Chapitre 14 : l'Interview
Les semaines s'écoulent, peuplées de joies, de fatigues et de travaux. J'enchaîne les chapitres, autant sur une histoire que sur une autre. Bientôt deux mois arrivent à leur terme, et il me semble à présent impensable de vivre ailleurs qu'à Wattpad. Les étranges souvenirs de mon accueil ainsi que l'entretien sont vites oubliés ; je me prélasse sur mon canapé avec Flocon, efface les cernes sous mes yeux en quelques jours et roule jusqu'à l'Industrie en chantant à tue-tête au volant.
J'ai même sociabilisée avec Plume Noire, une auteure de Fanfictions LGDC, tout comme moi. Nous débutions un échange de lecture, sans toutefois en savoir un minimum l'une sur l'autre...
Ce matin là, tandis je lâche mon sac sur mon bureau pour sortir mes affaires, mon nom semble résonner non loin. Intriguée, je me redresse et regarde aux alentours ; non loin, une jeune femme aux longs cheveux noirs me hèle en agitant les bras.
-Anora Ellhor ! s'écrie-t-elle avant de s'arrêter face à moi, devant mon air ahuri.
-Bonjour... ?
Elle fait une pause quelques secondes, hors d'haleine, puis se redresse :
-J'ai commencé à lire Le Clan des Feuilles pour notre échange de lecture, et j'adore ! J'aimerai beaucoup t'interviewée pour mon journal !
Mes yeux s'écarquillent se surprise, tandis que je me retiens de sauter de joie :
-C'est vrai ? Ça me ferait tellement plaisir !
Un sourire s'étale sur ses lèvres :
-On peut commencer aujourd'hui si tu veux !
Je glisse un regard vers mes affaires sur mon bureau, avant d'hausser les épaules et d'acquiescer :
-Avec plaisir !
Nos sourires immenses concordent sur cette dernière réponse, et elle me fait signe de la suivre :
-J'écris mon journal sur le marché, où je peux plus facilement gagner des lecteurs.
Perplexe, je me contente de la talonner ; voilà qui bouleverse totalement ma journée !
***
N'ayant jamais pris la peine de lire le livret donné par Mr Edgarh, la présence d'une place de marché à Wattpad m'était jusqu'alors inconnue ; lorsque nous descendons de ma voiture, mes yeux s'écarquillent devant la foule qui s'agite sous mes yeux. Ce que je pensais être une place se révèle en vérité un serpentin de rues commerçantes, grouillant de clients et d'un brouhaha incessant.
Sur les côtés s'alignent des boutiques, des musées ou même animaleries aux façades enchanteresses, toutes plus colorées les unes des autres. Je vois là des magasins de première pages de couvertures de romans, des refuges pour créatures fantastiques, des escape games grandeur nature appelés "RP" ou encore des expositions de dessins.
Ahurie devant tant de diversité, je laisse Plume m'entraîner au cœur de la foule ; mes yeux se rabaissent vers mes pieds et aussitôt le monde bascule. Prise de vertiges, les muscles tendus, je suis comme noyée dans un océan de bruits et d'agitation ; la foule me paralyse ! Comment ai-je pu oublier une seule seconde le mal être qui s'empare de moi à chaque pas fait dans une foule aussi bondée.
Consciente de mon malaise, Plume nous sépare de la marée pour nous plaquer contre le mur.
-Tout va bien ? s'inquiète-t-elle.
Je hoche la tête, tâchant de reprendre calmement ma respiration.
-Ce n'est rien, je la rassure, reprenant peu à peu mes esprits. Où se trouve ton magasin ?
Elle pointe le bout de la rue de son doigt, la mine toujours légèrement inquiète.
-C'est à une trentaine de mètres. Tu es sûre que ça va aller ?
Je garde les yeux levés vers le ciel et m'avance au cœur de la foule, comme plongeant dans les bras d'un monstre vicieux.
-Oui, ne t'en fais pas, je poursuis sans même être consciente de ce que je raconte réellement.
Elle m'agrippe le bras et, reconnaissante, je la laisse me guider. Le ciel se tâche quant à lui de petits moutons blancs, tranquilles. Leur apparence calme ralentit les battements fous de mon cœur et bientôt, nous nous arrêtons. Je baisse les yeux pour contempler une façade aux couleurs or, noires et rouges ; l'écriteau "À Lire Absolument !" s'écrit en majuscule au dessus de la porte vitrée. Plume glisse la clef dans la serrure et nous fait entrer. Elle allume alors les lumières et je peux alors observer la pièce plus en détails : on trouve dans un coin d'agréable canapés rouges, agrémentés de plantes sur les bordures. À l'opposé, une caisse longue propose sur son devant des journaux et pubs.
Plume m'entraîne sur les canapés et nous fait asseoir ; tandis que je retire ma veste, elle sort de sa poche un calepin et un stylo :
-On commence quand tu veux, fait-elle, chaleureuse.
Je croise les jambes et, soudain consciente qu'il s'agit là de ma première interview, je me redresse pour donner la meilleure image de moi, malgré le fait que rien de tout ceci n'est filmé. Plume commence alors à écrire tout en posant sa première question :
-Alors... Pourquoi avoir choisi le nom "Le Clan des Feuilles" comme nom de Clan ?
-Il faut savoir qu'à la base, le nom du Clan était "Le Clan des Survivants", je réponds tout en étant la plus sincère possible. Mais je ne trouvai pas ce nom assez original ou tout simplement beau, alors j'ai cherché et j'ai trouvé "Le Clan des Feuilles". Ça a un rapport avec l'endroit où ils vivent, donc la forêt, mais aussi un sens plus sentimental, que l'on va découvrir par la suite - je ne veux pas spoiler !
Elle calque mes réponses sur son calepin avec une rapidité surprenante, avant de poser la deuxième question :
-À propos des personnages... qui est le vrai protagoniste de l'histoire ? Rivière Bleue, Étoile de Granit ou Feuille Douce ? Ou bien les trois ?
-La principale protagoniste de l'histoire est en effet Rivière Bleue, puisque c'est elle que l'on suit / va suivre tout le long du roman, et que c'est elle qui nous raconte son histoire. Mais quand on y réfléchis bien, je dirai que ces trois personnages (Étoile de Granit, Feuille Douce et Rivière Bleue) sont tous aussi importants les uns que les autres.
Elle hoche la tête, approbatrice, tout en notant.
Les questions s'enchaînent ainsi, et mon plaisir à répondre aux questions ne fait qu'augmenter. Ma joie est telle que des frissons ne cessent de me parcourir le long de l'entretien.
Lorsque ce dernier ce termine, Plume m'adresse un large sourire :
-Voilà, c'est terminé, merci beaucoup ! J'espère ne pas t'avoir pris tout ton temps...
Je balaye son inquiétude d'un geste de la main :
-Pas du tout ! C'est moi qui devrait te remercier, si tu savais comme ça me fait plaisir d'être ici !
Elle se lève, s'étire légèrement et nous nous serrons la main :
-Au plaisir de te revoir ! me salue-t-elle tout en rangeant son calepin.
-Je viendrais te voir ici à la sortie du journal ! j'ajoute, enfilant mon manteau.
Elle me tient la porte et je lui souris une dernière fois avant de quitter le magasin. Je lâche un frisson : la brise légère qui vient me chatouiller la nuque se fait fraîche.
Je souffle alors un bon coup, de grands feux d'artifices explosant au creux de mon estomac. Je suis si heureuse !
Le sourire au visage, je descends les quelques marches pour bondir sur les dalles grises irrégulières de la ruelle, le cœur gonflé de joie et de fierté.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top