21⚔️Pourquoi moi ?
SIRYASIUS
16 ANS PLUS TOT
Alors qu'il franchissait le seuil, la lumière de l'après-midi, dorée et chaleureuse, baignait la forêt de Lae'Thys d'une aura presque magique. Le soleil commençait sa lente descente vers l'horizon, peignant le ciel de teintes orangées et pourpres. L'air était empli du chant des oiseaux et du murmure des feuilles bercées par une brise légère.
Siryasius prit place sur un banc de pierre, son regard se perdant dans la contemplation de la nature environnante. C'était une rare occasion pour lui d'observer de près le monde de la surface, si différent de l'obscurité et du feu de son foyer infernal.
L'attente lui semblait interminable, chaque minute s'étirant alors qu'il tournait et retournait dans son esprit les événements de la journée. L'accueil initial tendu, suivi de l'ouverture de cette elfe si douce.
Quand il fut de nouveau appelé, l'atmosphère dans la salle avait totalement changé.
— Tu as, certes, l'aspect d'un adolescent, mais tu portes déjà des responsabilités qui pèseraient lourd sur les épaules d'un adulte. J'admire ta bravoure, jeune Siryasius, ajouta l'elfe, sa voix empreinte d'une chaleur maternelle.
Lorsqu'il fut finalement convié à rejoindre à nouveau les conseillers, Siryasius ressentit une légère appréhension. Cependant, dès qu'il franchit le seuil de la salle, il fut accueilli par une atmosphère différente. Les visages autrefois crispés par l'incertitude affichaient maintenant une expression plus apaisée, presque accueillante.
L'elfe, qui avait précédemment manifesté une douceur et une empathie surprenantes, reprit la parole avec une bienveillance qui réchauffa le cœur de Siryasius.
— Laisse-nous te montrer notre hospitalité, jeune garçon, puis nous discuterons de notre arrangement.
Siryasius, touché par l'accueil soudainement chaleureux, sentit une bouffée de gratitude.
Peut-être, après tout, y avait-il un espoir de parvenir à un accord. Il hocha la tête, acceptant l'offre d'hospitalité.
Un petit festin fut rapidement organisé en son honneur, les mets les plus raffinés de Lae'Thys étant servis. Siryasius, entouré de sourires bienveillants se laissa emporter par l'ambiance chaleureuse, oubliant un instant la lourdeur de sa mission.
Il n'avait jamais connu pareille attention et se mit à penser que les royaumes terrestres étaient bien merveilleux, remplis de bonté, et que malgré son apparence et sa nature de cambion, il pourrait y trouver sa place.
— À notre collaboration avec les Enfers ! lança un conseiller en tendant à Siryasius une coupe remplie d'un breuvage ambré.
L'enthousiasme se propagea rapidement parmi l'assemblée, chacun levant son verre dans un élan de convivialité apparente. Siryasius porta la coupe à ses lèvres sans hésitation.
Cependant, à peine le liquide eut-il frôlé son palais qu'une sensation alarmante se propagea à travers son corps. Les muscles de Siryasius se tendirent subitement, une réaction inattendue qui le fit s'effondrer au sol. L'air se raréfiait dans ses poumons, et son cœur, pris de folie, tambourinait contre sa poitrine avec une intensité terrifiante.
Dans un réflexe désespéré, il leva les yeux vers l'assemblée, cherchant du secours dans les yeux de ceux qui, quelques instants auparavant, avaient partagé avec lui des gestes de fraternité.
Mais au lieu de la compassion, c'est une froideur glaçante qu'il rencontra, des regards où perçait désormais une répulsion à peine voilée.
L'elfe, que Siryasius avait naïvement cru douce et bienveillante, fut la première à lui transpercer la poitrine d'un coup de couteau acéré. Ce geste brutal ne resta pas isolé ; elle fut rapidement imitée par les autres membres du conseil, qui, tout en assaillant le jeune messager d'insultes, manifestaient une hostilité démesurée à son égard.
— Tu ne nous arracheras pas nos enfants ! s'exclama l'un.
— C'est pour leur bien que nous agissons. Retourne dans les abîmes, créature maléfique ! renchérit un autre.
— Nous défendrons Lae'Thys contre les abominations telles que toi, assura un troisième.
Alors que Siryasius se vidait de son sang, la douleur le clouant sur place, des larmes inondèrent ses joues. Il était trainé par les cornes, à travers l'obscurité oppressante de Lae'Thys, vers un destin funeste.
Le silence était absolu. Les oiseaux s'étaient tus, le vent ne soufflait plus et seule la lueur vacillante des torches tenues par ses bourreaux était visible.
— Ton sacrifice paiera notre dette, lui lança-t-on d'un ton solennel.
Une douleur aiguë déchira l'oreille de Siryasius, juste avant que l'elfe et ses complices ne le précipitent dans une fosse septique, dissimulée à l'écart de la forêt. L'odeur nauséabonde des excréments s'entremêlait à celle du sang qui s'échappait de ses plaies.
— Pourquoi... ?
La voix faible de Siryasius parvint à articuler ces derniers mots, adressés à l'elfe qui jouait nonchalamment avec l'objet qu'elle avait subtilisé de son oreille.
— Nous devons protéger nos enfants. Tu n'es qu'un dommage collatéral et d'après ce que nous avons vu et remarqué, personne ne va te regretter, sinon tu n'aurais pas été envoyé seul si jeune face à nous pour une telle mission.
Dans un dernier souffle, il répéta :
— Pourquoi moi ?
L'elfe, baignée dans la lumière des torches, se pencha légèrement vers lui, plongea son regard dans le sien et, avec une froideur déconcertante, répondit :
— Pourquoi pas ?
À ce moment précis, il perdit foi envers l'humanité.
Abandonné dans la fosse septique, considéré comme mort par ceux qui l'y avaient jeté, Siryasius se retrouva enveloppé dans un mélange toxique d'obscurité, de douleur, et d'odeurs répugnantes. La vie semblait le quitter, chaque souffle était un combat, chaque battement de cœur un rappel de sa situation désespérée.
Alors qu'il flottait à la limite de la conscience, une présence s'imposa à lui dans l'obscurité suffocante : c'était le Dieu de la Mort.
Une entité que beaucoup craignaient mais que Siryasius considéra, dans cet instant, comme un possible sauveur.
— Ton temps n'est pas encore venu, déclara l'entité d'une voix qui semblait à la fois partout et nulle part. Je ne peux te sauver de ce destin.
Siryasius, avec le peu de force qui lui restait, tenta de répondre, mais ses mots se perdirent dans un gémissement faible. La silhouette resta immobile puis disparut aussi soudainement qu'elle était apparue, laissant le jeune cambion seul avec sa souffrance.
Même la mort l'avait abandonnée.
Les jours passèrent, lourds et interminables.
Siryasius, grâce à sa nature démoniaque, commença à cicatriser lentement, très lentement. Pourtant, chaque petite victoire était tempérée par le poison qui infectait ses blessures, un rappel cruel de l'endroit impitoyable où il avait été abandonné.
L'odeur des excréments, omniprésente, se mêlait à celle de son sang et de sa chair en décomposition, un mélange horrifique qui aurait brisé l'esprit de n'importe qui d'autre.
Pourtant, Siryasius s'accrocha à la vie avec une détermination farouche.
Sa situation semblait sans espoir, mais sa volonté de survivre, de surmonter ce supplice, brûlait en lui comme un feu ardent. Il se parlait à lui-même, se rappelant des rares souvenirs plus « heureux », se battant contre la folie qui menaçait de le consumer.
Il ne voulait pas finir comme sa mère.
Au fil des jours, sa conscience flottait. Par moments, il croyait entendre des voix, des pas au loin, ou peut-être était-ce le murmure du vent à travers les arbres de Lae'Thys.
Mais aucune aide ne vint.
Un sentiment de trahison profonde s'insinuait en lui. Il se sentait abandonné, non seulement par ceux qui l'avaient jeté dans cette fosse, mais aussi par son propre père.
L'indifférence apparente de son géniteur face à sa disparition alimentait une haine brûlante au fond de lui. Comment pouvait-il être laissé ainsi, oublié, comme si sa vie n'avait aucune valeur ?
Puis il comprit que si son père lui avait confié cette dangereuse mission, c'est qu'il voulait se débarrasser de lui.
Pas de témoin, à la surface, sans conséquence.
Sa mère n'avait pas voulu de lui à la naissance et son père, se rendant compte petit à petit de son inutilité, l'avait entrainé sur un chemin mortel.
Ce constat résonnant dans son esprit, amplifiant son désespoir et sa colère.
La haine de Siryasius ne se limitait pas à sa famille ou à ses bourreaux ; elle s'étendait au monde entier.
Un monde qui permettait une telle souffrance, une telle injustice, ne méritait-il pas d'être méprisé ?
Dans les moments de douleur insupportable, où la faiblesse de son corps semblait se moquer de sa volonté de vivre, cette haine se transformait en un carburant, alimentant sa détermination à survivre.
Ses membres, jadis paralysés par la douleur et les blessures infectées, répondaient désormais à sa volonté, bien que chaque mouvement fût un supplice.
Siryasius, utilisant chaque once de sa nature démoniaque et de sa haine comme catalyseurs, commença à se hisser hors de la fosse. C'était un processus lent et douloureux, chaque mouvement vers le haut contre les parois glissantes et imbibées d'excréments testant les limites de sa force physique et mentale.
Son esprit, embrouillé par la fièvre et la douleur, ne rêvait que de sentir l'air frais sur sa peau, loin de l'odeur de mort et de décomposition qui l'avait enveloppé pendant ce qui semblait être une éternité.
Finalement, après de nombreux jours de lutte acharnée, Siryasius atteignit le bord de la fosse lors d'une nuit, chaque mouvement accompagné de douleur, de larmes, et d'une colère qui n'avait cessé de croître.
Enfin libre de la fosse mais pas de son calvaire, Siryasius s'effondra sur le sol de la forêt. Le contact avec la terre ferme, bien que douloureux, était un soulagement après son confinement. L'air frais semblait brûler ses poumons, mais c'était une douleur qu'il accueillait volontiers.
Autour de lui, la forêt de Lae'Thys se dressait, indifférente à sa souffrance et à sa survie.
Avec peine, il ouvrit une de ses blessures, la douleur aiguë lui rappelant qu'il était toujours vivant, toujours capable d'agir. Utilisant son propre sang comme encre, il commença à tracer un pentagramme complexe dans la terre de la forêt.
À l'intérieur du pentagramme, il écrivit des incantations en langue infernale que Calamité lui avait appris en cas d'urgence. Le sortilège complété, Siryasius se traina au centre du pentagramme et murmura les dernières paroles de son incantation.
Alors que ses mots s'élevaient dans la nuit, le sang s'illumina d'une lueur rougeâtre et l'air se chargea d'une énergie surnaturelle. Il sentit la magie l'englober, déchirant le tissu de la réalité alors qu'une sensation de chute l'envahit, comme s'il était aspiré à travers un tunnel sans fin.
Après quelques secondes, Siryasius se retrouva allongé sur le sol chaud d'un des salons de la demeure de son père.
Les sons étouffés de l'agitation, des rires lointains et de la musique parvenaient à ses oreilles, tandis que l'odeur riche et enivrante des festins et des encens remplissait l'air.
Siryasius se força à se relever. Chaque mouvement était un supplice, mais la rage qui l'avait porté jusqu'ici continuait de le soutenir.
Les festivités, comme il s'en rendit vite compte, étaient en l'honneur de l'Archi-diable Asmodeus, une célébration de décadence et de pouvoir démoniaque que son père organisait pour asseoir son influence et sa richesse.
Soutenu grâce aux murs, Siryasius avança lentement, observant à travers les portes entrouvertes les démons et les invités masqués qui se délectaient des plaisirs offerts par son père.
Jusqu'à ce qu'ils le voient s'avancer lentement vers la grande salle de réception.
Lorsqu'il arriva devant la porte grande ouverte, un carnaval de vice se déployait entre démons et invités de haut rang. Siryasius, dans son état pitoyable, contrastait violemment avec l'opulence environnante.
Pourtant, il avançait.
Les conversations s'essoufflèrent progressivement à mesure qu'il s'approchait du trône, son apparition captant l'attention de tous. Il y avait un mélange de chocs, de mépris et de curiosité dans les yeux de l'assemblée.
Mais Siryasius ne voyait que deux figures : son père, assis sur son trône, avec à ses côtés son invité, Asmodeus lui-même dont le charisme terrifiant semblait tout engloutir autour de lui.
Sa stature imposante dépassait celle de tout autre être dans la salle, une silhouette majestueuse drapée dans des étoffes qui semblaient tissées à partir des ténèbres mêmes. Son visage, d'une beauté cruelle et fascinante, portait les marques d'une éternité passée à régner sur les enfers. Ses yeux, d'un rouge profond et perçant, scrutaient l'assemblée avec une assurance absolue de sa domination.
Le silence se fit presque complet lorsque Siryasius s'arrêta, à peine à quelques pas du trône. Son regard se fixa sur son père, un mélange de colère et d'amertume, avant qu'il ne tourne la tête vers Asmodeus et s'agenouille par respect.
— Siryasius... Tu es là.
« Vivant » était le mot qui transpirait derrière sa remarque d'une banalité insultante pour son fils.
Asmodeus, lui, affichait une impassibilité étudiée devant l'apparition du cambion meurtri, son aura puissante ne trahissant aucune surprise. Son regard, pénétrant et acéré, semblait fouiller l'âme de Siryasius, y décelant les cicatrices et les secrets enfouis.
— Cet individu est-il issu de ta lignée ? interrogea Asmodeus.
— Il s'agit de mon bâtard, rétorqua le père de Siryasius, sa voix empreinte d'un dédain à peine voilé pour cet héritier à demi diabolique.
Non loin, la belle-mère de Siryasius et ses demi-frères et sœurs ne dissimulaient pas leur joie face à la scène.
L'Archi-diable possédait le pouvoir d'anéantir n'importe quelle créature lui déplaisant d'un simple geste. Pourtant, face à Siryasius toujours agenouillé, il adopta une attitude dévoilant son intérêt.
— Intéressant.
— Si sa présence vous importune, je le ferai disparaître sans délai.
Cependant, Asmodeus, d'un geste de la main, imposa le silence autour de lui avant d'ordonner au cambion de se redresser.
Mais Siryasius resta à genoux et se contenta de regarder l'Archi-diable droit dans les yeux.
— Il flirte avec la mort, celle-ci l'effleurant sans jamais l'étreindre, observa Asmodeus, une lueur d'intérêt perceptible dans sa voix. Son regard a quelque chose d'énervant... Non... d'exaltant. Siryasius, n'est-ce pas ? Dis-moi, si je tentais de t'ôter la vie ici et maintenant, quelle serait ta réaction ?
— Je vous affronterais, malgré l'absence totale d'espoir de victoire, répondit Siryasius avec une détermination glaciale.
Le silence s'abattit sur l'assemblée, sidérée par l'audace du jeune cambion. Pourtant, loin de s'offusquer, Asmodeus éclata d'un rire sonore, appréciant manifestement le spectacle d'une telle insolence.
Se redressant de toute sa stature imposante, Asmodeus s'approcha de Siryasius et, de ses mains puissantes, le releva. Il scruta le cambion, jugeant que la seule chose empêchant le Dieu de la mort de venir le chercher était la rage dans ses yeux.
— Voilà des siècles que je n'avais contemplé une telle soif de destruction incarnée dans un être si... diminué. Et tu n'es qu'un cambion, ironisa Asmodeus. Disyasius, toi et ta lignée devriez rougir de votre faiblesse face à la fureur de ton bâtard. Regarde bien cet éclat dans ses yeux. Face au souverain des enfers, il ne vacille pas, il me défie.
L'intérêt d'Asmodeus pour Siryasius était désormais indéniable pour tous ceux présents.
— J'attends avec impatience de voir ce que tu pourrais devenir.
Se tournant vers les serviteurs qui bordaient les murs de la salle, Asmodeus ordonna d'un ton qui n'admettait aucune réplique :
— Veillez à ce que l'on s'occupe de lui. Que ses blessures soient traitées et qu'il soit restauré. Disyasius, ne me cache plus ton bâtard. Je suis curieux d'assister à son ascension.
La déclaration fit l'effet d'une onde de choc parmi l'assemblée. Siryasius, le rejeté, bâtard à peine toléré, se voyait à présent offrir une attention directe de la part d'Asmodeus lui-même.
Les regards, autrefois chargés de mépris ou d'indifférence, se teintèrent maintenant d'un mélange de respect contraint, d'envie, voire de crainte.
L'Archi-diable, par son seul intérêt, avait changé le cours de la vie d'un cambion méprisé, lui ouvrant les portes d'une destinée grandiose défiant la mort.
— — —
— Désormais, tu connais un fragment de mon histoire. La raison pour laquelle j'ai attaqué Lae'Thys en premier. L'origine de ma quête pour dominer les royaumes des mortels... Tout ça à cause d'un pacte infernal et d'un cruel manque de reconnaissance.
Rizael semblait avoir perdu toute contenance. Assis à même le sol, jambes croisées, son regard se perdait dans le vague. Lorsqu'il releva les doigts pour triturer sa boucle d'oreille, il s'arrêta net.
Il releva les yeux vers Siryasius, une question muette dans le regard, avant de murmurer :
— C'était... c'est la tienne, n'est-ce pas ?
Le cambion acquiesça silencieusement, détournant son regard vers les dunes de sable brillant à la lumière de la lune.
— Elle m'a aidé à te reconnaître dès notre rencontre. Ta mère me l'a dérobée pour te l'offrir. Te voir avec m'a replongé dans ces souvenirs, ravivant la douleur et la colère que je pensais enfouies.
Il se tourna à nouveau vers Rizael, son expression dure.
— Nous ne sommes pas responsables des actes des autres mais si en premiers lieux je te hais, c'est à cause de ta mère. De comment ils m'ont tous manipulé et m'ont fait croire que nos différences n'existaient pas.
— Je refuse de croire à cela... balbutia Rizael, secoué.
— J'étais qu'un enfant... et ils m'ont brisé. Rabaissé à moins que rien.
— Stop...
— Ils m'ont poignardé plus de fois qu'il faudra pour tuer quelqu'un, puis ils m'ont jeté dans une fosse septique en croyant que ma vie s'éteindrait.
— Arrête...
— Malgré tout, je regrette... Je regrette de ne pas les avoir étranglés un à un lors de mon arrivée à Lae'Thys.
— Tais-toi.
— Je regrette de ne pas avoir pu poignarder ta mère et lui dire que tout se passerait bien pour son fils.
— La ferme !
— Je regrette d'avoir eu foi en l'humanité et je regrette d'avoir cru que l'on me sauverait. Parce que personne n'est venu, Rizael. Je suis sorti tout seul de la merde.
— ASSEZ ! Ma mère, le conseil... ils n'auraient jamais commis de telles atrocités, s'insurgea Rizael, le déni l'envahissant.
— Mais c'est la vérité. Ils l'ont fait.
— Mensonges ! Tu cherches à me tromper, à manipuler mes sentiments. Tu veux me faire croire qu'il y avait une justification à anéantir tout ce que j'avais, que je le méritais...
— Ta naïveté est désolante. Quel bénéfice y trouverais-je à inventer une histoire si sombre ?
— Tu tentes de m'attendrir, de jouer avec mes émotions pour gagner ma sympathie, c'est évident depuis le début.
— N'est-ce pas ce que tu fais également ? Essayer de m'apprivoiser pour mieux me trahir quand l'occasion se présentera ? Tu me vois comme le « méchant » de ton histoire, mais tu n'es pas plus héroïque que moi.
— Reprends-la, ta foutue boucle d'oreille !
Dans un geste presque désespéré, il tenta de retirer la boucle mais elle semblait se moquer de ses efforts, restant fermement ancrée.
Puis, les barrières cédèrent.
Les larmes, longtemps contenues derrière les yeux de Rizael pendant le récit, commencèrent à couler.
— Je... je ne sais pas quoi dire, balbutia Rizael, ses mots à peine audibles entre les sanglots. Je... Ma mère...
Rizael, avec sa vulnérabilité soudaine, n'était plus simplement l'ennemi ou le fils de celle qui avait trahi Siryasius : il devenait une autre âme marquée par les cicatrices d'un passé cruel.
Siryasius sentit une impulsion, un élan de compassion qu'il n'aurait jamais cru possible envers Rizael.
S'approchant doucement, il hésita un instant, son regard capturant la détresse dans les yeux de Rizael, avant de finalement céder à un geste d'une tendresse inattendue.
Sa main trouva les cheveux blanc argenté de Rizael, doux et légers sous ses doigts. Avec une délicatesse surprenante, il commença à les caresser, un mouvement apaisant, espérant transmettre un semblant de réconfort dans le geste le plus simple.
— Je... suis désolé, Siry. Si je n'avais pas existé, tu n'aurais pas souffert.
Ce n'était pas la vengeance qui lui apportait une satisfaction. Il s'était attendu à plus, mais pas à ça.
Les frottements doux contre ses cheveux semblaient apaiser légèrement Rizael, ses sanglots s'espacèrent, et bien que les larmes continuaient de marquer son visage, son corps commença à relâcher la tension qui l'avait emprisonné.
— C'est moi qui devrais pleurer, idiot. Et ne t'excuse pas d'un crime que tu n'as pas commis, murmura Siryasius, sa voix rauque trahissant une émotion contenue. Les conflits du passé ne devraient pas peser sur ceux qui n'y ont pas participé.
— Si j'avais su plus tôt, je.... J'aurais...
— Qu'aurais-tu fait ? Tu aurais risqué ta vie pour protéger Lae'Thys ? La vérité est que la ville était perdue dès l'instant où le conseil a choisi de trahir et-
— J'aurais pu te sauver.
Cette affirmation, simple et chargée de sincérité, suspendit le temps. Siryasius cessa ses mouvements dans la chevelure de Rizael, mais y garda sa main.
— J'aurais tout tenté pour te sauver, pour trouver ensemble un moyen d'éviter le désastre qui a frappé Lae'Thys, pour déjouer les plans qui ont conduit à cette guerre destructrice.
— Tu sais bien que j'aurais refusé ton aide, murmura Siryasius, un sourire amer effleurant ses lèvres.
— Après tout ce que l'on s'est fait, tu me dois la vérité.
Siryasius cligna des yeux, surpris, tandis qu'il laissait sa main glisser doucement le long de la nuque de Rizael, alors que les larmes continuaient de perler sur ses cils.
— Réponds-moi franchement : aurais-tu vraiment repoussé ma main tendue ?
Un silence chargé de tension s'installa entre eux.
Finalement, il répondit, sa voix teintée de regret :
— J'aurais désespérément voulu que tu sois le héros qui me sauve.
⚔️PROCHAIN CHAPITRE SAMEDI ⚔️
Un chapitre assez dur à écrire avec la douleur de Siry dans son flashback, mais que j'ai "aimé" écrire tellement c'était intense et important pour comprendre pourquoi et comment Siry est ce qu'il est. Qu'en avez-vous pensé ?
N'hésitez pas à soutenir cette histoire en votant/cliquant sur l'étoile et en laissant un petit commentaire. Ça fait toujours plaisir de lire vos retours et ça m'encourage à continuer !⭐
Bạn đang đọc truyện trên: AzTruyen.Top