regard, croisant rageusement ses bras devant sa poitrine.

— J'ai pas besoin qu'on me surveille. Je ne vais rien faire, Sirius...

— C'est ce que dis tout le temps Remus et tu ne sais pas le nombre de fois où j'ai du le traîner de force du haut de la Tour d'Astronomie. Et après tout ce qu'il s'est passé ce soir... Non, je ne te laisse pas seule, refusa Sirius.

Camille leva les yeux au ciel et réprima un cri de frustration devant l'obstination du Gryffondor. Elle se retourna finalement vers lui, le doigt pointé de façon menaçante sur lui.

— D'accord. Mais juste cette nuit, j'ai pas besoin d'une baby-sitter inquiète de plus ! Maintenant je peux sortir ?

— Qui d'autres le sait ?

— Aleks. Lupin aussi.

Sirius hocha la tête devant l'air embarrassé et irrité de son amie, secrètement attristé qu'elle ne lui en ait pas parlé avant.

— Il faut que tu en parles, Camille...

— Stop ! Baby-sitter d'une nuit ça ne veut pas dire psychomage ! Je peux aller dormir ?

Sirius hocha une nouvelle fois la tête et s'écarta pour la laisser passer. Elle le dépassa, l'ignorant le plus fièrement possible malgré ses joues rouges et la lueur de fureur qui brillait dans ses yeux.

— T'es vraiment énervant.

— Je veux juste t'aider.

— Et me surveiller la nuit c'est m'aider ? Me regarder dormir ?

— Je ne vais pas te regarder dormir, soupira Sirius. Juste vérifier que...

— Je me foutes pas en l'air ? M'ouvre les veines ? Me jette par la fenêtre ?

— Toi aussi t'es super énervante. Même Remus est plus coopératif que toi, sérieux ! C'est pas une plaisanterie.

— Crois-moi je sais. Mais ne pas me laisser plaisanter c'est comme priver Potter de son balai. Inhumain.

— Je préfère passer pour une personne inhumaine que te laisser plaisanter sur le fait de te suicider.

Camille ne répondit pas et se contenta de lui jeter un regard par dessus son épaule. Au fond, bien qu'elle ne l'avouerait jamais, le fait que Sirius se soucie d'elle au point de dormir par terre dans sa chambre lui apportait un certain réconfort. Lui, il ne s'en fichait pas d'elle.

— Si tu souris parce que tu penses à une autre blague...

— T'es mignon quand tu t'énerves, le coupa Camille avec un sourire.

— C'est pas drôle. T'es infernale.

— Tu rougis ? s'extasia Camille.

— Je sais que t'essaie de dévier la conversation !

— Tu as les joues toutes rouges, tu veux sourire ! Trop mignon !

— Je te déteste. Je te hais vraiment. Tu m'énerves.

***
Hey fuckers !
Me revoilà après beaucoup trop de temps de silence.

Alors je ne vais pas poster pendant les vacances parce qu'il faut absolument que je prenne de l'avance. Mais ! J'ai préparé un questionnaire pour vous, pour que vous me donniez votre avis sur cette fanfic et si vous voudriez que j'améliore ou éclaircisse certains points.

Je le posterai juste après ce chapitre et j'espère que vous prendrez le temps d'y répondre même si votre réponse tient en deux mots.

Bon sur ce on se retrouve dans deux semaines, profitez bien de vos vacances !

Joyeux Halloween en avance ! 🎃

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