46. Narashim
À chaque clé correspond une serrure. Telle est la vérité. – Journal intime du premier Aar'on –
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Narashim. La planète capitale du système Solissacar faisait quatre fois la taille d'Horus. L'astre surpeuplée était le symbole d'une civilisation ultradéveloppée. Tel était le royaume des Avs. À côté de sa voisine Vâmana, plus petite planète tellurique de la Fédération, Narashim ressemblait à un ogre. Toutes sortes d'Âminêtres, d'Âminaux et d'animaux y vivaient. Kili'an la connaissait principalement pour ses tours semblant toucher le ciel et ses magasins où il pouvait dépenser tout son solde à chacun de ses passages. Il ne s'en privait jamais.
Mais si Narashim était connu dans tout Vojolakta, ce n'était pas seulement pour son essor économique, ses musées, son art raffiné, sa gastronomie, ses ressources naturelles, ses paysages idylliques et son système politique démocratique. Non, ce n'étaient là que de légers détails à côté de sa base militaire, la plus imposante de toute la Fédération. Un continent complet était réservé aux diverses installations et armements. Plusieurs instances d'envergures y siégeaient. Une partie du commandement, dont le reste était partagé entre Horus et Thor, y résidait.
Alliés depuis le cinquième Aar'on, l'Âminateur, les Humains et les Avs avaient partagé leurs savoirs et technologies dans toutes les guerres. Celle contre les Kémèts d'abord, puis contre le pacte Ashtars–Ztékojs. L'amitié entre ces deux peuples était le ciment de la Fédération et la preuve qu'une construction politique et pacifique était possible.
Surtout, il était dans l'intérêt des Aar'ons de se faire des potes pour taper sur les méchants. Avec leur peau foncée, les multiples bras, jambes et orifices et leur sexualité particulièrement déviante, les Avs avaient le profil parfait des bons copains de soirées, du genre de ceux avec qui on pouvait sans peine finir la nuit. Leur seul défaut physique résidait sur le point rouge fluorescent qu'ils avaient sur le front et qui était la source de leur regard. Cette petite particularité avait tendance à briller dans le noir, ce qui n'était pas forcément très pratique pour dormir à côté.
Kili'an aimait vraiment Narashim et ses habitants. Son seul regret était de ne pas pouvoir si rendre plus souvent au cours de ses missions qui le conduisaient souvent vers des terres bien plus sauvages. Mais quand l'occasion se présentait de fêter une grandiose victoire avec tous ses amis, il était toujours le premier partant. Surtout que là, il avait été donné congé à toutes les troupes en attendant que l'Aar'on décide de son prochain mouvement. La seule obligation des militaires ? Rester sur Narashim pour pouvoir rejoindre la base au premier signal.
Forcément, Kili'an demanda à visiter le plus grand bordel actuel de tout l'univers. Son statut particulier lui en avait toujours interdit l'accès. Là, s'il pouvait en profiter tous frais payés par la Fédération avec une autorisation expresse de se faire plaisir de la part de son maître, il n'allait pas se faire prier. Après une longue hésitation, Le Légitime avait accepté de fermer les yeux et d'offrir ce cadeau charnel à son bien aimé au titre de ses nombreux services rendus les armes à la main. Forcément, ce droit étant donné à tous les soldats victorieux et survivant des batailles les plus sanglantes, il s'avérait compliqué de ne pas l'accorder au plus héroïque de tous. Et puis, le brun ne pouvait rien refuser à son petit filou dès que ce dernier se mettait à argumenter avec sa langue.
La seule erreur de Kili'an avait été d'omettre de préciser à l'accueil qu'il venait en tant que client et non pas en tant que marchandise. C'était sûr qu'avec son derrière pur, parfait, angélique et éthéré, il y avait de quoi se méprendre. En plus, avec toute l'armée qui souhaitait se vider les bourses avant de repartir au combat, les tenanciers ne pouvaient pas se permettre de refuser un peu de main-d'œuvre gratuite en plus. Après une seule journée de travail – la planète Narashim mettait tout de même plusieurs centaines d'heures à faire le tour d'elle-même, ce qui représentait des horaires assez éreintants pour un simple Humain –, le jeune blond s'enfuit des lieux en braillant et en rampant à quatre pattes :
– C'est pas juuuuuuuuuuuuuuuuuuste ! En plus, l'Aa'chouchou avait dit que je n'avais le droit qu'à un seul coup, et là, j'ai la moitié de l'armée qui m'est passé dessus. J'vais encore me faire punir !
– Geeeeeeeb ! – confirma, souriant, son meilleur lieutenant.
À cheval sur le dos de l'adolescent, Gabri'el avait profité du calme ayant suivi sa victoire contre Clé'a pour revêtir sa forme Chérubine. Avec sa taille enfantine et son air trognon, il faisait un merveilleux cavalier sur la plus belle de toutes les montures en s'éloignant vers le soleil couchant à coups de cravache.
Une grosse fessée plus tard, Kili'an fut condamné à rester nu à genoux au coin les mains derrière le crâne et une pancarte « je suis beaucoup trop désirable et c'est pas bien » dans le dos. Bougon, il accepta tout de même son sort. Par rapport à la faute, la punition était particulièrement clémente. Il fallait aussi avouer qu'à lui seul, il avait remonté le moral des troupes mieux que quiconque dans l'histoire. C'était un peu le miracle blond.
Au dernier étage du Q.G de Narashim, – une petite tour de quelques milliers de mètres de haut – se tint une réunion stratégique. L'Aar'on et le conseil des douze réorganisé siégeaient autour d'une table et décidaient, ensemble, de la suite des événements. La priorité était de remplacer les généraux et hauts gradés morts au combat ou renvoyés pour insuffisance professionnelle. Pour la dix-huitième fois de l'histoire, la direction de l'état-major des armées fut confiée à un Av. Pour la première fois, par contre, ce fut un Âminal qui fut élevé au titre prestigieux et recherché de grand Khass-Kouil, un honneur que Jéro'èm accepta la main sur le cœur. Avec tout ce que le soldat avait fait sur Tlaloc, cette nomination semblait tout à fait justifiée. C'était aussi un signe politique fort envoyé en ces temps troublés à tous ceux qui osaient critiquer l'Aar'on.
Suite à cette nomination, toute la team Kili'an fut invitée à participer aux délibérations, à l'exception bien sûr du capitaine de l'équipe, consigné dans son coin. Enfin, cela n'empêcha pas le beau blond de profiter d'un moment d'inattention pour se nicher amoureusement aux pieds de son brun, où il put écouter d'une oreille attentive l'audition de son cher ami Gabri'el.
Revenu d'entre les morts pour vaincre Clé'a, il tenait à faire toute la lumière sur ses origines et surtout sa survie. Si l'Aar'on connaissait déjà la vérité, il la devait aussi aux autres, à commencer par un certain adolescent aux yeux verts. En plus, cela lui donnait à présent une parfaite occasion de briller. Sa révélation figea tous les présents.
– Les artistes sont immortels !
Sidéré, Kili'an jaillit de dessus la table après s'être cogné trois fois le crâne. Puis, pointant du doigt l'Humain aux yeux bleus, il l'interrogea.
– Attends... Ce... C'est ça ta punchline que tu voulais pas sortir sur Tlaloc ? Mais c'est complètement nul ! J'm'attendais à un truc trop badass moi ! Putain, déception quoi !
L'air un peu gêné, son interlocuteur se gratouilla la tête. Ce n'était pas qu'une simple punchline. C'était aussi la vérité. L'heure de sa confession était arrivée
– Nan mais c'est vrai, j'te jure, j'le suis vraiment ! J'suis le Gabri'el originel ! Plusieurs centaines d'années au compteur et toujours ma peau de bébé. C'est moi qui ai dessiné la couverture du journal intime du premier Aar'on que tu avais vu sur Siddhart, il me l'a offert en gage d'amitié avant d'ailleurs roupiller pour l'éternité avec ta première version. D'ailleurs, pour info, mon prénom, c'est Gabriel, sans cette stupide apostrophe au milieu. Ça, c'est encore une de ses idées à la con !
Alors que le Légitime soufflait en essayant de se faire se rasseoir par terre son Kili'an, ce dernier resta immobile, la langue pendue. Il avait des milliers de question à poser à son camarade aux multiples secrets. Une principalement, qui faisait appel à son sens critique, lui brulait les lèvres :
– Mais, dans ce cas-là, tu devrais être super vieux, non ?
– Mhhh... – hésita le concerné en se frottant le menton. Bah nan. Il se trouve que je suis un éternel gamin, pas ma faute !
– T'as toujours réponse à tout comme ça ?
– Ça va, j'me débrouille !
Retombant sur le sol, Kili'an entendit ses fesses claquer contre le carrelage. Même dans ce monde de fous, cette révélation semblait complètement invraisemblable. Le sourire du châtain trahissait pourtant sa sincérité. Son soupir portait des paroles de vérité. La main délicatement posée sur la joue du blond, il lui révéla tout :
– Ne me crois pas si tu ne veux pas, mais à la différence de toi et de ton maître je ne me suis jamais réincarné. Un blond et un brun s'aimant avec un châtain pour les guider... C'est la sainte trinité Vojolaktienne. Sauf que moi, durant vingt-sept générations, je suis resté le même. C'est pour ça que, lors de notre première rencontre, je t'ai dit être originaire de Canaan. J'y suis né à une époque où cette planète s'appelait encore la Terre. Le premier Aar'on était un camarade de classe doublé d'un de mes meilleurs amis. Après la première Résonance, il a fait le choix de s'endormir, j'ai fait celui de rester éveillé en lui promettant de toujours veiller sur son Kili'an à chacune de ses renaissances. C'était notre pacte. Ton modèle était adorable ! Quand je n'étais qu'un simple Humain, j'aimais le dessiner, il s'offrait naturellement à ma plume et à mes pinceaux... Il était magnifique, impudique et boudeur. Je l'adorais, je l'aimais, même, d'un amour chaste et sincère. Tu es son portrait caché ! Bien sûr, tous les Kili'an lui ressemblaient, réincarnation oblige, mais toi... c'est du cent pour cent copie conforme !
Hagard, le blond se laissa aller à quelques larmes. L'homme qui se tenait devant lui le connaissait sans doute mieux que lui-même. C'était perturbant, et cela ne correspondait même pas à ses livres d'histoire. Si un être aussi puissant existait depuis aussi longtemps, pourquoi avait-il laissé se dérouler tant de guerre ? Pourquoi ce menteur n'avait-il pas soutenu chaque Kili'an et Aar'on comme il l'avait promis ? Lisant dans ses pensées, Gabri'el plaqua ses lèvres sur ses joues humides, puis lui répondit :
– Une certaine lassitude m'a rapidement enveloppé. Le Kili'an que j'aimais était scellé et j'ai toujours eu du mal à m'attacher à ses copies. Même si j'en ai adoré certaines. Et puis, c'était surtout les Aar'on qui me faisaient chier. Quand ils étaient trop casse-couilles, je les laissais se démerder, j'm'en foutais qu'ils ne trouvent pas leur Kilian, et c'est arrivé assez souvent, n'empêche. Tant pis pour leur gueule, ils n'avaient qu'à être aimables. Mais j'ai eu des rapports très forts avec certains, et ce furent même eux les plus grands de l'histoire. Quand le sixième a été exécuté avec toute sa famille, c'est moi qui ait sauvé son successeur, encore bébé, et qui l'ait élevé en secret. Faut dire que j'avais bien merdé avec le dernier en date, mais j'ai adoré jouer les nourrices. Ce brun était adorable. Ensemble, on a cherché son Kili'an, il avait un de ces derrière ! Même moi j'me suis fait plaisir avec mon pinceau ! Par contre, qu'est-ce qu'il était chiant ! Un affamé ! S'il n'avait pas sa dose matin, midi et soir, il devenait insupportable. Le pauvre septième, tout pudique comme il était contrairement à la rumeur, il ne voulait pas être gâté en public, ça le gênait ! Enfin, c'est quand même cette gourmandise qui nous a permis de gagner la guerre...
Cette fois-ci, le jeune soldat aux yeux verts et toute l'assistance affichèrent leur sidération sur leur visage. C'était un mythe qui venait de s'effondrer. Timidement, il demanda s'il y avait d'autres anecdotes dans le genre. Ce que Gabri'el confirma immédiatement en hochant vigoureusement la tête.
– Le vingt-et-unième ! J'étais super pote avec lui, même s'il était un peu violent et cruel. Mais super sympa à table, un gros déconneur. Du coup, j'lui ai montré comment bien monter son Kili'an, on s'est vraiment éclatés. Quand il a appliqué toutes mes astuces d'un coup, ça a fait une putain de Résonance, j'avais pas vu ça depuis le premier ! Out le Bottel'ron, rayé de la carte ! Ah nan, mais faut pas croire hein, en plusieurs centaines d'années, j'ai eu le temps de m'amuser...
Prise d'un boute, la bête apeurée bégaya. Et lui, dans tout ça ?
– Du du du... du coup, i... il t'a dit quoi, le mien, d'Aar'on, pour que tu acceptes de te battre avec nous ?
– Oh, rien de spécial – avoua le châtain. Il m'a fait un peu de chantage après que tu sois venu me chercher, comme quoi j'avais juré à son ancêtre et tout. Puis on a discuté Business ! Il m'a promis de me céder à la fin de la guerre vingt pour cent de sa holding « Kili'an and ass » qui détient cent pour cent de ta personne ! Attends, une vraie bonne affaire, j'vais pouvoir dessiner ton cul autant que j'en ai envie ! Non, mais il a su me prendre par les sentiments, il savait que j'adorais ça avec le premier, et t'es son portrait craché ! J'pouvais pas refuser. Par contre, là où il a été énervant, c'était en me le rappelant à chaque fois que j'avais un coup de mou. Mais en même temps, il avait raison. Ce genre d'argument, ça fait toujours mouche avec moi ! J'ai tellement hâte de pouvoir ressortir mes pinceaux !
Il ne fallait pas plus de confession au jeune blond pour lui donner envie de retourner bouder dans son coin. Là, il était vexé. Pour la peine, il allait même chouiner, tiens. Plus terre à terre, l'Aar'on poursuivit la discussion. Lui aussi avait certains points qu'il souhaitait voir éclaircis.
– Je voulais te demander, sérieusement cette fois-ci, comment as-tu survécu sur Spenta ? Clé'a avait tout fait sauter, tu avais complètement disparu des radars, on te croyait tous mort, même moi !
– Ça ? – s'amusa l'adolescent aux yeux bleus. Enfantin ! J'avais prévu le coup. On ne survit pas à autant de guerres que moi si on ne fait pas un minimum gaffe. Au moment de l'explosion, j'ai utilisé mon RP pour envoyer tous les êtres vivants au dernier endroit auxquels ils avaient pensé. Dans ce cas de figure, j'avais prévu mon propre point de chute, une planète nommée Limbo que j'avais créée pour ce genre d'occasions, dans un autre système non accessible par les Vorticos, histoire d'être bien pénard. Mais sur place, des Âminaux pas très sympas avaient fondé une colonie et ont profité que je sois évanouie pour parasiter mon système nerveux. Après t'avoir paralysée, ces saloperies te siphonnent les cerveaux neurone par neurone jusqu'à ce que tu crèves. Leur truc, c'est de foutre un bordel monstre dans ta mémoire pour que tu sois persuadé de vivre la réalité et que tu ne te réveilles jamais. T'es littéralement prisonnier de tes rêves. Il m'a fallu un peu de temps pour tout remettre en ordre, c'est pour ça que vous n'aviez aucune nouvelle, j'étais un peu dans les vapes. Ensuite, j'ai pensé qu'il était préférable de faire croire à Clé'a que j'étais bien mort, histoire de pouvoir frapper par surprise. Désolé. D'ailleurs, en parlant d'elle et de son frère, si vous pouviez les faire venir, j'ai encore quelque chose à vous dire, et cela les concerne aussi...
Sans discuter, l'Aar'on ordonna à ses soldats d'aller chercher les prisonniers dans leur cachot. Après la bataille de Tlaloc, Clé'a avait admis sa défaite, en échange de quoi Gabri'el avait demandé à ce qu'elle reçoive les meilleurs soins et qu'on remplace ses bras arrachés par un exosquelette. De son côté, Clé'o s'était rendu de lui-même sans opposer la moindre résistance. Emprisonnés, les deux Ztékojs avaient acceptés de coopérer. Dès la fin de la bataille, le Bottel'ron avait exigé qu'on lui rende les deux otages, non pas pour les libérer, mais pour les exécuter lui-même après leur avoir longuement fait payer leurs trahisons respectives. Ils n'avaient dès lors plus aucune raison de le soutenir et de le suivre.
Une fois tout le monde réunit au dernier étage de la grande tour, Gabri'el prit son inspiration, puis posa ses deux mains sur la table. Sur cette dernière était posée un étrange ouvrage que tous connaissaient bien. L'heure de la toute dernière révélation avait sonnée.
– Ce secret, je ne l'ai révélé qu'à quelques Aar'on dans l'histoire, ceux qui le méritaient le plus. Je le tiens du tout premier, et il vous concerne tous. Lui-même a pleuré des litres et des litres de larmes avant de le comprendre et de l'accepter. Je crois que Clé'o et Clé'a ont déjà compris la vérité. Mais toi, Kili'an... Tu penses être comme eux une clé. Mais sais-tu vraiment ce que c'est, une clé ?
Levant inutilement la main en l'air pour qu'on ne lui pique pas la parole, le jeune blond répondit :
– La clé est ce qui permet la Résonance en déverrouillant les pouvoirs des gens spéciaux comme l'Aar'on ! Les clés, en s'offrant à eux, leur permet de réaliser des miracles !
– En effet, c'est presque là la définition d'une clé – répondit très sérieusement le châtain. Libérer le pouvoir d'un autre via une intense stimulation sexuelle et réaliser des miracles. Dans le cadre du plan de Clé'a sur Hécalt, l'autre était la lune et son pouvoir, toute l'énergie emmagasinée pendant la fornication des Ztékojs. Maintenant, avec tout cela en tête, explique-moi comment elle et toi avez pu avoir une Résonance ensemble, si vous êtes tous les deux des clés ? Il n'y a pas quelque chose qui te semble étrange ?
– Beh... euh.... – bredouilla le blond. Euh... En effet, c'est pas logique... Mais bon, pas moins qu'un artiste qui a plusieurs centaines d'années dans les pattes... Enfin, j'sais pas moi, p'têt que deux clés ensemble, ça marche aussi !
– Alors pourquoi n'a-t-elle jamais essayé de réaliser ce rituel avec son frère ?
– MAIS JE SAIS PAS ! T'es chiant avec toutes tes questions ! Tu crois que c'est le genre de choses auxquelles je réfléchis quand je suis à quatre pattes ?
Un sourire aux lèvres, Gabri'el retint un ricanement. Voir le jeune blond s'énerver était toujours aussi amusant.
– La vérité, Kili'an, c'est que tu n'es pas une clé, tout simplement. Tu penses en être une, mais tu es bien plus. Dans le couple que tu formes avec l'Aar'on, la clé, c'est lui !
– QUOI ? – hurlèrent de manière synchrone les deux concernés, avant de se dévisager.
– En effet. L'Aar'on est la clé. Celui qui possède le pouvoir de la Résonance en lui, c'est et cela a toujours été son Kili'an. En gros, si tu veux, t'es la serrure. Et quand on met la clé dans la serrure, pouf, ça fait une Résonance. C'est marqué, là, dans le journal intime du premier, regarde : « À chaque clé correspond une serrure. Telle est la vérité. ». Quand l'Aar'on enfile sa clé dans ta serrure de derrière, bah voilà, t'as besoin d'un dessin ou tu comprends ? Mais c'est bien toi qui a le pouvoir de réaliser des miracles et d'ouvrir Nigatruo, même si, en te dirigeant, c'est l'Aar'on qui garde le contrôle. De même, quand Clé'a t'a forcé, elle a pénétré ton âme, ce qui t'a fait réagir, c'est le même mécanisme. D'ailleurs, pour rétablir une certaine vérité, c'est le premier Kili'an qui est à l'origine de la première Résonance, du Regard et des Vorticos. Son homme n'a fait que lui donner son amour pour éveiller ce pouvoir, mais tout partait bien du blond. Après, pour des raisons politiques, tu comprendras très bien pourquoi les premiers descendants de la lignée brune ont gardé ça secret. Parce qu'un blond maître de l'univers, ça aurait été vachement chelou. C'est pour cela, aussi, qu'une Résonance totale n'est possible qu'entre un Aar'on prêt à tout donner et un Kili'an prêt à tout recevoir.
Complètement immobile, le jeune blond laissa un étrange son s'échapper de sa bouche, de type « nnnnnnnnnnnnnnnnnnn », preuve qu'il avait définitivement bugué. De son côté, le brun reprenait son souffle. Tout cela était surprenant, mais pas illogique. Cela expliquait même beaucoup de choses.
– Si j'ai bien compris, sans lui, je ne suis rien et n'ai aucun pouvoir ? Et quand cela ne fonctionne pas entre nous, ce n'est pas sa faute, c'est parce que je suis incapable de le déverrouiller ?
– Tout à fait. En gros, sans vouloir être méchant, sans ton Kili'an, tu n'es rien d'autre qu'une bite. Grosse, hein, mais parfaitement inutile. Si tu n'es pas rempli d'amour ou d'un véritable but comme pouvait l'être Clé'a quand elle l'a agressé, alors ça revient à tourner la clé dans le vide. Pour que la connexion se fasse, il faut que l'Aar'on accepte ses sentiments envers son petit blond, s'abandonne et lui donne tout. Voilà le secret d'une Résonance bien réussie ! Et voilà sans doute pourquoi vous n'arriviez plus à en avoir. Pas assez d'amour et d'affection de ta part, c'est ultra bloquant un truc comme ça. Non, parce que même si son cerveau ne percute pas, son corps, lui, il les ressent, ces choses-là...
– Attends... – le coupa Kili'an en un sursaut. J'ai un contre-exemple qui démonte tout ce que tu dis. Pour ouvrir le passage menant à Canaan, on a eu une Résonance inversée ! Donc suivant ta logique, j'ai joué le rôle de la clé.
– Naaaaaaaaaaan – grogna méchamment Gabri'el, pas très content qu'on remette en cause ses explications. Là, tu l'as juste enculé, en fait. Mais ça lui a fait du bien, hein ! Ça lui a redonné un coup de peps et il a pu ouvrir le Vortico scellé, mais c'est tout. Ça, c'est un truc classique de son RP Vortication, contrôler les Vorticos déjà existants. C'est pour en créer des nouveaux qu'il faut une Résonance.
– Mais... – gémit le pauvre blond, écrasé par le poids immense de cette vérité. Et avec Camill ?
– Bah lui, il a simplement joué son rôle. Des fois, quand la clé est un peu rouillée et rentre mal dans la serrure, c'est bien d'utiliser un peu d'huile. C'est le rôle du Synchrotron. Bon, ça fonctionne plutôt comme un ondulateur, mais c'est exactement ça. Il prend le coup de jus, il le stock et il te le rebalance à la bonne fréquence. Nan mais cherche pas, hein, j'étais avec le premier Aar'on quand il a théorisé le truc, on en a discuté pendant deux heures un midi. D'ailleurs, ce jour-là, il était d'un chiant, il n'arrêtait pas de parler de son couple et de son petit niais en sucre... L'amour rend vraiment con, j'vous jure...
Cette fois-ci, Kili'an se retrouva à court d'arguments. Il n'y avait rien d'autre à dire, jusqu'à subir. À ses côtés, les yeux à demi clos, son brun semblait tout autant pensif qui lui. Cela changeait tout et en même temps, cela ne changeait rien. Pour éviter une trop longue guerre qui ferait des milliards d'innocents, il fallait vaincre le roi des Ashtars. Seul eux deux pouvaient le faire. Alors que Gabri'el s'était tu en gardant pour lui les ultimes vérités de son monde, Clé'a avait pris la parole. Puisque son rêve ne pourrait pas se réaliser, alors elle ferait le nécessaire pour remettre les choses en état. Elle savait où se situait la cachette du Bottel'ron. Elle pouvait les guider.
La dernière bataille se profilait.
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