🤍chapitre 9🤍

👻Raconte moi une histoire :
Il était une fois un autre monde enchanté...👻

Mes mains égratignées écartent quelques branches touffues pour me permettre d'avancer dans la forêt dense. Le sentier n'est pas sécurisé, mais je ne fais pas attention, bien trop angoissé pour me rendre compte où je mets les pieds. Mes joues sont trempées par mes larmes qui n'arrêtent pas de couler. Je ne peux pas m'empêcher de ressasser ce qui vient de se passer.

Pourquoi elle m'a fait ça ? Quel but avait-elle de me faire souffrir ? Surtout qu'elle, c'est ce que j'ai vécu pendant ma scolarité. Est-ce que ce qu'elle a dit avait un semblant de vérité ? Parce que si c'est le cas, je ne pense pas supporter cette dure réalité.

Je me laisse glisser contre un tronc d'un arbre majestueux. Mes bras entourent mes jambes que je serre contre ma poitrine. Ma tête se pose sur mes genoux et doucement, ma respiration ralentit aux rythmes des battements de mon cœur. Je ferme les yeux pour me laisser submerger par ce silence si bienfaiteur : il n'y a que les feuilles d'arbres avec le chant des oiseaux qui se font entendre.

Je ne sais pas combien de minutes s'écoulent parce que la notion du temps m'échappe dans l'état actuel dans lequel mon esprit est plongé. Mes tremblements redoublent d'intensité à cause du froid qui se fait lentement sentir dans le courant d'air. Mes cheveux cachent mon visage sûrement bouffi à cause de mes larmes qui ne font que couler jusqu'à ce qu'il ne me reste plus une seule goutte.

J'entends des bruits de craquement de branches. Cela signifie que quelqu'un approche, mes muscles se crispent à me faire mal et la panique s'insinue dans chaque parcelle de mon être.

Je crains que ce soit Cassie. Mon cœur espère que ce n'est pas elle, parce que je sais que la colère que je ressens envers elle est prête à exploser. Pas sûr que cette fois, je me contrôle pour ne pas la blesser avec mes mots tranchants.

Les bruits de pas se rapprochent et j'agonise presque par les émotions qui m'envahissent. Je prie silencieusement pour que ce ne soit pas elle, même si je n'ai aucune croyance. J'espère que ma prière sera entendue quand même.

J'ouvre brusquement les yeux, surprise par un miaulement aigu. Devant moi se trouve la petite chatte noire Aurore, ses yeux vert intense m'observent d'un air curieux. Elle se lève gracieusement pour s'avancer vers un autre sentier dissimulé par des arbustes.

Elle s'arrête pour tourner sa tête vers moi et me miauler dessus, parce que je mets du temps à comprendre qu'elle m'attend pour que je la suive. C'est grotesque, mais mon instinct me pousse à me lever et à la suivre, même si c'est une pure folie.

Elle se dandine avec grâce pour éviter les obstacles qui barrent le chemin. Par contre, avec ma maladresse, mon pied s'entrave dans une racine, je m'écroule lourdement sur le sol avec douleur.

J'essaie de me relever avec mes coudes et la blessure sur ma main se remet à saigner. La chatte revient sur ses pas pour venir me renifler et me donner un coup de tête comme pour dire de me dépêcher de ce que je fais malgré les douleurs qui s'élancent dans mon corps.

Je me demande bien où elle m'emmène. J'écarte quelques fougères pour poursuivre le chemin. Mes yeux s'écarquillent de surprise par l'endroit où débouche cette sortie.

La chatte Aurore monte avec facilité dans un arbre pleureur qui se trouve à la lisière d'une rivière aux courants légers. Près de celle-ci se trouve une fontaine avec deux bancs placés de chaque côté.

L'endroit semble être abandonné depuis sûrement longtemps, vu l'état dans lequel il l'est. Je viens doucement m'installer sur le rebord de la fontaine qui représente une magnifique femme qui tient dans ses mains un violon et une paire d'ailes orne son dos.

Mon regard se fixe intensément sur la plaque qui orne le bas de la statue et, avec concentration, j'essaie de lire ce qui est écrit, mais c'est en grec ancien, pareil au petit livre de ce matin.

Je passe ma main sur la plaque noircie et mes émotions sont tellement intenses que ma tête tourne légèrement. Ce lieu m'apaise étrangement et cette atmosphère mystérieuse me rend curieuse de beaucoup de choses.

Mes pensées s'emmêlent légèrement jusqu'à ce que j'entende des bruissements venir des arbres. Je soupire longuement, soulagé de voir que c'est juste Lyam, et mon regard se fixe sur lui. Il est dans une tenue simple qui le met en valeur, il dégage un petit quelque chose qui me met presque mal à l'aise.

Il passe une main dans ses cheveux sombres, ses yeux bleu-vert intenses se posent sur moi et je me sens fondre, mes mains se referment fermement sur le rebord de la fontaine pour contrôler les frisons que je ressens.

— Vous vous faites guider par la petite aurore, elle connait des coins incroyables ; cette petite cachotière ne les montre qu'aux personnes qu'elle aime bien, dit-il avec sa voix grave, mais remplie d'une certaine douceur et trouble. C'est discrètement que je l'observe s'installer pas très loin de moi.

On reste silencieux jusqu'à ce que mon regard se pose sur ce qu'il tient dans ses mains.

Un livre avec un magnifique jaspage vert émeraude que je reconnais très bien. C'est avec surprise que je tends ma main vers celui-ci, mais je suspends mon geste timidement pour ramener celui-ci contre moi.

— Laissez-moi deviner, vous l'avez trouvé durant votre petit jardinage matinal ? Demandai-je sans détacher mes yeux de cet ouvrage intrigant.

— Il faut bien que quelqu'un entretient toute cette magnifique verdure, et sachez, mademoiselle, que je suis le seul à avoir la main verte. Ma surprise a été grande quand j'ai trouvé ce livre dans les buissons sous votre balcon. Vous n'aimez pas la lecture en grec ? Demande-t-il avec un sourire au coin qui me fait doucement rire.

Je lui avoue à demi-mot ce qui s'est passé ce matin, mon regard s'assombrit aux souvenirs de la suite des événements qui s'est déroulée ensuite. Mon cœur s'alourdit et je fixe le sol que je trouve à cet instant très intéressant.

— Αιωνία αγάπη μου.

— Pardon ? Demandai-je surpris par ce qu'il vient de prononcer. Il regarde fixement la plaque de la statue. Est-ce qu'il a traduit cette phrase aussi facilement ? Il passe une main sur sa nuque, légèrement gêné par mon regard intense et curieux. Je me rapproche pour être plus près de lui et suspendu à ses lèvres, j'attends impatiemment qu'il me dise ce qu'il sait.

— C'est du grec, c'est écrit « Les âmes éternelles », cette statue a été dédiée à la fille du baron de cette propriété au siècle dernier. C'est le peuple qui l'a fait pour que personne ne puisse oublier la triste histoire concernant cette jeune femme. On raconte sur elle qu'avec son violon, elle pouvait charmer n'importe quelle personne ou animal, mais le charme a un double tranchant. Elle a été l'instrument pour permettre à une déesse de se venger, dit-il d'une voix sombre. Ses mains serrent fermement le livre qui tient comme si c'était son ancrage pour ne pas être emporté par ce récit peu ordinaire.

Je ne peux pas rester les bras ballants sans réagir, surtout qu'il semble accablé. Mes mains se posent sur les siennes qui sont froides et nos épaules se touchent presque, ce qui me fait rougir, parce que je n'ai jamais été aussi tactile, pas par ma propre volonté.

Je mordille ma lèvre, mais les mots m'échappent avant qu'ils puissent sortir de ma bouche. Je ne sais pas comment apaiser ce qu'il ressent à ce moment précis, je me sens impuissante face à sa détresse pour ce récit.

— Racontez-moi une histoire, s'il vous plaît ? Demandai-je d'une petite voix timide, pas vraiment sûre de ma demande, qu'il le surprend, parce qu'il fixe son regard brillant d'émotions sur moi.

Heureusement que je suis assis, puisque je ne suis pas sûr que mes jambes auraient pu supporter mes tremblements. Il ne dit pas un mot jusqu'à ouvrir le petit livre entre nous deux et il commence à me faire la lecture avec sa voix suave qui me fait frémir chaque parcelle de mon âme.

Je suis ensorcelé par le conte qu'il me raconte et c'est tellement passionnant que je me coupe du monde pour me laisser harper par celui qu'il m'offre à travers cette épopée. Je pose ma tête sur son épaule et son odeur m'enveloppe dans un cocon rempli de douceur. Je soupire, soulagée d'avoir pu lui faire changer ses pensées pour l'éloigner du conte funèbre sur cette statue impressionnante.

Mes yeux se ferment lourdement pour me laisser submerger par le récit captivant qui me fait remonter certains de mes souvenirs à la surface parce que ça raconte l'histoire de deux amies. Je ne peux pas m'empêcher de penser fortement à Cassie, car il n'y a pas une minute que je ne puisse avoir une légère pensée pour elle, malgré les douleurs et les tristesses.

L'amitié est un mot qui définit un sentiment compliqué comme chaque personne a un avis très différent sur ce mot essentiel qui peut bouleverser une vie. Elle s'éveille au moment précis où deux personnes sont attachées réciproquement. Ça peut être de tout âge, il n'y a pas réellement de règle et de condition pour qu'une amitié commence, cela se fait simplement sans qu'on le veuille souvent.

Elle est comparée la plupart du temps à une fleur au début : c'est un petit bourgeon timide, mais petit à petit, si on l'arrose avec de la loyauté, de l'empathie, de l'attention, de l'honnêteté et surtout de croire en l'autre. Elle va commencer à fleurir pour devenir une magnifique fleur qui résistera aux pires tempêtes des plus violentes parce que profondément dans la terre, les racines seront solides autant que de l'acier.

On recherche toute cette personne incroyable avec qui notre vie sera bouleversée, avec qui on aura un lien si fort. Qu'elle fera partie d'un bout de notre vie, mais la plupart du temps, il y a des amitiés qui se séparent ou chacun prend différentes routes pour qu'un nouveau chapitre se tourne. Ça ne voudra pas dire que c'est la fin, parce que le destin peut nous remettre sur notre route des personnes chères à notre cœur qu'on n'a pas pu oublier.

Je sais la chance que le destin m'a donnée d'avoir rencontré cette personne avec qui on est deux facettes d'une même pièce, comme on est totalement l'opposé de l'une et de l'autre. Cela n'a pas empêché qu'un bourgeon naisse entre nous au fil du temps pour devenir une sublime fleur. Je ne regrette pas une seconde de l'avoir dans ma vie, puisqu'elle m'a sauvé dans les moments les plus durs et un jour. Je garde espoir de pouvoir lui rendre tout ce qu'elle a pu me donner.

Je ne sais pas ce que je représente pour elle réellement, mais c'est sans importance, comme souvent les mots qu'on ne dit pas se font ressentir par les gestes et les petites attentions.

Elle est un bout de ma vie depuis des années. Je ne pensais pas qu'un jour cette fleur entre nous puisse noircir. Légèrement sur les rebords de ses sublimes pétales de soie, puisqu'une amitié peut être indestructible, mais une fois qu'un mal s'installe, il est presque impossible de le détruire à sa souche.

Je me redresse brusquement, un peu surprise de m'être extirpé des rivières de mes songes. Je sens que les muscles de Lyam se raidirent et ses yeux sont fixés intensément à l'entrée de ce lieu magique. Je regarde ce qui a pu autant attirer son attention au point de perdre le fil du récit qui me raconte avec passion. Qu'elle ne fût pas ma surprise de voir Cassie essoufflé et ses cheveux emmêlés avec des brindilles dedans ses mèches.

Son arrivée inattendue change l'atmosphère radicalement. Elle avance et ses bras croisés contre sa poitrine lui donnent une allure sévère. Elle fixe froidement Lyam, ce dernier soupire discrètement et il ferme le livre avant de se lever.

Avant de partir, il prend délicatement ma main pour déposer un baiser sur celle-ci. Ses yeux se voilent d'inquiétude par rapport à ma blessure, il fouille dans une de ses poches pour en sortir un mouchoir qu'il vient mettre autour de ma main blessée avec délicatesse.

— Je vous remercie pour ce moment agréable. Si vous aviez besoin d'un traducteur, vous auriez où me trouver, murmure-t-il et il s'en va sans un regard à Cassie qui paraît furibonde contre lui ou peut-être moi. Je ne serais pas le dire.

Je caresse nonchalamment ma main sur laquelle je sens encore l'empreinte de ses lèvres si douces. Mes pensées m'éloignent du moment présent parce que je ne veux pas confronter Cassie en sachant que tôt au tard, je vais devoir y faire face.

Cette conversation va être un tournant pour notre soi-disant amitié, les mots dits ne peuvent pas être oubliés et même avec les excuses, des fois les blessures ne risquent pas de cicatriser.
Je ne suis pas sûr de pouvoir lui pardonner cette fois-ci.

Nos regards si différents et remplis d'émotions se soutiennent longuement, aucune de nous deux ne bouge et le silence s'installe, pesant sur nos cœurs qu'ils s'alourdissent au fur et à mesure que le temps s'écoule. Je me lève parce que, bien qu'on soit différents, ça n'empêche pas que je la connais par cœur et je sais qu'elle ne va pas s'excuser.

Encore moins reconnaître ses fautes, légèrement déçu par son comportement, c'est silencieusement que je passe à ses côtés sans un regard pour elle.

— Tu comptes ne plus m'adresser la parole jusqu'à la fin du séjour ? Juste à cause d'une petite conversation de ragots ? Oh Éléonore, s'il te plaît, ne soit pas si susceptible.

Mon sang bouillonne dans mes veines à chaque mot qu'elle ose prononcer d'un ton nonchalant, presque agacé, même parce qu'à ses dires, apparemment, j'ai un comportement d'enfant. Je me retourne vers elle, pour une fois, c'est vraiment la colère qui me domine envers elle.

— Pour toi, c'est normal alors cette conversation ? Au fond, ç'a dû te plaire de me rabaisser et de me mettre plus bas que terre pour savourer les éloges à ton égard, Cassie ! Quand vas-tu comprendre que ton comportement est blessant ? Est-ce que tu aurais aimé que je te fasse ça ? Demandai-je d'une voix fatiguée, en sachant déjà quelle réaction elle va avoir, parce qu'elle ne va jamais admettre ses erreurs ; elle est bien trop fière pour ça, même si elle a ses torts. On s'observe longuement sans oser s'avancer vers l'une et l'autre, sûrement, car on sait que les choses peuvent se dégénérer avec notre fort caractère.

— Éléonore, écoute-moi, murmure-t-elle en faisant quelques pas pour se rapprocher, mais d'un geste de la main, je l'arrête puisque sa présence m'est insupportable.

— Non, je ne pense pas qu'avoir une conversation là maintenant va nous aider à arranger les choses, j'ai besoin d'être seule et loin de toi, puis tu dois avoir marre de moi, que je te colle comme un pauvre toutou, aujourd'hui, il faut mieux qu'on se sépare, murmurai-je, accablé par la situation, parce que ça me fait du mal de la rejeter comme cela, mais il faut qu'elle comprenne que cette fois-ci, elle est allée trop loin.

Je pars sans m'attarder davantage par crainte de ne plus pouvoir contrôler toutes mes émotions intenses et, avec une grosse fatigue qui pèse sur mes épaules, je décide de retourner au manoir pour me réfugier dans ma chambre.

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