Chapitre 22 : Beauxbâtons Ball 1/3

1976

Chapter 22 : Everything Under Control

Contrairement à ce que pensait Aleksander, Camille savait pertinemment qu'elle aimait Sirius Black et qu'il lui rendait la pareille. Elle le savait depuis la première fois où elle l'avait fait rire.

Camille adorait faire rire, surtout ses amis et surtout Sirius. Quand elle entendait des gens rire de ses blagues, elle était tout de suite ravie. C'était une sensation incroyable d'entendre quelqu'un rire grâce à elle. De faire sourire quelqu'un.

Quand elle avait réussi à faire rire Sirius pour la première fois, Camille s'était littéralement figée sur place.

Sirius n'était pas quelqu'un d'heureux. Peu de personne le savait mais les Black avaient sapé toute sa bonne humeur lorsqu'il n'était encore qu'un enfant. Sa bonne humeur mais également sa confiance en soi et envers les autres, tout avait disparu sous les coups et insultes.

Alors lui redonner le sourire avait été une véritable fierté pour Camille. Elle s'était sentie bénie par son rire et elle s'était alors rendue compte de quelque chose : elle ferait tout pour que Sirius reste heureux, pour qu'il garde ce sourire.

Elle le voyait rire et elle sentait ce besoin irrépressible de le protéger, de le préserver du reste du monde. Sirius sans sourire n'avait pas de sens à ses yeux et Sirius blessé était inimaginable, elle ne laisserait jamais une telle chose arriver.

Mais plus que tout ce dont elle avait peur c'était de le perdre. De perdre son sourire, son rire, son humour... Elle s'en fichait de sortir avec lui, tant qu'elle gardait une place à ses côtés, là où elle pouvait s'assurer qu'il allait bien.

Être en couple, était-ce très important ? Le plus important n'était-ce pas d'être proche de la personne qu'on aimait ?

***

— Debout là dedans ! Allez Camille ! Black !

— Black, Light ! Levez-vous immédiatement ! ordonna Dorcas en ouvrant les rideaux.

— Non ! Sombre créature démoniaque, retourne dans tes profondeurs en Enfer, gémit Camille en essayant de masquer ses yeux à la lumière.

Sirius bougea à côté d'elle, glissa son bras sur son ventre avant de tirer toute la couverture vers lui en grognant. Camille se redressa en lui jetant un regard incendiaire, désormais parfaitement réveillé mais également transie de froid. De son côté Sirius ne se réveilla pas, imperturbable, et lâcha même un « retourne te coucher sale lutin hyperactif ». Dorcas, loin de s'émouvoir de cette scène inhabituelle, soupira et quitta la pièce. Elle revint un instant plus tard pour jeter un sac sur leur lit alors que Camille essayait de retirer le bras de Sirius de son ventre.

— Vos tenues pour ce soir si ton copain peut te lâcher Light, lâcha-t-elle.

— C'est pas son petit-ami, s'indigna Marlène. Elle vaut mieux que Black.

Dorcas eut un rictus amusé avant de sortir en aboyant à William de se réveiller s'il ne voulait pas finir trempé. Au même moment Aleksander apparut derrière la porte, bâillant et ne portant qu'un short. Il se tourna vers la chambre de sa meilleure amie en se frottant les yeux et entra sans frapper évidemment.

— J'ai besoin d'un café là... Oh tiens, Sirius s'est enfin déclaré ?

— Non, grommela Camille. Mais c'est pire qu'un strangulot.

— Tu t'en rends compte que maintenant ? soupira Marlène. Il est plus collant que de la Glu Perpétuelle.

— S'il n'a pas avoué, pourquoi il te prends pour sa nouvelle peluche ?

— Il est bourré, se défendit Camille.

— Queskibouré ? bailla Sirius.

— Debout Black ! aboya Marlène.

Sirius ouvrit les yeux, remarquant immédiatement qu'il serrait quelque chose. Peut-être James ou Remus. Quand il faisait des cauchemars, il allait parfois les voir pour ne pas être seul dans le noir. Ça lui rappelait de mauvais souvenir le noir, comme le Square Grimmaud.

Mais cette personne n'était pas un de ses amis. Elle était trop petite. Plus petite que Peter même. Et elle avait la peau douce et sentait l'alcool. Sirius sourit dans son oreiller, appréciant l'odeur du whisky et cette sensation de bien-être.

— Hum, Sirius ? appela Camille. Ça risque de devenir très gênant pour tout le monde là.

Sirius ouvrit brusquement les yeux, réalisant qui il tenait et se maudit de tout les noms en se redressant.

— Dis-moi qu'à défaut de porter une chemise, t'as au moins un caleçon ou mieux un short, gémit Marlène.

— Il porte un short ! intervint Camille.

— Quoi ? T'as jeté un coup d'œil sous la couette ? ricana Aleksander.

Camille lui lança son oreiller à la figure alors que Sirius rougissait furieusement. Ce dernier quitta précipitamment le lit, attrapant un haut dans son sac à dos. Camille lança un regard incendiaire à ses amis puis se pencha pour attraper un jean dans son propre bagage.

— On était proche, je pouvais le sentir, marmonna-t-elle.

Sirius enfouit son visage dans une de ses mains, mortifié. Il savait qu'il avait tendance à être collant, mais jamais à ce point avec une fille...

— J'ai besoin d'un café, lança-t-il.

— Ah tu n'es pas totalement stupide finalement, lança Aleksander en sortant. Je t'en fais un noir, comme nos âmes.

Sirius évita le regard de son amie en sortant à la suite du Serpentard. Il voulait se faire avaler par le sol.

— Et ils disent que c'est les filles qui sont compliquées à comprendre ? soupira Camille en attrapant sa paire de lunette.

— Tu l'aimes vraiment ? s'étonna Marlène.

— Je sais que toi tu ne l'aimes pas, mais déjà un je m'en fiche et deux Sirius est adorable quand tu le connais.

— Bien sûr, ricana Marlène.

— Quand tu le connais et qu'il t'aime bien, précisa la Serpentard.

— Ah ! Tout s'explique. De toute façon les mecs sont tous stupides. Je peux blairer très peu de Gryffondors d'ailleurs...

— Heureusement que t'es pas à Poufsouffle alors, plaisanta Camille.

— Camille, soupira Marlène alors qu'un sourire fleurissait sur ses lèvres. C'était particulièrement nul.

— Dit-elle en riant silencieusement.

— Tu veux un café aussi ?

— C'est dégoûtant le café. Je vais prendre un chocolat chaud.

— Tu es une addict au sucre, tu vas finir diabétique.

— Et toi à la caféine. Tu vas finir comme Potter.

— Comment tu veux survivre aux entraînements de Maugrey et Prewett sans café ?

— Ne compare pas mes séances d'apprentissages aux séances de tortures de Maugrey, lança Gideon, le nez dans une tasse de thé. Moi et Fabian on est gentils par rapport à ce bourreau... D'ailleurs exercices de préparations dans une heure à la salle de sport de l'hôtel.

— Y'a une salle de sport ? releva Sirius en bâillant.

— Mais il est seulement huit heures, râlèrent les deux Serpentards.

— On ne peut pas visiter plutôt ?

— Non. Nous ne sommes pas là pour faire du tourisme comme l'a fait remarquer Alastor, rétorqua Dorcas.

— Laissez-moi finir mon café d'abord, grommela Aleksander.

— Y'a du chocolat ?

— Je crois qu'on a tout fini.

— Demande à Tinker sinon.

— Tu dis s'il te plaît ! s'écria William depuis le canapé. Tu lui demandes avec politesse et respect, tu dis merci et s'il vous plaît.

— Willy elle va en faire une attaque.

— Soyez polis avec Tinker !

— On le sera, soupira Marlène.

— On peut revenir sur le fait qu'on ait retrouvé Black et Light dans un même lit ? Vous avez quelque chose à nous avouer les tourtereaux ?

— Non. Fermez-la, attaqua Sirius.

Camille se contenta d'hocher la tête affirmativement en beurrant ses toasts.

— On reviendra surtout sur le fait que vous avez vidé mon compte en banque en commandant tout ses plats, marmonna Dorcas. Allez vous habiller, on se retrouve dans la salle dans une demi-heure. Prewett !

— Ouais j'arrive ! C'est toi le boss, Meadowes !

— Arrête avec ce surnom stupide. La prochaine fois je prends ton frère.

— Je commence vraiment à croire que vous préférez tous Fabian, s'indigna Gideon.

— C'est bien évidemment juste une impression Prewett, soupira Dorcas.

***

Comme à leur habitude, Aleksander et Camille avaient détesté cette matinée d'entraînement. Les Serpentards n'aimaient pas s'entraîner sans leurs baguettes. Sirius et Marlène par contre avaient adoré, fiers de montrer qu'ils étaient à l'aise avec les techniques de combats moldus. William avait été exempté d'entraînement pour qu'il puisse refaire son stock de potions et de baumes. Il en avait d'ailleurs profité pour se moquer des performances des Serpentards, ce qu'il avait regretté amèrement quand le duo avait retrouvé leurs bien-aimés baguettes.

L'après-midi avait été plus à leur convenance, Dorcas avait repris l'entraînement après un déjeuner trop léger au goût de Gideon et William. Cette fois-ci c'était des duels qui les avaient occupés et l'apprenti-médicomage avait également du se joindre à eux. Aleksander et Camille s'étaient sentis bien plus à l'aise en jetant des sortilèges et maléfices et malgré leur manque de muscles, leur précision et puissance compensaient.

Quant à Sirius et Marlène malgré leur manque de technique et de savoir, ils avaient une puissance magique plus que suffisante et enchaînaient chaque sort avec rapidité. William était remarquable agile et précis, tout comme sa gamme de sortilèges était impressionnante.

Mais celle à qui Gideon avait hésité à remettre un trophée était Camille grâce à la tactique de déstabilisation qu'elle avait mise en place cet été. La Serpentard avait pris l'habitude de prononcer des formules qui différaient des sorts qui sortaient de sa baguette. Au bout d'une demi-heure, Marlène en avait d'ailleurs marre de voir la blonde toujours gagner tout en enchaînant des formules saugrenues que la Serdaigle ne connaissait pas. Mais si Marlène ne les connaissait pas, c'était parce que Camille les inventait au fur et à mesure que le combat s'éternisait. De plus la blonde et sa mémoire légendaire se souvenait de chaque sorts et maléfices que Marlène lui lançait.

Gideon s'était écroulé de rire quand la baguette de Marlène avait commencé à produire des canards à chaque sort qu'elle jetait.

William, lui, se plaignait de l'agressivité de Sirius qui prenait le duel très à cœur et lui envoyait maléfice sur maléfice, sort sur sort, avec acharnement. Comme il ne prononçait pas la moitié, l'américain devait constamment improviser ce qui l'agaçait profondément.

Quant à Aleksander, il se battait avec Dorcas qui voulait évaluer ses capacités magiques louées par tant de personnes. Elle devait l'admettre, le garçon était indéniablement doué. Il tenait six minutes contre elle, Dorcas ayant du mal à rompre son bouclier et lui attaquant sans répit. Il déviait chaque assauts de la Chef et ce fut grâce à son manque de rapidité et savoir que cette dernière le battu. Aleksander fut très irrité par ce constat surtout quand Gideon se mit à en rire.

Les seuls à sortir satisfaits de cette après-midi furent donc Camille et Sirius, amusés par l'agacement évidemment de leurs adversaires et revigorés par leurs victoires enchaînées. Ils étaient même excités par la perspective de leur prochaine mission, souriant comme des enfants, répétant que c'était trop « cool » et « classe » au désespoir de Dorcas qui leur répétait à quel point c'était dangereux et qu'ils devaient rester concentrés. Ce qu'elle ne savait pas c'était que Gideon articulait derrière elle avec exagération la liste d'invités prestigieux, attisant l'enthousiasme des deux adolescents.
Enthousiasme douché par Dorcas lorsqu'elle leur avait rappelé d'éviter tout membre de leurs familles. Ils ne devaient pas oublier qui ils affronteraient.

***

Aleksander répétait des formules à voix basse en boucle, fumant une cigarette près de la fenêtre pour tromper sa nervosité. Se retrouver face à des Mangemorts semblait l'effrayer bien plus que ses camarades. Camille finit par le rejoindre, essayant de le calmer en rappelant qu'ils n'étaient même pas sûrs que les Mangemorts attaqueraient. Elle se retrouva également à lister les raisons pour lesquels se battre pourrait être bénéfique.

— On pourrait mourir ! s'emporta Marlène à un moment.

— Oh ça, fit Camille en haussant les épaules. Si ça se trouve il y aura des dragons !

— Tu veux bien arrêter avec tes dragons ? s'irrita Aleksander en relisant un livre de sortilèges.

— Oh donne-moi ça, dit Camille en lui arrachant le livre. Pas efficace, nul, inutile, un jeu d'enfant, trop facile, incroyablement drôle mais complètement inutile... Tu les connais pratiquement tous Aleks.

— Pratiquement.

— Le seul digne d'intérêt est Anatikula. Pourquoi j'apprends que maintenant ce sort incroyable ?

— On va mourir, soupira Marlène.

— Je ne comprends pas votre obsession avec ça... Bien sûr qu'il y a une chance pour qu'on meurt, mais c'est ça qui déclenche notre instinct de survie. Parfois ça rends même plus compétent pour se battre. C'est comme pour les examens, on est plus performants sous pression. Vous voulez vraiment aller à un bal prévisible où vous serez en parfaite sécurité ?

— Oui ! s'indigna Marlène.

— Je ne suis pas si doué en duel donc j'aurais tendance à dire « oui » également, intervint William.

— Non, refusa Sirius.

— J'aimerais dire non comme Black. Mais Molly me tuerait si jamais je mourrais ou pire si je rentrais blessé. Vous comprenez, je suis le parrain de son deuxième fils, Charlie, c'est un grand honneur, expliqua Gideon. Ensuite Fabian et Cassie me tomberaient dessus, ce serait la catastrophe... Je préfère rester en vie pour éviter de me faire tuer.

— Tout ce qui sort de ta bouche n'aucun sens Prewett, lança Meadowes en vérifiant les papiers des élèves.

— Tu vois Sirius, c'est pour ça que tu es mon préféré dans l'équipe, déclara Camille avec un grand sourire.

— Dites si le plan c'est vraiment de laisser les deux instables ensemble sans surveillance, je doute que notre plan soit un bon plan. Et donc je ne suis pas vraiment rassurée, prévint Marlène.

— On est en temps de guerre, personne n'est rassuré.

— Honnêtement tais-toi Light.

— On revoit le plan une dernière fois, ordonna Dorcas. Huit heures quinze ?

— Meadowes et moi on rentre par l'entrée Sud, dans la petite cour du château, commença Aleksander. On attends Bones dans le Hall.

—  Huit heures vingt-cinq ?

— McKinnon, Sunner et moi rentrons avec Edgar, on vous retrouve dans le Hall. On se sépare, je vais chercher Doge avec Sunner. McKinnon et Bones te suivent Meadowes, continua Gideon.

— Huit heures trente.

— Camille et moi on rentre par l'entrée de la Cour à la Fontaine. On déambule parmi les invités, on se fond dans la masse, on évite nos salauds de parents et de cousins et toutes les personnes qui pourraient potentiellement nous connaître...

— On repère Bazin et on sécurise le périmètre. On prévint Prewett en cas de mouvement suspect et on va monter la garde sur les hauteurs.

— On a le droit de manger ? intervint William.

— Non. Enfin si mais ne perdez pas votre temps et restez concentrés bon sang ! s'agaça Dorcas. Franchement ça devient difficile d'oublier que vous n'êtes que des enfants, vous cinq. En cas de blessures ?

— Trouver William ou Doge, soupira Marlene. Ça aussi ça ne me rassure pas...

— En cas de mouvement suspect ?

— Vous prévenir vous, Gideon ou Edgar.

— En cas d'attaques ?

— Protéger Bazin et évacuer la foule.

— En cas d'apparitions de Mangemorts ?

— Essayez de les reconnaitre ou de leur arracher leurs masques. 

— En cas de capture ?

Les adolescents gardèrent le silence et échangèrent de rapides coups d'œil.

— Élimination de la personne capturée ? suggéra Sirius.

Dorcas ferma les yeux et laissa échapper un soupir. Elle lâcha les papiers et se rapprocha des cinq adolescents assis dans le salon. Aleksander fumait toujours malgré les plaintes de William. Camille semblait essayer de retenir un rire nerveux face au silence pesant alors que Marlène avait blêmi en entendant la remarque de Sirius et que le Gryffondor semblait être le plus tendu. William recomptait inlassablement ses potions et baumes, la nervosité le faisant repousser des mèches de cheveux derrière ses oreilles.

Dorcas se posta face à l'héritier Black qui l'observait avec un air de défi qui lui rappelait un peu trop Walburga Black à son goût. Cette femme aussi ne reculait jamais d'un duel ou d'une bataille. Orgueilleuse, fière et parfois impulsive, Dorcas se souviendrait toute sa vie de sa préfète de Serpentard qui terrifiait les élèves. La terrible Black qu'elle détestait.

Maintenant elle se retrouvait à former son fils aîné, à l'entraîner pour qu'il puisse se battre contre tout ce que Walburga admirait et défendait. L'ironie de la situation n'avait de cesse de la surprendre.

— Je ne pense pas que la situation soit amusante, Black. Efface ce sourire.

— Un peu quand même. Regardez-nous Madame. Un Black, une Light, une McKinnon, un bâtard sang-mêlé et un né-moldu. Et aucun de nous n'hésiterait à se sacrifier pour la cause d'Albus Dumbledore.

— Disons que c'est une situation inédite, ajouta Aleksander.

— Je ne dirais pas sans hésitation, corrigea William. On finirait par le faire, mais ce ne sera pas un réflexe pour moi si ça peut te rassurer Dorcas.

— Mais vous croyez vraiment qu'après des mois à se préparer, on laisserait juste notre vie ruiner une telle mission ? soupira Marlène.

— On ne part pas pique-niquer. On connaît les risques et on sait à quel point cette mission est importante. Bien sûr qu'on risque de mourir.

— Mais au moins on mourra en emportant quelques Mangemorts dans notre chute, conclut Aleksander avec une expression étrangement sérieuse.

Gideon les observa, le regard sombre. Même Dorcas fixait son filleul avec un regret non-dissimulé. La sorcière se sentait coupable de l'avoir impliqué dans toute cette guerre.

Gideon, lui, éprouva une bouffée de colère. Envers Dumbledore pour recruter des enfants si jeunes. Envers ce mage noir, Voldemort, pour ne pas leur avoir laisser le choix. Envers les monstres qui leur servaient de parents pour ne pas les en avoir empêcher, pour ne pas leur avoir donné la rage de vivre. Lui-même après des années en tant qu'Auror, après des centaines d'attaques et de tueries, en avait marre. Mais lui, il avait vingt-sept ans, presque vingt-huit. Ces enfants n'étaient même pas des adultes. William n'avait pas atteint ses dix-huit ans. Sirius et Marlène n'étaient majeurs que depuis quelques jours. Aleksander et Camille étaient encore considérés comme des enfants légalement. Pourtant ils se sentaient déjà le devoir de mourir pour gagner une guerre.

Prewett eut un rictus de dépit. C'était peut-être ça le grand plan d'Albus Dumbledore : trouver des enfants malheureux et leur donner une raison de se battre jusqu'à la mort. Il en avait fait des soldats loyaux et obéissants, puissants et dédiés corps et âmes à sa cause. Albus devait leur apparaître comme un sauveur... Un sauveur qui leur aurait donné un but, une raison de vivre.

— Votre vie vaut tellement plus que cette guerre infernale, soupira Gideon en passant une main dans ses cheveux roux.

— Le problème est que si. La victoire vaut largement une vie sacrifiée, surtout si c'est la nôtre. Réfléchissez, décréta Camille. Autant les vôtres Gideon et Madame ou même celle d'Edgar sont indispensables, autant les nôtres ne sont pas essentielles. Cette guerre ne va pas être gagnée par des enfants.

— On est géniaux certes. Mais on est toujours à Poudlard quand même, intervint Sirius.

— C'est pas nous qui sommes importants, marmonna William.

— Nos morts ne toucheraient personne. Les vôtres toucheraient toute la communauté sorcière et la déstabiliseraient encore plus. Si vous mourez, c'est un peu plus d'espoir qui quitte tout les sorciers. Et c'est comme ça que Voldemort gagnera la guerre.

Aleksander remarqua immédiatement que Gideon serrait ses poings. Mais il ne pouvait pas retirer ses mots, c'était un simple constat. Ils n'avaient aucune valeur par rapport aux illustres sorciers qui étaient membres du W.O.R.L.D et de l'Ordre. Se voiler la face ne résoudrait rien, il fallait affronter la vérité en face. Leurs vies ne valaient rien. Qu'ils meurent ou qu'ils vivent, Aleks et ses amis à leur échelle ne changeraient rien au cours de cette guerre.

— Bon. Tu comptes me passer une bièreaubeurre ou je dois aller à la chercher moi-même ? demanda Camille en se tournant vers Sirius.

Gideon avait l'air d'avoir avalé une couleuvre et Dorcas passait une main dans ses longs cheveux tressés, soupirant de dépit. Pourtant une étincelle d'approbation brilla dans ses prunelles noires quand son regard effleura les deux Serpentard.

Deux personnes pragmatiques et déterminées, c'étaient ce qui leur fallait. Camille et Aleksander n'avaient peut-être pas beaucoup d'importance maintenant, mais plus tard ils deviendraient assurément des personnes clés de cette guerre.

— Je suis obligé de porter une cravate ? Elle me sert ma pomme de Sirius, intervint Sirius, pas le moins du monde perturbé.

— Ta pomme de Sirius ? répéta Marlène alors que Camille s'esclaffait.

— Pour la dernière fois Sirius ce n'est pas nommé après chaque homme. C'est une pomme d'Adam bordel, soupira Aleksander.

— Je trouve ça injuste que cet Adan ait le droit de lui donner son nom et moi pas, rétorqua Sirius.

— La vie est injuste.

— C'est pas avec cette attitude pessimiste que ça va s'arranger.

— Je vais me changer, surveille-les Prewett.

— C'est censé te rassurer le fait que je les surveilles ?

— Tu pourrais au moins faire semblant de prendre ton rôle d'aîné au sérieux.

— Oh mais en quoi serait-ce drôle ? Tu n'as pas remarqué ? Les blagues, ça les détends. S'ils sont détendus, ils sont plus efficaces et... Ne te mens pas à toi-même, Meadowes, tu préfères les voir rire plutôt que de les voir sérieux.

— Ce ne sont encore que des enfants, murmura Dorcas après un temps de silence.

— Maugrey avait tort finalement... On aurait du les emmener faire du tourisme, conclut gravement Gideon.

***

Beauxbâtons, la célèbre école de sorcellerie française, était un grand château aux murs blancs immaculés, situé dans les Pyrénées. Trois tours de pierres blanches, plus hautes que celles de Poudlard, la plus grande étant celle de Theodorus Belby, l'actuel directeur du prestigieux établissement. Une cinquantaine de mètres de blocs de marbre clair empilés dans un ordre précis. Une tombe, toutes les autres tombent.

Contrairement au gouvernement sorcier français, aussi appelé État Sorcier Français ou le Prévôté par abus de language. L'Etat Sorcier Français était mieux organisé que le Ministère de la Magie, tout anglais pouvait l'admettre. Ils savaient gérer les crises et bien improviser. Ainsi la sécurité des centaines de hauts fonctionnaires et particuliers qui assistaient au bal du 15 novembre 1976 semblait irréprochable aux yeux des moins avertis.

Mais le W.O.R.L.D pensait autrement. Parce que la menace ne viendrait pas de l'extérieur. Les Mangemorts étaient déjà entrés, en toute légalité, dans Beauxbâtons et se comportaient comme n'importe quel autre invité, riant, parlant ou marchandant.

— Ils ne fouillent même pas les invités, commenta Camille en observant les Gendarmes examiner les papiers d'identité et les invitations des arrivés.

— Ce serait mal vu. La présence de Gendarmes les fait déjà douter que tout ne tourne pas rond dans leur petit monde parfait, dit Sirius en réajustant son veston. Où tu l'as planqué ton couteau ?

Camille ouvrit sa propre veste, laissant apercevoir une poche. Sirius haussa un sourcil en la voyant vide mais tendit la main et sentit un manche en cuir. Avec un sourire entendu, il en tira un couteau, rendu invisible par les soins de Dorcas Meadowes.

— De quel couteau veux-tu parler Sirius ? Je ne suis pas une terroriste. Je me rends simplement à un bal, accompagné par mon vieil ami, Sirius Black.

— Le seul moment où mon nom de famille me sert à quelque chose. Il est quelle heure ?

— Quinze. Ils doivent être au portail.

En effet devant eux, parmi la foule d'aristocrates et de politiciens, Aleksander Brand et Dorcas Meadowes tendaient leurs papiers respectifs à Lionel Beylier, un jeune Gendarme à la chevelure châtain et au regard vert innocent.

Lionel fronça les sourcils en relisant les papiers de la sorcière et jeta un regard sceptique à Aleksander qui le toisait avec un ennui évidemment. Il aurait préféré entrer avec Gideon et Edgar. Quant à Lionel, il interpella un de ses collègues plus âgé en français, lui donnant les papiers de deux invités au passage. Son aîné à la moustache en brosse et au regard dur scanna les deux sorciers. Dorcas commença à perdre patience et vrilla son regard sombre sur les deux gardes. Ils détournèrent rapidement le regard à sa grande satisfaction.

— Madame Meadowes, il manque des informations importantes à vos papiers. Votre profession, votre adresse, votre prénom, avança prudemment le Gendarme plus âgé.

— Dorcas Meadowes, dit froidement Dorcas. Je suis là par ordre du Ministre de la Magie anglais, Harold Minchum, en tant que son porte-parole officielle. Il ne peut hélas quitter l'Angleterre en ces temps troublés. N'est-ce pas pour cela que vous assurez la garde, messieurs ?

Les Gendarmes échangèrent un regard embarrassé. Dorcas sortit sa baguette, pinçant ses lèvres avec exaspération quand Lionel recula immédiatement et dégaina son arme. Mais Meadowes se contenta de poser sa baguette sur un parchemin vierge et murmura une formule d'une voix inaudible. Lionel sursauta quand de l'encre coula sur le parchemin, révélant une lettre officielle d'Harold Minchum assurant l'identité de Dorcas Meadowes, la désignant comme la Chef du Département des Mystères anglais. Il conclut en la déclarant sa représentante officielle avec Edgar Bones, un Haut Juge du Magenmagot.

— Vous comprenez, messieurs, que mon poste ne permet pas d'avoir des papiers en règles et complets, n'est-ce pas ? Mon travail est tenu au secret professionnel tout comme le sont certaines informations me concernant depuis ma nomination.

— Bien sûr Cheffe... Enfin Madame, balbultia Lionel en lui rendant ses papiers. Et... Et ce jeune homme ? Un membre de votre Département ?

— Ça vous ne le saurait jamais, dit froidement Dorcas.

— Je suis encore élève, leur apprit Aleksander avec un regard irrité pour sa supérieure.

— À Poudlard. Mais Albus Dumbledore n'a eu de cesse de me louer ses capacités, me glissant qu'il ferait un formidable secrétaire. Cette soirée est une sorte de test pour lui, sourit Dorcas.

— Aleksander Brand... Ah oui, votre mère est arrivée il y a peu, déclara Lionel en lui redonnant ses papiers.

— Ma mère ? répéta Aleks en se figea.

— Oui. Sorscha Brand, elle était accompagnée de votre frère il me semble. Jean ?

— Belle-mère et demi-frère, corrigea sèchement Aleks. Et il s'appelle Jan. Avec un j.

Il attrapa les papiers que lui tendait Lionel et suivit à grands pas Dorcas qui montait déjà les escaliers, sa longue robe bleu ciel traînant sur le sol en marbre, ses talons claquant sur chaque marche. Que fait Sorscha ici ? ragea silencieusement Aleks. Elle n'apparaissait jamais en public sans son célèbre mari, or son père n'était visiblement pas là.

Aleksander se reprit, inspira une longue bouffée d'air frais. Tout allait bien, ça ne changeait rien... La présence de sa belle-famille ne changeait absolument rien. Il devait simplement les éviter et les ignorer. Tout allait bien se passer... Aujourd'hui, c'était le véritable test.

***

— Ils sont rentrés, lança Camille. Aleks a déjà l'air énervé.

— Hein quoi ? fit Sirius.

Il cligna les yeux et détourna le regard de la foule. Il s'était mis à juger silencieusement les tenus des invités, se demandant comment un sorcier bien éduqué pouvait sortir en portant une robe orange.

Heureusement la tenue de Camille était ravissante. Au moins Meadowes avait bon goût même si elle se révélait parfois être un tyran.

Habillée d'une robe noire qui lui arrivait aux genoux, dénudant ses épaules mais couvrant son cou, Camille avait récupéré son air de princesse. Ses cheveux blonds courts étaient attachés en un chignon au niveau de la nuque. Chignon sur lequel Marlène avait passé du temps avant d'abandonner et de demander à Sirius de le faire. Il avait plus l'habitude d'en faire que la Serdaigle. Sa veste noire, destinée seulement à accueillir ses armes et ses papiers, accentuait ses épaules larges. Mais Sirius trouvait que cela la rendait plus jolie, plus élégante.

Lui-même portait un costume sombre fait sur mesure pour l'occasion. Ironiquement Sirius était vêtu de noir de haut en bas. De son veston à ses chaussettes, la couleur familiale le drapait. On reconnaissait bien là « l'arrogance des Black » lui avait déclaré avec moquerie Gideon. La veste était d'ailleurs un peu serrée en haut, il avait lui aussi des épaules larges dues à sa carrure de batteur.

— Je disais que Meadowes et Aleks étaient rentrés, on ferait mieux de bouger, lança Camille en enfilant ses escarpins. Quelle torture ces trucs... Mais apparemment y allait en bottes serait inapproprié et déplacé pour un bal. La barbe, j'aimerais bien voir Prewett passer toute une soirée en talons ! Surtout pour une mission...

— Ne me donne pas d'idée, rit Sirius en l'aidant à se stabiliser.

— On doit rejoindre l'entrée de la fontaine, il y a un passage là-bas, dit Camille en désignant un tunnel à l'écart de la queue d'invités.

— Et qu'attendons-nous ? Notre bal nous attend prince charmant, ironisa Sirius en lui tendant son bras.

— Et ça rime en plus...

***

— Edgar ! lança Gideon. J'ai l'impression que ça fait une éternité qu'on ne s'est pas vu ! Alors la paperasse ne t'as pas avalé ?

Un grand homme à la barbe taillée et aux cheveux auburns rendit un sourire à Prewett, de petites rides se formant aux coins de ses yeux au passage. Marlène, debout aux côtés de l'Auror, le salua d'un hochement de tête alors que William portait une énième fois sa main à sa hanche pour vérifier que sa sacoche, habilement dissimulée par un sort de Dorcas, était toujours bien accrochée.

— Gideon, répondit Edgar avec un sourire. Ça va faire deux semaines seulement, tu sais ? On était ensemble pour cette descente aux coffres.

— C'est long deux semaines quand tu as Alastor Maugrey pour partenaire... Tu as l'air crevé.

— Toujours aussi charmant, n'est-ce pas ? Oliver ne fait toujours pas ses nuits et ça énerve John, je dois veiller toute la nuit. Surtout que ma femme m'abandonne pour aller passer du bon temps au Brésil, plaisanta Bones. Elle va bien ?

— On a pas de nouvelles, mais c'est normal ne t'inquiète pas. On a vu Cassie avant qu'elle ne parte, elle était en forme.

— Elle n'arrêtait pas de se moquer de Black et Camille, lança Marlène en frissonnant dans son écharpe.

— J'aurais du prendre plus d'onguent. Et de potion revigorante... Par Morgane ! La crème pour brûlures ! Ah non je l'ai prise, soupira William avec soulagement, sa main fouillant son sac à l'aveuglette.

Edgar lui envoya un regard surpris alors que ses lèvres frémissaient, les prémisses d'un sourire titillant les coins de sa bouche.

— Toi tu dois travailler avec Elphias Doge.

William sursauta et se tourna vers le juriste, son visage trahissant sa surprise et ses épaules se tendant instinctivement. Cependant un léger sourire fendit ses propres lèvres en avisant Edgar et il tendit amicalement sa main.

— Edgar Bones, c'est cela ? Camille n'arrête de faire vos louanges ! En même temps vous avez un poste clé au sein du Magenmagot, ça l'impressionne vu qu'elle a toujours voulu devenir... Enfin bref. Je suis William Sunner.

— William vient d'Ilvermony également avec Abbott et Graves. C'est le filleul de Meadowes, potioniste et médicomage.

— Apprenti médicomage, corrigea William.

— Tant que tu peux nous rafistoler, tu feras l'affaire, commenta Gideon avec un haussement d'épaule.

— Camille fait mes louanges ? s'amusa Edgar. Et pourquoi donc Cassie tourmentaient Sirius ?

— Oh il tenait la main de Camille, fit vaguement Marlène. J'aime bien ta femme.

— Tu aimes tout ceux qui se moque de Sirius, intervint William.

— Il n'empêche que Cassiopeia Bones est une sacrée sorcière.

— C'est vrai que j'ai une femme extaordinaire, admit Edgar avec une pointe de fierté. Où sont les autres ?

— Aleksander et Dorcas nous attendent dans le hall. Elphias est déjà à l'intérieur. Camille et Sirius rentrent par la cour Nord à trente. D'ailleurs c'est à nous dans cinq minutes...

— Vous avez laissé Camille et Sirius ensemble ? releva Edgar, les lèvres pincées.

— Ah voilà ! Merci ! C'est ce que je dis depuis le départ, ils ne vont pas ensemble.

— Balivernes, balaya William d'un geste. Ils sont faits l'un pour l'autre.

— Non, non je ne faisais pas référence à ça. Je me demande juste si le fait que les deux héritiers de familles dont la haine mutuelle est notoire arrivent ensemble à un bal ne soulèvera pas des questions problématiques pour nous, clarifia Edgar.

— C'est le plan de Meadowes. Et s'il y a bien une chose sur laquelle je lui fais confiance c'est la réussite de ses plans, rétorqua Gideon. Camille et Sirius sont efficaces et savent improviser, ils s'en sortiront.

— Je ne suis toujours pas convaincu que ce soit la solution optimale. Nous aurions peut-être dû laisser Marlène et Sirius ensemble et prendre Camille avec nous...

— Alors non ! Je ne fais pas équipe avec Black. Plus depuis le fiasco du Chemin de Traverse.

— Non ce n'est pas une bonne idée de mettre Black et McKinnon ensemble, approuva Gideon. Fais confiance à Meadowes, Ed'. Elle trouve toujours une solution. Si son plan ne fonctionne pas, elle en aura un autre pour y remédier... C'est dans ces moments-là que je ne doute pas qu'elle soit une Serpentard.

Edgar soupira et se passa une main sur le visage aux traits tirés. Ses cernes formaient des demi-lunes sous ses yeux verts aux lueurs sages. Ça se voyait qu'il était exténué.

— Oui bien sûr lui fais confiance. Dorcas a toujours un plan, soupira-t-il. Je suis juste un peu à cran en ce moment....

— La situation de crise au Mangenmot n'est toujours pas réglée ?

— Non c'est toujours la guerre Minchum et Bagnold là-bas. Millicent est à deux doigts de démissionner... Elle m'a même proposé son poste mais honnêtement j'ai déjà trop de travail... Entre l'Ordre, le Ministère et les enfants, je jongle déjà constamment entre trois rôles différents... Et entre nous, je préférerais que ce soit Minchum qui démissionne. Il est complètement aveugle à la montée de Voldemort, il ne fait rien. Je comprends l'agacement de Millicent, elle doit constamment relâcher des criminels par manque de preuves ou parce qu'ils sont en bonne relation avec le Ministre...

Gideon grimaça face au sourire fatigué que lui offrit son ami.

— C'est pour ça que j'ai rejoins les Aurors et pas un bureau... Trop de paperasse mais surtout trop de politique. Profite de ce soir pour te détendre un peu Ed'.

— Officieusement nous sommes en mission Gideon. On ne peut pas se relâcher.

— Ne dis pas n'importe quoi. Tu passeras tes nerfs sur quelques mage noirs ce soir.

— La seule chose qui m'aiderait à me détendre ce serait d'enfin coincer Dolohov, lâcha Edgar les sourcils froncés. On l'a arrêté trois fois, trois fois par Merlin ! Tiens la dernière fois, c'était parce qu'il s'en était pris à un pauvre elfe de maison, l'accusant d'avoir volé un bijou de son coffre de Gringotts... Un elfe voler son coffre ! Balivernes. Il a jeté des sorts sur l'elfe en pleine rue, l'elfe a réussi à s'enfuir. Malheureusement pour nous. D'ailleurs je crois que c'est toi qui l'a aidé à s'échapper, non ? Si seulement il avait pu témoigner ! À chaque fois on doit relâcher Dolohov par manque de preuve !

— Oui c'est moi qui l'ait aidé ce pauvre elfe. Il avait l'air en mauvaise posture.

— Sauf que notre témoin aussi s'est échappé... Amelia était blême de rage quand on a du laissé sortir Dolohov une énième fois...

Gideon esquissa un pauvre sourire. Malheureusement personne ne semblait vouloir accepter que les sang-purs les plus influents de Grande Bretagne soient des Mangemorts et l'Ordre en pâtissait énormément. Il pataugeait car d'une part ils n'étaient toujours pas reconnus comme une organisation légale, d'autre part leurs ennemis étaient intouchables juridiquement. Même s'ils parvenaient à en capturer, c'était pratiquement impossible de les mettre à Azkaban.

— Papiers messieurs, fusa une voix.

Les deux adultes se retrouvèrent face à un Lionel, toujours déstabilisé par sa rencontre Meadowes et Brand. Il ouvrit de grands yeux en examinant leurs papiers. Sûr que le nom Bones avait de la résonance, même à l'étranger. Quant à Prewett, il était connu comme étant un des partenaires du célèbre Auror, Alastor Maugrey, qui commençait à devenir un des Aurors les plus respectés de sa génération.

— C'est un honneur, messieurs. Est-ce que ces enfants vous accompagnent ?

Gideon et Edgar lancèrent un regard amusé à Marlène et William, qui incendiaient le Gendarme du regard, indignés par la façon dont il les avait désignés.

— Nous serons majeurs dans quelques mois je vous ferais remarquer, fit dédaigneusement Marlène en lui tendant ses papiers. Ah non. On est déjà majeurs. J'oublie tout le temps que je suis une adulte...

— Je suis un ami de famille, j'ai la responsabilité de Miss McKinnon, intervint Edgar alors que Lionel dévisageait étrangement Marlène.

— McKinnon ? Ils me semblent avoir fait rentrer des McKinnon après les deux fous, marmonna Lionel avant de virer rouge pivoine.

— Les deux fous ? répéta Gideon.

— Enfin... Ils ne sont pas vraiment fous... Ils nous ont juste donné du fil à retordre à mon supérieur et moi, bafouilla Lionel. Une femme anglaise, une Chef de Département, et son secrétaire. Un danois nommé Brand. Étrangement assortis si vous voulez mon avis...

Gideon eut du mal à dissimuler son éclat de rire alors qu'Edgar eut une quinte de toux très prononcée. Il n'avait jamais été question de faire d'Aleksander un secrétaire. Marlène et William fixaient Lionel avec une expression étrange, essayant de réprimer leurs fou rires du mieux qu'ils pouvaient.

— Je suis en charge de Sunner, avança Gideon en reprenant un air sérieux. Il est bénévole pour Sainte-Mangouste, notre hôpital sorcier, et a été recruté pour aider les équipes de secours médicales sur place. Tenez.

Lionel s'empara de l'invitation spéciale de William, hocha la tête avant de lui indiquer où se trouvaient les postes médicaux dans le château, loin de se douter que William n'y mettrait jamais les pieds.

Une fois l'inspection terminée, Lionel les laissa passer en les gratifiant d'un tonitruant « bonne soirée messieurs » ce à quoi Marlène lui répondit par un regard irrité.

— J'ai l'air d'un mec moi ?

Lionel ne répondit pas et se retourna vers la file d'invités, déjà exténué. Il aurait du le savoir. Ce poste pour quelqu'un de son grade c'était trop beau pour être vrai. Mais maintenant Lionel se rendait compte que c'était un plan pourri.

De toute façon il n'avait pas eu le choix. André Rolland l'avait forcé après tout et Lionel ne pouvait pas désobéir à son Administrateur Général. Il en allait de la sécurité de sa petite sœur.

***

Sirius et Camille rejoignirent bien vite la foule grouillante, profitant du nombre importants d'invités pour se faufiler dans le tunnel. Ils firent de leur mieux pour adopter un air naturel, essayant de faire croire qu'ils appartenaient à ce genre d'endroits. Ce qui était le cas. Après tout ils descendaient tout les deux de riches familles sang-purs.

Le sourire de Sirius vacilla légèrement quand un sorcier français lui adressa un respectueux « monsieur Black ».

Leurs visages étaient assez célèbres pour être reconnus par intermittence dans une foule de sang-purs. Heureusement les Black et les Light taisaient toujours les frasques de leurs héritiers sinon leur présence à ce bal aurait été considérée étrange.

Camille perdit un instant son sourire quand on l'appela par le nom de sa sœur aînée. Elle lança immédiatement un regard incendiaire au sorcier qui s'était trompé. Ce dernier recula légèrement face aux yeux bleus furieux de la blonde et disparut dans le bain de foule. Sirius soupira exagérément et passa une main dans ses cheveux soigneusement coiffés.

— Je ne vais pas supporter ça toute la soirée, dit Camille entre ses dents, souriant à des inconnus.

— Je n'aime pas ça non plus, marmonna Sirius.

— Quoi ? Te faire admirer par une foule en délire ? C'est pourtant ton truc.

— C'est différent... À Poudlard on me dévisage parce que je suis un Maraudeur et que je suis beau. Parce que je suis Sirius. Ici on me regarde parce que je suis un Black. Parce que je suis riche et que je suis un sang-pur.

— Un bon parti, commenta Camille.

— Exactement. Tu es intéressée par l'offre ?

— Non. Tu ronfles.

— Je ne ronfle pas.

— Si. Très fort.

— N'importe quoi...

— Laisse tomber. Souris comme si tu voulais me frapper mais que tu te retenais.

Sirius lui offrit un sourire rayonnant à la place. Mais celui-ci disparut rapidement alors qu'il désignait discrètement l'avant de la file, à quelques mètres devant eux, où se tenaient trois personnes qui électrisaient la foule en se lançant des regards pleins de haine. Le couple Light et le patriarche des Black.

Arcturus Black adressait un regard meurtrier à Charles et Gemma Light. Cette dernière observait Arcturus avec un dédain qui lui était rare, ses cheveux noirs remontés en un chignon lâche semblable à celui de sa propre fille. Charles fixa la nuque du patriarche d'un regard glacial, brûlant d'une colère froide.

Sans le vouloir, surprise par la vue de ses parents, Camille lâcha Sirius comme s'il l'avait brûlé et se retourna pour ne pas que le couple Light ne la remarque. Sirius la laissa seule, plongeant ses mains dans ses poches pour les réchauffer un peu, un masque de nonchalance s'installant sur ses traits.

C'était un véritable spectacle d'observer les expressions faciales s'enchaîner sur le visage de l'héritier Black, passant du dédain à la nonchalance en quelques secondes aussi facilement que s'il revêtait un habit.

Camille croisa les bras sur sa poitrine, une colère sourde grondant en elle. Cela faisait plusieurs mois qu'elle n'avait pas vu ses parents et pourtant rien que les apercevoir la mettait dans un état de rage qui la surprenait elle-même. Elle enfonça ses ongles dans sa peau à travers le fin tissu de sa veste, essayant de réprimer toutes les émotions qui la submergeaient... Elle força ses pensées à dévier du couteau qu'elle transportait en secret. Elle ne comprenait pas pourquoi les voir la rendait si furieuse. Elle les aimait au fond d'elle, elle le savait pertinemment. Alors pourquoi les haïssait-elle autant ?

Sa réponse lui apparut clairement dans son esprit. Le regard dégoûté et supérieur que ses parents avaient adressé à Evelyn sur le quai de la gare Grand Central de New York.

Evelyn avait pourtant été adorable avec eux, leur souriant et les saluant avec respect et politesse. Mais ses parents l'avaient toisé avec froideur et avaient fixé sa tenue moldu avec dégoût. Evelyn avait fait semblant de ne pas remarquer la réaction des parents de sa meilleure amie, embrassant Camille sur la joue et lui chuchotant que ce n'était pas grave avant de lui souhaiter un claironnant  « Joyeux Noël ».

Camille pouvait accepter les insultes envers sa personne, même les coups elle s'en fichait, elle aurait tout accepté de ses parents avec flegme puis elle se serait excusée. Mais elle ne supportait pas la façon dont ils avaient toisé Evelyn, le dégoût sur le visage de son père. Sa mère s'était contentée de ricaner de ses vêtements mais n'avait rien dit d'autre. Son père n'avait pas eu son tact. Mais Camille n'avait rien répondu quand il avait insulté les moldus et les nés-moldus. Elle avait arrêté de se battre avec eux depuis longtemps.

Ses parents étaient morts. Et ce n'était que leur souvenir que Camille aimait de tout son cœur.

Quand elle les voyait sourire simplement, échanger un regard plein d'amour l'un pour l'autre, plaisanter et même rire, elle les retrouvait. Elle retrouvait ses parents, ceux qu'elle chérissait et qu'elle voulait protéger de tout. Même son père, si froid et intimidant, lui semblait accessible. Sa mère et sa douceur, sa gentillesse étaient de retour.

Puis quand ils se tournaient vers elle, elle ne voyait que leur manque de tolérance, leurs esprits fermés et leur sentiment de supériorité. Elle se rendait compte qu'elle ne pouvait pas protéger des gens qui se trouvaient dans le camp adverse.

Maintenant, elle les considérait comme des Mangemorts. Et elle n'était plus sûre de les aimer.

— Il faut qu'on avance prince charmant, intima Sirius en posant une main soudainement sur son épaule. Qu'est-ce que tu... Oh, attends.

Sirius décrocha ses doigts glacés de ses bras et noua fermement leurs doigts ensemble. Il ignora la fureur dans ses yeux et lui adressa un léger sourire.

— Vas-y, tu peux serrer maintenant.

— Tu vas le regretter, plaisanta Camille mais le cœur n'y était pas et elle serra la mâchoire.

— Avec ta force de crevette ?

Camille le poussa légèrement et il accusa le coup avec une petite grimace avant d'éclater de rire, de son rire d'aboiement de chien. Il secoua la tête et sourit à son amie avec dépit.

— Petite crevette.

— Salaud.

— Ah quand même. C'est juste de voir tes parents qui te mets dans cet état ?

Pour toute réponse, Camille serra plus forts les doigts de son ami et Sirius grimaça à nouveau quand il sentit les ongles de son amie s'enfoncer dans sa peau. Mais il ne protesta pas. Si c'était ce dont elle avait besoin pour se calmer, ça ne le dérangeait pas d'avoir des bleus.

— Je les hais.

— Je sais.

— Non mais je les hais vraiment. Avec leur putain de condescendance idiote et leurs putains de sourires supérieurs et leurs putains de... De costumes.

— La robe de ton père est classe pour une fois, ça tu dois lui accorder.

— Je lui accorde rien du tout ! C'est un salaud d'imbécile élitiste et méprisant ! Il a la classe, il sourit comme si tout va bien et il... C'est un salaud bordel ! Il a tort. Il a juste tort et il le voit pas, s'exclama Camille, sa frustration et sa colère brillants dans ses yeux orageux. Il ne fait même pas d'efforts et ma mère le suit sans hésiter... C'est... C'est dégueulasse. Je les hais. Et toi aussi insulte tes parents, je me sens seule !

Sirius esquissa un nouveau sourire mais l'étincelle d'amusement dans ses yeux gris s'était tarie. Son rire s'évanouit et fit place à un rictus de dépit.

— Mes parents... C'est des enflures. Mais contrairement aux tiens j'ai l'impression qu'eux ils le savent... Orion se tire dès que le ton monte entre moi et Walburga, il fait rien quand... Enfin tu sais quand elle... Enfin... Ce que je veux dire c'est que tes parents ne se rendent pas compte qu'ils disent ou font des choses mal. Alors que mon père il s'en fiche juste par exemple, il regarde sans rien faire. Même quand c'est Reg qui prend. Et ma mère... C'est juste une grande malade. Elle jette les sorts et je te jure elle a l'air d'apprécier... Elle dit que c'est pour notre bien, pour qu'on apprenne l'humilité... Et mon père ne fait rien, dit durement Sirius, un flamme dansant dans ses prunelles orageuses. À part se disputer avec Walburga et s'énerver sur nous parfois. Si tu veux des salauds, prends-les eux.

— Sirius, écoute, l'interrompit soudainement Camille en désignant les personnes devant eux.

Devant eux se tenaient les Light qui n'étaient toujours pas entrés dans le château et discutaient avec un Gendarme.

— Monsieur Belby souhaite vous rencontrer, vous et le reste de votre famille, dans le Salon de Brocéliande. C'est une réunion familiale urgente, déclara l'Auror.

— Nous avons rendez-vous avec des amis. Cette réunion ne peut-elle pas attendre ? demanda Charles avec agacement.

— J'ai bien peur que non monsieur. Votre beau-frère tient à vous parler le plus rapidement possible. Notre Administrateur Général, André Rolland, vous escortera jusqu'au salon de Monsieur Belby. Il sera là d'une minute à l'autre, je vous l'assure.

— Theodorus a intérêt à avoir de bonnes raisons, pesta Charles. Tu n'as pas trop froid ma chérie ?

— Non. Il fait plutôt bon pour un quinze novembre. Un temps idéal pour aller se promener sur le toit du château comme tu le faisais, répondit Gemma avec un sourire entendu pour son mari. On peut observer toute la salle de bal d'en haut, n'est-ce pas ?

Charles sourit et le cœur de sa fille se serra. Sa poigne sur la main de Sirius se desserra légèrement et elle leva les yeux vers les hauts du château. En effet, au milieu des trois tours il y avait un plafond de verre. Cela devait faire office de toit pour ceux à l'intérieur du bâtiment. Quant au verre il devait permettre de voir tout en bas sûrement. C'était une belle bâtisse.

Ils avaient étudié quelques plans du château au cours du mois dernier mais ce n'était pas des morceaux de papiers qui allaient les préparer à la vision de cet édifice impressionnant. Ce bâtiment était bien plus élégant que Poudlard mais plus froid également. Les pierres grises du château écossais étaient plus agréables et réconfortantes que le blanc immaculé de Beauxbâtons.

— Monsieur Light ! Quel plaisir de vous rencontrer enfin, j'ai tellement entendu parler de vous, s'exclama une voix à l'accent français prononcé. Excusez-moi, deux invités m'ont retardé sur le chemin.

Un homme aux cheveux noirs et à la moustache en brosse tendit sa main à Charles Light d'un air formel.

L'Administrateur des Gendarmes était légèrement plus grand que Charles malgré la grande stature des hommes Light et arborait des cicatrices aux mains et une à la tempe. Il examina le couple avec un regard calculateur, sans jamais perdre son sourire. Camille voyait bien pourquoi c'était le chef des Gendarmes, il était bien plus alerte que les autres, à l'affût du moindre danger et sur ses gardes. La façon dont il analysait les Light montrait qu'il ne leur faisait pas entièrement confiance. Le Chef n'était pas berné par la richesse et l'influence des Light.

— Veuillez me suivre, je vais vous mener à Monsieur Belby.

Le couple Light emboîta le pas au Gendarme, l'air ennuyés par ce contretemps familial. Il était de notoriété publique que Charles ne s'entendait plus avec sa famille, surtout avec sa sœur aînée qui avait épousé Theodorus et avait donc renoncé au nom Light. Une fois ses parents disparus, Camille se détacha complètement de Sirius et souffla un instant avant de suivre son ami vers le Gendarme qui était resté.

— Bonsoir. Papiers s'il vous plaît, ordonna-t-il d'une voix aimable.

Sirius lui tendit ses papiers et ceux de Camille. Le Gendarme arqua un sourcil en les parcourant distraitement et leur adressa un regard incrédule, se redressant soudainement.

— Monsieur Black, Mademoiselle Light... C'est un honneur. Vous avez raté vos parents et votre grand-père de peu.

— Quel dommage, soupira exagérément Sirius. Bon pouvons-nous...

— J'ai cru entendre que mon oncle avait organisé une réunion familiale, l'interrompit Camille. J'imagine que je dois en faire partie ?

— Oui, oui... Bien évidemment, Mademoiselle. Monsieur Belby m'a demandé de notifier la réunion à chaque membre de votre famille... Mais... Avec Monsieur Black... Enfin je ne comprends pas...

Il ne comprenait pas ce que faisait l'héritier Black et la cadette Light ensemble. Surtout qu'Arcturus et le couple Light venait de faire une démonstration de leur haine mutuelle devant lui. Camille glissa un regard prudent à son ami.

— J'ai reçu un hibou de mon oncle m'informant que Black et moi nous rendrions ensemble au bal. Comme nous venons tout deux de Poudlard et qu'il est majeur, vous comprendrez qu'il ait préféré que je sois accompagnée pour voyager même si... C'était accompagnée d'un Black, mentit-elle effrontément. On fait avec ce qu'on peut.

— J'ai une partenaire si charmante, sourit Sirius, l'air crispé. Douce et aimable.

— Au moins moi je ne suis pas un traître à ma propre famille...

— Tu en es sûre de ça ?

Camille et Sirius se fusillèrent du regard, se délectant de l'air horrifié du jeune Gendarme en face d'eux.

— Voyons mademoiselle, monsieur ! Ne vous disputez pas. Je vais vous mener au salon de votre oncle, s'empressa de déclarer ce dernier. Vous êtes libre de nous accompagner Monsieur Black...

— Hélas. Je n'ai pas le choix. Saluer son hôte est la moindre des politesses, n'est-ce pas mon brave ? Quel est votre nom ?

— Je... Je suppose. Je suis Guirec Pithiviers...

— Un prénom breton, releva Camille avec enthousiasme.

— Oui... Ma famille est originaire du Finistère. Vous connaissez ?

— Oh oui. Je suis née en Bretagne, un endroit magnifique. L'Angleterre manque de ce genre de charme je dois l'avouer. Ma famille paternelle est bretonne. Guirec... Pas facile à prononcer quand même.

Le jeune homme brun rougit légèrement, faisant pouffer silencieusement Sirius. Camille continua ses piques, alternant compliments sur la Bretagne et remarques désagréables envers le mauvais temps constant ou l'Angleterre. Guirec avait l'air gêné, il répondait à demi-mots, craignant sûrement d'offenser la blonde. Le trio s'engagea dans le château, passant par la Cour de la Fontaine, cadeau des Fontaine d'ailleurs selon les dires de Guirec. Camille ralentit pour observer la fontaine magnifique, une sensation de déjà-vu la saisissant aux tripes.

Camille était sûre de reconnaître la jeune femme en bronze qui dansait au dessus de l'eau du bassin en versant de l'eau grâce à une amphore. La statue adressa un sourire charmeur et un clin d'œil à Sirius quand ce dernier l'examina ce qui fit sourire à moitié Camille. Mais la sensation demeurait et la perturbait. Où l'avait-elle vu bon sang ?

Elle dût finalement détacher son regard de la statue quand ils rentrèrent dans le château. Elle remarqua avec malaise que ses talons claquaient trop bruyamment à son goût sur le marbre froid du sol. Quant au hall de la fontaine, il était rempli de rire et de bruits de conversation animées.

Sirius et Camille échangèrent un regard soulagé quand Guirec les guida à travers des couloirs de moins en moins fréquentés. Alors que le Gendarme leur annonçait qu'ils étaient bientôt arrivés, Camille adressa un regard entendu à Sirius qui sortit une fiole et un bout de tissu de sa poche de veston. Discrètement, il versa le contenu de la fiole sur le tissu en veillant à ce que le Gendarme ne le remarque pas, Camille lui posait des questions sur ce Salon de Brocéliande pour l'occuper.

— Monsieur souhaitait être assez éloigné de la salle de bal pour plus d'intimité. Mais vous verrez le Salon de Brocéliande est une merveille d'architecture. Une des plus belles bibliothèques qu'il m'ait été donné de voir, raconta Guirec. Tout les meubles ont été réalisés avec du bois venant de la forêt de Merlin, on peut même apercevoir son bâton d'enchanteur dans une vitrine au fond. Voilà, c'est au bout de ce couloir. Je vais vous faire rentrer, j'ai une clé pour l'arrière porte grâce à mon...

Sirius l'empêcha de finir sa phrase, plaquant le tissu sur sa bouche et son nez, et il l'immobilisa alors que Camille lançait des sorts de silence dans le couloir. Pithiviers se débattit férocement, envoyant son coude dans l'estomac de Sirius qui fut pris d'une quinte de toux violente et jura avec grossièreté. Malgré tout le Gryffondor le tint fermement, sa prise ne faiblissant jamais, et le Gendarme finit par s'affaisser dans ses bras. Par mesure de sécurité, Sirius tint le mouchoir un peu plus longtemps avant de le relâcher et de le déposer à terre. Camille gifla le français puis, voyant qu'il ne tressaillait même pas, elle entreprit de lui enlever sa veste d'uniforme.

— C'est violent ce truc, dit Sirius en observant avec inquiétude la fiole. Je ne vais plus voir Doge de la même façon maintenant...

— Surtout qu'il a dit que c'était purement expérimental, marmonna Camille en fouillant la veste. Croisons les doigts pour que Guirec se réveille...

— Expérimental ? s'étrangla Sirius. Par Merlin, je l'ai peut-être tué ce gars ?

— En principe, la potion ne durera que vingt-quatre heures, répondit Camille avec un air gêné. Tu connais Doge... C'est un génie, je ne pense pas qu'il se soit trompé.

— Pense ? s'emporta Sirius en s'accroupissant près du Gendarme et en prenant son pouls.

Il soupira en sentant le cœur de ce dernier battre doucement, au ralenti. Il se leva et d'un mouvement de baguette fit léviter le corps inerte.

— Avec tes conneries on se retrouve à droguer un représentant de l'ordre...

— Pithiviers fait partie de l'Ordre ?

— Non. Je parle des forces de l'ordre en général. Les Gendarmes, la Brigade Magique, les Aurors et tout le bazar.

— Ah oui. Ne me fais pas peur comme ça Sirius ! Mais bordel y'a combien de poches dans ce truc ? Accio clé !

Trois clés jaillirent de la veste. Camille s'en empara et jeta la veste sur le corps du Gendarme. Elle avait également pris des parchemins gribouillés d'encre et un autre trousseau de clé, ainsi qu'une fiole.

— C'est quoi tout ça ?

— Des listes de suspects mage noirs, la liste des invités et des bons de commande pour Fleury & Bott. Un trousseau de clés qui peut nous être très utile et une potion pour... Je ne sais quoi, y'a pas marqué dessus. Je la donnerai à William. Il faut l'Oublietter le Gendarme d'ailleurs

— Et planquer son corps accessoirement. On pouvait pas juste le stupéfixier ?

— Non, le Ministère peut tracer les sorts qu'on jette. Alors même si Meadowes et Bones ont désactivé ma Trace, je pense que réduire le nombre de sorts offensifs de nos historiques magiques est plus judicieux. En plus, un Stupéfix ça ne dure que quelques heures et on ne peut pas prendre le risque de le laisser traîner au bal.

— Comment ils ont désactivé ta Trace ?

— Aucune idée. Sûrement Meadowes qui y a accès pour son boulot. Bon il va falloir se dépêcher de le planquer après on va voir dans le Salon et...

— Attends, attends, la coupa Sirius. Tu vas vraiment y aller ?

— Oui. Je veux savoir ce qu'il se passe à l'intérieur de ce salon. Qu'est-ce que manigance ma famille cette fois-ci, tu n'as pas envie de savoir ? Si tu crois que c'est une coïncidence qu'une réunion familiale ait lieu le jour où on va s'attaquer au Premier Ministre français...

— D'accord, accepta Sirius après un temps de réflexion. C'est quoi ton excuse pour débarquer à Beauxbâtons en France alors que tu es censée être à Poudlard en Écosse ?

— Je ne sais pas... Une fausse lettre m'informant d'une réunion familiale secrète à Beauxbâtons le 15 novembre ? Un imposteur se fait passer pour mon oncle et m'envoie cette lettre... Je dois parler de toute urgence à mes parents... Je fais secrètement partie des Mangemorts... Aucune idée, j'improviserai. Tu sais que je mens bien et rapidement, déclara Camille en réajustant ses manches. Je vais te couvrir d'un sortilège de Désillusion et tu me couvriras au cas où ça tourne mal.

Sirius hocha la tête alors que Camille lui tapait la tête d'un coup de baguette. La sensation du sort le recouvrant pouvait être comparé à un œuf cassé sur sa tête qui dégoulinait sur tout son corps. En somme, c'était une sensation écœurante. Sirius frissonna et grimaça. Camille ouvrit une porte sur le côté et passa sa tête dans l'embrasure.

— Personne. Tu peux y aller.

Sirius guida le corps de Guirec jusqu'à l'intérieur de la pièce où il l'installa sur un sofa, ils étaient visiblement dans un salon plus étroit. Sirius jeta la veste du Gendarme sur son corps, le couvrant, l'air coupable. Il n'avait rien fait pour mériter tout cela, il s'était juste trouvé au mauvais endroit, au mauvais moment.

Camille referma la porte derrière Sirius avant de respirer un grand coup et de se tourner vers l'autre côté du couloir. Elle allait revoir sa famille au grand complet. La dernière fois remontait à Noël dernier et elle n'avait pas été des plus aimables avec ses oncles et tantes.

***

Sirius se glissa silencieusement à la suite de son amie à l'intérieur de la pièce, le regard alerte et la baguette sortie. Il resta dans l'ombre de Camille quand elle s'avança discrètement vers les voix bruyantes mais froides qui emplissaient la bibliothèque. Se dissimulant à moitié derrière les étagères, la Serpentard s'avança à pas lents et mesurés, un sourire nerveux aux lèvres alors que son cœur battait la chamade. Une fois qu'elle fut assez proche, elle s'accroupit et tendit l'oreille. Elle se retint de frissonner quand elle sentit le souffle de Sirius dans sa nuque.

— As-tu perdu l'esprit Theodorus ? C'est du suicide !

— Je n'ai jamais eu l'esprit aussi clair, Mélodie. Vous voulez vraiment vous prosternez à ses pieds comme de vulgaires rats ? Nous valons mieux que cela ! Nous sommes la fine fleur de la communauté sorcière, notre sang est l'un des plus respectés et puissants ! Ce n'est pas un sang-mêlé qui v dicter notre conduite.

— Se rebeller contre lui après lui avoir juré loyauté ne restera pas impuni, Theodorus. Nous serons exécutés pour traîtrise...

— Notre clan est sûrement l'un des puissants d'Europe ! Nous n'allons pas craindre un seul homme !

— Ce n'est pas d'un seul homme dont nous parlons, mais d'une armée ! Nous sommes puissants mais leurs alliés sont nombreux, nous ne faisons pas le poids...

— Depuis quand les Cieslak sont-ils des lâches ? Nous ne sommes pas n'importe qui, tout le monde magique le sait. Ils nous respectent. Ne suis-je pas directeur de cet établissement ? L'école sorcière la plus renommée après Poudlard ? Charles a un poste important au sein des Gendarmes anglais, enfin de la Brigade Magique pardon, et Maximilien n'a de cesse de gagner en influence au Prévôté. Narcisse commence à se faire un nom dans le Quidditch, Castiel est déjà connu chez les Gendarmes et même les Aurors depuis peu. Ne parlons pas de Bagnold, qui gagnera probablement les prochaines élections ministérielles. Théodore a déjà brillamment rejoint le Prévôté à la Cour Marchande. Sophie est un génie, l'année prochaine elle rentrera au Ministère et elle obtiendra bien vite un poste important. Quant à Camille, elle est brillante et douée en duel. Bien plus que la moyenne. Elle est rentrée d'Amérique, c'est le moment pour elle de nous rejoindre. Ne voyez-vous pas la puissance et l'influence de votre propre sang ?

Instinctivement, Camille serra les doigts autour de sa baguette alors que Sirius se tendait à côté d'elle. La Serpentard sortit sa baguette de sa poche et se mit à la faire tournoyer nerveusement entre ses doigts, les yeux rivés sur les livres en face d'elle. Elle avait reconnu plusieurs voix.

Son oncle, Theodorus Belby prenait le plus souvent la parole. Face à lui Mélodie Cieslak, sa grande-tante, Ulysse Light, son oncle, et même sa mère, Gemma Light.

D'un coup d'œil rapide, elle identifia Denise Belby et son cousin Théodore Belby. À leurs côtés Cassius, son grand-oncle, Narcisse, son cousin éloigné, et Iris, sa grande-tante, Fontaine. Ils ne participaient pas à la conversation mais étaient attentifs à chaque mot prononcés.

Trois autres personnes se tenaient dans le fond, Pénélope Delacroix, sa cousine, Lancelot Belby et sa fiancée, Isabelle Delacour. Sur le côté se tenait son père, Charles Light, qui observait la scène d'un air songeur. À sa droite, une vieille femme aux cheveux blonds tirant sur le gris fixait ses enfants d'un regard sombre. La matrone, Kamilla Cieslak, ne semblait pas apprécier la tournure des événements.

Camille hésitait. Theodorus parlait-il de Voldemort ou de Julius Bazin ? Tout deux convenaient à la description de son oncle et du reste de sa famille. Tout deux sang-mêlés qui s'arrogeaient des pouvoirs spéciaux, l'un par la peur, l'autre par la loi sorcière en temps de crise. Tout deux à la tête d'une armée. Bazin n'avait besoin que de l'accord du Prévôt pour déverser la force des Gendarmes et des autres forces spéciales sur le clan Light. Et Voldemort avait son armée de fidèles Mangemorts.

Seulement, Camille ne comprenait pas pourquoi sa famille se retournerait contre Voldemort. Certes, Tom Jedusor restait un simple sang-mêlé, mais c'était également l'un des plus grands Mages Noirs que l'histoire ne connaîtrait jamais. Il forçait le respect des familles les plus pures et, selon ses dires, il descendrait de Salazar Serpentard en personne.

Non. La théorie d'un Julius Bazin subissant les foudres des Light pour sa tolérance envers les nés-moldus et son poste important malgré son sang indigne était plus plausible.

De plus, il y avait un espion dans le Prévôté qui avait permis à Toussaint de s'enfuir, cela pouvait être l'œuvre de Théodore Belby, poussé par son père. Toute cette histoire prenait peu à peu forme dans l'esprit de la blonde. Il fallait qu'elle en parle à Dorcas...

— Tu n'as qu'à lui parler maintenant Theodorus. Ma fille est cachée derrière cette étagère, lança la voix froide de Charles Light.

Les regards du clan Light se tournèrent vers l'étagère qu'avait désigné Charles d'un mouvement de tête. Camille n'était pas franchement surprise, elle s'attendait à être découverte dès son entrée dans le salon. Néanmoins son cœur rata un battement et d'un vague geste de la main, suivit d'un regard suppliant, Camille ordonna à Sirius de rester caché et de ne rien faire. Elle se redressa lentement, serrant sa baguette fermement dans sa paume de main.

— Et bien, montre-toi Camille, continua son père. Joins-toi à nous.

Camille sortit de l'ombre rassurante de l'étagère et s'avança dans la lumière face au clan Light. Les regards de tout les membres de sa famille étaient dardés sur elle et elle s'efforça de réprimer la nervosité et la tristesse qui s'empara d'elle.

— Tu espionnes ta propre famille maintenant Camilla ? interrogea sa grand-mère sur un ton réprobateur.

— J'ai commencé à huit ans mamie. Narcisse et Sophie aussi m'accompagnaient.

— Petite effrontée. Tu n'as plus huit ans, quelle est ton excuse désormais ?

— Tu devrais être à l'école ma chérie, s'indigna Gemma.

— Je suis dans une école techniquement...

— À Poudlard, s'agaça Charles. Qu'est-ce que tu fais ici Camille ?

— C'est Castiel qui m'a invité. Il a eu une place avec son travail et il voulait qu'on se parle, ce que vous pourriez comprendre vu ce que vous m'avez écrit il y a un mois. Castiel qui va se marier, c'est un événement historique. Qui voudrait de lui ?

— Et pourquoi es-tu ici ? Dans cette salle ? Où est Castiel ? Il ne nous a pas dit qu'il viendrait.

— Le Gendarme qui a vérifié mes papiers m'a amené ici. Apparemment il pensait que j'étais toujours acceptée aux réunions de famille.

— Tu es acceptée à nos réunions...

— Castiel doit être avec les autres Aurors invités, on s'est séparé à l'entrée. Il ne voulait ni vous voir, ni vous parler...

— Et toi tu le voulais ?

— Évidemment je suis aussi en colère que lui à propos du mariage mais je pense qu'on ne trouvera pas une solution en vous ignorant...

— Il n'y a pas de solution. Le mariage aura lieu que vous le vouliez ou non, répliqua Rhéane Light. Ce mariage est profitable pour nous tous, même vous deux.

— Oh s'il vous plaît... Vous voulez juste vous débarrasser des deux problèmes familiaux.

— Comment es-tu venu ? Tu n'es pas majeure et Dumbledore ne t'as sûrement pas laissé partir seule, intervint Ulysse.

— Castiel a signé les papiers pour les autorisations de sortie légales, il est majeur et fait partie de ma famille proche. C'était suffisant. Et Marlène McKinnon m'a accompagné, elle a fait croire que je serais sous la surveillance de ses parents ce soir. Elle est majeure depuis une semaine.

Seule la dernière phrase était vraie, Marlène avait fêté ses dix-sept ans sans le dire à personne. Si America n'avait pas rappelé à Camille et Aleksander que le huit novembre était l'anniversaire de la Serdaigle, ils l'auraient tout deux manqué. Marlène l'avait dit à très peu de personnes, elle trouvait le concept d'anniversaire stupide et ne voulait pas spécialement fêter le sien.

— Les McKinnon ? renifla avec dégoût Mélodie.

Camille lui adressa un regard incendiaire démentit par le sourire aimable forcé qui étirait ses lèvres. La Serpentard brûlait d'envie d'utiliser sa baguette.

— De vieux sang-purs anglais, lui apprit Charles. Ils n'ont pas rejoins le Seigneur des Ténèbres mais au moins tu ne t'es pas entourée d'une autre sang de bourbe, Camille.

— N'utilise pas ce mot, dit brusquement Camille.

— Ce n'est qu'un mot, Camille. Dis-moi, pourquoi nous honores-tu donc de ta gracieuse présence ce soir ? Les traîtres à leur sang et les sangs indignes ne sont-ils plus à ton goût ? Cela fait des années que tu t'es détachée de nos affaires. Enfin plutôt que tu t'es détachée de notre famille. Tu n'as aucun respect pour ton sang, alors pourquoi accepter de participer à cette réunion ?

— Peut-être, justement parce que vous êtes ma famille. Ce n'est pas parce que je me suis détachée que je ne fais plus partie du clan Light. Que je le veuille ou non, Light sera toujours mon nom.

— Ce n'est pas juste un nom. Light. La lumière face à la magie noire dans laquelle se noie certains sang-purs... Nous sommes un symbole. Le symbole d'une nouvelle ère de sang-purs qui n'utilisent pas cette magie infâme. Light. C'est une histoire, une tragédie. C'est un mot qui inspire le respect à des sorciers puissants. Ce nom auquel tu te sens enchaîné pourrait te sauver la vie.

« Gardez-le, je ne veux même pas être sauvée.»

— Ce nom, c'est ton attache au monde sorcier légitime tout comme ton sang. Il te garantit de ne jamais finir seule.

« Je ne serais jamais seule mais ce n'est certainement pas grâce à vous... Je ne veux même plus vivre avec vous, sorciers pourris jusqu'à la moelle par votre maudit orgueil et votre putain d'idéologie suprémaciste ! »

— C'est ma magie mon attache, siffla Camille. Ma baguette. Je ne vous dois ni l'un, ni l'autre.

— Si l'on croyait en cela, les nés-moldus seraient des sorciers. Or ce n'est pas le cas.

— Pourtant c'est parfaitement logique. Pourquoi vouloir faire compliqué ? Tu as une baguette, tu es un sorcier, fin de l'histoire.

— Notre monde n'est pas fait pour être logique Camille. Notre monde est régit par la magie et rien n'est plus absurde que la magie.

— À part vos idéaux peut-être, déclara Camille légèrement trop fort.

Les membres de sa famille la toisèrent avec mépris. Par Merlin. Elle voulait s'enfuir en courant ou sortir sa baguette. Mais elle ne voulait pas rester ici, figée dans son fauteuil.  Elle avait peur, elle avait tellement peur. Elle força sa voix à rester neutre et forte, mâchant ses mots.

La seule chose qui l'empêchait de se prosterner devant le regard intrusif de son père était Sirius. Camille puisait sa force dans l'ombre rassurante de Sirius. Elle pouvait sentir son souffle dans sa nuque encore une fois. Il ne lui avait pas obéi et avait décidé de la rejoindre malgré ses ordres. Pourtant Camille en était extrêmement soulagée.

— Vous dites que les nés-moldus ne sont pas des sorciers, vous les dites indignes, pourtant qui la magie a-t-elle choisi ? En qui est-elle apparu ? Chez les nés-moldus. Vous avez des pouvoirs parce que vos parents en avez. Vous n'auriez peut-être pas de pouvoirs si vous étiez nés de moldus. Alors qui est indigne ? Ceux qui ont mérité leur magie ou ceux qui l'ont grâce à leur sang ?

— Tu oses insinuer...

— Oui pour la première fois j'ose Rhéane ! Les sang-purs proclament leur haine et dégoût des nés-moldus, leur supériorité face à des "êtres indignes". C'est faux et vous le savez très bien. Vous n'êtes pas dégoûtés par les nés-moldus, vous en avez peur. Peur d'enfants nés dans un monde qui vous ait inconnu. La vérité ce n'est pas que vous êtes supérieurs, c'est que vous êtes des froussards ! Vous avez peur de cette différence entre les nés-moldus et vous. Peur parce que vous savez que les nés-moldus sont de véritables sorciers, bien plus que vous ne le serez jamais ! Votre soi-disant supériorité m'a l'air de découler d'un sérieux complexe d'infériorité. Mais ce sont les nés-moldus qui sont supérieurs, malgré tout vos beaux discours et vos insultes vous le savez également. C'est nous les indignes.

Cette fois-ci Camille sut qu'elle avait franchi la ligne entre provocation et rébellion. La fureur éclata dans les yeux des membres de sa famille. Dans les yeux de ses parents pourtant juste de la déception et de la résignation.

Le premier sort à fuser émanait de son cousin Théodore. Mais Camille n'esquissa aucun geste pour dégainer sa baguette, trop troublée par l'expression de ses parents. Elle évita de justesse le sort de son cousin en se levant de son fauteuil et se jetant sur la droite.

Le deuxième sortilège jaillit de la baguette de Mélodie. Camille porta sa main à la poche où se trouvait sa baguette, peu effrayée par la perspective de se faire toucher par cet éclat violet. Elle avait confiance en son ombre. Et elle avait raison.

Le maléfice de sa grande-tante s'échoua sur le bouclier de Sirius. Mélodie écarquilla les yeux quand son sort s'arrêta à quelques centimètres de sa cible. Le sort de dissimulation de Camille vacilla alors brièvement et les Light aperçurent durant l'espace d'une seconde l'héritier des Black, sa baguette tendue vers leur clan et le regard brûlant de fureur. Il se rapprocha de Camille.

Son rayon de soleil il l'avait surnommé auparavant. C'était vrai, la blonde lui donnait envie de sourire, de rire. Son soleil personnel. Tout comme il était son ombre personnel. Et pour une fois, l'ombre haïssait la magie noire.

L'éclat violet lui était familier, sa mère adorait l'utiliser lors des punitions. Un sort de déchirure, il déchirait les muscles et les tendons. Un sort noir et tellement douloureux que Sirius avait hurlé et supplié en le recevant. Qu'est-ce qu'il haïssait la magie noire. Elle ne devrait pas exister. Et surtout elle ne devait pas approcher son rayon de soleil, il ne voulait pas qu'elle perde en éclat. Il refusait de la voir hurler et supplier.

— Mélodie ! Pas ce sort ! grondèrent Théodore et Charles.

— Black ! Sors de ta cachette ! appela Théodore avec haine. Tu ramèneras un cadeau de ma part à ta salope de cousine !

Beaucoup de gens haïssait Bellatrix Lestrange, peu de personne l'haïssait plus que Théodore Belby.

— On ne le touche pas, déclara Camille en se plaçant devant lui. Sirius est sous ma protection.

— Tu es une traître aussi de toute façon Camille !

— Théodore ! grondèrent Charles et Cassius.

— Pars, Camille. Rejoins ton Castiel, notre pourriture de cousin ! Pars ou tu vas regretter chaque mot que tu as prononcé traître à ton sang, menaça Pénélope avec hargne.

Camille se contenta de lui offrir une expression furieuse, elle avait toujours détesté cette cousine. Pourtant la sorcière sut qu'elle n'avait de meilleure option que celle que Penelope venait de lui suggérer. Si elle restait même ses parents ne pourraient la protéger de la violence de Melodie et Rhéane. Quant à Sirius c'était une cible encore plus évidente pour eux.

Alors Camille finit par abaisser lentement sa baguette et elle se retourna avec rancoeur. Elle savait qu'elle venait de perdre plusieurs batailles ce soir, elle n'avait rien appris sur Théodore non plus. Mais elle ne pouvait pas rester, Sirius était en danger.

La Serpentard se dirigea à contrecœur vers la sortie, sa baguette sortie bien qu'aucun sorcier avec un tant soit peu d'honneur n'attaquerait quelqu'un de dos. Et la fierté c'était le maître-mot dans le clan Light.

Camille aurait aimé dire que son cœur s'était brisé quand elle s'était faite rejetée par ses cousins, insultée, attaquée... Mais rien ne lui fit plus mal qu'entendre sa mère appeler son nom avec désespoir. Néanmoins, et elle se détestait pour cela, elle ne se retourna pas pour la rassurer sa mère, lui sourire et lui promettre qu'elle reviendrait. Camille continua de marcher.

Ce fut Sirius qui lui ouvrit la porte, ce fut Sirius qui la tira dehors avec brusquerie et ce fut Sirius qui l'examina rapidement du regard. Une fois qu'il fut assuré qu'elle n'ait pas reçu de sort, il lui sourit.

— Tu es incroyable.

— Ma famille me hait ?

— Je dirais qu'une large partie te déteste.

Camille fixa le sol, blême, et tira légèrement le tissu de sa robe au niveau du cou pour respirer plus aisément. Sirius l'entraîna rapidement à travers les couloirs de Beauxbâtons, s'aidant des bruits de conversations et de rires pour rejoindre la salle de bal. Ils ne parlèrent pas pendant le trajet. Camille digérait encore la conversation. Mais elle refusait de s'attarder sur la pensée qu'elle se ferait probablement renier pour ce qu'elle avait dit. Il y avait plus urgent ce soir, la protection de Bazin devait passer avant tout.

Et puis qu'importe si elle était reniée ? Elle savait qu'au moins un membre du W.O.R.L.D accepterait de l'héberger. Quant à sa famille... C'était des ennemis. Elle ne pouvait rien en tirer, ils resteraient camper sur leurs idéaux, persuadés d'avoir raison et d'être dans leur bon droit.

La priorité pour l'instant était de localiser l'espion qui avait infiltré le Prévôté. Grâce à ce qu'elle avait entendu, elle pouvait considérer Théodore et chaque membre de sa famille comme des suspects potentiels. Or beaucoup avaient des postes clés au Prévôté, surtout Théodore et Maximilien. Peut-être Calypso aussi, si elle avait repris son travail après sa deuxième grossesse. Camille devait trouver Dorcas à tout prix pour lui faire part de ses suppositions.

— Ce que tu as sorti là-dedans, commença Sirius. Sur les nés-moldus... C'est... Ça fait du sens. Bordel ça fait du sens. Comment tu as trouvé ça ?

— Evelyn essaye de comprendre le point de vue des sang-purs depuis des années, je l'aide. Je veux comprendre pourquoi ma famille méprisent autant les nés-moldus... Et on s'est demandé si ce mépris au final n'était pas simplement leur façon de dissimuler leur peur. Ou du moins ce mépris descend de la peur de leurs ancêtres... Mais le fait est qu'ils ont peur des nés-moldus parce que ça leur est totalement étranger et inconnu, ces personnes sont leurs supposés égaux et pourtant ils ne viennent pas du même monde qu'eux. C'est le manque de culture qui nourrit la haine anti-nés-moldus. Enfin c'est ce que je pense...

— C'est... C'est logique, dit Sirius en fixant le sol, le regard perdu dans le vide.

Camille l'observa avec des sourcils froncés. Une main recouvrant son menton et sa bouche, Sirius semblait réfléchir ardemment à ce que lui avait dit la Serpentard. Un sourire incrédule vint effleurer ses lèvres. Il se tourna vers Camille, l'air agité mais ravi.

— Un complexe d'infériorité, c'est du génie ! Imagine que je sorte à la harpie et à Orion qu'ils sont complexés par rapport aux nés-moldus, les vrais sorciers, et qu'ils sont indignes par rapport à eux ! Du génie par Merlin, du pur génie !

— Si tu le fais, prends une photo de leur tête puis dégage immédiatement ! Surtout si tu les traites de froussards comme je l'ai fais... Louée soit Morgane, une chance que ma famille est dix fois plus tolérante que la tienne... Je ne tiens pas à mourir de leurs baguettes, maugréa Camille en passant des mains sur son visage jusqu'à son cuir chevelu.

— On pourrait former un groupe toi et moi avec Andromeda et Castiel. Les moutons noirs, proposa Sirius avec enthousiasme. Bien que l'ironie soit plus flagrante pour moi et Andy bien sûr. Par le caleçon de Marlin, il faut trouver Castiel pour lui proposer tout de suite, prince charmant !

— Sirius ! Non, Sirius, s'exclama Camille alors que Sirius la tirait à travers les couloirs par le bras avec force. On est en mission imbécile ! Lâche moi Black, espèce de salaud !

— Tu t'adresses au mauvais Black, moi c'est Sirius pas Orion, lança Sirius avec un rictus.

— Black ! J'imagine que tu préfère fils de chienne dans ce cas ?

— Cette insulte, c'est une douce musique pour mes oreilles, sourit Sirius.

***

Hey ducks !

Voici un nouveau chapitre écrit par mes soins.
Je suis ouverte aux critiques pertinentes et blagues nulles en tout genre. N'hésitez pas à lâcher un vote ou un petit commentaire, ça me fait plaisir et ça motive énormément !

On se retrouve dans une semaine pour la suite du bal et de nombreuses révélations... *musique mystérieuse et dramatique*

Je vous donne un indice : un moment du chapitre suivant a déjà été évoqué dans le chapitre 11.

J'attends vos théories !

Bonne journée à tous !

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