12⚔️Siry le pervers


RIZAEL


Moon lui avait toujours dit qu'il cherchait les embrouilles là où il n'y avait pas lieu d'être. Que pour un demi-elfe élevé dans la forêt, Rizael avait un tempérament de feu.

Ce dernier avait souvent justifié son attitude par ses expériences et son désir de se battre pour la résistance. Qu'il alimentait le conflit pour écrire et chanter de belles chansons inspirées.

Un artiste passionné.

La réalité était qu'il avait toujours été ainsi.

Rizael Silverleaf était venimeux, c'est ce qu'il vint à penser, les bras tendus dans l'atelier de Thalion en train de finir ses retouches sur sa tenue.

Renvoyez par Supplice car le « maitre » n'avait pas besoin de lui comme la veille, il se sentit coupable.

Coupable d'avoir causé la mort d'innocents à cause de son audace.

Coupable d'avoir été naïf en tentant le coup en blessant Siryasius tout en se disant que le cambion, s'il avait bien du sang humain, pourrait mourir avec une dague en plein cœur.

Mais en apprenant que Siryasius ne voulait plus le voir parce qu'il l'ennuyait, il se sentait coupable d'avoir trop parlé.

Son but était de rentrer dans les bonnes grâces de son ennemi pour mieux s'échapper et permettre sa déchéance avec ses camarades.

Pourtant, même si on le laissait tranquille depuis, il sentait qu'il s'était éloigné de celui dont il désirait ardemment la mort.

Il devait y remédier, même si ça lui faisait mal de faire tant d'effort pour manipuler quelqu'un.

— Et voilà ! s'exclama Thalion, fier de son résultat. Alors ? Te sens-tu à la fois à l'aise et beau ?

Après s'être dévisagé dans le miroir, Rizael laissa échapper un léger souffle admiratif.

Sa nouvelle tenue était un ensemble raffiné. La veste était d'un bleu clair éclatant, vibrant comme ses propres yeux. Le pantalon, dans une nuance de gris foncé, créait un contraste subtil mais élégant avec la veste. La chemise, d'un blanc pur, apportait une touche de luminosité à l'ensemble. Des touches d'argent étincelant, minutieusement brodées le long des contours de la veste et du pantalon, ajoutaient une note de brillance.

Rizael ressentait une montée d'assurance et d'élégance alors qu'il contemplait sa nouvelle tenue dans le miroir. Il avait l'impression de retrouver de la prestance et de s'éloigner de cette image dégradante d'« animal » ou de « jouet » que certains s'amusaient à lui attribuer depuis son arrivée, dans le but de l'humilier.

« Ne manque que ma rapière » pensa-t-il lorsqu'il remarqua une immense veste noire accrochée sur un cintre en bois. Des fils rouges étaient encore en train d'être cousus sur le tissu, dégageant une infime aura magique.

— Utilises-tu de l'étoffe magique ? demanda-t-il en désignant le vêtement du doigt.

— Seulement pour les demandes spéciales de Siryasius. Celle-là me donne du fil à retordre. Haha, tu l'as ?

— J'ai. Qu'a-t-elle de spécial ?

— C'est pour l'anniversaire de la Reine Sadique.

L'indifférence de Rizael n'était qu'une façade ; son intérêt venait d'être piqué au vif. Il venait de déceler une occasion d'approfondir ses connaissances sur cet événement sans éveiller de soupçons.

— La Reine Tiam m'a convié en tant que barde pour cette soirée.

— Bon sang, je vais devoir te préparer quelque chose ! Je pense avoir le temps, mais j'ai beaucoup d'idées.

— Du temps ? Tu vas en manquer, penses-tu ? Quand aura lieu cette soirée ?

— Ah, ma mémoire des dates me fait défaut... J'ai tout noté quelque part par ici. Pourquoi demandes-tu ?

— J'aimerais composer une nouvelle chanson en langue infernale pour l'occasion.

Rizael se dirigea vers le bureau de son ami, nota la date et calcula le temps restant, soulagé. Il avait amplement le temps de préparer un plan pour avertir la résistance et se rapprocher de Siryasius dans le but de se venger et de le renverser.

— Tu connais la langue infernale ? s'étonna Thalion.

— Hm, pas vraiment. J'ai pu saisir quelques injures sur le champ de bataille, mais rien qui ne touche à la poésie.

— Dans ce cas, rends visite à Calamité. Il gère l'archivage de la bibliothèque de la demeure.

— N'est-ce pas l'un des diablotins au service direct de Siryasius ? Je ne l'ai jamais rencontré.

— Il veille sur les appartements privés et sur la bibliothèque, la nuit. Les dialectes démoniaques, c'est sa passion ! C'est lui qui les a enseignés à Siryasius durant son enfance, d'après Grall.

— On dirait que tu t'entends bien avec les autres employés...

— Quoi ? Tu penses encore qu'on est tous des esclaves maltraités à chaque pleine lune ?

Rizael se tut, laissant Thalion secouer la tête avec désinvolture avant de se remettre au travail. Le demi-elfe réalisa, peut-être un peu tard, que son ami semblait désormais plus assuré qu'auparavant. Plus confiant et, surtout, plus enjoué.

Bien qu'ils soient tous deux des rescapés de Lae'Thys, un seul paraissait véritablement épanoui cinq ans après le désastre, malgré son service sous la coupe de leur bourreau.

— J'ai du mal à concevoir comment tu peux tolérer cela... murmura Rizael, la tête basse.

— Hm ? Tu as dit quelque chose ?

— Non, rien. Merci pour ces vêtements. C'est du travail de maître.

Le sourire que Thalion lui adressa alors lui fit momentanément regretter ses desseins. Si Siryasius venait à tomber, Thalion serait libéré de cette cage dorée, mais à quel prix ? Parviendrait-il à s'adapter à un monde extérieur, libéré des chaînes, mais empli de nostalgie pour son geôlier ?

Avec l'esprit tourmenté, Rizael quittait l'atelier, les bras encombrés par ses nouvelles tenues, lorsqu'il remarqua soudain l'ébauche d'une porte se matérialiser sur un mur auparavant lisse.

Elle s'ouvrit à son approche, révélant un petit salon orné et, en son cœur, un escalier en colimaçon. Mais plus surprenant encore, deux silhouettes se faisaient face, engagées dans une discussion houleuse.

— En quoi te sens-tu en droit de tout superviser ?! lança avec exaspération l'occultiste Oliver. Ce n'est pas toi qu'il a sollicité pour veiller sur sa guérison !

— Simplement parce que tout ce qui entre dans sa bouche finit dans la mienne, rétorqua Beatrix, les bras fermement croisés.

— Tu es répugnante. Tu manques totalement de finesse.

— Quoi qu'il en soit, Siry est troublé ces temps-ci, et c'est la faute de cette convalescence que tu lui as imposée. Un démon a ses besoins, et pas seulement charnels. Il doit pouvoir s'exercer, s'aérer ! Siry aime explorer les confins de ce royaume terrestre, et toi, tu lui imposes cette retraite forcée. C'est toi le véritable fléau.

— Garde à l'esprit qu'il est certes issu des enfers, mais qu'il porte également du sang humain. En tant que seul humain ici présent, je suis le mieux placé pour comprendre ce dont il a besoin pour recouvrer la santé. Ne joue pas à la guérisseuse, succube !

— Si on le laisse sombrer comme l'année dernière, tu t'en mordras les doigts. Te souviens-tu d'Orifleur ? Moi, oui.

Rizael se remémorait clairement du « non-siège » d'Orifleur, un an auparavant.

Cette cité méridionale, bercée par l'illusion d'une paix due à sa situation côtière, avait reçu une missive de Siryasius, ou plus probablement de l'un de ses généraux, peut-être Oliver lui-même. Elle proposait une capitulation préventive. La résistance avait accouru pour aider à l'évacuation de la ville qui, finalement, ne fut jamais assiégée.

Rizael avait des souvenirs très flou de cette histoire, notamment parce qu'il avait été ivre pendant des heures après avoir appris que ses ennemis ne viendraient pas.

Mais il se rappelait clairement d'un événement qu'il avait causé et dont il ne pouvait parler à haute voix. Ni même à ses compagnons de la résistance.

La seule explication donnée furtivement lors d'un combat des semaines plus tard face à Siryasius fut : « La blague était bonne ? ».

Ce geste avait rappelé à la résistance la cruauté de leur adversaire, les ayant induits en erreur et gaspillés leurs ressources pour une attaque fantôme.

« Peut-être qu'autre chose se cache sous cette histoire ? » s'interrogea Rizael, captant soudain le regard de l'occultiste et de la succube posé sur lui.

Un silence tendu s'installa entre eux avant qu'Oliver, lassé, laisse échapper un soupir exaspéré et quitte la pièce sans un regard de plus pour Rizael.

— Ne fais pas attention, il est raciste des elfes. Une mésaventure conjugale qui l'a laissé amer. Mais dis-moi, que fais-tu ici ?

— La porte s'est ouverte toute seule à mon passage.

— Ah, je vois. J'étais sur le départ quand ce con m'a rattrapé. Eh. En haut, les yeux.

Le commentaire de Beatrix arracha Rizael à sa contemplation. Il s'était laissé distraire, ses yeux capturés malgré lui par le décolleté plongeant de la succube.

Elle se tenait là, incarnant une figure de tentation avec une aisance naturelle. Sa beauté était marquante, et son allure, alliant la grâce à une aura de danger, captivait l'attention. Ses cheveux noirs encadraient un visage immaculé dont chaque trait semblait ciselé pour ensorceler.

Malgré la réprimande, une lueur espiègle dansait dans son regard, comme si elle prenait plaisir à cette faiblesse momentanée de Rizael.

Rizael détournait le regard, une ombre de gêne colorant ses joues, avant de fixer à nouveau Beatrix, tentant de camoufler son embarras.

— Envisages-tu de te rendre auprès de Siryasius ? Malheureusement, l'accès est restreint. Seule une personne est autorisée à visiter ses appartements privés chaque jour, à moins d'une exception notable.

— Comme être sa favorite, par exemple ?

— Coucher avec lui ne me donne pas plus de privilèges que d'autres.

— Je ne cherche pas à monter, clarifia Rizael. Je suis tombé ici par hasard et je m'apprêtais à partir.

Un regard empreint de dédain glissa sur le demi-elfe avant que Beatrix ne laisse échapper un soupir de lassitude.

— Tu sais que je ne t'apprécie pas ?

— Sans blague ? Serait-ce parce qu'il y a trois ans, j'ai tranché ta queue de succube ?

— Elle a repoussé, comme tu peux le voir, répliqua-t-elle en saisissant la queue en question.

Elle commença alors à circuler autour de Rizael, l'examinant sous toutes les coutures avant de s'arrêter et de pointer du doigt son oreille droite.

— Tout est repoussant chez toi, sauf peut-être ta boucle d'oreille qui te donne un air rebelle. D'où vient-elle ?

— Ce petit bijou ? De ma mère.

Beatrix intensifia son examen critique, ses yeux brillants d'un mépris mal dissimulé.

— Ton apparence m'a toujours semblé, comment dire... profondément repoussante. Alors qu'est-ce qu'il te trouve ?

— Qui ?

— Siryasius. Je m'interroge réellement. Quel attrait peut-il te trouver ?

Face à cette question, Rizael cligna plusieurs fois des yeux, décontenancé.

— Il semble me trouver divertissant, un peu comme un jouet, je suppose.

— Certes, ça c'est tout lui, mais d'où lui vient cette envie pour toi ? Cela dépasse mon entendement.

Rizael, pris au dépourvu par la troublante question de Beatrix, resta un moment silencieux.

— Envie ? murmura-t-il, pesant chaque syllabe, comme s'il tentait de décrypter un code caché dans la question même.

— Je parle de désir charnel, précisa-t-elle sans détour.

— Siryasius ne me convoite pas de cette manière.

— Excuse-moi chéri, mais qui était sur sa queue, l'autre jour ? C'est moi. Donc je sais sentir le moment où mon amant devint plus dur en moi. Et en tant que succube, je perçois plus facilement l'excitation des autres. Celle de Siry a excessivement augmenté à l'instant même où vos regards se sont croisés durant nos ébats.

— C'est parce qu'il est pervers ! Il aimait être observé, s'exclama Rizael, cherchant une explication logique.

Beatrix le regarda, une intensité dans le regard qui cherchait à sonder les profondeurs de son âme, tandis que Rizael détourna les yeux, en proie à un tourbillon de pensées et d'émotions.

— Laisse-moi te confier un secret, mais si tu le répètes à Siryasius, c'est moi qui te couperais la queue. Écoute bien : autrefois, son excitation venait du frisson du combat, de l'affrontement avec votre résistance. Mais avec le temps, c'est l'idée de te combattre, toi, qui le consumait, parce qu'il prenait plaisir à ce qu'il y a entre vous.

— Quel est le foutu rapport avec le désir sexuel ?

— Parce que récemment, il émettait une envie particulière quand ton nom était mentionné. La dernière fois, à Etherna, lorsqu'il avait appris ta présence... je l'ai ressenti, identifié. J'ai eu du mal à y croire moi-même, mais c'était bel et bien du désir. C'était plus intense que de l'adrénaline.

Cette révélation laisse Rizael abasourdi, confronté à une réalité qu'il n'avait jamais envisagée.

— Siry n'a peut-être pas pris conscience de cela mais je te conseille de faire gaffe à ton cul si un jour tu le croises dans un état d'ivresse. L'alcool affecte les humains d'une certaine manière, mais pour les démons, l'effet est... différent, pour ainsi dire.

— Pourquoi me révèles-tu cela ? interrogea Rizael, sa curiosité éveillée malgré la gêne évidente que suscitait cette conversation.

Beatrix avait haussé les épaules, un sourire flottant sur ses lèvres.

— Peut-être parce que je tiens un minimum à Siry. S'il est en bonne santé physique et mentale, son goût sera meilleur. Je ne demande pas à ce qu'il soit heureux, ça n'a jamais été le cas et ça ne le sera certainement jamais, mais si ta présence pouvait le rendre plus excitant pour moi, comme l'autre fois, j'apprécierais.

— Je n'ai nulle intention d'agir selon tes insinuations qui pourraient très bien être un piège pour me manipuler, rétorqua Rizael avec fermeté.

— Comme tu voudras. Néanmoins, je suis convaincue que tu y réfléchiras. Admets-le, la curiosité t'étreint, n'est-ce pas ? Savoir ce que Siryasius, ton adversaire le plus acharné, pourrait ressentir du désir pour toi... Rien que d'y penser et vous imaginer en train de baiser sauvagement me rend toute excitée !

Sans prononcer un seul mot supplémentaire, Rizael s'était précipité hors de la pièce, ses pas empressés trahissant un tumulte d'émotions.

Il avait parcouru les couloirs sombres du manoir, ses bras enlaçant étroitement les vêtements qu'il venait d'acquérir, son regard esquivant celui des domestiques, jusqu'à ce qu'il se réfugie dans sa chambre.

Une fois la porte fermée derrière lui, Rizael s'était laissé tomber sur le bord de son lit, le regard fixé sur le vague. Les paroles de Beatrix résonnaient encore dans son esprit, chaque mot vibrant d'une signification trouble et dérangeante.

L'idée que Siryasius, cette entité démoniaque incarnant la terreur et la puissance, puisse éprouver à son égard une attirance, le déroutait.

Rizael se trouvait désormais face à une interrogation cruciale : sa présence influençait-elle réellement Siryasius au point de devoir redéfinir sa stratégie ?

« Si j'ai, ne serait-ce qu'une infime possibilité de pouvoir influencer ses actions, ne devrais-je pas exploiter cette faille à notre avantage ? » pensa-t-il alors qu'il tentait d'écarter toute pensée le forçant à reconsidérer sa relation avec Siryasius.

Il le détestait et les mots de Beatrix n'y changeraient rien.

Cependant, cette nuit-là, le sommeil lui fut étrangement insaisissable. Des visions perturbantes de Siryasius, dans une nudité provocatrice, devant lui et lui ordonnant de le sucer, lui revinrent inlassablement en tête.

À tel point qu'il se retrouva contraint de chercher un soulagement physique, étouffant ses gémissements dans son oreiller.

Luttant contre des désirs non désirés.



⚔️PROCHAIN CHAPITRE SAMEDI ⚔️

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Rizael quand il apprend que Siry a chaud aux fesses en le voyant :

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