15⚔️Douce Amalia
RIZAEL
Il devait être minuit passé dans la demeure de Siryasius. Alors que tous les serviteurs somnolaient après une longue journée de travail, Rizael laissait glisser son archet sur les cordes de son violon, la musique emplissant silencieusement l'obscurité nocturne.
Il avait toujours composé pendant la nuit, trouvant son inspiration sous la lueur argentée de la pleine lune. Il n'avait pas manqué cette dernière phase, se rappelant de la dernière fois où il l'avait observée lors de son entraînement sur la plage avec Siryasius.
L'épaule encore engourdie par la visite inattendue des Souliers Rouges la veille, il commençait déjà à ressentir une amélioration grâce aux soins prodigués par son « maitre ».
À cette pensée, il ne put réprimer une grimace avant de se tourner vers la fenêtre de l'alcôve où il avait établi sa résidence musicale à l'étage des serviteurs. Suffisamment éloignée des couloirs pour garantir son intimité, c'était là qu'il se retirait pour jouer de la musique sans déranger personne.
Dans le silence de la nuit, il contempla les dunes de sable s'étendant à perte de vue, tandis que ses pensées se tournaient vers Siryasius. Ces derniers jours, il s'était efforcé de se rappeler toutes les raisons qui justifiaient la mort de son ennemi.
Le massacre de Lae'Thys, toutes les vies innocentes sacrifiées par sa faute, les camarades de la résistance tombés au combat... Mais aussi la menace que représentait Siryasius pour le monde, son insatiable désir de conquête et le flot de sang qu'il versait chaque jour.
Rizael repensa à la douleur physique qu'il avait endurée, se rappelant comment il avait toujours répondu à Siryasius, lui refusant le plaisir de le dominer. Sur le champ de bataille, chaque coup avait été rendu, et même en captivité, il avait gardé sa dignité, comme lorsqu'il avait lancé une dague en plein cœur de Siryasius en réponse à ses coups de fouet.
Étrangement, il ne s'était jamais senti inférieur à son ennemi. Bien sûr, sur le moment des tortures, oui, mais chaque acte de vengeance lui redonnait un sentiment de puissance.
Cependant, sur le plan psychologique, il se sentait dépassé. Depuis qu'il était prisonnier, il avait l'impression que les mots blessaient bien plus qu'auparavant. Qu'il était plus facile de s'atteindre l'un et l'autre.
Plongé dans ses pensées, Rizael laissa échapper une mélodie de son violon, sa concentration obsédée par le cambion. Il devait le vaincre, à tout prix. Alors pourquoi cette solution ne lui semblait-elle pas suffisante ?
Pourquoi ressentait-il le besoin d'en savoir plus sur lui ?
Siryasius était une énigme à chaque rencontre. Ses soins, sa rigueur à l'entraînement, son passé mystérieux, sa dualité humaine et démoniaque... et son regard.
Émerveillé par le ciel étoilé. Amusé aux moments de tension. Malicieux à chaque échange salé avec lui.
Intense lorsqu'il l'observait.
Il manqua presque de laisser échapper son archer des mains, distrait par ses pensées, avant de prendre une grande inspiration et de se frotter vigoureusement le visage pour chasser son ennemi de son esprit.
« Je le déteste. Je le déteste. Je le déteste. Siryasius est un monstre. Sanguinaire. Cruel. Il n'a rien d'humain, si ce n'est une part de son sang... » pensa-t-il avec amertume, avant de murmurer à voix haute :
— Et si sa part humaine était sa faiblesse ? Et si c'était grâce à cela qu'on pouvait le vaincre ?
Rizael se mit à repenser à ses camarades de la résistance. Il songea à Moon, qui, conscient que leur adversaire était un cambion, découvrirait de nouveaux stratagèmes pour contrecarrer sa conquête. Il imagina toutes les possibilités de le vaincre, si seulement il parvenait à s'échapper de cette demeure.
Le demi-elfe commença alors à entonner doucement une mélodie, reprenant l'une des balades les plus apaisantes de la résistance, mais cette fois en elfique. Il peaufina les paroles, choisissant des mots qui ne seraient compréhensibles que par les bardes de son camp et par Moon.
En moins d'une heure, il composa un hymne de détresse déguisé en berceuse. Les paroles révélaient ses découvertes, sa position approximative, mais surtout, elles annonçaient l'absence de Siryasius lors de l'anniversaire de la Reine Sadique. Ce jour-là, la résistance aurait une chance de pénétrer dans la demeure.
Il ne restait plus à Rizael qu'à diffuser son appel. Grâce à son talent magique de barde, la tâche semblait aisée, mais elle nécessitait deux éléments : des oiseaux et une nouvelle sortie, cette fois avec son violon.
Cependant, alors qu'il élaborait son plan, un frisson le parcourut. Son corps se figea par réflexe de survie, pressé contre le rideau de la fenêtre, tandis qu'il percevait des pas dans le couloir.
Lorsqu'il tourna la tête, les bruits cessèrent soudainement. La peur s'empara de lui à la vue des yeux jaunes et lumineux de Siryasius qui scintillaient dans l'obscurité. Le demi-elfe resta pétrifié jusqu'à entendre un craquement sinistre avant que le cambion ne reprenne sa marche. Il avait échappé de justesse à sa vigilance.
Rizael observa Siryasius disparaître, tenant dans ses bras une silhouette menue et une tignasse rousse.
Amalia.
Soudain, l'angoisse fit tambouriner le cœur de Rizael, terrifié à l'idée que le cambion puisse nuire à l'enfant.
Il marqua une pause, déposa son violon avec précaution, et commença à suivre Siryasius, veillant à maintenir une distance sécurisée tout en restant discret. Rizael se remémora l'affection presque paternelle que son adversaire semblait éprouver pour la jeune humaine.
Cependant, il ne pouvait s'empêcher de penser que cette sollicitude n'était peut-être qu'une ruse, une façade élaborée pour dissimuler sa véritable nature, celle d'un être dénué d'empathie et d'affection.
Lorsque Siryasius s'immobilisa devant la porte de l'escalier menant à la prison, Rizael n'eut plus de doute. Il allait se passer quelque chose d'horrible pour Amalia et il devait intervenir coûte que coûte.
Il attendit encore puis sans un bruit, Rizael se rapprocha davantage, ses pieds glissant sur les dalles humides de l'escalier. Lorsqu'il atteignit enfin le bas de l'escalier, un frisson lui parcourut l'échine. La froideur de la pierre, l'obscurité oppressante, tout ici lui rappela sa perte de liberté à son arrivée dans cette demeure.
Le silence pesait lourdement, une absence de son qui s'étendait anormalement. Aucun cri de torture ne résonnait, aucune présence menaçante ne semblait rôder dans les parages. Rizael sentait son cœur s'emballer dans sa poitrine alors qu'il observait avec anxiété les cages suspendues, désormais vides, dans les hauteurs de la prison.
Puis, l'horreur le figea sur place lorsqu'il vit Siryasius s'approcher du bord du gouffre, là où il avait déjà plongé auparavant. Un frisson glacé parcourut l'échine de Rizael alors qu'il réalisait l'atroce vérité qui se déroulait sous ses yeux.
Il oublia toute prudence, toute peur, et se mit à courir désespérément vers Siryasius, mais il était déjà trop tard.
Un cri déchirant s'échappa de ses lèvres lorsque Siryasius lâcha le corps inerte d'Amalia dans le gouffre béant. Le désespoir et la rage s'emparèrent de lui alors qu'il la voyait tomber vers les ténèbres.
— Amalia ! hurla-t-il, impuissant, alors que Siryasius se retournait brusquement vers lui, surpris.
Sans réfléchir, Rizael se précipita vers le bord du gouffre. Le souvenir macabre de la mer de sang qui se trouvait au fond lui vrilla l'esprit, mais il n'hésita pas une seconde. Dans un geste désespéré, il se lança dans le vide, son seul espoir étant de sauver la jeune fille.
L'air sifflait autour de lui tandis qu'il chutait dans l'obscurité, puis dans un bruit sourd, il heurta la surface de la mer de sang.
L'impact fut brutal, et Rizael se retrouva submergé par l'épais liquide carmin. Une douleur lancinante lui traversa le corps alors qu'il luttait pour retrouver son souffle, désorienté par l'obscurité et la puissante odeur de fer.
Il chercha frénétiquement des signes d'Amalia, son cœur battant la chamade dans sa poitrine. Il plongea et remonta à la surface à plusieurs reprises, scrutant l'horizon de ses yeux embués par le sang. Chaque seconde semblait une éternité.
Soudain, ses mains frôlèrent quelque chose de lourd et coriace sous la surface. Une vague de panique le saisit alors qu'il réalisait que ce n'était pas Amalia qu'il avait trouvée.
C'était une créature difforme, aux crocs acérés et haute de trois mètres, qui émergea des profondeurs de la mer de sang avec ses quatre bras s'agitant avec férocité. Ses yeux luisaient d'une lueur malveillante alors qu'elle se tournait vers Rizael, sa bouche s'ouvrant dans un grognement bestial.
Dans un élan désespéré, Rizael chercha frénétiquement une arme parmi les débris qui jonchaient le sol de la caverne. Ses doigts glissèrent sur un morceau de métal rouillé partiellement enfoui sous un amas d'ossements. Sans hésitation, il se jeta vers l'objet, arrachant la lame émoussée de sa cachette macabre.
À peine avait-il saisi l'arme improvisée que quelque chose d'autre tomba dans la mer de sang avec un éclat retentissant. C'était Siryasius.
Rizael se tint prêt, l'arme à la main, son cœur battant la chamade dans sa poitrine. Il savait qu'il devait agir vite, pour retrouver Amalia et avant que la créature ne l'attaque de ses griffes meurtrières.
Mais lorsque Siryasius émergea, ses vêtements maculés de sang, il nagea avec une détermination étrange jusqu'à une berge d'ossements avant de s'écrier :
— Ne l'attaque pas !
— Tu as sacrifié Amalia à cette monstruosité ! Comme si j'allais laisser passer ça ! Ta cruauté n'a pas de limites ! rugit Rizael, sa voix empreinte de colère et de désespoir.
Alors que Rizael s'apprêtait à fondre sur la créature, prêt à en découdre pour sauver Amalia, Siryasius prit son élan et sauta, se plaçant devant elle, les bras écartés dans un geste de protection.
Dans le mouvement brusque qui s'ensuivit, l'arme rouillée que tenait Rizael s'enfonça dans le pectoral du cambion, qui vacilla sous le choc.
Le regard de Siryasius, mêlant douleur et rage, rencontra celui de Rizael.
— Arrête, murmura-t-il d'une voix entrecoupée, alors que du sang commençait à se répandre autour de la lame plantée dans sa chair.
Désemparé, Rizael retint son geste, son arme tremblant dans sa main, déconcerté par son ennemi.
Siryasius, avec peine, posa sa main sur l'épaule du demi-elfe et avoua d'une voix faible :
— C'est Amalia.
Un frisson d'horreur parcourut l'échine de Rizael alors qu'il réalisait la vérité.
La créature, toujours imposante et menaçante, recula d'un pas en voyant la détresse sur le visage de Siryasius et la réaction de Rizael. Son regard noir vacilla brièvement entre eux, puis elle fit un grondement sourd avant de s'éloigner lentement, glissant vers l'autre bout de la grotte.
Rizael, encore sous le choc de la révélation, resta figé un instant, observant la créature s'éloigner alors que Siryasius sortit totalement de la mer de sang pour s'assoir sur des ossements.
— Amalia est le fruit d'une monstruosité démoniaque et d'un humain. Le résultat d'une expérience macabre, d'un croisement interespèce. Elle prend forme à la pleine lune, se nourrissant de sang plus voracement que les Souliers Rouges eux-mêmes.
L'horreur submergea Rizael un peu plus, cette fois mêlée à une tristesse profonde pour la jeune fille qu'il avait tenté à la fois de sauver et de tuer. Elle était devenue une victime de sa propre nature, transformée en une créature hybride tiraillée entre deux mondes...
— Comme toi, murmura Rizael en regardant Siryasius se redresser avec effort, retirant l'arme rouillée de son pectoral.
Rizael tourna la tête vers la monstruosité, ne retrouvant aucun trait rappelant l'enfant humaine à la tignasse rousse. À la place, c'était une créature se délectant dans le sang, léchant des crânes et des os avec un appétit inquiétant.
— Il n'y a aucun moyen de la sauver ? déclara-t-il d'une voix empreinte de détermination. Nous devons trouver un moyen de lui offrir une vie meilleure que celle-ci.
Siryasius serra les poings, son regard s'assombrissant de colère.
— Une meilleure vie que celle-ci ? répéta-t-il, sa voix teintée d'une amertume palpable.
Rizael tenta d'interrompre, mais Siryasius poursuivit sans relâche, sa colère éclatant comme un volcan en éruption.
— Il n'y a pas à sauver quelqu'un de sa nature, Rizael ! s'exclama-t-il, sa voix empreinte d'une fermeté implacable. Tu crois toujours que tout peut être réparé, que tout peut être changé, mais parfois, il faut simplement accepter les gens tels qu'ils sont !
Le ton de Siryasius était tranchant, chargé d'une amertume qui trahissait ses propres tourments.
— La résistance prétend lutter pour la liberté, pour l'égalité, pour accepter les gens différents, n'est-ce pas ? Alors pourquoi ne peux-tu pas faire de même avec Amalia ? Pourquoi la juges-tu comme tout le monde ?
Rizael sentit le poids de ces accusations peser sur ses épaules, tandis que la colère de Siryasius grondait comme un orage.
— Pourquoi est-ce que vous n'acceptez que ce qui vous est familier, hein ?! Dès que l'on sort de l'ordinaire, qu'on ait une autre forme, teinte de peau, des cornes, une queue, dès qu'il y a un truc qui dépasse de vos cases, pourquoi est-ce que vous le jugez sans le connaître ?!
— Calme-t...
— Que je me calme ?! explosa Siryasius, son regard brûlant d'une intensité furieuse. Putain, tu es gonflé ! Tu allais tuer Amalia sans même réfléchir ! Tu ne te poses pas de question et tu agis comme un demeuré ! Tu veux savoir ce qui me déçoit le plus ? C'est qu'au final, tu es comme tous les autres.
La révélation claqua dans l'air, empreinte d'une vérité amère qui laissa un goût de cendres dans la bouche de Rizael.
— Tu ne vois pas au-delà de l'apparence. Tu ne comprends pas. Tu fais l'hypocrite, le héros capable de tout accepter, mais ce jour-là, tu aurais été le premier à... Le premier...
Les mots de Siryasius s'étranglèrent dans sa gorge. Son regard, empreint d'une douleur profonde, transperçait Rizael avec une intensité brûlante.
— Les gens différents comme moi, tu les aurais tués sans te poser de question. Parce que nous ressemblons à une menace. Le monde nous qualifie de monstres, alors nous devenons des monstres. Si personne ne m'aime, alors je n'aime personne.
Les paroles de Siryasius résonnèrent dans la caverne, chargées d'une amertume palpable. Le silence qui suivit était pesant alors que Rizael sentit une boule se former dans sa gorge.
— Je suis qui je suis parce que le monde ne nous donne aucune chance. Alors j'ai décidé de changer les choses, par mes moyens. Si tu es l'espoir de la résistance, je suis celui des « monstres ».
Rizael ne parvenait plus à soutenir le regard de Siryasius.
Chaque échange visuel était une brèche dans son armure, une douloureuse confrontation à la vérité qu'il ne pouvait plus ignorer. Il se sentait désemparé, sans mots pour exprimer le tumulte de sentiments qui le submergeait. Car au fond de lui, il savait que Siryasius avait raison, et cette vérité le déchirait.
Dans la résistance, il s'était toujours considéré comme un modèle d'acceptation. Pourtant, il ne pouvait réfuter les paroles de Siryasius. Il se rendait compte maintenant qu'il avait été aveugle, qu'il avait porté un regard empreint de méfiance envers les créatures démoniaques qu'il rencontrait. Il avait jugé sans connaître, condamné sans comprendre, et la culpabilité le rongeait.
Moon, le chef de la résistance, n'était pas exempt de ce préjugé. Il distinguait les espèces, favorisant les demi-elfes, tolérant les demi-orcs, mais condamnant sans appel les cambions.
Un regard vers Amalia lui arracha un soupir de compassion. Il comprenait désormais toute la souffrance que cette jeune fille avait endurée, condamnée à une existence de rejet et de solitude.
Elle, mais aussi les autres.
Et Siryasius.
Lorsqu'il releva enfin les yeux vers Siryasius, il vit dans le regard du cambion une lueur de dégoût dirigée vers sa boucle d'oreille, un simple souvenir de sa mère qui lui avait toujours procuré un sentiment de réconfort et de fierté.
— C'est à cause de gens comme toi que... non. C'est à cause de ton existence, Rizael, que je mène ce combat sanglant. Tout ça parce que vous n'avez pas accepté ma différence.
Rizael fut déconcerté par les paroles de Siryasius, qui semblaient soudainement chargées d'une signification personnelle bien plus profonde. Jusqu'à ce que le cambion, d'une voix dénuée de toute émotion, lui lance :
— Tu connais la sortie.
Soudain, Siryasius posa sa main sur l'un des murs d'ossements et se dissipa dans une brume sombre.
Assis parmi les ossements, dans le silence oppressant de la caverne, Rizael se retrouva plongé dans un océan de pensées tumultueuses.
Alors que le temps s'écoulait lentement, une présence timide brisa le silence. Rizael leva les yeux et vit Amalia dans sa forme monstrueuse, s'approcher lentement de lui.
Se redressant avec précaution parmi les ossements, Rizael tendit la main vers elle.
— Amalia, c'est moi, Rizael. Je ne te ferai aucun mal, je te le promets, murmura-t-il d'une voix douce, empreinte de sincérité.
Elle fixa Rizael de ses yeux emplis d'une lueur craintive, puis, comme si elle avait compris ses intentions pacifiques, elle s'allongea à ses côtés.
Observant ses gestes avec une certaine curiosité mêlée de tristesse, Rizael vit Amalia commencer à ronger les os qui jonchaient le sol de la caverne.
— J'avais promis de ne plus être en colère devant toi... Tu vas devoir me faire avaler mille aiguilles.
Elle le fixa un instant puis leva l'un de ses petits doigts vers lui, comme pour lui montrer qu'elle se souvenait bien de leur promesse, malgré son apparence monstrueuse.
Qu'elle était bien là, même si elle ne semblait plus humaine.
Rizael hocha la tête avec un léger sourire, saisissant délicatement la griffe sanglante d'Amalia pour enrouler son doigt autour.
Dans ce geste simple, il trouva un semblant de réconfort, une lueur d'espoir dans les ténèbres qui les entouraient.
⚔️PROCHAIN CHAPITRE SAMEDI ⚔️
Comment j'imagine Amalia avec Siry 😭 :
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