Chapitre 4
Lately I've found you on my mind
Récemment, je t'ai trouvé dans mon esprit
More than you know
Plus que tu ne le crois
More than you know – Billie Holiday
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Je suis dans les vestiaires et je me change avec Méli avant notre entraînement de volley. Je suis assise devant mon casier, strictement identique aux dix-sept autres qui l'accole. Ceux-ci devaient être jadis bien blancs et portent désormais les stigmates des traces de sueurs et de talc qui constellent un joueur dès qu'il sort de l'entraînement. Ça ne m'étonnerait même pas qu'on m'apprenne que la tâche jaune sur mon propre casier est la preuve que celui qui est passé avant moi a renversé l'intégralité de sa boisson bourrée de vitamine sur la peinture blanche. Je me débat actuellement avec ma genouillère en inspectant cette tâche alors que tout le monde semble déjà prêt. Les autres filles parlent entre elles de leur journée et je vois Méli s'approcher de moi.
— C'est vrai ce que tu m'as dit hier, au téléphone ? Tu vas vraiment les accompagner pour leur match ? s'excite-t-elle.
— Ouais.
Je fais court et précis, parce que je n'aime pas trop m'étendre sur le fait que je suis la fille du coach adjoint et par conséquent, que j'ai droit à certains avantages. Méli n'insiste pas et nous nous dirigeons vers le terrain. Nous débutons alors l'entraînement. On commence par courir autour du rectangle orange puis nous faisons du gainage, des pompes et d'autres exercices physiques. Notre entraîneur essaye de nous motiver avec des « tu peux faire mieux », « plus rapide », « allez, allez ». Au bout d'une demi-heure on est toute trempé et on n'a pas encore touché la balle. On commence alors à faire des passes et des attaques par deux avant de commencer à vraiment pratiquer. Et là, on est parti pour une bonne heure de réception, passe, attaque, défense.
— Anna, je ne savais pas que tu étais aussi douée ! me dit Méli. Je t'avoue que la première fois que je t'ai vu arrivé à l'entraînement, il y a deux semaines, je pensais que ce serait plus compliqué pour toi. Tu sais, parce que le beach, ce ne sont pas les mêmes sensations qu'à l'intérieur.
C'est vrai que Mélissane ne m'avait vu jouer que sur les plages mais fouler un terrain n'était pas nouveau pour moi. Avec un père dans la profession depuis que je suis toute petite, je me devais forcément d'avoir au moins quelques bases. Je souris à Méli pour la remercier et on termine la séance par quelques matches. A la fin, on est toutes dégoulinantes et rentrons dans les vestiaires pour nous changer. C'est là que Tanya nous propose d'aller prendre un verre dans un bar, pas loin de la salle, ce que nous acceptons sans hésiter.
*
Nous sommes toutes assises autour d'une table, attendant qu'un serveur vienne prendre notre commande. Le bar est dans un style assez « old » avec ses tables en bois et son ambiance tamisée. Il donne l'impression de n'être jamais bondé et pourtant rempli d'habitués.
— Quand tu t'es pris le ballon en pleine tête s'était énorme ! s'exclame une de mes coéquipières.
— Oui, en même temps, tu n'as pas lésiné sur ta force pour l'attaquer, ça je peux le garantir, répond Tanya.
Et c'est au milieu de leur rire que j'ai reconnu la voix.
— Mais c'est la p'tite Tomas ?
Je tente de faire abstraction du « petite » et me retourne pour faire face à Gabriel.
— Gabriel ? Qu'est-ce que tu fais là ?
— Figure-toi qu'à mes heures perdues, j'aide pour le service, me répondit-il.
C'est la première fois que j'entendais autant de mots sortir de sa bouche, en tout cas pour s'adresser à moi, et ça me value quelques secondes de blanc avant d'enchaîner.
— S'il est ainsi, je commanderais bien une limonade s'il vous plaît.
Je dis ça avec une voie de femme de la cour, si bien que je fis ricaner Méli, la pro dans le domaine. Alors que mes copines prennent également commande, toutes plus pendues à ses lèvres qu'autre chose, je remarque que Gabriel a gardé un sourire en coin depuis ma réplique. Mes yeux se baladent sur ses muscles qui bougent dès qu'il fait glisser son stylo sur le carnet et sa main qui passe dans ses cheveux entre deux commandes, sans parler de ses lèvres, lorsqu'elle bouge dans une danse hypnotique dès qu'il doit prononcer quelque chose. Je pense que je le reluque un peu trop car Méli me donne un coup de pied, juste à temps, alors qu'il relève la tête dans ma direction.
— Je vous rapporte ça les filles.
Et il s'en va, me permettant de mater son dos parfait.
— La terre appelle Anna, me réprimande Mélissane.
— Oh, c'est bon, ce n'est pas comme si je faisais tâche. Regarde-les, toutes, elles aussi elles le matent, dis-je en désignant nos amies.
C'est seulement lorsqu'il disparait derrière le bar qu'elles se retournent toutes vers moi.
— Comment ça se fait qu'il te connaisse ?
— Tu peux nous le présenter ?
— C'est ton pote ?
Les questions fusent et je ne peux plus les arrêter alors comme seule réponse, je leur explique que mon père est le coach adjoint de l'équipe.
— C'est vrai qu'il y a une petite ressemblance ! s'exclame Tanya.
— Oh la chance ! dit une autre.
Je les laisse continuer de me poser des questions en concentrant mon regard sur Gabriel, qui revenait avec nos boissons et repartait aussi vite, non sans un regard dans ma direction, qui me pris en traître alors que je n'avais pas détaché mon regard de lui.
*
— Mademoiselle Tomas, que me vaut l'honneur ?
Je suis accosté directement par Gabriel alors que je venais tout juste de m'accoudée au bar.
— Monsieur Perez, auriez-vous l'amabilité de me servir un mojito ? lui demandais-je.
Je vois le coin de ses lèvres remonter alors qu'il se penche vers moi.
— J'ai bien peur que l'alcool soit interdit aux mineurs, se moque-t-il.
— Ah ah ah, tu as besoin d'une preuve ? Mon acte de naissance ? Ma carte d'identité ? Mon relevé de compte tant qu'on y est ? Attend voir...je dois avoir...
Je fouille alors dans ma poche et y trouve ma carte d'identité. Je la mets pile sous ses yeux de sorte qu'il voit bien la date de naissance inscrite dessus. Il se penche encore un peu plus et fait passer ses yeux de la carte à moi puis de moi à la carte, comme s'il vérifiait mon identité. Je sais très bien qu'il fait semblant d'avoir du mal à me reconnaître. Et pourtant, ce simple constat arrive à m'arracher un sourire.
— En effet, oui oui, il semblerait que mademoiselle soit majeur. Je vais donc pouvoir accéder à sa requête, sourit-il.
Il m'offre un clin d'œil avant de se retourner pour préparer ma boisson. Lorsqu'il me la tend, il ne peut s'empêcher de demander.
— Pourquoi se la jouer solo cette commande, Romanna ?
— J'ai besoin d'un petit remontant, tu n'imagines même pas l'épreuve que c'est t'entendre jacasser 12 filles réunies pendant plus d'une demi-heure !
— Tu sais que tu fais partie des 12 filles en question ? ricane-t-il
— Non non, il y en a douze sans moi, je te le confirme. C'est juste que je t'ai ajouté dans lot tu vois ?
Et là, il rigole franchement et malgré moi, je ne peux m'empêcher de frissonner. Légèrement. Très légèrement. N'est-ce pas ?
— C'est bizarre, j'avais pourtant l'impression de ne pas avoir beaucoup parlé... continue-t-il, en s'accoudant à son tour au bar.
— Oui mais ça peut s'arranger, répondis-je au tac-o-tac.
Cette fois, il me regarde fixement, comme s'il se demandait si je jouais sérieusement ou non. Je n'hésite donc pas à soutenir son regard pour lui montrer que je ne suis pas le rôle de la petite fille craintive dans lequel il a voulu me caser.
— Tu veux autre chose Romanna ? me demande-t-il.
— Oh je voudrais plein de chose Gabriel, mais on va peut-être y aller petit à petit... souris-je.
Mon audace me surprend moi-même mais je n'ai pas le temps de vérifier si elle étonne également mon interlocuteur car un client appelle Gabriel et il me laisse donc, accoudée seule au bar. Je me demande si je fais bien de rester là, plantée comme une idiote, une idiote seule et souriante comme une débile, et je m'apprête donc à repartir vers la table de mes copines lorsque je remarque qu'elles sont parties. Je vérifie mon téléphone et en effet, Mélissane m'a envoyé un message, il y a deux minutes, pour me demander où j'étais et me prévenir qu'elles rentraient, elle et les filles. Je soupire en rangeant mon téléphone et me prépare à appeler mon père pour qu'il vienne me chercher quand je vois une chevelure blonde apparaître dans mon champ de vision. Je me retrouve alors face à un Gabriel qui semble sur le point de partir.
— Tu aurais besoin qu'on te raccompagne, par hasard, Romanna ? dit-il, après avoir jeté un regard derrière moi et vu que mes copines avaient désertées.
— J'étais justement en train d'appeler mon père t'en fais p...
— Allez viens, m'interrompt-il, je te remmène, on ne va pas faire déplacer le coach pour ça.
C'est comme ça que je me retrouve dans la même voiture que le beau blond à qui je n'ai jamais autant parlé que ces dernières heures. Alors que je commence à m'installer, il me prévient directement.
— Fais gaffe où tu poses tes mains, elle est toute propre ma voiture.
Je le regarde de travers avant de voir qu'il me parle très sérieusement. D'un certain côté, il n'a pas tort, car elles sont tellement moites qu'elles pourraient laisser des traces. D'un autre, il vient tout de même de sous-entendre qu'elles sont sales.
— Toi, en revanche, tu peux poser les tiennes ! râlé-je.
— Sauf que moi, je pose mes doigts sur le volant uniquement parce que c'est nécessaire pour conduire, ricane-t-il.
Son discours n'a ni queue ni tête et pourtant, je continue de m'enfoncer.
— C'est vrai que tes doigts, ce n'est pas grave s'ils touchent ta voiture, tu ne les utilisent jamais pour autre chose ! répliqué-je, sans même réfléchir.
Evidemment, ma phrase a un double sens.
Je le vois hausser les sourcils et esquisser un sourire en coin.
Evidemment, il l'a malheureusement compris.
— Par exemple, pour...le...volley, bafouillé-je, en rigolant moi-même de ma bêtise.
— Pour le volley bien sûr... rigole-t-il à son tour.
J'hésite entre le remercier pour ne pas se braquer et l'étrangler pour avoir compris ce que je voulais vraiment dire. Il ne pouvait pas être stupide ? On arrive devant chez moi sans plus aucun mot et pourtant, je me suis tellement repassé la scène d'il y a quelques minutes que je n'ai même pas remarqué si le silence était gênant ou non ! Avant de partir, il me demande de ne pas oublier de saluer le coach adjoint pour lui.
— Bonne fin de journée, Romanna, murmure-t-il en s'attardant un tout petit peu trop sur mon prénom.
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Heyyy🌺
Petit chapitre pour mieux installer la relation Anna-Gabriel 😏
Que pensez-vous de ses coéquipières ? Et l'attitude de Gab' envers Anna ? Je crois que cette dernière aime un peu trop le reluquer 🙄😄
• Prochain chapitre mercredi •
Des Bisous ❣️
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