Chapitre 48
Musique : Morgxn- Home.
PDV Sarah :
— J'en ai marre Mathilde, tellement marre. Je couine, agrippée à mon téléphone.
— Je te comprends Sarah, mais Théo va te le rendre, j'en suis sûre.
— Tu parles ! Je l'ai harcelé de messages hier soir, il a même pas répondu. À tous les coups il a dû le jeter à la poubelle, je te jure que si c'est le cas je l'étripe, une première fois pour ce qu'il t'a fait et une seconde fois pour mon carnet !
Mathilde rit, une voix s'élève, je reconnais sa mère, toujours en train de crier après elle.
— Bon Sarah, faut que j'aille mettre la table, mais avant, je voudrais que tu laisses tomber cette histoire de vengeance, ce qui s'est passé avec Théo ne concerne que nous. Le plus important, c'est que toi tu récupères ton carnet et qu'il te fiche la paix !
Je dis oui à tout ce qu'elle dit, avec le sourire, mais quand elle raccroche, je me laisse glisser au sol, pompée de mon énergie. Tout ça c'est la faute de Théo. Ces dernières semaines, nous chamailler faisait partie de notre relation et pour moi, c'était un moyen de lui faire payer et en même temps d'appliquer le plan, mais hier, il a dépassé les bornes. Les genoux ramenés contre ma poitrine, je me revois assise sur un banc la veille, mon carnet en main en train d'écrire quelques bouts de phrases qui me venaient. Presque toute ma vie est contenue dedans. Mes pensées, mes envies les plus folles et maintenant, je n'ai pas la moindre idée d'où cette part de moi peut être.
Depuis que Théo me l'a arraché des mains avant de s'enfuir en courant dans son bus, je n'ai pas réussi à le contacter. J'angoisse à l'idée qu'il ait pu le feuilleter, lire mes mots et me découvrir sous un angle où nul autre ne m'a encore vue. Dans ce carnet, c'est mon âme que je dévoile, celle que je suis sans l'ombre d'un mensonge. C'est moi. Moi dans mon entièreté, dans toute la sensibilité de mon être et ça, pour rien au monde je ne souhaite que quelqu'un en qui je n'ai pas confiance y ait accès. C'est trop intime. Trop intime pour que Théo soit celui qui me voit. Depuis que j'ai posé un pied à cette soirée, je ne me suis pas mélangée au groupe, je suis directement allée au fond du jardin pour que personne ne me dérange durant mon appel avec Mathilde. Mais comme elle me l'a dit à plusieurs reprises, me morfondre dans un coin ne me ramènera pas mon carnet. Je finis par me relever, mes articulations craquent. Je m'avance vers la maison, cette fois certaine de vouloir rejoindre la fête pour me vider la tête. Dans la cuisine, la musique me fait vibrer jusqu'à la moelle.
Je respire à pleins poumons, regarde les bouteilles sur la table et jette mon dévolu sur un mélange un peu hasardeux que je me concocte. Alors que je commence à siroter mon breuvage tout en me dirigeant vers le salon, je me heurte contre quelqu'un et manque de renverser mon verre au passage. En voyant le visage de Théo, je regrette que ça ne se soit pas passé. Je roule des yeux, esquisse un pas sur le côté, je ne me sens pas de prendre sur moi pour lui expliquer la situation. Théo ne manque pas de culot, il m'attrape par le poignet, comme si je lui devais quelque chose, à commencer par ma présence.
— Sarah, je te cherche depuis le début de la soirée, tu vas où ?
Son sourire à la con me donne envie de lui cracher dessus. J'inspire, j'expire, calme mes pulsions, rejette les pensées noires qui me cisaillent, mais c'est peine perdue, je suis aveuglée par ce sentiment de trahison qui grandit et grandit jusqu'à ne plus me laisser que de la colère à exprimer.
— Loin de toi, comme je m'en assure depuis que j'ai posé un pied à cette soirée de merde.
— Au moins ça a l'art d'être direct, je peux savoir ce qui se passe ?
Son expression d'hurluberlu me fait grincer des dents.
— Tu sais pertinemment ce qui se passe.
— Oui, mais justement, on pourrait pas en discuter ?
Mon sang s'agite dans mes veines, il bout, j'ai soudain très chaud, l'envie de lui hurler dessus monte en crescendo. Je tente de me rappeler les conseils de Mathilde, mais à bien regarder Théo, je n'ai pas du tout envie de me calmer, tout comme je ne veux pas d'échanges construits avec lui.
— Non, on ne peut pas. Les vingt-trois messages que je t'ai envoyés hier parlent suffisamment pour nous deux. Je rétorque, acide, alors qu'une certaine douleur se peint sur son visage.
Je suis trop obnubilée par ma propre détresse pour m'interroger sur ce qui le tracasse. En réalité, je me contrefous de ce qu'il peut penser ou même de ce qu'il s'imagine. Quand j'aurai mis la main sur mon carnet, je ne chercherai plus à me frotter à lui, au diable notre plan et le jeu, je préfère rendre les armes avant qu'il ne soit trop tard.
— Sarah, je te jure que j'ai pas reçu un seul de ces messages, est-ce que tu peux te montrer un peu plus explicite s'il te plaît ?
Il me fixe sans ciller, comme si la sincérité dans ses prunelles pouvait m'atteindre. Je ferme les yeux sur ça, fais mine de ne pas me soucier de son acharnement à vouloir comprendre. J'ai pris le risque de jouer avec le feu ces dernières semaines et maintenant je me plains d'une petite brûlure, seulement cette brûlure me consume l'âme.
— Rah, mais j'ai pas envie de te parler putain, qu'est-ce que tu comprends pas là ?! Je veux juste que tu me rendes mon carnet et que t'arrêtes de me prendre la tête à longueur de journée !
Ce n'est pas très fair-play de lui faire ce reproche, Théo semble du même avis et ne manque pas de me le faire sentir en m'incendiant du regard. Cette distorsion poignante qui vient me saisir le cœur m'incite à me mettre à sa place un peu avant. Est-ce qu'il a ressenti quand je lui ai mal parlé ? Auquel cas, j'aimerais pouvoir être désolée de m'apprêter à continuer mon petit manège.
— Mais je vais te le rendre ton carnet Sarah, je pensais pas que ça te mettrait autant en rogne, t'es pas obligée de tout m'envoyer dans la gueule non plus.
— Bah si justement, si t'avais pas mal pensé on n'en serait pas là ! Maintenant, d'ici à ce que je récupère mon carnet, je n'ai pas envie de perdre mon temps avec toi.
Voyant que Théo ne dit rien, mais ne bouge pas pour autant, je pousse un profond soupir et vide mon verre sous son nez. Quand le mélange arrive dans le creux de mon estomac, je réalise que je n'ai encore rien mangé, au lieu de donner priorité à ce détail, je me dis surtout que ce verre n'était pas suffisamment alcoolisé. Je fais demi-tour, retourne vers les alcools et je m'empare du whisky que je mélange avec un fond de coca. Quand je pivote sur mes talons, Théo n'a toujours pas bougé, il me couve du regard comme si j'allais faire une connerie d'une minute à l'autre, ça m'agace.
— Je peux savoir pourquoi tu me reluques comme ça ? T'as pas des trucs plus importants à faire ?!
— Non, je sais pas, j'ai l'impression que tu vas mal finir, alors je préfère garder un œil sur toi.
Je lui jette un regard désabusé, complètement sidérée qu'il prétende s'en faire pour moi. Cependant, s'il tient tant que ça à s'occuper des brisures qu'il a causées de par son insouciance, je ne vais pas me gêner pour lui donner du fil à retordre.
— Très bien, si ça t'amuse de jouer le baby-sitter.
Ne supportant pas la tension qui s'exerce entre nous deux à cet instant, je détourne mon attention et la reporte sur mon verre que je vide d'un trait. Une ribambelle de rots s'échappe de ma gorge, Théo me fixe sans savoir quelle réaction adopter. Je lui coule un regard noir, l'air de dire que j'ai envie qu'il se casse, mais il se contente de sourire, alors je me tourne une dernière fois vers les bouteilles et m'abreuve de vodka jusqu'à être suffisamment remplie d'alcool pour la soirée. Au moment où je m'aventure dans le salon, Théo est toujours dans mes pattes, je ne comprends pas les raisons qui le poussent à me suivre, mais je n'ai pas envie de me le coltiner toute la soirée au cas où il ne l'aurait pas pigé.
Quand je commence à me fondre dans la masse, à me dandiner dans tous les sens sur le rythme de la musique, soudain emballée par les effluves de l'alcool, je mets de côté ma rancune et l'idée que Théo est quelque part, parmi les gens qui m'entourent. Ce n'est qu'en me faisant aborder par un gars pas mal du tout que je ressens de nouveau sa présence. Alors que l'inconnu se joint à ma danse, collant son corps contre le mien, la chaleur de son contact disparaît brusquement. La silhouette de Théo se dessine à sa place, ma colère menace de refaire surface, mais l'alcool la tient à l'écart, du moins, jusqu'à ce qu'il se rapproche. Je me faufile parmi les corps pour prendre mes distances et sens mon cœur s'alléger quand je repère Alaska. Je m'accorde sur son rythme, m'amuse à coller mon bassin contre le sien, tandis qu'elle rit aux éclats, les yeux brillants.
— Alors c'est l'éclate Sarah ? Tu pointes enfin le bout de ton nez ?!
— J'ai connu mieux. Théo me colle aux basques, j'en peux plus, je peux même pas m'amuser comme je l'entends !
— Je t'avoue que mon moral est pas au top non plus, je viens tout juste de réaliser à quel point nos vies ne tournent qu'autour du jeu et des gars. On est libres de rien au final, si ce n'est peut-être de danser. Soupire-t-elle en jetant un regard autour de nous. Et t'as raison, Théo te lâche pas du regard.
Ma situation la fait rire, c'est peut-être pas plus mal. Je songe à ses paroles, mais mon degré de compréhension s'est fait la malle en même temps que ma sobriété. J'ai envie de m'amuser, de respirer la parfaite insouciance d'une vie normale où les prises de têtes ne sont pas constamment présentes. J'ai envie de profiter pleinement de l'alcool qui me rend si légère à cet instant, de me lâcher avant que tout ne retombe à plat et que je me retrouve seule avec mon amertume. Sur un coup de tête ou non, quand je vois la table disposée en bas de l'escalier, j'attrape la main d'Alaska et l'entraîne avec moi. Elle me regarde surprise, s'apprête à me poser des questions, mais avant qu'elle ne le fasse, je me hisse sur la table et lui tends la main pour qu'elle me rejoigne. Dans un premier temps elle hésite, puis elle rit à gorge déployée et grimpe. Les regards se tournent vers nous, je vois plein de visages et de sourires qui nous font face tandis qu'on a l'audace de se déhancher à notre guise à la vue de tous, y compris de Théo. De là où je suis, il n'est pas en capacité de me freiner ni même de m'arrêter, ce soir, je suis la seule à décider de ce que bon me semble.
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MMMH mais c'est que cette soirée est pleine de rebondissements de tout côté !!
La relation Théo/Sarah risque de changer... Faites péter vos ressentis, je meurs de curiosité héhé ! ;)
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