Novembre 2020 partie 2 - Spécial le Mâle
Bonjour Wattpadiens et Wattpadiennes. Vous lisez un magazine qui après avoir fait tomber le mâle de son piédestal, va essayer de le faire s'y remonter.
Entre le violeur et la perte de virilité, nous avons conscience que le dernier numéro était un peu dur. Clairement, nous avons vécu le début de confinement comme tout le monde : avec une grosse baisse de moral. Cependant, si tout casser comme un ado puéril écoutant du Saez, c'est parfois utile, il faut, à un moment donné, penser à la reconstruction.
Ce numéro, c'est un miroir espoirant (c'est déformant, mais en espérance - oui, je viens de l'inventer). On reprend l'avocat du Diable, mais notre nouveau rédacteur va nous apporter une défense héroïque des personnages féminins que j'ai un peu écorché précédemment (j'ai présenté le nouveau sous le nom de Drozo dans le numéro précédent, mais vu qu'il a créé un compte sur Wattpad spécialement pour vous, il faudra l'appeler LientyRagus). Quant à la BAC, elle va s'intéresser à un des héros les plus romantiques de la littérature française.
Si on pouvait voir l'analyse de Lynkha comme un copieux (et délicieux) plat de résistance, ici, il sera plus question d'une farandole de desserts. Du retour de la gendarme Aillys au voyage en Grèce proposée par wait4aturtle, en passant par l'anecdote et le Coup de Cœur de l'infatigable Kellroye, c'est un gros concentré d'anecdotes pour réfléchir et se divertir.
Aimez-vous, c'est le plus important. Et bon numéro.
Dans les coulisses, l'Académie vit un important chambardement et il fallait qu'on vous dévoile un jour ce qui est en train de se jouer.
Tout d'abord, nous avons le regret de vous annoncer le départ de Detico, qui préfère se consacrer à ses projets personnels. C'est une figure majeure de l'ACA qui nous quitte, toujours prêts à nous crier dess... euh je veux dire à nous rappeler les deadlines, un type qui passait un temps considérable en coulisse et, même si je l'ai parfois chambré au cours de mes différents articles, un ami.
Autant ne rien vous cacher, il part au moment où nous sommes en plein doute. Perte de visibilité, perte de sens aussi. Notre mission première a toujours été les commentaires, que nous avons ralenti par lassitude, à force de répéter à chaque fois la même chose. On vous avoue qu'en faisant muter le mag cette année, on a eu peur de se fourvoyer.
D'ailleurs on a vraiment besoin d'avoir votre avis. Non pas concernant le manque d'audience - parce qu'on a tous remarqué le bazar que sont les algorithmes Wattpad - mais on voudrait savoir ce que vous pensez du mag, mais aussi de l'ACA. En gros dans quelle direction nous devons continuer. Après tout, nous avons toujours considéré le mag comme étant le votre donc il est normal qu'on vous laisse la parole. ^^
Enfin nous faisons un appel d'urgence au recrutement. Le départ de Detico, c'est un poids supplémentaire dans une équipe déjà réduite. Vous n'êtes pas obligé de collaborer à chaque numéro - c'est d'ailleurs le choix qu'à fait LientyRagus, mais nous serions ravi de recevoir votre aide, quelle que soit votre implication.
D'avance merci.
Les femmes d'action ne sont pas (toujours) des Mary-Sue
« La mode actuelle de mettre des femmes Mary-Sue en tête d'affiche c'est du féminisme bas de gamme qui est en train de détruire toute forme de héros virils dans la fiction actuelle. » Voilà des propos que j'entends régulièrement ces dernières années. Des mots très faux à mon sens : il suffit de regarder le nombre hallucinant d'histoires surfant sur le succès de la série télévisée Vikings pour constater que oui, l'homme bodybuildé a encore de beaux jours devant lui.
En fait, malgré les apparences, on peut même dire que la femme d'action de premier plan reste encore largement minoritaire au cinéma. Pour chaque Wonder Woman, combien y a t-il de Batman, de Superman ou d'Aquaman ? Paradoxalement, ce manque de représentation féminine dans la fiction se ressent encore plus dans les histoires où c'est la femme elle-même qui tient le premier rôle. Prenez le film Rogue One par exemple. Malgré une Felicity Jones en tête d'affiche, la parité du casting est encore plus déséquilibrée que dans une école d'informatique !
Il faut dire que la représentation d'héroïnes d'actions dans la fiction a un passé compliqué. À la fin du XIXème siècle et au début du XXème, la littérature d'aventure était exclusivement destinée à un public de jeunes garçons, le lectorat féminin étant lui redirigé vers d'autres genres. L'héroïne y est donc une figure minoritaire, puisque l'adolescent pré-pubère peut moins facilement s'identifier à elle. Elle n'est pas absente pour autant. On peut ainsi citer la sympathique série de nouvelles de Robert Howard (l'auteur de Conan le Barbare) centré sur le personnage badass d'Agnès de Chastillon, une sorte de hors-la-loi un peu misandre qui n'hésite pas à utiliser le poison et les assassinats pour parvenir à ses fins. Ou encore l'aventurière jules-vernienne Paulina Barnett, héroïne du roman le Pays des Fourrures, qui elle, utilise plus ses capacités féminines (pour l'époque) pour avancer, que ce soit son intelligence ou sa sociabilité. Mais ces personnages sont très rarement au premier plan, et restent au final cantonnés à quelques archétypes : la femme dangereuse, mystérieuse et sulfureuse, qu'on pourrait rapprocher du cliché de la femme fatale ; et la femme douce, gentille, raisonnable et aventureuse, qui sert surtout à modérer les excès des hommes.
Il aura fallu attendre les années 1940 et l'arrivée d'une nouvelle forme d'art pour voir de nouveaux archétypes prendre le devant. Cette forme d'art, c'est la bande-dessinée. Dignes successeurs des récits pulp du début du siècle, ses auteurs ont rapidement tenté d'appâter un nouveau public : les adolescentes. C'est donc l'arrivée dans la fiction des femmes fortes qui cassent des gueules « comme des hommes » : les Wonder Woman (1941), les Rulah, la Déesse de la Jungle (1947, une sorte de repompé de Tarzan), puis, plus tard, les Spider-Woman et autres She-Hulk (preuves que le remake féminin, ça ne date pas d'hier). Est-ce l'héritage de cette culture qui a donné l'envie à Hollywood, à partir des années 70, de créer ses Princesses Leïa (Star Wars), ses Sarah Connor (Terminator) et ses Beatrice Kido (Kill Bill) ? Peut-être...
Kamen, Fox Feature Syndicate's Zoot n°7, juin 47 - Domaine Public
Et on en arrive aux alentours des années 2010, l'époque où, selon certains, la représentation féminine aurait « dérapé ». On accuse souvent les personnages féminins actuels d'être des Mary Sue (en omettant d'ailleurs les très nombreux Gary Stu actuels ; et oui, beaucoup de problèmes que l'on reproche à Captain Marvel ou au dernier Mulan valent également pour des films comme Doctor Strange). On accuse les studios de vouloir faire de la lèche aux féministes, et donc de gâcher leurs licences pour des raisons mercantiles. En fait, si nous ne nions pas l'existence de ces basses pratiques commerciales, force est de constater que la réalité est beaucoup plus nuancée.
D'une part, et c'est sans doute le point le plus important à noter, le public de ce genre de fiction a beaucoup évolué en un siècle. D'un genre exclusivement destiné à un public d'enfants et de jeunes adolescents masculins, l'aventure s'adresse maintenant également aux femmes et aux adultes, ce qui induit naturellement l'émergence de figures féminines marquantes pour plaire à ce nouveau marché. En quelque sorte, ce n'est pas si différent que créer des Conan le Barbare pour plaire au public masculin d'il y a un siècle ; la fiction s'est toujours adaptée et s'adaptera toujours à son public.
Ensuite, si j'ai insisté sur l'importance de l'arrivée du comics dans la représentation féminine en fiction, c'est parce que l'émergence des nouvelles figures féminines des années 2010 peut elle aussi s'expliquer par l'arrivée d'une nouvelle forme de littérature : le young adult.
Pour des raisons que nous ne développerons pas ici, là où la littérature d'aventure dite « généraliste » est très largement dominée par des auteurs hommes, le young adult compte une majorité d'autrices... et donc un grand nombre d'héroïnes. Ce genre ayant largement été inspiré par la saga des Harry Potter de J.K. Rowling. On y retrouve majoritairement des personnages principaux « normaux », pas plus forts que n'importe qui, et qui subissent plus les événements qu'ils n'agissent directement dessus dans un premier temps. La narration y a souvent une focalisation interne avec un seul point de vue afin de maximiser le transfert d'émotions entre le personnage et le lecteur. L'exemple le plus célèbre est celui de Katniss Everdeen, au centre de la saga Hunger Games, mais on peut en citer d'autres : Rhine dans le Dernier Jardin, Sacha dans l'excellent roman Vita Nostra (qui, s'il n'est pas officiellement considéré comme du young adult, en reprend ses codes)... On est donc à l'opposé des personnages "biger than life" auxquels la fiction nous avait habitué.
Ross, Hunger Games, 2012 - Tous droits réservés à Lions Gate Pictures - image respectant le Fair Use (Us) et le droit de citation (Fr) - Jennifer Lawrence interprétant Katniss Everdeen, une des héroïnes de Young Adult les plus connues.
Et au cinéma, le personnage de Jyn Erso dans Rogue One est totalement dans la lignée de ses personnages. Un cas intéressant à relever est celui de Yennefer de Vergenberg qui, dans les romans du Sorceleur (1989) était un archétype de femme fatale, mais qui, dans son adaptation télévisuelle dans la série Netflix The Witcher, devient plus un personnage à fleur de peau qui subit les événements, comme dans du young adult. Un autre exemple, bien moins réussi cette fois, dont j'aimerais parler est celui de Rey dans la postlogie Star Wars. On a souvent dit que si ce personnage était une Mary-Sue, c'était parce qu'une forme de marketing pseudo-féministe voulait que, parce qu'elle est une femme, il ne doit rien lui arriver. Pour ma part, la raison est là encore due aux influences young adult du personnage. Rey au début de l'histoire est une femme lambda, et pas surpuissante comme un Anakin, qui passe son temps à fuir dans le premier volet et réagit plus par émotions que par réflexions. Bref, c'est un personnage à fleur de peau qui peut facilement transmettre ses émotions fortes au spectateur. Sauf que les scénaristes voulaient garder un ton léger, et si Rey avait perdu ou subit des événements graves, alors elle aurait immédiatement donné au spectateur des émotions négatives très fortes. D'où le fait qu'elle devait devenir imbattable. Et donc une Mary Sue.
Évidemment Rey est un personnage raté, ce qui n'est pas le cas de la majorité des héroines de young adult, fort heureusement. Et il ne faut pas non plus croire que les archétypes de young adult vont remplacer les archétypes de personnages féminins préexistants. On aura toujours des Cersei Lannister (le Trône de Fer) et des Dame Mevanwi (Kaamelott) pour se battre avec des armes « de femme » comme les héroines du début du siècle. On aura toujours des Mikasa Ackerman (l'Attaque des Titans) et des Furiosa (Mad Max : Fury Road) pour cogner les méchants comme dans les années 90. On aura toujours des Vanya Hargreeves (The Umbrella Academy) et des Clarke Griffins (The 100) pour devoir lutter contre des forces qui les dépassent malgré leur normalité.
Et, de l'autre côté, on aura également toujours des Ragnar Lothbrok (Vikings), des Mandaloriens (The Mandalorian), et des Geralt de Riv (Le Sorceleur) pour les amateurs de beaux hommes d'action virils avec de jolis abdos. Le cinéma, la télévision et la littérature sont tellement vastes que l'arrivée de nouvelles figures, qu'elles soient féminines ou autres, apporte juste plus de diversité et de richesses à nous, spectateurs et lecteurs.
Dans la fiction, rien ne se perd, tout s'additionne.
Marty Stu
Appelé aussi Gary Stu ou Larry Stu, voici l'homologue masculin de Mary Sue. Débordant d'énergie comme de cliché, ce pseudo-homme idéal nous fait croire au prince charmant. Je pense que vous avez déjà entendu parler de lui et vous voyez tous le personnage archétype de la virilité avec un sombre passé larmoyant. Fort, intelligent, beau et j'en passe, il est tout simplement par-fait. Il existe cependant plusieurs types de Marty Stu.
Le Manly Stu : C'est l'incarnation de la virilité dans le sens le plus macho du terme. Il est fort, grand, a des chevilles très gonflées et ne s'attarde pas sur la romance.
Le Romantic Stu. Lui a toutes les qualités du petit copain rêvé : attentionné, à l'écoute, aimant. Il vous vend une romance digne d'un shojo (manga pour fille, plus que souvent romantique).*
Hardwicke, Twilight, chapitre I : Fascination (2008) - Affiche promotionnelle - Tous droits réservés SND - Usage respectant le Fair Use (US) et le droit de citation (Fr)
Robert Pattison joue Edward Cullen, un des Marty Stu les plus populaires.
L'Uke Stu : Voici ce que devient Marty une fois qu'il libère sa féminité. Certains pourraient le comparer avec le cliché de l'homme gay.
Le Lemon Stu : Séducteur, il peut mettre toutes les filles qu'il souhaite dans son lit. Même les plus réticentes d'entre vous. Si si.
Le Geeky Stu : Il sait très bien qu'il n'a aucun muscle donc il mise tout sur son intellect. C'est d'ailleurs souvent le meilleur en science et en informatique. N'oubliez pas que hacker, c'est mal.
Le Purity Stu : Sans défaut, cet homme a toutes les qualités du monde. Aucun défaut, je vous jure !
Le Black Hole Stu : La personne que tout le monde adule et imite. C'est le modèle incarné, le soleil illuminant, inspirant les autres personnages. Ne vous demandez plus qui a lancé la dernière mode, c'est lui.
Maintenant, plusieurs choix s'offrent à vous pour éviter de tomber dans le cliché.
1) Repérer ce genre de personnage et le rendre plus réaliste. C'est-à-dire, entre autres, enlever des qualités et ajouter des défauts, donc équilibrer sa personnalité. Rendez-lui un passé "normal" et plausible, ajoutez lui des manies, des tocs, des habitudes originales, atypiques et donc imparfaites et attachantes. Quelqu'un disait (je sais plus qui désolée), qu'aimer une personne, finalement, c'était aimer ses défauts plus ses qualités. Je ne vais pas philosopher sur cette question mais notez tout de même dans un coin de votre tête, qu'être ami avec une personne parfaite, ça doit être assez déprimant et même sûrement ennuyeux. Après, ce n'est qu'une supposition.
2) Garder le personnage et jouer sur les conséquences. J'explique. Le but va donc être de rendre le personnage réaliste grâce à un cadre plausible et en montrant les implications de son comportement. Par exemple, le Lemon Stu, grand séducteur, aura effectivement plusieurs filles à ses pieds en raison de sa beauté et de ses techniques de drague, mais pas toutes. Certaines le détesteront à cause de ça. Il sera admiré par certains garçons et renié par d'autres. Pour résumer, la technique consiste à faire redescendre sur Terre le personnage idéalisé.
Je m'excuse pour cet article court. Si je suis allée trop vite et que vous avez des questions, n'hésitez pas !
Ce mois-ci, à vous de réfléchir sur vos personnages masculins idéalisés. Les repérer est déjà une grosse étape. Ensuite, réécrivez sa fiche de sorte à équilibrer sa personnalité ou étudiez comment le faire redescendre sur Terre.
N'hésitez pas à nous partager vos réflexions, nous pourrons nous donner notre avis et vous filer un coup de pouce ;)
Allons voir chez les grecs
Bonjour tout le monde !
À mon tour de présenter la rubrique que j'animerai ce mois d'octobr...Novembre, déjà ?
Ah...
Bon... On va éviter de perdre trop de temps, alors.
Aujourd'hui, je vous emmène visiter le merveilleux âge d'or grec (Vème siècle av. J. C.) ! On regardera une petite pièce de théâtre avant de prendre part à la lecture d'un livre très attendu à Athènes. Son auteur est l'homme le plus reconnu de son temps. Je vous laisse essayer de deviner avant de lire la suite ;)
Tout au long de cette rubrique, nous allons causer d'art et des relations que l'art a pu partager avec les différentes sociétés qui ont peuplé l'Europe depuis l'Antiquité. Le pitch n'est pas très vendeur, certes, mais vous allez vite comprendre l'intérêt de cette chronique.
On est arrivé devant le théâtre. Installez-vous vite ! Je vous ai réservé les meilleures places, juste devant le chœur. Mais ne vous en faites pas pour les spectateurs situés au fond : l'architecture a été mise au service des théâtres (encore une fois) grecs pour que ces spectateurs puissent entendre les voix des acteurs à merveille.
Théâtre antique d'Epidaure - Grèce
Photo prise par Carole Raddato sous licence CC BY-SA 2.0
Sans autre moyen de déplacement que la marche, certains spectateurs manquent à la représentation. Heureusement, lorsque celle-ci commence, la pièce n'a pas vraiment démarré. C'est le chœur qui entame le spectacle, et à qui revient le rôle de résumer l'histoire régulièrement, en chantant, à tous les éventuels retardataires, ou bien d'annoncer l'histoire à venir. Et justement, le chœur nous conte le destin tragique d'Œdipe, connu notamment pour avoir résolu l'énigme du sphinx. (le "œ" dans Œdipe se prononce "è", bien que personne ne le prononce ainsi. À vrai dire, tous les "œ" se prononcent de cette manière, comme le devrait "œsophage", soit [è]sophage, par exemple. Seuls les "œ" auxquels est rattaché un "u" ou un "i" se prononcent "eu" comme œuf ou bœuf. Petite anecdote...)
Que le chœur spoile l'histoire avant même le début de la pièce n'est pas très perturbant chez les grecs. C'est d'ailleurs l'un des éléments qui définit la tragédie grecque. En Grèce, la société croit à des dieux qui cherchent parfois à s'amuser, comme le font les humains. Mais le passe-temps favori des dieux, c'est de voir les humains souffrir par leur propre faute. Et pour cela, il existe le destin, une histoire écrite à l'avance qui ne pourra jamais être violée. Et ainsi, il en devient quasi-nécessaire de connaître le destin du personnage principal dans une tragédie grecque. Car le but de la tragédie n'est pas de raconter le destin d'un personnage, mais la façon dont le personnage cherchera à fuir son destin, finissant ainsi par le provoquer.
Par exemple, Œdipe, ayant été mis au courant de son tragique destin - qui est de tuer son père et d'épouser sa mère - va fuir ses parents (qui se révéleront être ses parents adoptifs), puis tuera son père dans un accident de char, et épousera sa mère après avoir vaincu le sphinx.
La tragédie est devenue peu à peu le centre des cérémonies religieuses adressées à Dionysos, Dieu de la vigne, de la folie et de la démesure, et demeure encore bien présent aujourd'hui, ancrée dans les sujets de dissertation en français (une réelle joie).
Entre l'architecture, la musique et l'écriture, sans parler des peintures et autres effets visuels que nécessitait le décor derrière l'estrade, c'est l'art qui rythmait la vie des grecs.
En êtes-vous sûrs ?
De ce que j'ai pu expliquer, c'est bien l'art qui s'est adapté au rythme de la vie de l'époque et à la société de manière générale, plus que l'inverse...
Par exemple, l'architecture des théâtres s'est adaptée à son audience, le chœur aux retardataires et la tragédie à la religion de l'époque.
Vous le savez sans doute, mais l'imagination est sans limite, à tel point que les artistes, souvent, doivent s'imposer des contraintes pour voir plus clair dans leur imagination... Et le meilleur moyen d'orienter son imagination est de choisir des barrières qui arrangent le public, la société. On peut aussi se servir de barrières qu'on puise à d'autres époques, chez les autres artistes qui sont toujours reconnus aujourd'hui (personne n'a l'obligation d'utiliser de barrières pour créer, mais je dois avouer qu'elles sont d'une grande utilité, particulièrement au début).
Dans cette chronique, nous allons redécouvrir les plus belles créations artistiques, chercher à comprendre l'influence de l'art dans la société, l'influence de la société sur l'art, et surtout essayer de trouver les chemins que vous pourrez emprunter pour mieux vous rendre compte de l'immensité de votre imagination. J'essayerai de vous montrer comment ont raisonné les artistes d'hier, et comment vous devrez adapter votre art à la société, du moins si vous ne souhaitez pas jouer les "artistes incompris".
De retour à Athènes, je vous propose d'écouter le fameux orateur dont je vous ai parlé. Regardez sa coupe de cheveux ! Il doit lui aussi utiliser les shampoings Atmosp'Hair !!
(ça va ? Je l'ai bien placé, le produit ? C'est mon premier placement, vous voyez... Le stress, tout ça...)
Hérodote !!
Il revient cette année d'Afrique avec de tous nouveaux écrits !
Il est l'auteur de l'Enquête, l'ouvrage fondateur de l'histoire telle qu'elle nous est enseignée aujourd'hui. Cet écrit est composé de 9 livres, et conte l'histoire de nombreuses autres civilisations, de nombreuses autres religions disséminées à des centaines de kilomètres d'Athènes, mais surtout veut expliquer les raisons de l'ascension fulgurante de la cité Aquéenne après la guerre contre les Perses.
Portrait d'Hérodote, auteur inconnu - original se trouvant au Palais Massimo des Thermes, à Rome - Domaine Public
Ce qui rend Hérodote et ses écrits si attendus dans le centre-ville d'Athènes, c'est qu'il est le fondateur d'une idéologie particulièrement perturbante. En effet, celui-ci affirme qu'une civilisation à son apogée ne pourra que dépérir dans les années qui suivront cet âge d'or.
Et quelle période traitons-nous dans cet article ? De l'âge d'or de la civilisation grecque.
Il répand donc, avec cette idéologie, un sentiment d'insécurité dans la Grèce Antique qui se croyait pourtant bien supérieure aux autres civilisations. Et en effet, il est le premier à anticiper la guerre du Péloponnèse bien avant que celle-ci ne survienne.
Hérodote est également le premier anthropologue du monde. Il s'intéresse à tout un tas de civilisations et pense qu'aucune ne vaut plus qu'une autre. C'est enfin le fondateur du modèle économique classique, c'est-à-dire le nôtre... Et oui, les grecs ont vraiment tout inventé (si vous aimez l'éco, intéressez-vous à Adam Smith, il reprend tous les travaux d'Hérodote).
Mais pourquoi vous dire tout ça ? À première vue, Hérodote n'a aucun lien avec l'art et la société... À première vue...
Parce que si on fait un peu attention à l'assemblée qui s'est réunie autour d'Hérodote, on remarque Socrate, Platon et plein d'autres penseurs et philosophes grecs de cette époque... (si le tableau avait vraiment existé, Platon aurait été tout bébé avec des p'tites mains toutes potelées. Oewwww c'est trop mim's !!! *raclement de gorge*. Pardon.)
À Athènes, on pensait que les Grecs étaient les meilleurs, que leurs dieux existaient... Bref, qu'ils étaient les seuls à avoir raison. Hérodote leur a tout simplement dit que, partout à travers le monde, il existait un tas de civilisations, comme les Grecs, un tas de religions, et que chacun se croyait supérieur aux autres, que leurs dieux existaient... Bref, que chacun était le seul à avoir raison.
Hérodote a juste balayé les fondements de son époque qui s'étaient façonnés pendant des siècles et des siècles.
Et c'est donc avec cette nouvelle vision du monde que les grands penseurs et philosophes ont pu aspirer à ce génie qu'on admire tant aujourd'hui. C'est en remettant en cause leurs idéaux, leurs fondements et leurs acquis qu'ils ont pu développer leur art.
Et voilà donc la première leçon que cette rubrique pourra vous apporter : remettez-vous en question. C'est essentiel pour tous les artistes, et "je dirais même plus" (penserait M. Dupont dans Tintin), essentiel pour toutes les personnes qui se veulent saines d'esprit dans notre société.
Alors remettez vos idées, vos faits et vos certitudes en question. Vous sortirez chaque fois de ce débat intérieur plus fort... Si cette rétrospection a si bien réussi pour les Grecs, peut-être nous réussira-t-elle autant, vous ne trouvez pas ?
Ça vaut sûrement le coup d'essayer !
« La bêtise consiste à vouloir conclure ».
Je pourrais m'arrêter là. Pour le coup, je n'aurais même pas commencé et Flaubert aurait peut-être été fier de moi.
Mais dans ma grande bonté, je vais décortiquer avec vous cette petite citation. Cet article sera bref, mais j'espère que vous apprécierez.
Lorsqu'il écrit cette phrase, Flaubert dissocie la « fin » de la « conclusion ». C'est encore trop vague ? Il veut dire par là qu'un récit doit s'achever sans pour autant se conclure. La conclusion ne doit pas être explicite, fermée, définitive.
En fait, Flaubert nous explique que la conclusion est la projection d'une vision propre à l'auteur. Ce dernier dévoile par là sa compréhension du monde construite par son expérience, ses connaissances, mais aussi ses préjugés, ses maladresses et ses aveuglements. La volonté de conclure aboutit donc toujours sur la violence et la haine car elle suscite l'incompréhension et le désaccord. A partir de là, autant l'éviter.
Je vous avoue que je suis mitigée face à cette phrase. Je la trouve drôle au premier abord et bien plus décevante lorsque je comprends ce que Flaubert a voulu dire.
Pour ceux qui, comme moi, la préfèrent lorsqu'elle est brute (sans les explications sur le véritable sens de « conclure »), n'hésitez pas à l'utiliser pour justifier l'inachèvement de vos histoires. Perso, y en a quelques unes qui trainent en attendant leur fin... qui ne viendra peut-être jamais.
On se retrouve le mois prochain ! Prenez soin de vous.
Le Rouge et le Noir de Stendhal
Je suis vieux. Je le sais quand je vois la plupart des auteurs sur Wattpad, et que je les envie. Je n'ai connu durant mon enfance qu'une connexion limitée, pas de réseau social, et étant de nature timide, je ne peux qu'imaginer ce qui se serait passé si j'avais rencontré des personnes de mon âge qui partageaient ma passion. Revers de la médaille, cela permet à des gens peu fréquentables de se réunir ensemble.
Il y a six ans s'est déroulée la tuerie d'Isla Vista, en Californie. Cet attentat a fait 6 morts, 14 blessés... Cela peut sembler banal, mais ce qui a attiré l'attention des observateurs, ce sont les motivations du jeune homme : il se déclarait incel. Involuntary Celibate est une communauté considérant être rejetée par les personnes de sexe opposé. Essentiellement masculine, et très misogyne, ils soignent leurs déboires amoureux en foutant du gros sel sur leurs blessures : ils ne croient pas en l'amitié homme-femme et s'enferment petit à petit dans une obsession qui les rend inadaptés à la relation sociale amoureuse, prolongeant de fait leur célibat.
Ce qui est amusant, c'est que la communauté fantasme sur un type d'homme qui multiplierait les conquêtes, qu'ils appellent les "Chads." Chad est beau, musclé, riche et sans aucun gramme de sensibilité ou même d'éthique. Dis-moi à qui tu désires ressembler, je te dirais qui tu es...
On pourrait se faire la même remarque sur Julien Sorel, le héros du Rouge et le Noir. A priori, c'est l'archétype de l'arriviste - ce petit salopard prêt à utiliser toutes les combines pour monter dans la société et que l'on confond souvent avec ses homologues Georges Duroy (Bel-Ami de Maupassant), Aristide Saccard (la Curée et l'Argent de Zola) et Eugène de Rastignac (Le Père Goriot de Balzac). Et pourtant, le protagoniste du roman de Stendhal est d'une nature mutante.
Julien est moins un ambitieux qu'un type qui rêve d'être ambitieux. Il a été élevé dans le récit des grandes batailles napoléoniennes. Pas de bol, on est en 1827, et l'Empereur a été viré du trône en 1815 - et de toute façon, il est maigre comme un poulet. Pas découragé, il va essayer de se placer dans la seule maison qui embauche des intellectuels à l'époque, l'Église, malgré sa haine viscérale du clergé et sa difficulté à respecter son vœu de chasteté. Car Julien, avec son beau visage, fait tourner la tête de bien des femmes, notamment la belle Madame de Rênal, épouse du maire de Verrière.
Ce qui est intéressant dans cette histoire, c'est qu'il l'a rencontrée en étant le précepteur de ses enfants - parce que le fantasme du babysitter a toujours existé. Or, et malgré le fait qu'il allait vivre dans une maison bourgeoise au lieu de la scierie familiale où ses frères lui foutaient sur la gueule, il se met à pleurer. Tu parles d'un ambitieux qui devait tromper toute la société française ! C'est plus Kylo Ren que Vador. Mais c'est justement cette fragilité qui charme la romantique mère au foyer. Plus tard, Stendhal précise même "[qu']au lieu d'être attentif aux transports qu'il faisait naître, et aux remords qui en relevaient la vivacité, l'idée du devoir ne cessa jamais d'être présente à ses yeux. Il craignait un remords affreux et un ridicule éternel, s'il s'écartait du modèle idéal qu'il se proposait de suivre." En gros c'est en essayant d'avoir "l'air mâle" qu'il gâchait tout.
Ce "devoir social" qui s'applique aux hommes, c'est une notion que les féministes appellent la masculinité toxique, et une des œuvres populaires traitant le mieux ce sujet est Les Gardiens de la Galaxie. On a vu dans cette série de films une simple aventure comique avec une bande son qui tue. Ce n'est que la surface. Le fond raconte l'histoire de personnes ayant subit des comportements abusifs dans leur enfance et essayant de se construire malgré tout, que ce soit par la haine dans la relation sororale entre Gamora et Nebula, ou par le cynisme pour Rocket, créature se plaignant d'être une abomination scientifique dans le premier film. Yondu lui balancera dans le volume 2 : "tu joues au connard pour éviter que l'on s'attache à toi." La peur absolue de Rocket est de perdre ceux qu'il aime, en particulier Groot. Et puis il y a Star Lord, ce gamin qui joue au dur avec un résultat certes plein de panache, mais jamais tel qu'il l'espère. Au fur et à mesure, chacun des personnages vont faire tomber les masques, avouer leurs fragilités. S'accomplir.
Gunn, Guardians of the Galaxy, 2014 - Image promotionnelle - Tous droits réservés Walt Disney Pictures - Image respectant le Fair Use (US) et le droit de citation (Fr)
Yondu, le père adoptif de Peter Quill, malmène son fils et trouve cela drôle. Son fils avouera en avoir gardé des séquelles psychologiques.
Julien Sorel n'aura pas cette chance. Grâce à son intellect, il attire la sympathie des hommes et l'affection des femmes, sans se rendre compte que c'est moins son orgueil que sa personne qui est récompensé. Et comble du malheur, il tombera sur plus fier encore que lui, la belle Mathilde de la Môle. Elle ne connaît l'amour que dans les romans et idéalise cet homme, d'une condition bien inférieure à la sienne. Ils "singeront" la passion, dans une relation très déséquilibré que Stendhal, avec le sens de la formule, décrit ainsi : "Un voyageur anglais raconte l'intimité où il vivait avec un tigre ; il l'avait élevé et le caressait, mais toujours sur sa table tenait un pistolet armé. Julien ne s'abandonnait à l'excès de son bonheur que dans les instants où Mathilde ne pouvait en lire l'expression dans ses yeux. Il s'acquittait avec exactitude du devoir de lui dire de temps à autre quelque mot dur."
Et quand la délaissée Madame de Rênal enverra une lettre au Marquis de la Môle pour dénoncer le comportement de son protégé, Julien connaîtra la plus vive douleur, celle de croire avoir perdu la seule personne qui l'aimait.
Le Rouge et le Noir est beau, car il raconte des erreurs de jeunesse, des espoirs... Il critique une société trop rigide ou tout le monde joue un rôle, mais où à la fin le cœur triomphe. Il a été un scandale à son époque, et encore aujourd'hui c'est un des livres que j'ai le plus de plaisir à relire. Parce que je me reconnais dans cet imbécile de 17 ans qui ne savait pas avouer à celle qu'il aimait alors ses sentiments à 17 ans, je ne peux avoir que de l'affection pour ce tête-à-claque. T'inquiète petit, on peut tous progresser.
Le Chant des Voiles de Tiphs_
Un vent puissant qui fait claquer les voiles et les cordages, le fracas des vagues qui s'écrasent contre la coque d'un bateau, l'air marin, le goût du sel sur les lèvres, la chaleur du soleil sur le visage... ça vend du rêve, n'est-ce pas ?
C'est le rêve de Luka, et (plus ou moins) son quotidien de jeune recrue sur l'Endeavour. La destination du navire lui importe peu. Ce qu'elle désire ? De l'expérience, de l'aventure, et une lettre de recommandation pour intégrer l'Académie de la marine.
Sauf qu'être la seule femme sur un bateau rempli de gaillards bourrus peut s'avérer pesant. Surtout quand elle passe ses journées à découper des patates sous le regard moqueur du coq de l'équipage.
Voilà le pitch. J'en dis pas plus pour éviter de gâcher la surprise. Cette histoire est à découvrir. Je vous encourage à vous plonger dans les premiers chapitres et à savourer les jurons des marins. J'espère que vous apprécierez comme moi les piques d'Axel, la force tranquille de Nathanaël, le ton mordant de Luka.
Cette histoire est de celles que l'on arrête qu'une fois arrivé à la fin des chapitres publiés. Le rythme est soutenu, l'action est dynamique et les personnages sont fantastiques.
Il y a quelques retournements de situation qui feront grincer des dents les lecteurs. Il y a des scènes de bataille palpitantes (ceux qui aiment les combats au sabre et les techniques de combat de pirates seront ravis). Il y a une tension amoureuse insupportable entre 2 personnages, (arrgh @Tiphs_ fais quelque chose!) mais qui est loin de monopoliser l'action du livre.
Et puis il y a aussi de belles tirades engagées. Luka est féministe. Luka se bat pour elle et pour toutes les femmes de son monde. Pour prouver qu'une femme peut faire l'Académie et devenir capitaine de navire. Pour prouver que l'ambition paie et que les lois ne sont pas que des mots couchés sur le papier. Elle est obstinée, motivée et très inspirante. Et ça en fait une héroïne très chouette. Elle n'est pas du tout parfaite. Et elle est même sacrément casse-pieds parfois, mais vous verrez que c'est génial de suivre ses aventures.
Bref, lisez Le Chant des Voiles. On pourra en parler ensemble après, et vous me direz si, comme moi, vous trouvez Nathanaël super classe.
On se retrouve en Décembre pour le prochain coup de cœur !
Nous espérons que ce mag vous a plu. Nous nous retrouverons dès le 3 décembre prochain pour un numéro, qui n'aura pas de thématique. Et oui, il faut laisser les auteurs libres de temps en temps. On espère que ce doublé vous a plu et que vous vous porterez bien jusqu'à la prochaine fois.
L'équipe du Mag
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