Le passé est un prologue.



William Shakespeare.

Elle soupira une nouvelle fois et remua son poignet droit pour détendre son articulation. La chaise en bois foncée, sur laquelle elle était assise, craqua une fois de plus. Elle détestait le bois, elle ne l'avait jamais aimé. Le trouvant froid et sans âme. Elle s'en contentait, et puis elle avait elle-même demandé à ce que les autres matériaux soient utilisés pour leur sécurité.

À travers la fenêtre, qui lui faisait face, elle vit le ciel s'assombrir. La nuit commençait à tomber lentement. Grâce à Bog, la nuit ne l'effrayait plus depuis longtemps.

Depuis quand elle n'était pas sortie de chez elle ? Plusieurs jours surement, mais cela n'avait rien d'étrange pour la jeune femme. Cela lui arrivait très souvent, parfois trop d'après certain. Elle s'enfermait chez elle pour faire ce que seul Bog savait. Personne ne voyait les tourments qui l'habitaient, personne sauf lui de toute évidence. Mais il la laissait en paix quand elle refermait sa porte sur son dos. Il savait, mieux que personne, qu'elle en avait besoin. À dire vrai, cela lui arrivait également de s'isoler pendant plusieurs heures. Seulement plusieurs heures. Eux seuls pouvaient comprendre ce besoin de solitude, de silence. Après tout, ils partageaient bien plus qu'ils ne le laissaient paraitre.

Ana revint à elle à cause du brouhaha de la rue. Observant un jeune enfant courir droit devant lui tout en baragouinant elle ne savait quoi. Elle soupira une énième fois, mais l'en remercia mentalement. Elle n'aimait pas se perdre dans ses pensées. Elle se demandait une fois de plus si elle avait pris la bonne décision, si elle ne s'était pas trompée. Dans le fond, la jeune femme n'en savait rien. Elle sentait simplement au fond d'elle qu'il fallait que cela se passe ainsi. Puis, avait-elle le choix ?

Non, bien sûr que non. Elle n'avait jamais eu le choix. Aucun ne l'avait eu.

Ana prit son courage à deux mains pour se lever, il lui fallait au moins ça, sa chaise grinçant une nouvelle fois sur le parquet plus qu'usé. Le bureau, sur lequel elle avait déjà tout mis en place, était assorti au reste de son mobilier. Elle se dirigea vers sa cuisine. Mais que voulait-elle y prendre exactement ? Rien, n'ayant pas faim, ni soif. Elle avait juste besoin de s'occuper pendant un moment.

Elle prit un verre crasseux et le remplit d'alkogol'. Cette mauvaise habitude les tenaillait depuis plusieurs siècles maintenant. Puis elle changea d'avis, elle prit une tasse abimée et la remplit de café. Elle n'aimait pas ce breuvage, bien trop amer, même avec beaucoup plus de sucre que de liquide. Lui, au contraire, l'appréciait. Il en buvait autant qu'il était capable de vider de bouteilles d'alkogol' en quelques heures. Autant dire qu'il détenait un record que personne ici-bas n'avait encore dépassé, ni même égalé. En soi c'était un exploit. Pour Ana, l'odeur du marc de café était tout aussi rassurante que la taille de ses bras. Voilà pourquoi elle en avait chez elle, pour pouvoir le renifler pendant des heures.

Elle fit un crochet par sa chambre, mais n'y entra pas. Se contentant de s'appuyer sur le chambranle de sa porte et de fixer le mur du fond, qui fut autrefois blanc. De l'autre côté, il y avait sa chambre à lui. Elle n'aurait pas su dire, combien de fois ils avaient partagé la même couche. Toutefois, elle pouvait dire combien elle avait aimé se blottir dans ses bras.

Elle soupira une fois de plus. Elle savait parfaitement qu'elle aurait pu le rejoindre, qu'il ne l'aurait pas rejeté. Bien au contraire. Elle en avait vraiment envie. Non, rectification, pas envie, besoin. Désespérément besoin. Elle en crevait d'envie alors, elle se contenta de retourner dans sa cuisine pour empoigner une bouteille d'alkogol' pratiquement vide.

Elle savait pertinemment qu'elle se dégonflerait une fois bien à l'abri contre son torse. Tout en soupirant pour la millième fois depuis le déclin du soleil, elle porta sa bouteille jusqu'à sa bouche. 

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