Chapitre 60

Musique : Tove Styrke- liability 

PDV Aaron :

Ça fait une semaine que les vacances ont commencé et comme il est convenu à chaque fois, Nils organisera une soirée quand le moment lui semblera approprié pour s'assurer des avancées de chacun. Avec la nouvelle règle, elles devraient être à leur apogée pour chacun d'entre nous, après tout, il ne nous reste plus qu'à taper dans le tas et c'est gagné, seulement, le visage d'Alaska me quitte jamais, où que j'aille, je l'ai dans la tête et ça me complique nettement les choses. C'est plus précisément le souvenir de notre amour qui tourmente. Je n'arrive plus à voir la limite entre celui que j'ai été avant et celui que je suis maintenant, comme si j'étais en droit, même aujourd'hui, de ressentir ce que j'ai ressenti un jour pour elle si ce n'est plus. Alaska. Voilà que je reviens à l'époque de mes quatorze ans, je me demande encore comment j'ai pu être aussi con pour me laisser influencer par Théo et Matt, alors que j'avais à bout de bras, la seule fille que je désirais plus que tout au monde. 

Bref retour à la réalité pour me rappeler que je suis pas sorti de mon lit depuis ce matin, je me visionne des fantasmes divers, mais me repasser en boucle le film de ma vie me fera pas avancer. Je sens au plus profond de moi que j'ai besoin de quelque chose de concret, il me faut plus que ce que j'ai aujourd'hui, et par plus, j'entends Alaska. Dans un élan de passion désespérée, je lui envoie un message. Je ne sais pas si elle répondra, mais je veux la voir et si elle daigne venir chez moi, alors je lui avouerai que j'ai perdu notre pari, peu importe les répercussions, je veux pouvoir la tenir une fois dans mes bras et que ce soit aussi vrai qu'avant. Une fois que j'ai fait ce premier pas, il n'y a plus de retour en arrière possible, ne me reste plus qu'à espérer qu'Alaska partage ne serait-ce qu'un dixième des sentiments que je ressens pour elle. Après quelques brèves réflexions, je sors des draps, prends une douche, descends dans le salon et suis les odeurs alléchantes qui s'échappent de la cuisine. 

Dedans je trouve ma mère appliquée à retourner une omelette dans la poêle, du riz déjà disposé sur la table. Je sors des couverts, deux assiettes, puis m'assieds en attendant qu'elle s'installe. Quand je la regarde faire, j'en viens inévitablement à me demander quel genre de pensées traversent son esprit, est-ce que des fois, elle se sent seule ? Depuis qu'il n'y a plus Tony, plus Rose, plus personne pour lui tenir compagnie si ce n'est l'ombre de son dernier fils et encore. Elle me rejoint, m'adresse un léger sourire, mais il est fatigué et ses yeux ne sont que deux orbites creuses. Chaque fois que nous sommes l'un en face de l'autre, j'ai mal à l'intérieur et je n'ai plus qu'une envie, fuir cette maison, cette vie, pourtant je reste assis, j'esquisse le même sourire minable et je me sers du riz. On ne parle pas souvent, on ne parle même jamais depuis que je me suis terré dans mon propre silence et elle dans le vide de quelques souvenirs auxquels les murs de cette maison font encore écho.

 Les choses pourraient changer, juste une fois, je pourrais prononcer un mot, lui demander si ça va, si dans le fond, elle vit encore, mais à quoi bon ? La parole ne ramène pas les morts, faire semblant n'effacera pas le départ de mon frère. Je prends appui contre le silence, c'est tout ce qui nous rapproche, jusqu'à ce qu'il soit brisé par le retentissement de la sonnette. Ma mère se redresse, me lance un regard interrogateur et les battements de mon cœur s'emballent à l'idée que ce soit Alaska.

— Tu attends quelqu'un ?

Je reste tendu sur la chaise, incapable de faire un geste. Même si je le souhaitais, le fait qu'Alaska se pointe vraiment m'assaille de doutes, finalement ce n'était pas une bonne idée.

— Je vais aller voir qui c'est.

Je me lève, adopte un air indifférent, mais quand j'ouvre la porte et que mon regard croise celui de Charlie vêtue d'une robe légère, mes fantasmes s'éclatent au sol.

— Hey !

Elle sourit, je reste de marbre, dans une tenue pareille, elle doit crever de froid. Devant mon mutisme, elle laisse apercevoir son malaise, puis elle se reprend.

— Tu me fais entrer ou tu me laisses geler dehors ?

Avec réticence je m'écarte du passage, un peu décontenancé par sa venue même si les choses sont plus logiques ainsi. En un rien de temps, je retrouve mon rôle, mes yeux se baladent sur les délicieuses courbes de son corps que laisse deviner le tissu. Mon regard oblique ne lui échappe pas et sur ses lèvres naît un sourire captivant.

— Aaron ? C'était qui ? Couine ma mère depuis la cuisine.

—Personne, je vais monter dans ma chambre préparer mes affaires pour cet après-midi !

J'attrape Charlie par la taille et la pousse vers l'escalier. Elle glousse à chaque fois que ma main touche son dos pour la faire avancer, ce petit jeu lui plaît, mais je ne pense qu'à une chose : pourquoi diable s'est-elle pointée ici ? Certes je l'ai toujours trouvée plaisante, voire diaboliquement envoûtante, mais ce n'est pas dans cette vie-là que nous coucherons ensemble. Pour fantasmer sur elle comme j'ai pu le faire avant, il me faudrait un monde où Alaska n'est pas. Cependant, les choses ont très clairement l'air d'arriver dans ce monde-là sans que j'en sois l'auteur. C'est remarquablement troublant de voir un pion prendre de telles initiatives, comme se jeter sur mon lit une fois que nous sommes dans ma chambre. Charlie esquisse un sourire en coin, elle se redresse, ne prend pas la peine de remettre les pans de sa robe en place, consciente de ses jambes nues qui se dévoilent à ma vue. La façon dont elle s'offre à moi est trop belle pour être vraie.

— Je peux savoir ce qui te prend ?

— Quelle drôle de question, j'ai l'air d'attendre quoi là à ton avis ?

Elle fronce les sourcils, inutile de le nier, j'aime beaucoup ce que je vois.

— La réponse me semble assez évidente, mais j'ai des trucs à faire...

Mon excuse se retrouve misérablement réduite à néant par le regard sensuel de Charlie. Il faut que je commence à prendre des mesures de sécurité au lieu de me rapprocher doucement d'elle comme je le fais. Seulement, elle a ce petit quelque chose qui m'appelle à elle, dans son regard, ses gestes, y a un truc qui m'attire et cette putain d'attraction prend le dessus sur ma raison. Pendant une seconde, j'ai l'impression que tout ce qui compte s'accorde à son regard cerné de noir, à ses lèvres charnues qu'elle ne cesse de mordiller exagérément comme pour me faire de l'effet. Elle s'apprête à faire remonter sa robe plus haut encore, je prends une grande respiration et me tourne vers mon armoire. Je ne sais pas où je puise ma volonté pour m'apprêter à faire ce que je vais faire, mais une chose est sûre, si après ça, Alaska me refuse, je crèverai sous le poids des regrets. Au hasard dans la penderie, j'attrape un large blouson et pivote à nouveau vers Charlie.

— Tiens, tu ferais mieux d'enfiler ça pour...

Je m'arrête de parler net quand je réalise à mon plus grand plaisir et à la plus douloureuse des tortures qu'elle a retiré sa robe. Cette fois, c'est plus fort que moi. Au niveau de mon entre-jambe, mon jean est soudain trop serré et je peux pas m'empêcher de m'extasier devant sa magnifique paire de seins.

— Putain mais c'est quoi ton problème ?! Je m'exclame sans pour autant crier, alors que l'envie me démange.
Ma réaction la surprend, j'ai envie de lui dire que ce n'est pas contre elle, qu'elle est parfaite, peut-être trop pour moi d'ailleurs, mais ce n'est pas ce genre de pensées que je devrais avoir et c'est soudain l'horreur dans ma tête, des fantasmes y naissent et m'infligent un véritable supplice.

— Pardon ? Mais c'est quoi ton problème à toi Aaron ? Y a quelques semaines tu me tournais autour comme si j'étais la seule qui comptait et maintenant c'est à peine si tu m'adresses un regard ! Je suis censée faire quoi pour attirer ton attention si même ça t'en veux pas ?!

Elle s'indigne presque, désigne d'un geste l'entièreté de son corps. Je la regarde droit dans les yeux, la frustration et la détresse s'y mélangent, je ne parviens pas à saisir son raisonnement. À quoi s'attendait-elle ? Elle est mon pion, que je la drague ou lui traîne dans les pattes fait partie du jeu, il n'y avait rien à espérer. Seulement, je me vois pas lui déballer les choses de cette façon, je ne sais pas ce qui lui a laissé croire que quelque chose de réel pouvait probablement se passer entre nous, mais ce qui est certain, c'est que j'ai honte de ma propre compassion.

— Non, alors attends... Charlie, c'est pas contre toi, t'es... Enfin regarde-toi, t'es parfaite, vraiment, mais...

Mais il vaut mieux que je m'arrête là avant de m'enfoncer davantage. Je commence à comprendre pourquoi j'aurais mieux fait de taire mes sentiments pour Alaska, depuis qu'ils reprennent vie, j'arrête pas de me prendre la tête pour rien et plus je contemple les torts que je fais à Charlie, plus je me dis que l'amour pue vraiment la merde.

— C'est Alaska pas vrai ? Moi je suis là, je veux que toi, et t'es même pas foutu de le voir parce que t'es trop aveuglé par ta putain de princesse de glace !

Elle me prend de court une seconde fois, mais à mesure qu'elle ouvre sa grande gueule, je me demande encore pourquoi je l'ai pas virée quand j'en avais l'occasion. C'est clair qu'elle est belle, mais ça fait pas tout et actuellement, je ne supporte pas la jalousie qui se manifeste dans sa voix. L'expression qui passe sur mon visage quand elle nomme Alaska suffit à me trahir et son regard s'adoucit.

— Alors c'est ça hein. Waw, ce que t'es crédule en fait Aaron.

Elle se rapproche, ses paroles sèment le trouble en moi.

— Tu vois, dans votre beau rôle de joueur, vous êtes insatiables et sans remords pour ce qui est de jouer avec les émotions des autres, mais ça n'empêche pas que vous soyez suffisamment stupides pour croire qu'on n'est pas capable d'en faire de même.

La distance est si minime entre nous, que si j'y prête attention, et ce malgré moi, je peux sentir le bout de ses seins contre mon torse. La tentation touche son paroxysme, lorsque d'un doigt, elle caresse ma mâchoire. Je me contiens, attrape sa main assez brusquement pour lui rappeler que la tension peut s'exercer des deux côtés et j'ai en horreur le petit jeu qu'elle exerce sur moi, comme si je n'étais qu'un simple... Pion. Sacrément ironique finalement.

— Sois plus claire. Qu'est-ce que tu sous-entends par là ?

Charlie glousse, comme une petite garce qui ferait faire ce qu'elle veut à son chien du moment qu'elle a un biscuit dans les mains.

— Parce qu'en plus de ça, il faut que je te mâche tout le travail, tu veux pas essayer de réfléchir par toi-même un peu ?

Elle s'amuse à me faire languir, ça m'irrite. Pour m'assurer qu'elle capte le message, je maintiens fermement ses deux mains, puis la fais tourner sur elle-même afin qu'elle se retrouve bloquée, les bras dans le dos, plaquée contre moi. Je sens la courbe de son cul contre mon érection, c'est pas désagréable, mais j'espère qu'elle y fera pas attention.

— Maintenant, tu veux bien approfondir ton explication s'il te plaît ?

— Si tu insistes... Souffle-t-elle en se frottant contre moi. Alaska se joue de toi depuis le début, si tu as eu la naïveté de croire qu'elle en avait quelque chose à faire de toi, je suis désolée.

Alors que Charlie éveille mes doutes, je cerne soudain sa stratégie, elle ne fait ça que pour obtenir ce qu'elle veut. Je desserre mon emprise sur ses poignets avant de complètement la relâcher pour qu'elle puisse me faire face. Elle affiche une petite moue, puis sourit comme si elle n'avait pas fini.

— Je ne sais pas si tu captes, mais c'est du donnant-donnant. Tu te joues de nous, elle se joue de toi, tu crois mener la barque, mais c'est elle qui a le gouvernail. Tu saisis maintenant ?

Elle se permet une fois de plus de poser ses mains sur moi, sauf que cette fois, je suis trop mitigé pour chercher à la refouler. Si ce qu'elle dit est vrai, le pari qu'Alaska s'est subitement senti obligée de me lancer pour qu'on se rapproche, prend définitivement un autre sens. Et le pire, c'est que même si je voudrais m'en plaindre et m'abattre sur mon propre sort, toutes les conneries que je pourrais dire tiendraient du même charabia que les pions quand elles réalisent qu'on se fout vraiment d'elles du début à la fin.

— Je peux savoir pour quelle putain de raison je devrais te croire ?

Charlie continue de sourire, comme si ça la régalait de me voir si troublé. Elle se rapproche, ses seins contre mon torse réveillent mes envies les plus profondes, il me faut redoubler de lucidité pour ne pas envoyer chier toutes mes pensées et me contenter de simplement la prendre comme il me serait normal et aisé de le faire.
  
— Si tu ne me crois pas, tu n'as qu'à lui demander. Chuchote-t-elle en maintenant ses lèvres à quelques centimètres des miennes.

Elle se recule, me fait un petit signe pour que je me retourne. Quand je pivote sur mes talons, je m'attends à tout, à tout sauf à ce qu'Alaska soit dans l'embrasure de la porte, une expression dévastée sur le visage. Je n'ai même pas le temps de faire un geste, qu'elle sort en trombe de la chambre. Avant de perdre toutes mes chances avec elle, car c'est très certainement ce qui risque d'arriver si je ne me bouge pas, je plante Charlie et cours dans le couloir pour la rattraper.

— Alaska ! Al attends ! Je m'écrie depuis l'escalier quand, heureusement, elle finit par piler net devant la porte d'entrée.

Dans ma tête, les pensées fusent. Des morceaux de ma conversation avec Charlie viennent se mélanger à la crainte que ma mère soit encore dans la cuisine, je ne tiens pas à ce qu'elle nous entende.

— Aaron t'as une minute pour te justifier. Crache-t-elle sèchement quand j'arrive à son niveau.

Je trouve ça déplacé qu'elle m'accorde si peu de temps, d'autant que j'aimerais qu'elle aussi se justifie. Je la regarde droit dans les yeux, la haine qui émane de ses prunelles me défonce la rétine.

— Déjà pour commencer, c'est pas du tout ce que tu crois...

— Ok, c'est bon, j'en ai assez entendu, bonne journée Aaron.

Elle roule des yeux, je comprends que ce soit un peu cliché, c'est un quiproquo désastreux et alors qu'elle s'apprête à partir comme si elle était une victime dans l'histoire, je la saisis par le bras pour lui faire comprendre que les choses ne s'arrêtent pas toujours quand elle le veut.

— Al, tu me laisses même pas le temps de t'expliquer que déjà tu agis au quart de tour, attends cinq minutes au moins.

— Mais cinq minutes pour quoi Aaron ? Tu m'envoies un message pour que je vienne, je débarque et je te trouve avec Charlie à moitié à poil, je crois que les choses sont claires ! Franchement, je trouve ça dégueulasse que tu m'imposes ça comme si c'était qu'un jeu.

Au-delà de sa colère, je discerne une profonde déception dont je me sens accusé à tort.

— Pourtant y a une explication très claire à tout ça et c'est loin d'être celle que tu penses. Mais avant de t'en faire part, je voudrais savoir, c'est quoi ton but à toi ?

— Quoi ?!

Alaska me toise plus durement encore qu'il n'est possible de le faire, à croire que la seule chose qu'elle souhaite, ce sont des putains d'excuses, peu importe ce qu'il en est pour moi.

— Je vais être clair, est-ce que toutes tes putains de petites tentatives d'approche, tes supercheries, le pari et tout le bordel, c'étaient que des excuses pour te foutre de ma gueule depuis le début ?!

Pendant une nanoseconde, elle marque une hésitation, son regard se fait noir, elle pousse un soupir et ouvre la porte comme si elle allait partir, mais avant ça, elle fait volte-face pour m'enfoncer plus bas que terre.

— Je te dirais bien que c'est pas le cas, mais j'ai pas le goût au mensonge. J'en ai jamais eu rien à foutre de toi Aaron, alors retourne baiser ta putain de rouquine avant qu'elle refroidisse.

Ses paroles sont le coup de grâce. Même après qu'elle se soit éloignée et que la porte ait claqué derrière elle, je reste comme un con au pied de l'escalier. Un tumulte de sentiments se forme à l'intérieur de mes cavités. Cette fois, j'enclenche le mode off et mes pensées se taisent, les souvenirs meurent, je monte les marches deux à deux et regagne ma chambre, le visage fermé. Quand Charlie me voit réapparaître sur le pas de la porte, elle hésite à faire un pas vers moi, alors elle reste sur le lit.

— Tu veux le faire ? Je lui demande sans laisser l'ombre d'une putain d'émotion transparaître.

Elle hoche doucement la tête, son attitude a changé, peut-être que le ton de ma voix ou la mine sombre que j'aborde l'impressionne, mais c'est mieux comme ça, je me sens plus vivant maintenant qu'en moi, tout est mort.


(je mets cette musique en plus, parce que je trouve qu'elle correspond bien pour ce qui se passe entre Aaron et Alaska.. voilà voilà maintenant je vais laisser Charlie et Aaron faire ce qu'ils ont à faire ^^) 

https://youtu.be/eyk-Sliy8RU

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Hey hey, bien le boon jour :) 

J'espère que jusque-là, ces deux chapitres à balle d'émotions coco vous ont plu ! ^^ 

Ne dites rien, je sais que vous avez adoooré Charlie ahah ! 

Et alors, Aaron il va se sortir comment d'ce situation ? Parce que la belle princesse de glace, elle risque pas de faire le premier pas... ;)

Pleeeins de groos bisouus d'amouuur

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