Chapitre 6 - Lucky One
J'ai pensé à Dana toute la nuit, et les nuits d'avant aussi. Je n'arrive pas à m'empêcher de me repasser le fil des derniers jours dans ma tête.
Si ce qu'Elijah a dit est vrai, alors Dana a forcément atterri dans un autre groupe, et il n'y a rien de plus probable qu'elle soit dans les Négo – Info. N'étant pas avec nous – c'est un fait, elle n'est surement pas non plus avec les Infiltrés, elle n'a jamais su jouer la comédie ni cacher ses sentiments, c'était d'ailleurs pour ça qu'on s'entendait si bien, nous étions pareil. Elle est donc forcément dans la dernière catégorie.
Je sais que tout jouer sur des suppositions est quelque peu risqué, mais je suis prête à prendre le risque. Je la connais, je sais qu'elle est là, sinon c'est qu'elle est morte. Et ce n'est clairement pas une option envisageable.
Aujourd'hui, je suis encore franchement nulle aux entrainements. Je ne suis pas la pire, il y a en a bien qui font moins bien que moi, comme Kira Williams, la jeune fille au look mi gothique mi emo qui s'était fait violenter quelques jours plus tôt par Calvin et ses copains – toujours Calvin et ses copains, seul, c'est beaucoup moins drôle, et facile. Il y a aussi Kitty Eiceman, la grande dégingandé que Caleb avait violenté, lui aussi.
Quel crétin. Si je compte tous les garçons qu'il y a dans notre formation, et le nombre de sombre idiot, je pense que les chiffres vont exploser. Même un grand statisticien refuserait de les croire. Et pourtant c'est bien réel ! Calvin est méchant, Jakob assez bête pour le suivre dans ses âneries, sans parler de Jeff et Kenyson, et Caleb défit toutes les lois de la nature en termes de rigidité et de sévérité. Il est froid, distant, et se refuse à toute émotion. Un vrai iceberg !
Seul Elijah reste gentil, comme toujours, et David, de temps en temps, essaye de se montrer, sinon sympathique, au moins compréhensif et un peu plus chaleureux que de coutume.
Bref, je commence à me lasser de cette situation. Tourner en rond comme un lion en cage ne me va vraiment pas.
Je vois que je ne fais aucun progrès, autant physiquement que psychologiquement, et ça commence sérieusement à me taper sur les nerfs. C'est donc pour cette raison qu'aujourd'hui, je suis bien décidée à tirer mon épingle du jeu et à trouver un moyen de sortir d'ici, ou du moins de progresser dans ma mission top secrète.
Partir à l'aventure n'a jamais été difficile pour moi, en revanche, ça m'a toujours causé une excitation intense. Sans borne. Avec les gars, on partait souvent plusieurs jours dans la nature, tâchant de survivre à la seule force de nos bras et de nos cerveaux. Et c'était génial, même s'il faut bien avouer maintenant que, si David était le cerveau et Elijah les bras, je me contentais d'exécuter les ordres et de faire valoir le peu de capital physique que j'avais à l'époque, et encore aujourd'hui.
Mais en ce Lundi, si mes calculs sont bons, j'ai décidé de me bouger. Je vais aller chercher Dana, et, si possible, la trouver. J'ai déjà monté un mini plan d'évasion qui, je pense, peut faire l'affaire. De toute façon je n'ai pas le choix, il faut que je réussisse. Plutôt mourir en essayant de m'en aller de ce trou perdu que de rester à pourrir ici. Je ne serais pas leur jouet, et je refuse de devenir un légume. J'ai déjà bien assez mal au cœur comme ça quand je vois David embrasser Sheïla dans les couloirs et Elijah peiner à me reconnaître. Dana, elle, se souviendra de moi, j'en suis sûre. Nous sommes comme des sœurs jumelles, liées par quelque chose de bien plus fort que tout ce qui existe dans ce bas-monde.
Le soleil m'éblouit et je mets quelques secondes à m'habituer à la luminosité ambiante. C'est seulement en sentant les rayons chauds baigner mon visage que je me rends compte à quel point le soleil m'a manqué. Je ne suis pas restée enfermée longtemps, mais toute cette pression accumulée lors des dernières heures peut enfin s'évacuer, le vent l'emportant loin avec lui. Je tourne sur moi-même pendant quelques secondes, essayant de me repérer.
Je suis assez surprise d'avoir réussie à sortir aussi rapidement, et sans encombre. Je n'ai pourtant pas encore pris le temps de repérer les tours de garde ou ce genre de chose, j'ai sûrement eu de la chance, autant ne pas trainer prêt des portes. Se faire repérer maintenant serait vraiment trop bête.
De loin je perçois les fameux trois bâtiments que j'avais déjà vu lors de mon arrivée mouvementée. Malgré la brume qui me masquait les yeux, j'avais déjà remarqué que La Ruche se trouvait encerclée par 3 bâtiments, disposés à quelques centaines de mètres chacun.
C'est fou comme nos baraques bétonnées peuvent détonner face à cet immense immeuble confectionnée tout entier de verre. Etoile dans la nuit, soleil en plein jour, entouré de la tristesse de cette terre. Nous semblons bien ternes par rapport à Elles.
Elles, ce sont les abeilles. C'est comme ça que j'ai décidé de les appeler en tout cas. Toutes de blanc vêtu, elles s'affairent à je ne sais trop quoi, sortant et entrant de la maison mère.
De temps en temps elles daignent nous rendre une petite visite, mais ce n'est jamais assez longtemps pour que je puisse les étudier de prêt, elles partent aussi vite qu'elles sont venues. La seule chose que j'ai réussi à noter, c'est leur regard dédaigneux envers nos personnes, à moins que je sois complètement paranoïaque ; ce qui est tout à fait possible. J'ai tendance à stresser un peu quand on m'enferme trop longtemps.
« Enfant sauvage », selon ma mère.
Bref. Je continue de marcher vers ce que je pense être le bâtiment de Dana, même si je peux très bien me tromper. J'ai l'impression d'être un phare dans ce désert. Nous devons sûrement nous trouver sur ce qui devait être la Californie, fut un temps. En tout cas, ce qui est sûr c'est qu'il fait chaud et qu'il ne doit pas y avoir une seule ville à des kilomètres à la ronde.
Mon père m'avait montré un jour une carte, très ancienne, elle devait bien avoir trois siècles, quand les continents et les pays signifiaient encore quelque chose et que la Terre n'avait pas été totalement ravagée par les guerres et les rivalités puériles entre petits hommes voulant être plus grands.
En tout cas, selon lui, nous serions quelque part dans la Vallée de la mort. Je le sais parce qu'il était tellement passionné par cette région qu'il me l'avait montré au moins une bonne trentaine de fois, si ce n'est plus.
Je le remercierais bien si ça ne me mettait pas autant de mauvaise humeur. Car cette annonce gâche la fuite que je comptais prendre incessamment sous peu ! S'en aller dans le désert n'est pas du tout la même chose que partir tranquillement dans une forêt luxuriante ou de jouer à cache-cache entre les buildings jusqu'à être hors de danger.
Le désert implique plusieurs choses. Tout d'abord, évidente, la chaleur. Il faut de l'eau, des vêtements protecteurs pour résister aux températures avoisinant les 45°C à leur maximum, mais pouvant descendre une fois la nuit tombée. Il faudra aussi partir de nuit, car ce n'est pas le peu de cactus présents ici qui formeront un abri.
Autant de choses auxquelles j'avais pensé mais que je n'avais pas vraiment prévu.
Je continu de marcher tout en grognant, une main en visière pour me protéger de l'astre luisant. Je n'ai fait qu'une dizaine de mètres, et pourtant je sue déjà comme un cochon qu'on aurait poursuivi afin de l'égorger.
J'ai chaud, et une seule envie : boire jusqu'à plus soif. Je ne vois rien et mes pas sont incertains. Magnifique idée que de sortir tandis que le soleil vous éblouie tellement que vous devez plisser les yeux pour y voir un minimum. Je sens déjà ma peau rougir sous l'effet des rayons UV qui frappent ma peau sans relâche.
Je maudis la peau de rousse que m'a refilé ma mère. Heureusement que j'ai hérité des cheveux châtain de mon père, sinon j'en aurait fait une maladie je crois. J'adore les cheveux roux, mais je pense me faire assez remarquer par mon caractère, et avoir les poils du crane couleur carotte n'est pas la meilleure solution pour rester discrète. Demandez à Calvin, il vous répondra.
Je continue ma route quand une main forte s'abat sur mon épaule, une autre se plaquant sur ma bouche, m'empêchant de pousser le cri qui aurait été surement le plus perçant de ma vie.
Je ne sais pas comment réagir et je n'ose même pas me retourner pour voir qui se tient derrière moi. Je me sens tellement bête. À toujours vivre dans mes rêves, à ne jamais me poser de questions et agir avant de réfléchir. Voilà où ça m'avait mené. Quelle idiotie. Ma première tentative pour recueillir des informations et je me faisais prendre sur le fait. Une larme perle au coin de mon œil droit et je fais de mon mieux pour la retenir.
- Je vais te relâcher mais interdiction d'hurler.
La voix est dure et froide, et c'est un choc quand j'arrive à mettre un visage sur cette tonalité.
Notre Sergent Instructeur, Caleb Underwater se trouve en face de moi, droit comme un i, le regard fermé et les lèvres pincées.
- Que fais-tu ici, demandé-je en reprenant mon souffle, interloquée.
- Je te retourne la question, numéro 308.
Son ton est tranchant, et je me rappelle alors qu'il est mon supérieur et que je n'ai aucune excuse valable pour me trouver dehors. J'essaie de bégayer une réponse qui pourrait noyer le poisson mais n'arrive qu'à sortir un gargouillis ridicule et plaintif.
Je suis perdue.
- Tu as de la chance que tous les soldats aient été appelés pour une réunion de dernière minute, sinon tu te serais transformée en une vraie passoire à peine le pas de la porte passé, fait-il en me tirant violemment par le bras, me ramenant vers notre bâtiment.
Il jette quelques regards autour de lui, son arme plaquée contre son torse puissant. C'est alors que je l'inspecte un peu plus. Il est si proche que je peux sentir son odeur musquée mais douce à la fois. Mélange de bois, de cendre et du métal des balles et des armes qu'il manipule tant.
Il me dépasse d'une bonne tête et j'ai du mal à le suivre. Ses larges épaules roulent sous son uniforme kaki et je me contente de trottiner derrière lui, jusqu'à ce qu'il s'arrête à l'ombre de notre habitation, si on peut l'appeler ainsi.
- Je peux savoir ce qui t'as pris ?
Je remarque à peine qu'il me tutoie, trop occupée à me faire toute petite devant ses yeux verts inquisiteurs.
Il me secoue le bras et je me réveille.
- Je ne sais pas. Je suis désolée, je me suis perdue et je...
- À d'autre. On n'arrive pas à la porte d'entrée par pur hasard. On l'ouvre encore moins sans s'en rendre compte. Ne me raconte pas de conneries, tu n'es pas arrivée dans ce désert par magie.
Il se retient de hurler, je le vois bien et fait tout son possible pour se calmer.
- Je... je...
Mon souffle se fait erratique et je commence réellement à avoir peur. Je n'ai aucune excuse à lui fournir et il le sait bien. Je suis totalement finie.
- Viens par là.
Il me tire encore une fois par le bras sans ménagement, nous plaçant dans un coin, s'assurant du regard que personne ne peut nous voir.
- Je veux bien croire que c'est une erreur. Que tu t'aies laissé emporter et que tu as atterri là par simple bêtise. Que tu ne t'aies pas rendu compte de ce que tu faisais.
Je le regarde, et il doit voir mes yeux remplis d'incompréhension car il continue sa tirade.
- Tu as de la chance d'être tombé sur moi. Adrianna t'aurait foutu au cachot pour moins que ça, et elle aurait eu raison. Duke quant à lui t'aurait carrément exécuté. Je vais être magnanime pour cette fois, en revanche, je ne veux plus jamais te voir en dehors des clous, c'est bien d'accord ?
Je hoche la tête. C'est tout ce que je suis capable de faire à ce moment précis. Je ne suis plus maitre ni de mes pensées ni de mon corps, et ce n'est qu'une fois dans le dortoir que j'éclate en sanglot, réalisant ce qu'il vient de se passer.
Je viens de griller ma seule cartouche pour m'échapper d'ici et retrouver Dana. Caleb ne me lâchera pas d'une seule semelle et ça me prendra des mois pour pouvoir partir d'ici, si je le peux un jour.
Fatiguée par les émotions vives que je viens de vivre, je me couche quelques instants, me réveillant uniquement pour le prochain entrainement.
Voilà le nouveau chapitre en ligne & à l'heure pour une fois ! Pardonnez surement les fautes de frappe d'orthographe ou autre, j'espère que ce petit bout de mon histoire vous aura plu !
Je tiens à préciser que je ne posterais que les 10 premiers chapitres de mon histoire sur Wattpad !
N'hésitez pas à laisser votre avis !
PS : Cette partie était censée être publiée Samedi dernier ... sauf que j'ai oublié d'appuyer sur le bouton ! Amen.
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