Chapitre 65

Musique : Garden city movement- She's so untouchable      (Alaska sisi)


PDV Aaron : 

Depuis deux jours, on ne manque pas de bizuter Jadine à la moindre occasion, mais j'en viens plus souvent à me demander comment est-ce que je parvenais à faire ça avant sans m'en soucier, plutôt qu'à profiter de ce pouvoir sur elle. D'autant que ce n'est pas ma préoccupation première, ce qui m'intéresse, c'est de trouver un moyen pour approcher Alaska, je ne peux pas supporter que les choses se terminent ainsi. Je repense à ses propos, encore, et même si je voudrais le contraire, c'est irréversible, je l'aime toujours autant si ce n'est plus à chaque fois que je la regarde et qu'elle détourne son regard.

 De temps en temps, je la surprends à me mater et mes doutes se dissipent, mais elle garde ses distances comme si elle cherchait à se voiler la face. J'en ai marre de ce petit jeu, à mesure que mon désir grandit, je réalise que tous les aléas du quotidien m'en éloignent, faire semblant devient intenable. Je tourne la tête, la fixe du coin de l'œil, elle n'a pas touché à son assiette, hier non plus d'ailleurs. Depuis que Jade est placée en martyre, j'ai l'impression qu'Alaska perd de son éclat, à moins que ça ne remonte à plus loin. La situation ne peut pas s'éterniser, il faut que je lui dise ce que je ressens, là, maintenant, que ses joues rosissent légèrement et qu'enfin, ses lèvres dessinent le plus doux des sourires. Alaska. Ça me rend fou de la voir si loin et à la fois si proche. Je repense au jour où j'ai couché avec Charlie, j'ai compris en passant à l'acte, que fourrer ma queue dans un trou n'avait pas de sens, pas de chaleur réelle ni de bonheur intense. 

J'ai fermé les yeux à ce moment-là, j'ai imaginé Alaska et j'ai subitement compris, en revoyant ses yeux affolés et vengeurs, qu'elle avait été blessée, comme moi, alors elle a menti. Pour se protéger. Et moi j'ai couru tête baissée me réfugier dans les bras creux de Charlie qui ne m'ont procuré aucune sensation. À l'intérieur, je suis comme mort et y a que les regards d'Alaska pour exalter mes sens. Aujourd'hui, je comprends tout ça, alors je la fixe sans craindre que les gars me charrient. Qu'ils le fassent d'ailleurs, je serai ravi de leur dire combien je suis fou d'elle.

— Salut bande de cons !

Quand je détourne mon regard d'Alaska, je réalise que c'est pas un putain de rêve, Jade est bien plantée devant nous, ses mains fermement appuyées sur le bord de la table. Je repense à hier, à Théo qui lui a renversé ses pâtes sur la tête. Aux côtés de Jade, Octobre sourit, son regard est rivé sur Owen qui la dévore des yeux en retour.

— Bon, c'est gentil deux minutes, mais j'en ai marre de votre jeu minable. Annonce solennellement Jade en se redressant, attirant ainsi tous les regards vers elle. Je m'adresse pas à l'un de vous en particulier, mais à l'ensemble des mecs réunis à cette table qui sont suffisamment hypocrites pour se permettre de me rabaisser, alors qu'ils ont eux-même transgressé certaines règles, oh, hé, n'adoptez pas de regards innocents, mentir à soi-même, c'est rarement louable.

Ses mots font écho en moi, je me retourne vers Nils en espérant qu'il la remette à sa place, qu'il lui explique qu'elle n'a rien à faire là, mais il fait pas un geste, au contraire, il sourit de satisfaction.

— Attendez, vous vous acharnez sérieusement sur Jade ?!

Sarah semble ahurie, comme si c'était surprenant qu'on soit capable d'un tel truc, alors qu'en soi, ce qu'on fait subir à Jadine n'est qu'un dixième de ce qu'on fait habituellement. Son regard alerte et sa petite moue d'enfant attirent l'attention, elle se lève brusquement et incendie Théo du regard.

— Même toi ?! Putain, Théo, je peux savoir pourquoi tu t'abaisses encore à agir comme une merde alors qu'on sait tous les deux ce que tu vaux vraiment !?

Je ne l'avais jamais vue si fulminante, elle semble vraiment déçue, comme si elle n'en revenait pas, seulement connaît-elle Théo ? Je vois soudain les filles sous un nouvel angle. À quel moment avons-nous offert à des pions la possibilité de nous faire la morale ? Sarah s'apprête à quitter la table, Jade à reprendre son petit sermon déclencheur de toute cette merde, et voilà que Théo y met du sien en se levant de sa chaise.

— Sarah, attends ! J'ai merdé et j'en suis désolé, mais tout ça, c'est plus moi.

Il désigne l'ensemble de notre table d'un geste, quand nos regards se croisent, quelque chose d'incertain émerge en moi.

— Toutes ces conneries... tout ce temps gâché pour esquiver celui que je suis, c'est plus pour moi. Sarah, souffle-t-il en se tournant vers elle, une main pendue dans sa direction qu'elle n'hésite pas à saisir. Sarah et moi on est ensemble. Je l'aime et c'est réel, ça compte bien plus que tout le reste.

Et comme pour nous montrer qu'il n'en a vraiment plus rien à foutre, il l'embrasse sous nos yeux. L'évidence me transperce à cet instant. L'envie de dire ce que je ressens me ronge, je suis sur le point d'imploser quand je regarde Alaska.

— Je quitte le jeu.

Les mots devancent ma pensée. Mes jambes se sont redressées d'elles-mêmes et je suis debout comme un con avec trop de paires d'yeux braqués sur moi pour me défiler.

— J'ai perdu un pari avec Alaska. Je suis retombé amoureux, et en fait, j'ai jamais cessé de l'être, alors je l'annonce...Je veux plus être un joueur.

À ce moment-là, j'ai vraiment très envie de me rasseoir et de retourner une minute en arrière. Sarah m'adresse un large sourire, je baisse les yeux sur Alaska qui se relève d'un bond, le reflet d'une peur effarante baigne son regard. Elle peste et s'enfuit en courant. Je n'y réfléchis pas à deux fois avant de suivre l'élan qui m'anime pour la rattraper, peu importe ce que les autres en pensent. De toute évidence, avec l'entrée en scène de Jade, tout est chamboulé à jamais, pour mon plus grand bonheur et ma plus grande désillusion. Dans le couloir, je vois la chevelure blonde d'Alaska disparaître à l'étage, je me lance à sa suite d'un pas plus tranquille. Au fond de moi, je sais où elle va. S'il y a une chose que j'ai bien comprise ces derniers temps, c'est que l'un comme l'autre on n'a pas tant changé avec le temps. Au sommet des marches, j'inspecte le couloir puis repère la salle de musique sur le côté. 

J'y entre, Alaska n'est pas là. Enfin, c'est ce que je pourrais croire, mais je sais qu'elle est drôlement douée pour ce qui est de jouer à cache-cache. Sans prêter attention à son éventuelle présence, j'observe les instruments autour de moi, y a un piano, mais manque de bol je sais pas en jouer. En fait, ce qu'il me faudrait, c'est un violon. Parce que je sais à quel point cet instrument est différent des autres à ses yeux. Je vois un étui sur l'étagère en face, je m'approche, espère de tout mon cœur que ce soit ce que j'imagine. Bingo ! Ils ont bien un violon ici, si j'avais su, j'aurais pris des cours au lieu de m'entraîner tout seul, ça m'aurait peut-être promis plus de résultats. M'enfin, je m'empare de l'instrument, inspire un grand coup et jette un coup d'œil circulaire dans la pièce.

— Alaska, si t'es là, je te conseille de te montrer avec que mes accords te fassent saigner des oreilles. 

Pas de réponse. J'attends un peu, pas un bruit. Si ça se trouve elle est même pas là et je parle seul comme le dernier des abrutis qui espère encore après un amour perdu. Je secoue la tête, chasse les dernières pensées qui y traînent, puis serre fermement l'archet dans ma main moite. Super. Je ferme les yeux, m'accrochent à quelques souvenirs pour tenter de jouer comme à une certaine époque où je m'entraînais tous les soirs. J'avais beau dire que c'était pour entendre le son fascinant de cet instrument, en réalité, jouer me rapprochait seulement d'Alaska. Un jour, elle m'a parlé de son père. Contrairement à ce qu'elle croit, j'ai rien oublié de tout ce qu'elle m'a confiait, je l'ai juste mis de côté. Mais son admiration forcée envers son père, pour se voiler la face un petit bout de temps, je m'en souviens. 

C'était un musicien. Voilà son crédit d'excuse pour avoir lâchement abandonné sa famille. Il pouvait pas sacrifier sa carrière, son amour pour le violon et pour une raison qui m'échappe, même si Alaska souffrait, jamais elle n'a rejeté la faute sur sa musique. Elle aimait, les accords qu'il jouait. Elle aimait un morceau en particulier, celui qu'il n'a jamais réussi à jouer et qu'elle a tenté d'apprendre en espérant que ça le ferait revenir. Quand elle a compris que c'était qu'un rêve d'enfant, Alaska l'a très vite lâché, et moi j'ai repris le flambeau. Mais pas pour son père. Je voulais jouer pour elle. Jouer cette partition qui un jour lui avait tenu à cœur, pour la voir sourire comme jamais.

— C'est un véritable massacre.

Je dérape avec l'archet, ça fait un son affreux, Alaska tire une grimace. Je souris, elle était bien là.

— On est pas tous né pour être musicien faut croire.

Elle secoue la tête, reste dans l'angle de la pièce.

— Qu'est-ce que tu me fais là Aaron ?

— Bah, c'est bien connu que les filles tombent raides dingues des musiciens, tu comptes y faire exception ?

Je pose le violon sur l'étagère, me tourne vers Alaska qui sourit de toutes ses dents, mais le masque quand je la regarde de nouveau. Sacrée nana.

— Je te parle pas de ça guignol... Je parle de ton cirque au self tout à l'heure.

Elle aborde une moue agacée, je parviens tout juste à dissimuler mon sourire. J'ai envie de lui dire tellement de choses maintenant qu'il n'y a plus de cadre, plus de condition, plus rien pour confiner mes pensées et broyer mon amour.

— Je suis désolé. Pour ce qui s'est passé avec Charlie.

Alaska décroise ses bras, elle balade son regard dans la pièce pour éviter le mien et remue ses lèvres, gênée.

— Je m'en tape Aaron. J'ai mal réagi aussi. Maintenant je veux savoir ce qu'il t'a pris pendant le repas.

— J'ai fait ce que tu voulais Al. J'ai perdu le pari et je te le dis sincèrement maintenant, je t'aime.

Alaska reste silencieuse. Elle est si belle quand elle est prise au dépourvu, si belle quand ses yeux ne regardent que moi, quand je la fixe, incapable de savoir ce qui se trame dans sa tête. Ça a quelque chose de palpitant, qui fait que mon cœur s'acharne comme un lion en cage, et en même temps, il serait prêt à lâcher d'une seconde à l'autre tant c'est pétrifiant.

— Tu peux le redire encore une fois ?

— Je te le dirai bien plus encore quand je saurai ce qu'il en est pour toi.

Je soupire, en proie à la plus intense des palpitations. L'attitude d'Alaska est si changeante, si imprévisible, se caler sur son rythme relève de l'impossible, pourtant j'essaie et je tente de déchiffrer son regard qui me scrute avec une douceur renversante.

— Alors ? Je souffle en l'approchant.

Elle arque un sourcil, s'amuse à me voir languir, puis son sourire en coin irrésistible me laisse pendu à ses lèvres.

— C'est que... Je voudrais pas te briser le cœur une seconde fois.

Elle s'avance elle aussi, jusqu'à ce qu'on soit très près l'un de l'autre. Je ris, elle est pas foutue de lâcher sa fierté ne serait-ce qu'une seconde.

— Cesse de vouloir m'épargner, j'attends que ça.

Un rire nerveux s'échappe de ses lèvres entrouvertes. J'attrape sa main, la mène à mon visage. Alaska se laisse faire, je la regarde sans ciller et presse sa paume contre ma bouche. Elle la retire précipitamment, m'adresse un sourire enfantin renversant.

— Si je te le dis en musique, ça compte ?

Je hausse les épaules.

— Tans que je le ressens.

Fièrement elle passe devant moi, prend soin de me frôler au plus près et s'installe sur le tabouret en face du piano.

— Accompagne-moi au violon.

Je fais volte-face, la dévore du regard alors que sa jupe remonte et que son sourire fait des ravages dans mon cœur.

— T'es folle, tu vas nous en mettre plein la vue à mon instrument et moi, on saura plus où se mettre.

Elle se pince la lèvre inférieure, son visage est inondé par cet éclat qui la rend si vivante, ça pétille au fond de ses yeux.

— Tu t'en sors très bien en vrai et si tu m'aimes, sincèrement comme tu l'as dit, alors joues avec moi.

— À une seule condition...

Alaska me regarde de travers, je prends place à côté d'elle, sur le petit siège, elle attrape mon bras pour ne pas tomber à la renverse et sourit. Mon regard oblique sur ses lèvres, je veux qu'elle sente tout le désir qui m'imprègne. Je veux qu'elle voie comment je l'aime. Avec la tendresse d'un jouvenceau et la fervente ardeur d'une bête.

— Aaron...

Elle se tait, ses doigts viennent effleurer la ligne de ma mâchoire. Je la contemple sans l'ombre d'une lassitude, glisse une main dans ses cheveux.

— Embrasse-moi.

Alors que je m'attends à ce qu'elle la joue timide en détournant son regard, Alaska approche son visage, donne un petit coup contre mon nez avec le sien, sourit, et lèche du bout de la langue la pulpe de mes lèvres.

— T'es dégueulassement envoûtante tu le sais ça ?

— Divinement. C'est le qualificatif que tu voulais employer. Fais attention la prochaine fois que tu écorches les mots.

J'esquisse un sourire et mets fin à ce supplice qui me sépare de sa chaleur en plaquant maladroitement ma bouche contre la sienne. Alaska répond à mon baiser et dans cet échange langoureux, je ressens toutes les larmes, toute la joie et la haine qu'on a partagées. Dans le bon comme dans le mauvais, je l'ai aimée, d'un amour qui m'a consumé, mais qui m'a aussi fait renaître. Et ça, je sais au fond de moi, sans l'ombre d'un doute, que c'est réciproque.

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Holààà petit peuple ! 

Bon les couples se forment et ils se lâchent plus ! 

Vous en pensez kwaaa de nos deux ptits tourtereaux ? Personnellement je les adore, Alaska et Aaron sont mes préférés, vous c'est lesquels ?

AMOUUUUUR IN YOUR HEAAART ! (le franglais te régale)

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