~ TЯOISIΣMΣ PΛЯTIΣ


Mes amis m'avaient tous abandonné un par un, lorsque j'avais découvert la maladie. Parce que tu comprends, j'ai beaucoup de devoirs, on m'a confisqué mon téléphone. Je n'avais pas protesté. J'aurais fait la même chose à leur place. Ethan était pareil. Sa tumeur était apparue il y a trois semaines, lors d'un scanner de sécurité. Il venait de faire une chute à vélo, et comme il s'était évanoui sous le choc, il avait fallu vérifier. Résultat : tumeur au cerveau. On lui a dit qu'il serait avec une fille de son âge. Quand je le regardais, j'avais l'impression de me regarder dans un miroir. Il avait la rage. Il voulait vivre. Il voulait que tout soit comme avant. Mais il faisait mine que tout allait bien, il rigolait avec les infirmières, discutait avec les autres patients. Je lui demandai :

- Tu as des frères et soeurs ?

- Oui, un grand frère. Mais on ne se voit plus, me répondit-il sombrement.

- Pourquoi ?

- Il s'est brouillé avec mes parents quand il avait 20 ans. Ils ne voulaient pas le voir se marier avec Elizabeth. Elle était fermière, et mon frère ingénieur. Ma mère disait que leur couple ne tiendrait pas un an. Elle avait tort. Ça fait huit ans qu'ils sont ensemble.

-  Oh, je... je suis désolée, je ne savais pas...

- Pas grave, me coupa-t-il en souriant. Et toi ?

- Je baissai les yeux :

- Une petite soeur. Mais elle est en colère contre moi.

- Qu'est-ce qui s'est passé ?

- Quand j'avais quatorze ans, j'ai commencé à fumer. Capucine le savait, et elle haïssait la cigarette. Je lui avais dit que tout irait bien, que je ne finirais pas comme notre grand-père, mort d'un cancer du poumon. Elle m'a crue, et je suis tombée malade deux ans plus tard. Ma mère ne le sait pas, elle croit qu'elle ne veut pas me voir juste parce qu'elle n'aime pas les hôpitaux. Elle va essayer de la convaincre de venir me voir dans le parc juste en face.

- Oh, j'espère que ça va s'arranger. Parce que bon, appelons un chat un chat, notre temps est peut-être compté.

- Non ! Je veux vivre, je veux savoir ce que c'est d'avoir des enfants, des petits-enfants, des arrières-petits-enfants ! Je veux connaître l'amour et l'amitié, je veux pouvoir me dire que j'ai réussi ma vie ! Je ne veux pas mourir. Je ne vais pas mourir, m'emportai-je.

- Je sais, mais n'empêche que, soupira-t-il.

- Mon téléphone émit un petit bip, m'indiquant un message. Je bondis dessus, espérant que ce soit ma mère. C'était bien elle :

« Capucine a refusé le parc pour ce soir. Désolée. Bisous et mange bien ta portion en entier. »

Je donnai un coup de poing contre le chambranle du lit, déçue. Ethan s'approcha doucement de moi, s'assit sur le lit et me coucha, la tête sur ses genoux. Il me massa les tempes, ne me demandant pas ce qu'il y a. Je finis par me rendormir, ne me réveillant que lorsque Marie entra pour apporter nos repas. Elle nous retrouva affalés l'un sur l'autre, endormis. Elle sourit et s'exclama :

- Debout les marmottes ! A table !

On se réveilla en sursaut, et, découvrant notre position, nous nous écartâmes aussitôt, moi rouge de honte et Ethan amusé. Je me rappelai ma promesse de ne pas tomber amoureuse de lui et toussotai afin de me changer les idées, qui commençaient à se tourner vers des scènes pas très catholiques.

Je mangeai en silence, en regardant la fenêtre, ou plutôt la lucarne. Ethan lâcha :

- Ce serait bien d'être comme ces oiseaux.

Je tournai la tête vers lui et souris :

- Qu'est-ce que tu veux dire ?

- Se préoccuper seulement de manger et voler librement sans se poser de questions...

Je ris doucement :

- Quand j'étais petite, j'avais dit à ma mère « Tu sais Maman, j'aimerais être un oiseau. Comme ça, je pourrai toucher le ciel et sentir le soleil sur mes ailes. » Elle avait trouvé ma phrase très poétique et l'avait notée sur un papier. Il est toujours affiché sur son bureau, dans un petit coin.

- Moi aussi, j'ai une histoire comme ça, commença-t-il à raconter de sa voix mélodieuse, j'étais tout petit, mais mon père m'apprenait déjà à diriger un cerf-volant. Je lui avais dit que j'aimerais bien être à la place du cerf-volant. Il m'avait répondu : « Un jour, je te construirai un cerf-volant assez grand et solide pour te porter, et je te ferai voler. » J'y ai cru pendant très longtemps, jusqu'à ce que mon père meures dans un accident de voiture. Puis, j'ai grandi. Quand j'ai repensé à ce moment, je me suis dit que j'avais changé d'avis : je voulais avoir des ailes, et pas être enchaîné à la terre par une corde.

- C'est une très belle histoire, acquiesçai-je.

Je continuai :

- Je sais où je vais t'emmener cette nuit.

- Où ?

- C'est une surprise !

Il éclata de rire et me prit la main. Je la retirai immédiatement, et il me regarda, surpris. Je détournai le regard. Il haussa les épaules et passa vite à autre chose. Il se cala sur son lit, et se connecta à Internet depuis son iPad. Je l'admirai discrètement : ses yeux, à cause du reflet de la lumière de son appareil, brillaient fort, comme les étoiles depuis le toit. J'allai l'emmener là, où on pouvait voir le ciel bien mieux que ce qu'on pourrait croire. J'essaierai de lui montrer les constellations que mon père m'avait appris à repérer, avant qu'ils ne divorcent. Nous avions tous les deux besoin de nous échapper... 

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Merci d'avoir lu !

Bye ^^

• Chanson : Someone like you, Adele

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