Océane, 21 mai 2015
Roland Garros commence dans trois jours. Et, pour la première fois de ma carrière, je ne devrais pas passer par les qualifications. J'arrive également à Paris en ayant fait le plein de confiance à Madrid et Rome. Je suis parvenue à me hisser en quart de finale à chaque fois en simple et, encore mieux, avec Caroline Wozniacki, nous avons atteint les demi-finales à Madrid et la finale à Rome. Nous nous sommes donc inscrites en double également à Paris et je pense que nous pouvons aller très loin. Nous nous entendons très bien, nous nous éclatons sur le terrain et j'apprends beaucoup au contact de la joueuse danoise.
Cela s'est vu dans mes matchs en simple où je prends de plus en plus d'assurance. A Madrid, j'ai battu Ana Ivanovic pour la deuxième fois de l'année et je n'ai pas à rougir de ma défaite face à Serena Williams. A Rome, j'ai pris ma revanche sur Karolina Pliskova et surtout, je lui ai infligé un très sévère 6-0 dans le deuxième set. Je crois bien que je l'ai écœurée avec le nombre hallucinant d'aces que j'ai claqué.
Contrairement aux autres tournois, Roland Garros est le seul pendant lequel je ne loge pas à l'hôtel. Cette année, ce n'est pas de l'appartement de mes parents que je rejoindrai la Porte d'Auteuil mais bien de celui de Christopher. Cela ne m'empêche pas, cependant, de bénéficier du service de navettes pour les joueurs du tournoi. Mes parents ont tiqué au départ lorsque je leur ai indiqué mon choix mais, ensuite, ils ont bien compris que j'avais besoin de la présence de mon petit ami. Naturellement Lucas y est allé de sa petite blague en confiant à mon père, je le cite, qu'il veillerait à ce que je ne fasse pas des folies de mon corps chaque nuit.
Je ne vous dis pas ma tête, celle de Christopher et celle de mon père.
Heureusement, les journalistes semblent avoir déserté la rue où habite mon décathlonien. Il faut dire qu'avec l'arrivée des stars du circuit mondial de l'ATP et de la WTA, ils ont fort à faire. Et je ne vais pas m'en plaindre. Cependant, je sais que je ne couperais pas aux conférences de presse d'après match.
Aujourd'hui il y a de l'agitation car, à trois jours de l'ouverture du tournoi, c'est le media day. Naturellement, je ne suis pas assez connue pur y participer mais je constate que le nombre de journalistes est bien plus important que les jours précédents.
J'avoue que je ne suis pas vraiment les qualifications car je dois me concentrer sur ma préparation et éviter les questions de la presse britannique. Le Sun semble avoir assigné deux correspondants pour nous traquer Christopher et moi et cela commence à être pénible. Lorsque je m'entraîne sur les courts annexes, ils sont là. Lorsque j'arrive au stade ou que je le quitte, ils sont là. Caroline Wozniacki, avec qui je frappe la balle, m'aide à relativiser. Mais, à plusieurs reprises, je reconnais que j'ai été tentée de balancer ma raquette à la figure de ces deux anglais.
Cette année 2015 est différente à de nombreux points de vue : je ne suis plus une parfaite inconnue pour les fans qui suivent l'actualité tennistique et surtout, je suis en couple avec une star de l'athlétisme mondial. La présence de Caroline à mes côtés augmente également l'intérêt des médias à mon égard. Du côté des spectateurs, je dois dire que c'est Christopher qui a leur préférence pour les selfies mais je ne suis pas jalouse. J'avoue qu'en fait, je suis un peu perturbée par la perte de mon anonymat. Si mon petit ami, tout comme ma partenaire danoise, se soumet avec un certain naturel aux multiples demandes de photos et d'autographes, pour ma part, j'ai encore un peu de mal. Je ne suis pas une fille très expansive, je suis même assez timide. Alors, quand je vois plusieurs personnes s'approcher de moi, j'ai parfois un petit mouvement de recul.
Mais je peux toujours compter sur Christopher qui a très vite compris mon malaise. Il reste toujours à mes côtés, un bras passé autour de ma taille en un geste protecteur. C'est ainsi d'ailleurs que nous rejoignons le court numéro quatre, celui que nous pouvons utiliser pour notre session de deux heures d'entraînement. Caroline et moi nous déposons nos sacs sur les bancs et nous prenons une bouteille d'eau dans la grande glacière. Puis nous sortons nos affaires tout en regardant les tribunes face à nous. Les spectateurs, qui ont assisté à l'un ou l'autre match des qualifs, viennent à présent sur notre court. Ça ne me dérange pas, je commence à avoir l'habitude.
D'ailleurs, Caroline et moi nous nous amusons quelques instants à les observer. Puis, avec nos coachs respectifs nous discutons du programme du jour et nous débutons notre échauffement. De temps en temps, je jette un coup d'œil à Christopher et nous échangeons des sourires complices. Je ne vais pas me mentir, sa blessure a été, en quelque sorte, une bénédiction pour moi. Sans cela, il n'aurait pas été aussi présent à mes côtés.
Je commence à échanger quelques balles avec Caroline lorsque je remarque que mon petit ami se crispe. Je suis son regard et je constate que les deux crétins d'anglais viennent de faire leur apparition. Je tâche de me concentrer sur mon entraînement mais la présence des deux journalistes n'est décidément plus au goût de Christopher. Il se lève du banc où il était assis et il se précipite vers les gradins.
Pascal, Ryan et moi nous l'observons avec une certaine inquiétude. Mais très vite, je vois la tête des anglais changer du tout au tout et ils quittent précipitamment les lieux. Je ne sais pas pourquoi mais je sens qu'ils vont recevoir un appel de Jamie dans les prochaines minutes...
Le manager de mon décathlonien est sans doute la personne que j'apprécie le moins dans son entourage mais je dois reconnaître qu'il est très pro. Il a géré à la perfection les affaires de la sextape, de la fausse paternité de Christopher et de l'accident de Meghan Rowlan-Smith. Au final, il a réussi à redorer l'image de mon petit ami et certains journalistes commencent même à dénoncer l'acharnement dont il est la victime.
Le reste de mon entraînement se déroule dans une ambiance sereine et décontractée. Lorsque nous quittons le court, Caroline et moi nous nous signons plusieurs autographes et, avant de regagner les vestiaires, nous croisons Rafael Nadal entouré de tout son staff. Je soupire : qu'est-ce que j'aimerais pouvoir échanger quelques balles avec lui !
C'est LA légende de Roland Garros pour moi. Avec neuf victoires en dix ans à Paris, il est pratiquement ici chez lui. Il est aussi le champion olympique de Pékin. En 2014 il affiche un bilan de quarante-huit victoires pour onze matchs perdus. Et l'année précédente il avait réussi l'exploit de remporter les tournois de Barcelone, Madrid, Rome, et Roland Garros. Ici Porte d'Auteuil, il est le roi incontestable. C'est lui qui m'a fait aimer la terre battue, moi l'inconditionnelle du dur et du gazon.
Son jeu engagé m'a toujours impressionnée. Et, malgré son statut de légende du tennis, Rafa est reconnu par ses adversaires pour être un des joueurs les plus humbles et les plus fair-play du circuit. C'est pour cela que je l'admire autant. Je le regarde quelques minutes enchaîner les services.
- T'abuse Océane !
Et oui, ma grande sœur chérie est toujours là pour me ramener à la réalité...Elle me fait des grands yeux puis, elle désigne Christopher de la main :
- Baver comme ça devant un autre homme que lui, moi à sa place...
- Oooooh si on peut même plus regarder ! Ju, c'est Rafa là. Tu piges ? RAFA NADAL ! La légende de la terre battue. De toute façon, il est en couple. Et Christopher sait parfaitement qu'il n'a pas à s'inquiéter.
Comme si elle n'en avait pas fait assez, ma délicieuse sœur s'en va provoquer mon petit ami :
- Dites donc monsieur l'anglais, va falloir sévir vous ne trouvez pas ? Moi je dis ça je dis rien mais y a pas dix secondes ta chère et tendre reluquait un autre que toi !
- Justine !
Irritée, je m'approche de ma frangine dans l'idée de lui remonter les bretelles mais je croise le regard amusé de Christopher. Ce dernier, sur le ton de la plaisanterie, dévisage Justine en souriant :
- Non mais je suis pas fou non plus. Elle m'en ferait voir de toutes les couleurs si je ne la laissais pas admirer son Rafa chéri. J'ai l'habitude tu sais, elle me parle de lui au moins...cinquante fois par jour.
Je lève les yeux au ciel. Seigneur, ces deux-là, on ne les changera plus !
Je ne m'attarde pas dans le stade : ce soir c'est la soirée des joueurs et elle a lieu à la Tour Eiffel. Naturellement, la tenue de soirée est exigée pour ce rendez-vous ultra chic et glamour. Tout le monde ne peut y participer et chaque invité est soigneusement trié sur le volet. Mais cette année, j'ai reçu le précieux sésame grâce à ma présence dans le tableau final et, il ne faut pas se leurrer, parce que je suis en couple avec Christopher. À cette occasion, ce n'est pas à son appartement que je me préparerai mais bien dans celui de Serena Williams, grande amie de Caroline Wozniacki. Naturellement, il n'était pas très chaud de me laisser partir mais...je lui ai dit que j'avais besoin d'un petit moment « entre filles ».
Il fait nuit lorsque les voitures du tournoi viennent nous chercher dans le huitième arrondissement. Je ne connaissais pas Serena Williams et je suis ravie d'avoir pu discuter avec elle en toute simplicité. En sortant sur le trottoir je frissonne : il ne fait pas chaud et je ne porte qu'une petite robe bleu marine à manches courtes. Mais, je sais qu'une fois sur les lieux de la réception, je ne risque pas d'avoir froid.
Christpoher est déjà là et il est tout simplement sublime. Il porte un jeans, une chemise blanche et une veste bleu marine. Je suis soufflée par son élégance. Je le présente rapidement à Serena qui jette sur lui un regard appréciateur. Puis, nous prenons place dans la voiture qui va nous emmener à la Tour Eiffel. À peine assis, Christopher me prend la main et me dévore des yeux :
- Oh mon dieu Océane, tu es...magnifique. Ah je vais devoir faire attention ce soir...
- Attention ? Mais pourquoi ?
- Parce que que je suis certain que tous les invités présents seront jaloux de moi.
Je rougis et je me contente de me blottir contre lui.
Lorsque nous arrivons au pied de la Tour Eiffel, je suis sidérée par le nombre de journalistes présents. Avec une certaine appréhension, je me plie aux règles du red carpet. Heureusement, Christopher a l'habitude de ce type d'évènement et il me guide avec assurance. Nous prenons la pause devant l'objectif des photographes et nous répondons à quelques questions en prenant soin de ne pas évoquer notre vie privée.
Lorsque nous pénétrons à l'intérieur du lieu de la réception, j'aperçois plusieurs personnalités comme Boris Becker ou Michael Chang discutant avec animation. Je suis un peu mal à l'aise mais la présence de Christopher à mes côtés me rassure. Une demi-heure après notre arrivée, je remarque une certaine agitation à l'entrée. Et lorsque je me retrouve à moins de cinq mètres de Rafael Nadal, mes jambes se mettent à trembler.
C'est le moment que choisit mon petit ami pour s'éclipser quelques instants. Il me demande de ne pas bouger et me rassure en me disant qu'il n'en a pas pour longtemps. Interloquée, je le regarde disparaître dans la foule. Moins de cinq minutes plus tard, il réapparaît, me prend la main avec un petit sourire et il m'entraîne à l'extérieur, à l'écart de la foule.
Nous nous dirigeons vers deux hommes qui discutent dans un coin interdit aux journalistes. Et quand je les reconnais, je manque de m'évanouir. Avec un naturel désarmant, Christopher me présente au roi de la terre battue himself. Puis, il m'embrasse tendrement dans le cou et me dit, avant de filer :
- Profite !
Tendrement nichée dans les bras de mon décathlonien, je repense à la soirée magique que je viens de vivre. Pendant presque trente minutes, j'ai pu échanger avec Rafael Nadal. Sur le tennis bien entendu mais aussi sur mes hobbys, sur mon couple. Nous avons plaisanté sur le fait que nous sommes nés le même jour et il m'a donné quelques conseils pour mieux vivre ma « célébrité naissante ». Avant de le quitter, il m'a fixé rendez-vous pour le lendemain sur le Court Philippe Chatrier pour échanger quelques balles. Et il a exigé un autographe de Christopher !
Lorsque j'ai retrouvé mon petit ami, j'étais sur un petit nuage. Il m'avait alors confié qu'il voulait me surprendre pour mon anniversaire, même si ce n'est que dans deux semaines. Je vais devoir m'employer pour être à la hauteur pour son anniversaire en octobre moi...
En tout cas, j'ai hâte que le tournoi commence car là, je me sens pousser des ailes !
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