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David était déjà installé avec un café et une pâtisserie lorsque j'arrivais à notre point de rendez-vous. Je passais donc commande directement au comptoir avant de le rejoindre. Les yeux fixer sur son téléphone, il ne me vit pas arriver et sursauta lorsque je glissais la chaise en face de lui pour pouvoir m'asseoir.
Je retenais un rire moqueur, mais ne pu empêcher une remarque.
- J'aurais pu être une personne malintentionnée, je serais déjà loin avec mon larcin.
Il rit à ma plaisanterie, attirant le regard des quelques clients présents. Son regard fixé sur moi me mettait mal à l'aise et je ne saurais dire si cette impression s'estomperait au fil de la conversation ou non. Pour en avoir le coeur net, j'allais apprendre à le connaître.
- Bien ! Commençais-je. Je suis là, alors parlons.
Le sourire satisfait de David eut le don de m'agacer.
- Vu que tu as l'air de tout savoir sur moi. Dis-moi tout sur toi !
- Que veux-tu savoir ?
- Dis-moi tout.
Nous nous racontions notre histoire, chacun notre tour, bien que j'eu plus à raconter que lui. Il savait déjà une grande partie de ma vie. Mes grands-parents étaient apparemment très bavards à mon sujet. Il savait par exemple que mes parents vivaient à présent en Amérique et que j'étais en deuxième année d'histoire. Et, comble de l'horreur, il connaissait tout de mes rêves d'enfants. Ca avait l'air de bien l'amuser de savoir que depuis petite j'avais une passion pour les vêtements de certaines époques et que je me prenais pour l'impératrice Sissi à l'école. J'étais rouge de honte, alors que lui était mort de rire, attirant une nouvelle fois les regards des curieux sur nous.
- Et toi alors ? N'as-tu rien fait dont tu puisses avoir honte dans ta jeunesse ?
J'espérais mettre les compteurs à égalité, mais il secoua la tête avec un sourire moqueur.
- Désolé pour toi, répondit-il. Mais je ne dévoilerais rien qui pourrait me compromettre.
Tant pis ! Je demanderais à sa mère.
Nous restions encore un moment à discuter de tout et de rien et j'appris qu'il venait d'être muté comme professeur dans l'un des établissements de la ville. Finalement, je me détendis petit à petit en sa présence. De mon côté, je n'avais pas grand chose à dire. Il en savait déjà beaucoup : merci papi et mamie.
Soudain, mon téléphone se mit à sonner dans mon sac. C'était mamie. Je devais répondre.
- Excuse-moi.
Il ne se formalisa pas de cette interruption et me laissa décrocher sans rien dire.
- Bonjour mamie, comment vas-tu ?
David montra un grand intêret pour ma conversation. Il croisa les mains devant lui et posa son menton dessus, écoutant attentivement ce que je racontais.
- Où es-tu Clarisse ? demanda-t-elle d'une voix enrouée.
Son ton m'inquiétait beaucoup. On aurait dit qu'elle avait pleuré.
- Tout va bien ? Qu'est-ce qu'il se passe ?
L'homme en face de moi fronça les sourcils. Il demanda silencieusement si tout allait bien. Je ne me préoccupais plus de lui lorsque j'entendis renifler et hoqueter à l'autre bout du fil. Des voix inconnue s'élevèrent en fond et lorsque grand-mère leur répondit, mon sang se glaça. J'avais peur de comprendre.
Une main se posa sur la mienne, l'enveloppant de sa chaleur et me ramenant à la réalité. Je me raccrochais à lui pour m'assurer que je ne rêvas pas. Non, c'était bien réel. Les personnes qui se trouvaient avec mamie étaient des secouristes et elle venait de leur donner les informations médicales de papi.
- Mamie, repris-je la voix tremblante. Que s'est-il passé ?
De l'autre côté, elle ne put répondre. Sa voix était secouée de spasme et ses pleurs l'étouffaient. David avait comprit. Il appela une serveuse et régla leur note alors que j'étais toujours au téléphone.
- Je t'emmène, déclara-t-il en sortant ses clés de voiture.
Je le suivais à l'exterieur, tout en essayant de rassurer la vielle femme au téléphone. Le trajet jusqu'à la voiture me sembla durer une éternité. Qu'allait-il en être de la route jusqu'au village ?
- Je suis avec David, déclarai-je soudain. Nous nous mettons en route.
- Je t'attendrai à l'hôpital, bafouilla-t-elle en réponse.
Lorsque je raccrochais, je fut prise de nausée et ma gorge se serra à tel point que je n'arrivais plus à respirer. Même mon coeur sembla avoir un dysfonctionnement. Il battait si fort. David m'appelait, mais j'étais incapable de lui répondre. Assis au volant, attentif à la route, il me jettait tout de même des regards inquiets.
- Clarisse ? Tu es avec moi ?
Il me fallut un moment avant de revenir à moi et de pouvoir lui répondre.
- Qu'est-ce qu'il se passe ?
Je puisais dans le peu de force qu'il me restait pour trouver les mots.
- C'est papi. Il a fait une rechute...
Ma voix se brisa sur ces derniers mots et les larmes coulèrent sur mes joues sans que je puisse les arrêter. Je me détestais de me montrer ainsi devant lui, mais j'étais reconnaissante qu'il soit là. Dans mon état, prendre la route aurait été stupide et risqué. De plus, il était aussi comme un petit fils pour mes grand-parents et devait être lui aussi très inquiet.
Sa mâchoire était serrée et ses mains cramponnées au volant. Je ne sais pas à quelle vitesse nous roulions, mais j'étais certaine que la limitation était dépassée. Je détestais la vitesse, mais là je n'en avais plus rien à faire. Je voulais être auprès de ma famille le plus rapidement possible.
Bientôt, l'hôpital apparu devant nous. David gara sa voiture sur la parking destiné aux visiteurs pendant que je rappelais ma grand-mère.
Nous la retrouvons dans la salle d'attente du service des urgences. Elle tournait en rond et les personnes autour d'elle la regardaient avec pitié ou agacement. Lorsqu'elle nous vit David et moi, elle se précipita sur nous en lâchant les sanglots qu'il lui restait.
- Comment va-t-il ? questionna l'homme qui m'avait accompagnée.
La vieille femme tremblait contre moi, à tel point que j'étais certaine qu'elle ne tiendrait plus debout si je n'étais pas là pour la soutenir. Elle chercha ses mots, ne sachant quoi dire.
- J.. Je ne sais pas, bafouilla-t-elle en essuyant ses larmes. Le médecin ne m'a pas encore donné de nouvelles.
- Depuis combien de temps est-ce qu'il est là ?
Je ne compris pas sa réponse à travers ses reniflements, au contraire de David visiblement, qui se dirigea droit vers le comptoir de l'accueil. De mon côté, je forçais mamie à aller s'asseoir sur l'un des seuls sièges vides restant. Je me rendis ensuite au distributeur pour retirer deux bouteilles d'eau. Avec toutes les larmes qu'elle avait versé, elle devait être déshydratée.
- Bois un peu.
Elle se força à ouvrir la bouteille et avaler quelques gorgées avant de me la rendre. C'est ce moment que choisi David pour revenir. Son air sombre n'annonçait rien de bon.
- Qu'est-ce qu'ils disent.
- Ils ne peuvent rien dire pour le moment. Il est toujours en soin. Nous devons attendre.
C'est ce que nous fîmes. Pendant ce qui nous sembla être une éternité. Nous attendîmes le coeur battant, observant sans les voir les nombreux patients arriver, être admis puis ressortir, pour certains. Quatre heures... quatre très longues heures d'attentes à tourner en rond, se ruiner en café imbuvable et se ronger les sang. Etait-ce normal ?
Un médecin sorti finalement de la zone de soin. Il s'arrêta à l'accueil et s'adressa aux infirmières qui pointèrent un doigt dans notre direction. Enfin. On allait enfin pouvoir nous dire ce qu'il en était.
- Bonjour, je suis le Docteur Lancier, se présenta-t-il. Etes-vous de la famille de monsieur Forgeron ?
David et moi nous levions. Mamie étant trop faible après avoir tant pleuré, elle ne fit que lever un regard suppliant vers lui.
- Comment va mon grand-père, Docteur ?
Il sembla hésiter devant ma question. Mon coeur se serra d'avantage.
- Allons dans mon bureau !
Ok. C'était très mauvais. Je n'avais pas du tout envie de le suivre. Comme si rester dans la salle d'attente allait changer quelque chose. David aida mamie à se relever et me poussa doucement dans le dos pour me forcer à avancer. Nous emboitions donc le pas à cet homme en blouse blanche jusqu'à une porte. Il nous fit entrer dans une pièce et referma derrière nous en nous invitant à nous asseoir. David nous laissa à mamie et moi les deux seules chaises qui faisaient face au bureau. Il resta debout, derrière nous, une main réconforta,te posée sur l'épaule de ma grand-mère.
Le docteur s'assit en face de nous en posant un dossier que je n'avait pas vu jusqu'ici, devant son ordinateur. Il se racla la gorge et évita notre regard.
- C'est assez difficile pour moi de vous l'annoncer, commença-t-il.
A la seconde où il prononça ces mots, mon sang se glaça.
- Je suis au regret de vous dire que monsieur Forgeron est décédé.
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