Lise

Histoire certifiée 100% vraie : c'est la mienne ! (mais romancée quand même, hein)

Y a-t-il quelque chose de pire que d'être ignorée par sa meilleure amie ?

Oui, sans doute. Se sentir coupable parce qu'on est la cause même de ce comportement, par exemple.

Je voudrais tant qu'il soit possible d'annuler des actions de sa vie comme l'on efface les mots d'une histoire pour en changer le cours. J'aimerai tant pouvoir faire un ctrl+Z dans ma propre histoire. Revenir dans le passé et changer mes actions.

Au-dessus des vieux volcans

Glissent des ailes sous le tapis du vent

Mes pensées seraient des ailes qui survoleraient le monde sans pourtant y apporter le moindre changement, le moindre malheur. Je me contenterais d'être spectatrice de ma vie, car en être l'actrice principale est bien trop difficile. Je ne sème que le malheur autour de moi.

Voyage, voyage

Éternellement.

Oui... Voilà qui est une bonne idée. Ne plus agir, et ainsi ne plus causer le mal nulle part. Ou alors partir, tout simplement. Voyager tout autour du monde, voir toutes les beautés qu'il rengorge. Et ne plus revenir, pour ne plus voir le visage de ceux que j'aimais.

– Lise ?

Mais évidemment, c'est impossible. On ne change pas sa vie en un claquement de doigts. Tout comme on ne change pas une personne par la seule force de sa volonté. C'est ainsi, c'est une règle de l'Univers. Inviolable.

– Lise !

– Qu'est-ce qu'il y a ?

– La cantine doit être ouverte, à cette heure-ci !

Ah oui, c'est vrai.

De nuages en marécages

De vent d'Espagne en pluie d'Équateur

Ce qui m'étonne toujours, c'est que la Terre continue de tourner, le temps de passer et les gens de vivre malgré tout le malheur et la misère du monde. La souffrance qui brise mon cœur est si faible, si négligeable par rapport au reste. Je pourrais ne pas exister, ça ne changerait rien.

Voyage, voyage

Vole dans les hauteurs

Si seulement... Si seulement je pouvais m'envoler. M'envoler au-dessus de tout ça, de tous les problèmes et de tous les malheurs qui m'arrivent. Si je pouvais déployer de grandes ailes d'argent qui seraient attachées dans mon dos et m'envoler au loin, si loin que personne ne me retrouverait.

Le temps passe – le temps passera toujours – et la souffrance, elle, reste. Elle est là, comme un parasite infect accroché à mes chairs, se nourrissant de mon sang, de mes forces, de mon essence. Et la souffrance est mêlée à une autre chose, pire encore si c'est possible : la culpabilité.

Au-dessus des capitales

Des idées fatales

Ce que j'ai fait est impardonnable. Mais en même temps, j'essaie de ne pas trop m'en vouloir, car depuis que je l'ai fait, je me sens plus légère. Comme... libérée. Libérée d'un fardeau qui pesait sur mes épaules depuis trop longtemps, d'un poids que j'étais la seule à sentir et qui, chaque jour, s'alourdissait un peu plus.

On m'a dit que je me faisais des idées. Mais alors pourquoi est-ce que maintenant, je me sens libre ? Libre de pensées, est-ce que ça veut dire quelque chose ? Moi, j'ai l'impression que je ne me faisais pas que des idées. Que ce que je percevais dans son comportement, je ne l'inventais pas. J'étais juste la seule à le voir.

Regarde l'océan

Je lui ai écrit. Je lui ai écrit une lettre où je lui balançait ses quatre vérités à la figure. Évidemment qu'elle m'en veut, qu'elle a le cœur brisé, qu'elle se remet en question. Évidemment. Qu'est-ce que je m'imaginais ?

J'ai bien compris que la voie écrite n'était pas la bonne solution. Je l'ai simplement compris trop tard, quand le mal était fait.

Voyage, voyage

Plus loin que la nuit et le jour

Voyage

Dans l'espace inouï de l'amour

L'amour – le sien –, je l'ai perdu. Et il y a peu de chances que je le retrouve un jour. Mais le fait est que nous vivons dans le même lycée, que nous sommes dans la même classe. J'aurais préféré qu'il en soit autrement, car je n'aurais pas eu à subir ce que je subis. La voir. Chaque jour. Faire comme si elle n'était pas là. Car pour elle je n'existe plus. Ne plus lui parler. L'éviter.

L'éviter pour éviter la souffrance qui l'accompagne et se jette sur moi comme un animal affamé quand je passe trop près.

Sur l'eau sacrée d'un fleuve indien

Voyage

Et jamais ne revient

Je comprends qu'elle aussi veuille voir d'autres horizons que celui où je suis. Je comprends qu'elle veuille du temps pour assimiler. Mais pendant ce temps, je souffre. De tout mon cœur, de toute mon âme. Je souffre. Elle ne reviendra probablement jamais de ce voyage destiné à nous éloigner.


Sur le Gange ou l'Amazone

Chez les Blacks, chez les Sikhs, chez les Jaunes

Où que j'aille son souvenir me hantera. Où qu'elle aille mon souvenir la hantera.

Ce qui est lié ne peut être défait, du moins pas de cette manière là.

Alors il ne reste qu'une chose à faire, n'est-ce pas ? Que l'une de nous fasse un voyage dont elle est sûre de ne jamais revenir. Un voyage qui lui promettra la paix éternelle, une vie douce et sans souvenirs.

Voyage, voyage

Dans tout le royaume

Ce matin encore, je l'ai vue. Et j'ai tenté de m'excuser. Mais elle n'a rien voulu entendre, et sans doute ne me voyait-elle même pas. C'est celui qui prend les billets qui paye. C'est celui qui déclenche les choses qui doit les terminer. C'est celui qui s'exprime qui doit mourir.

C'est moi.

Sur les dunes du Sahara

Des Îles Fidji au Fudjiyama

Mon esprit, une fois libéré de sa culpabilité et de sa douleur, s'envolera et fera le tout du globe. Je planerai au-dessus de toutes les créatures qui souffrent de la vie et je pourrai rire, rire de ma liberté et de mon insouciance. Rire parce que je cesserai de semer la douleur dans mon sillage. Rire...

Pour l'instant c'est impossible. On ne rit pas avec un cœur qui saigne.

Voyage, voyage

Ne t'arrête pas

Voilà. C'est cela la solution.

Si je n'avais pas vu ce que j'ai vu. Si je n'avais pas écrit cette lettre. Si j'avais réfléchis avant de la lui donner. Si j'avais pensé que je lui ferai autant de mal. Si je m'étais dit que je signais par mes mots la fin de notre amitié.

Alors rien ne serait arrivé.

Mais l'on ne répare pas le mal à coups de "si". On pourrait aller loin, avec les "si".

Au-dessus des barbelés

Des cœurs bombardés

Alors voilà. C'est la fin. Pour l'instant, rien n'est faisable.

Mais demain, je ne serai plus.

Demain je volerai, libre, et je rirai, heureuse. Libérée des tourments de la vie, du malheur que peuvent causer des mots, de la peine et de la douleur. Libre de vivre dans la mort comme je l'entendrai, libre de me gorger de bonheur. J'ai hâte... Je sens déjà cette ivresse me monter à la tête en même temps qu'une lame me perforant je ne sais quel organe vital. Je sens d'ores et déjà sur ma peau le souffle d'une liberté nouvelle, l'air d'un autre monde caresser mes sens, les lumières de ce lieu ô combien espéré, les odeurs délicieuses de l'au-delà.

Oui, je sens tout cela, et je comprends que je ne regretterai rien. Car c'est le cours de la vie. C'est ainsi.

J'ai perdu une amie, la meilleure qui soit. J'ai perdu Anna, et la vie ne vaut plus d'être vécue sans elle. Alors j'y mettrai fin, et tout ira mieux.

J'ai été.

Je ne suis plus.

D'autres seront.

Regarde l'océan...

~ 1212 mots ~

Chanson : Voyage, voyage, de Desireless

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