Un surnom est le plus irréfutable des arguments
Un surnom est le plus irréfutable des arguments.
William Hazlitt.
Ils ouvrirent les yeux au même moment et avec la même conviction. Il fallait partir. Maintenant et loin.
Le vent maudit soufflait si fort qu'il sifflait atrocement dans leurs oreilles. Ana, resta quelques minutes de plus allongées dans ses couvertures. Elle avait presque trop chaud, mais elle ne bougeait pas. Les yeux fixés sur son plafond de pierre, la jeune fille tentait de remettre un peu d'ordre dans ses idées.
L'homme dehors lui faisait peur, mais ses mains n'avaient pas l'air méchantes et il l'avait nourri et fait en sorte qu'elle ne meurt pas de froid. Pourquoi faisait-il cela ? Pourquoi l'avait-il aidé quand le gros la... ? En repensant à cette ordure Ana étouffa un couinement tout en fermant si fort ses yeux qu'elle s'en faisait mal.
Ce son minime fit bondir le colosse. Qui ? Oui, qui lui faisait du mal ! Qu'il se montre pour qu'il le pulvérise à la force de ses poings ! il ne savait pas d'où lui venait ce besoin de la protéger, mais c'était vital pour lui. Il s'arrêta un instant, fronça les sourcils puis laissa tomber ses épaules. Ces nouveaux sentiments lui faisaient perde la raison.
Anton se laissa retomber au sol en un souffle, ses jambes bien trop longues et fortes de par et d'autre de son corps tout aussi massif.
- Ebat', c'est quoi ce bordel... souffla-t-il dans le vent. Quand il leva le nez vers le ciel, il ne vit rien de différant de d'habitude pourtant plus rien n'avait de commun.
Pendant un instant, il se sentit désarmé. Cela lui fit grincer les dents.
- Écoute, je... je te propose de sortir de ton petit coin. T'en dis quoi ? proposa le colosse à Ana, après s'être trainé jusqu'à l'entrée à quatre pattes.
La jeune fille sentit un frisson brulant lui remonter le long de son dos en voyant la silhouette de l'immense homme se rapprocher d'elle.
Elle prit une grande inspiration pour calmer les battements de son cœur. Quelque chose au fond d'elle lui disait qu'il était plus que temps qu'elle sorte. Toutes les cellules de son corps déjà bien trop maltraité, lui hurlait de sortir et de suivre le vent maudit.
Ana regarda le petit bout de tissus crasseux toujours accroché a son poignet. Elle l'embrassa, le resserra et sortit tout en trainant ses bouts de peaux.
Quand Anton remarqua que la petite venait vers lui, il fut d'abord étonné qu'elle le fasse. Puis, il se recula et s'assit sur ses talons. Son cœur se mit à tambouriner dans sa poitrine. Il essuya ses deux mains sur ses cuisses et souffla au moment où la frêle silhouette apparaissait devant lui.
Il fut soufflé. Estomaqué. Cette petite était crasseuse à souhait et au moins tout aussi maigre, mais elle ressemblait à une reine. Le colosse se laissa tomber sur ses genoux. Ses cheveux noirs étaient tout emmêlés, sa peau qui devait déjà être foncée l'était encore plus avec la saleté et ses yeux... ses iris brunes, presque aussi noirs que ses cheveux le fixaient sans ciller. Il du s'y reprendre a deux fois pour avaler sa salive.
Son regard se perdit sur ses genoux qui étaient totalement écorchés, il du serrer les mains pour contrôler l'irrésistible envie de la prendre dans ses bras et de la couvrir d'herbe médicinale.
- Anton, je m'appelle Anton. Se reprit le colosse en tendant une main vers elle. Main qu'il laissa retomber au bout d'une poignée de minute interminable.
Ana du attendre quelques secondes avant que ses yeux ne s'accoutument a toute cette luminosité. Énorme, fut la première chose qu'elle pensa du colosse en le voyant à genoux devant elle. Tout était disproportionné chez lui, même ses oreilles.
Elle se frotta le bras tout en l'observant. Il aurait pu lui rompre le cou avec ses mains, de cela la jeune fille en était persuadée. Mais, il avait quelque chose de serein dans son visage. Quelque chose qui assurait à Ana qu'il ne lui ferait jamais rien. Pas comme tous les autres.
- Ami. Dit-elle en le pointant du doigt, elle du s'y reprendre a trois fois tant sa voix était enrouée à cause de sa gorge trop sèche.
Le colosse sembla le comprendre et lui tendit une gourde en peau de renard, bien plus solide que celle en peau de biche.
Ana s'approcha de lui en buttant sur ses pieds plus d'une fois, Anton la laissa faire, il ne voulait pas l'effrayer.
« Ami ? avait-elle dit ? » Il se dit qu'il y pensera plus tard, en attendant son cœur son gonfla d'un bonheur qu'il croyait mort depuis bien longtemps.
La jeune fille lui prit la gourde et but à grosse gorgée son lait.
- Anton, répéta le colosse doucement en posant une de ses mains sur sa poitrine. La jeune fille parut contrariée.
- Ami. Dit-elle une nouvelle fois en le pointant du doigt.
Anton, tout fraichement rebaptisé « l'ami », du faire appel a tout son sang froid pour ne pas la prendre dans ses bras. Il ne voulait ni la faire fuir et encore moins lui briser tous les os.
- Ami, reprit-il en se montrant une nouvelle fois. Le visage de la jeune fille s'éclaira d'un coup. Il sentit un immense sourire se coller sur son visage. Et toi ? Il lui demanda en la montrant du doigt.
- Ana, souffla la jeune fille qui parut soudain très timide.
- Kulka, dit Anton en la montrant du doigt.
Kulka était un mot plein d'affection que l'on donnait à une enfant de sa famille.
Ana releva ses yeux d'un coup et se mit a fixer le colosse qui n'avait pas bougé d'un iota. Kulka. Oui, elle pouvait accepter qu'il l'appelle « petite poupée ». Une poupée c'était joli non ? Et puis on en prenait soin aussi.
Elle lui sourit à son tour et le colosse crut mourir sur place tant son sourire fut radieux.
- Je te propose qu'on parte d'ici. On a qu'à aller vers la mer blanche ?
- J'ai faim, finit-elle par lui dire après avoir opiné du chef.
Il sourit, puis se releva en se disant que la faim était une très bonne chose.
- Il me reste encore un peu de lait et de viande séchée ça te va ?
Pour toute réponse le sourire de la jeune fille s'élargit un peu plus et ses petits yeux se mirent à briller.
Pendant tout le repas, Anton n'avait eu de cesse de la regarder. Elle qui était si petite, si maigre paraissait indestructible. Bientôt, les vraies questions pointèrent dans son esprit : était-il capable de subvenir à ses besoins ? Pouvait-il la protéger de tout ? Et pourquoi le ferait-il ?
Il n'en savait strictement rien, mais quand il la voyait s'acharner sur son bout de viande comme une petite sauvage il se dit que c'est ce qu'il devait faire.
Tout en regardant une nouvelle fois vers le ciel, il adressa quelques mots à sa famille. Bien sûr, il n'obtenait jamais de réponse quand il leur parlait. Pourtant, il continuait a le faire.
Ana crut que son ventre allait éclater ! elle venait d'ingurgiter son poids en viande et en lait, tout en posant une main sur son trop petit ventre elle sourit en sentant les trop rares rayons de soleil lui réchauffer le visage.
- On y va Kulka ? La petite opine du chef en peinant pour se relever. On passe d'abord par ma cabane, 'faut que je prenne deux trois choses.
La jeune fille opine une nouvelle fois du chef et se raidit quand elle se rendit compte qu'ils allaient devoir traverser le village.
Tout d'un coup, ses jambes lui parurent trop lourdes pour elle, elle eut aussi très envie de rendre tout son repas. L'ami sentit son angoisse avant qu'il ne la voie réellement. Il fronça les sourcils avant de comprendre.
- Ce sont eux qui te font peur ? Il se plaça en face d'elle, car elle ne lui répondit pas. Kulka, je te jure sur ma vie qu'il ne t'arrivera rien. Il la regardait avec tant d'intensité que tout le Mira autour d'eux s'effaça sans un bruit. Plus personne ne te touchera. Lui jura-t-il avec force.
Il se releva, plus pour s'interdire de lui toucher les épaules qu'autre chose. Il était persuadé que la toucher était impossible. Après tout, les hommes l'avaient bousillé de la pire façon qu'il soit.
« Con d'eux ! Tant que je serais vivant, personne ne lui fera plus jamais aucun mal ! » se promit le colosse en serrant les dents.
- On y va ?
Ana souffla un « oui » et colla son nouvel ami. Elle était proche de lui que leurs vêtements s'accrochaient l'un à l'autre.
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top