Océane - 12 août 2014 (2ème partie)
Amélie et moi nous sommes affalées sur nos lits et nous regardons distraitement la télévision avant de nous coucher lorsque quelqu'un frappe à notre porte.
- Tu attendais quelqu'un Amélie ?
- Non. Et toi ?
- Non plus.
Je vais ouvrir et je suis très surprise de voir face à moi mon frère, accompagné de...Christopher Hodges.
Ce dernier semble vraiment très mal à l'aise et Lucas,...on dirait qu'il est tendu lorsqu'il me demande si je suis seule dans ma chambre.
- Non, Amélie est là aussi évidemment.
- Ah. Hum...tu peux l'appeler ? Je dois...lui parler.
Je regarde mon frère en me demandant ce qu'il mijote et je demande à ma meilleure amie de nous rejoindre. Heureusement que nos pyjama ressemblent plus à des tenues décontractées sinon je crois que je serai déjà partie me cacher avec une serviette de bain.
Lucas invite Amélie à sortir de la chambre tandis qu'il pousse ensuite Christopher vers moi.
Avant de s'éloigner, il regarde l'anglais et lui dit :
- Cinq minutes.
Je les regarde pour essayer de comprendre mais mon frère a déjà disparu avec ma meilleure amie qui est tout aussi étonnée que moi.
- Hum...je...je peux entrer ?
Je dévisage Christopher avec méfiance. Celui-ci ne semble pas étonné par mon comportement et il me dit qu'il a eu l'autorisation de Lucas pour venir me parler. Cela me fait réagir au quart de tour :
- Son autorisation ? Depuis quand il faut une autorisation pour... ? Et pourquoi il est parti avec Amélie ? Est-ce que vous allez enfin m'expliquer ce qu'il se passe ?
- Pas...dans le couloir. S'il te plait...
Je n'avais jamais vu Christopher Hodges aussi peu sûr de lui. D'un petit signe, je lui indique qu'il peut entrer dans ma chambre et je referme la porte lentement.
Je croise mes bras sur ma poitrine et j'attends.
L'anglais passe sa main dans ses cheveux : il est terriblement nerveux je le sens.
- Lucas a entendu une conversation que j'ai eue après le 400 avec Andrew.
- Et en quoi ça me concerne ?
Mon ton est sec : je n'ai pas envie de lui montrer que de l'avoir là tout près de moi me met dans tous mes états. Bordel, c'est l'un des athlètes les plus sexys de la planète et il semble totalement intimidé par ma petite personne.
- Parce que je parlais de toi.
- De moi ?
- Mon coach voulait savoir pourquoi j'étais aussi paumé sur la piste et que je faisais n'importe quoi.
- Ah oui, ça...on peut dire que tu as fais de sacrés conneries. Je n'ai toujours pas compris comment tu as pu être si mauvais à la longueur. C'était comme si tu sautais pour la première fois. Rien à voir avec le sportif arrogant et prétentieux que nous avons l'habitude de voir.
Ma petite pique le fait grimacer et tout à coup je vois qu'il est vraiment peiné par mes mots. Je me demande alors si je ne suis pas allée trop loin et je m'excuse du bout des lèvres.
- Non, tu as parfaitement raison. Je ne suis qu'un connard stupide et immature.
- Je ne...
- Oh si Océane, c'est la stricte vérité. Et c'est pour ça que je suis là. Je me suis énervé avec Andrew et je lui ai avoué que...que si j'étais ailleurs aujourd'hui, si j'avais du mal à me concentrer c'est parce que je n'arrête pas de penser à toi.
Il détourne la tête pour éviter de me regarder et mon cœur a un raté. Christopher continue d'une voix monocorde tout en me fixant à peine :
- Je crois...je crois que j'ai des sentiments pour toi. Tu m'attires Océane. Je ne sais plus à quand remonte notre dernière rencontre parce que je ne m'en rappelle plus. Mais quand je suis arrivé à l'hôtel et que je t'ai vue, c'est comme si je te découvrais. Je n'ai jamais ressenti ça auparavant parce qu'il n'y a jamais eu de sentiments avec les filles que j'ai fréquenté. Et ce qui me fait mal c'est que je sais qu'à cause de mon passé justement, de mes conneries, je n'ai rien à espérer de toi. Je sais que je te dégoûte, je l'ai vu dans tes yeux la semaine dernière. C'est très dur à vivre mais je sais que c'est entièrement justifié. J'aimerai être quelqu'un d'autre, j'aimerai pouvoir t'apporter des arguments pour te convaincre que je suis un homme bien mais je n'en ai pas. J'ai envie de te prouver que tu peux me faire confiance, que je veux changer, que je veux...quelque chose de sérieux avec toi mais je ne peux pas t'obliger à me croire.
Il n'imagine pas l'effet que ses mots ont sur moi. Je vois bien qu'il est sincère et surtout qu'il est désemparé. Je comprends également qu'il a dû avoir une discussion animée avec Lucas et je me demande pourquoi mon frère lui a laissé cette chance de s'expliquer avec moi. Après tout, il aurait pu se dire qu'au vu de la détresse émotionnelle de Christopher, il avait une chance de le battre et d'être sacré champion d'Europe.
Mais ça,...ce n'est pas mon frère. Il y a une réelle et belle amitié entre eux et ce n'est pas la mentalité des décathloniens de souhaiter la défaite d'un de ses adversaires.
Curieusement, je n'ai jamais senti Christopher aussi honnête que maintenant. J'avoue que je suis flattée de savoir qu'il a des sentiments pour moi mais je veux rester prudente. M'embarquer dans un truc avec lui, là dans l'immédiat c'est hors de question. Tout ce que je sais de lui, c'est Lucas qui me l'a dit ou je l'ai lu dans la presse et le pire en ce qui le concerne je l'ai entendu dans les tribunes d'un stade.
Il n'ose toujours pas me regarder et c'est vraiment perturbant. Puis il redresse la tête brusquement et il me fixe terriblement gêné :
- Je crois que les cinq minutes sont dépassées. Je vais y aller sinon Lucas va me tuer.
Je suis toujours plantée au beau milieu du petit couloir de ma chambre à scruter Christopher avec un air sans doute toujours aussi ahuri. Lorsqu'il se dirige vers la porte, je réalise que je ne peux pas le laisser partir comme ça. Mais qu'est-ce que je vais lui dire ?
Accepter de sortir avec lui c'est inenvisageable. Pour l'instant. S'excuser et démontrer de la bonne volonté c'est bien mais ce n'est pas suffisant.
Et puis...il y a nos carrières respectives : nous voyageons aux quatre coins du monde, nous ne serons jamais au même endroit au même moment. Comment est-ce que je pourrais lui faire confiance et savoir qu'il s'est effectivement rangé ? Comment pourrais-je être certaine qu'il fait vraiment des efforts pour moi ? Et surtout, comment pourrais-je avoir une vraie relation avec lui si nous ne nous voyons jamais ?
- Attends.
Je ne reconnais pas ma propre voix et je perds un instant mes moyens lorsque Christopher me jette un regard plein d'appréhension mais aussi...d'espoir.
- Je pourrais te croire en effet. Mais je n'ai aucune preuve de ta bonne volonté. A la fin du mois je pars aux Etats-Unis et je ne reviens en Europe qu'en Octobre. Toi...je suppose que tu seras avec mon frère au Décastar puis ta saison sera terminée alors que moi...si je n'ai pas d'invitation pour Linz et Luxembourg je jouerai certainement au Mexique et seulement ensuite je reviendrai en France. Puis je serai en Tunisie et le 15 décembre j'espère avoir la confirmation que je peux participer aux qualifs de l'Australian Open. Auparavant j'aurais également eu la confirmation de mes participations aux qualifs à Auckland ou Brisbane. Je ne vois pas comment...
La tristesse apparait sur le visage de Christopher et je ressens un douloureux tiraillement dans le ventre. Il souffre à cause de son passé, à cause de moi et je viens d'enfoncer le clou en détruisant le minuscule petit espoir qu'il y avait dans son regard.
Il dit qu'il a des sentiments pour moi, mais moi, je n'en ai pas parce que je ne le connais pas assez. Et son passé sulfureux ne me donne pas envie d'apprendre à le connaître. Je pense alors à son décathlon et à la suite des épreuves qui l'attendent demain. Je ne veux pas qu'il foire tout par ma faute. Je ne pourrais pas admettre de voir mon frère sur le podium sans lui en sachant que je serai responsable de son échec. Il n'était pas obligé de me révéler ses sentiments pour moi, il n'était pas obligé de...de tout me déballer comme il l'a fait.
Une petite voix au fond de moi me dit de lui donner une chance et que rien que pour la démarche qu'il a faite à mon égard, je lui dois bien cela. Avec un petit sourire timide, je le regarde droit dans les yeux et je lui dis :
- Tu sais que tu vas en chier pour me convaincre ? Et que Lucas ne laissera rien passer ? Il va te coller encore plus aux baskets.
- Je sais...
- Tu es conscient que je n'ai, pour le moment, aucune affinité avec toi à part l'athlé ?
- C'est ce que j'aimerai changer.
- Tu as bien compris que je n'ai que du mépris pour le style de vie qui a été le tien jusqu'à présent et que je ne suis pas du tout comme toutes ces filles que tu as baisées ? Parce que si tu imagines que tu peux me séduire avec deux trois sourires et un peu d'attention tu te plantes royalement. Je n'aime pas les personnages arrogants, imbus d'eux-mêmes ni ceux qui considèrent les filles comme des objets. Je saurai me rendre compte très vite si tout ce que tu me dis n'est que du baratin à deux balles. Ce n'est pas non plus en quelques jours que tu arriveras à quelque chose. Tu veux une relation sérieuse avec moi ? OK, alors prouve-le.
J'ai l'impression de faire un combat de boxe : Christopher est mon adversaire et chacune de mes phrases l'approche un peu plus du K.O. final. Je vois que ma dernière tirade lui fait un peu plus mal encore mais autant que les choses soient claires entre nous. Il ouvre la bouche pour parler mais je l'en empêche d'un geste pour lui décocher la pique finale :
- Et je n'ai pas l'intention non plus d'être une médaille supplémentaire que tu accrocheras à ton tableau de chasse. Je ne cherche pas un truc d'un soir : je suis restée quatre ans avec mon ex petit-ami. S'il n'avait pas eu la gentillesse de me tromper avec une de mes amies, je serais peut-être restée encore longtemps avec lui si tu vois ce que je veux dire... Si tu n'es pas sur la même longueur d'onde que moi alors je te conseille de laisser tomber immédiatement.
- Je...je sais que c'est loin d'être gagné et je sais que...que tu ne me feras pas de cadeau. Je tiens vraiment à ce que tu puisses me faire confiance Océane et je...
Il soupire et ferme les yeux un bref instant tout en se mordillant les lèvres. Il n'a pas le temps de continuer car Lucas choisit cet instant pour se manifester à nouveau. Christopher me regarde une dernière fois avant d'ouvrir la porte et dans un souffle il me dit :
- Merci de m'offrir cette chance. Je tâcherai de ne pas la gâcher.
Un bref instant j'ai cru qu'il allait approcher son visage du mien pour m'embrasser et je lui suis reconnaissante de ne pas avoir voulu aller au-delà de ce que j'étais prête à tolérer pour l'instant.
Évidemment, dès qu'il a quitté ma chambre, Lucas et Amélie m'assaillent de questions. Je me borne simplement à leur dire que j'ai laissé Christopher s'expliquer et que j'avais accepté de lui laisser une chance de changer.
Mon frère tire une sale tête : il espérait sûrement que j'allais refuser. Mais il accepte ma décision. Enfin, accepter,...c'est un grand mot. Je lui ai quand même précisé que je n'avais pas l'intention de me jeter dans les bras de son ami et que s'il devait y avoir quelque chose entre nous, ça risquait de prendre des semaines, voire...des mois.
Lorsque je me couche dans mon lit, ma meilleure amie tient encore à me cuisiner un peu :
- Tu es amoureuse de lui ma belle. Reconnait-le. Tu ne lui aurais pas laissé une chance si ça n'avait pas été le cas.
- Il est canon c'est vrai mais on ne tombe pas amoureux comme ça en deux jours. . Mais pour le moment, il n'est pas le genre de mec avec lequel j'aimerais avoir une relation. Il me dit qu'il veut changer, alors je vais lui laisser la possibilité de me le prouver.
- Parce qu'au fond de toi tu espères bien que ça va être le cas, je me trompe ?
Je ne réponds pas et je fais mine de dormir. Trop de sentiments contradictoires m'envahissent.
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Océane a accepté de laisser Christopher s'expliquer mais j'espère que notre décathlonien a bien compris qu'il allait avoir du boulot avec elle...
Clairement à Zurich, il ne passera rien. Enfin, rien...ça dépend dans quel sens...
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