Océane, 17 juillet 2015
J'ai refusé de le revoir. Il a d'abord essayé de m'appeler au moins une cinquantaine de fois. Il a dû m'envoyer je ne sais combien de messages que je n'ai pas lus. J'ai regardé les photos de la soirée avec Justine que j'ai trouvées un peu partout sur Facebook. Ce sont pratiquement toutes les mêmes mais prises par une vingtaine de personnes différentes. Je sais donc qu'elles ne sont pas truquées. Voir Christopher danser avec cette...cette salope, la voir se coller à lui tout en lui permettant d'avoir un splendide aperçu de sa poitrine me donnent envie de vomir.
J'ai envoyé un message à Pascal pour lui dire d'annuler mes entraînements avant mon départ pour les Etats-Unis. Je ne me sens pas d'attaque. J'ai juste envie de disparaître de la surface de la terre. Allongée sur mon lit, je ne cesse de lire les articles des journalistes au sujet de Christopher. Je ne devrais pas, je me fais du mal inutilement mais...je ne sais pas, j'espère peut-être trouver une réponse à toutes mes questions.
— Arrête, tu te fais du mal.
Justine m'arrache mon smartphone des mains et le pose sur ma table de nuit. Ma mère l'a appelé en catastrophe hier, tant elle était désarmée face à ma douleur. Et depuis, elle ne m'a plus quittée.
— Océane...
Ma crise d'hystérie reprend de plus belle :
— Pourquoi il m'a fait ça ? POURQUOI ? Je lui ai tout donné, je lui ai fait confiance, j'ai failli foutre en l'air la cohésion de notre famille pour lui ! Et voilà le résultat...En fait je suis certaine qu'il n'a jamais eu l'intention d'aller loin avec moi. Tout ce qu'il voulait c'était obéir aux ordres de sa fédé et de faire croire jusque Rio qu'il s'était rangé. Et il lui fallait une petite conne bien naïve pour y parvenir. Et il a fait le bon choix.
— Sauf que là, il risque gros aussi. Cet écart pourrait avoir des conséquences négatives pour lui.
— Et bien tant mieux ! Il n'avait qu'à réfléchir avant de...Et Marine quoi...mais merde, elle savait qu'il était avec moi. Pourquoi elle l'a allumé comme ça ? Elle cherchait quoi ?
Notre discussion est interrompue par un nouvel appel sur mon smartphone. Justine s'en saisit et je suis étonnée de la voir décrocher.
— T'étais où toi ? C'est à cette heure que tu réagis ?
Pour que je puisse suivre la conversation, ma sœur met le haut-parleur :
— Océane est près de toi ?
— Évidemment, question stupide !
— OK. Chris est avec moi. il pourra écouter aussi. Océane devrait le laisser s'expliquer. Il ne l'a pas trompée.
— Ah non ? Excuse-moi mais quand un mec se retrouve, à poil, dans le lit d'une autre fille et qu'il y a deux préservatifs usagés sur le sol, tu appelles ça comment ?
— Il dit qu'il n'a rien fait. Qu'il n'a jamais eu l'intention de faire quoi que ce soit avec Marine. Il dit qu'elle l'a manipulé.
— Ouais c'est ça. Lucas, on a vu les photos sur le net, faut pas nous prendre pour des imbéciles. Et au fait, depuis quand tu défends Christopher ?
— Parce que j'ai compris que c'était un mec bien et qu'il est vraiment amoureux d'Océane. Que je me suis planté sur lui dès le départ.
— Donc...tu prends sa défense ?
— Oui ! Parce que je suis convaincu qu'il est honnête.
— Et que fais-tu des photos ?
— Chris dit qu'on a forcément dû mettre un truc dans son verre sans qu'il s'en aperçoive. Luke, Daniel et Travis sont formels : il a bu un mojito et puis basta, il ne prenait que du coca.
— Et ils sont restés avec lui jusqu'à la fin ?
Je n'entends plus mon frère pendant un instant et je réfléchis : Christopher m'a toujours dit qu'il était très prudent lorsqu'il sortait avant de me rencontrer. L'histoire du « on a mis un truc dans mon verre », j'ai du mal à le croire. Il est pire que maniaque. Que quelqu'un ait réussi à tromper sa vigilance, je ne sais pas, je n'y crois pas trop.
Je me rappelle de ses derniers messages avant que je ne rentre à Paris : il n'arrêtait pas de dire qu'il avait besoin de se lâcher, qu'il avait besoin de décompresser une bonne fois avant de reprendre l'entraînement sérieusement pour Rio. C'était la première fois depuis que nous sommes ensemble qu'il l'exprimait de manière aussi directe. Et, j'avoue, j'avais craint qu'il ne replonge.
La voix contrariée de mon frère me tire de mes réflexions. L'un des potes de Christopher lui a expliqué qu'ils étaient partis avant lui, avant que ne soient prises les fameuses photos car pendant tout ce laps de temps, ils étaient restés à quatre. Cela a le don d'énerver Justine et de m'enfoncer un peu plus.
— Ah oui ? Alors si son but n'était pas de s'envoyer en l'air avec une autre, pourquoi rester seul dans ce cas ?
— Il dit qu'il a croisé un ami et qu'il voulait juste discuter un peu.
— Et bien entendu personne ne pourra le confirmer. Malin.
— Écoute Ju, c'est ridicule tout ça. Laisse Océane parler avec Christopher. Il n'est pas bien tu sais.
— Ah parce qu'à ton avis ta petite sœur saute de joie ? Excuse-moi mais voir son petit ami danser de manière suggestive avec une fille à moitié dévêtue et se faire traiter de gamine naïve sur les réseaux sociaux, tu penses que ça lui plait ?
J'entends alors la voix fatiguée de Christopher qui me supplie de lui laisser une chance de s'expliquer, qu'il est convaincu qu'il n'a rien fait et qu'il veut même, en ma présence, confronter les dires de Marine aux siens. Je regarde ma sœur puis, je finis par accepter la proposition. Après tout, je n'ai pas eu le son de cloche de la coloc d'Amélie.
Une heure plus tard, je parcours avec une certaine appréhension les allées du Jardin des Tuileries. Justine, à mes côtés, ne dit rien. Je me suis repassée dans ma tête la scène à l'appartement de ma meilleure amie. Je revois encore le petit sourire de satisfaction de sa coloc : est-ce qu'elle avait essayé de me piéger ? Est-ce que Christopher disait vrai ?
Il était nu dans son lit, entièrement nu !
Je suis perdue, totalement perdue. Mais je ne veux pas prendre le risque d'arrêter ma relation avec mon petit ami sur un quiproquo. Je veux des réponses à mes questions. Au détour d'une allée, je vérifie l'heure sur ma montre. Bon, nous sommes dix minutes à l'avance. Ça me laisse le temps de me calmer et d'oublier, provisoirement, mes envies de meurtre.
Je regarde, amusée, un petit garçon faire ses premiers pas devant ses parents puis, mon sourire se fane lorsque j'aperçois deux silhouettes que je connais très bien. J'attrape le bras de Justine et je l'oblige à se décaler pour que Christopher et Marine ne nous aperçoivent pas. Je veux les observer quelques instants, tant qu'ils ne savent pas que nous sommes là.
Je pensais que mon petit ami serait remonté et énervé contre la coloc d'Amélie mais pas du tout. Au contraire, il semble la regarder...je ne sais pas trop comment dire mais il n'a pas l'air "fâché " contre elle. Il devrait pourtant. Non ?
Marine secoue la tête à plusieurs reprises. Elle...pleure ? C'est quoi ce bordel ?
J'ai la désagréable sensation que quelque chose m'échappe. Puis, une douleur fulgurante me traverse le corps et je sens que mon cœur se brise en mille morceaux. A une trentaine de mètres de moi, Christopher vient de prendre la main de Marine puis la nausée m'envahit lorsque leurs lèvres s'unissent.
Incapable d'en supporter plus, je m'enfuie sans regarder où je vais. Je bouscule des gens, j'entends des cris indignés mais je m'en fiche. Je voulais des réponses, je les ai eues. Je sors du parc et je m'apprête à traverser, sans regarder, lorsque quelqu'un me retient et je me sens partir vers l'arrière.
— Putain Océane t'aurais pu te faire renverser !
À travers mes larmes, je fixe le visage inquiet de Justine. Puis, les vannes s'ouvrent : je pleure sans pouvoir m'arrêter, je pleure jusqu'à en être épuisée. Je me sens déconnectée de la réalité, je me sens vide, détruite de l'intérieur.
Je ne sais plus comment je suis rentrée chez mes parents et je ne sais pas depuis combien de temps je suis étendue sur mon lit à ressasser encore et encore les mêmes images dans ma tête. J'ai éteint mon smartphone, je me suis enfermée dans mon ancienne chambre. Je ne veux parler à personne, je veux juste rester seule. Seule avec ma douleur et mon chagrin.
Après ce qui me semble une éternité, j'entends ma mère frapper à la porte et m'informer que le souper est prêt. Mais je n'ai pas faim.
Je prends un bouquin au hasard dans ma bibliothèque, histoire d'essayer de me changer les idées. Je tombe sur un texte où l'une des phrases m'interpelle :
« Face aux difficultés, garde l'espoir. Demain ne peut être que meilleur ».
Je jette le livre à travers la pièce. Tu parles !
Dès que je mettrais un pied dehors, les journalistes me courront après pour avoir des explications, la presse parlera pendant des semaines de la petite française naïve qui avait cru qu'elle pourrait assagir l'un des plus gros dragueurs de tous les temps.
Ouais, j'imagine les titres sur le net...
En songeant à mon prochain départ pour les Etats-Unis, je me dis que ce n'est peut-être pas une mauvaise chose de m'éloigner de Paris un certain temps.
Je finis par m'endormir, épuisée d'avoir tant pleuré et de m'être remémorée tous les bons moments passée avec Christopher. Une chose est sûre cependant : entre lui et moi c'est terminé. Je lui avais dit, il n'aurait pas de seconde chance. De toute façon, je n'ai même pas envie de lui en accorder une.
Il m'a trahie, il a trahi ma confiance.
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Histoire de bien enfoncer le clou....
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