Chapitre 46
Musique : Flora Cash- You're Somebody Else
PDV Alaska.
La perspective d'une soirée me plaisait dans l'optique de passer du temps avec les filles ou de faire tournoyer Aaron dans mes filets, mais au bout de quelques heures, autant se rendre à l'évidence, je m'ennuie ferme. Jade est partie manigancer je ne sais quoi avec Nils, Sarah n'a pas pointé le bout de son nez depuis qu'on est là et Octobre danse avec Aaron. Donc en plus de ne pas avoir d'amis, je ne peux même pas m'accaparer ce dernier. Quand il n'est pas en train de flirter avec Octobre pour son image, il drague Charlie et la suit où qu'elle aille, ce qui est loin de m'aider. Même si au lycée les tensions ont fini par disparaître entre nous, ce n'est pas suffisant, parce qu'Aaron n'a pas l'air de tomber sous mon charme ou alors il le cache bien.
Assise sur un canapé à l'écart, je les regarde fixement danser, de loin, ils ressemblent à un couple, du moins à quelque chose de visqueux et collant qui ondule avec un brin de sensualité. Je trouve ça ridicule qu'Octobre se prête autant à son jeu, tout comme ça l'est de m'insurger contre. Si je me concentre sur les potentielles émotions qui me traversent, je sens bien qu'une part de moi voudrait être à sa place. À l'instant où cette pensée m'habite, je me redresse d'un bond. Il faut que je fasse quelque chose. Mon regard se pose sur Owen, je penche la tête sur le côté, l'observe, il a l'air atterré, ses yeux pendus au corps-à-corps d'Aaron et Octobre. Est-ce que je les regardais avec cette même expression sauvage dans le regard ? Auquel cas, il faudrait peut-être que je m'en inquiète, mais en attendant, le génie en moi s'éveille, et Owen est l'occasion parfaite pour me satisfaire. Sauf qu'en venant à lui pour confirmer ma théorie, je n'imaginais pas qu'Aaron réagisse avec un tel excès.
J'espérais faire naître en lui les sentiments contradictoires que je me coltine depuis une semaine et maintenant que j'ai réussi à le traîner dehors après sa pseudo-bagarre avec Owen pour en tirer des explications, il n'a pas prononcé un mot. J'attends sagement qu'il se décide, observe les allers-retours qu'il s'acharne à faire pour retrouver son calme. Tenter de le provoquer ne risque pas de m'aider cette fois, je l'ai suffisamment fait en me trémoussant aux côtés d'Owen. Et si sa réaction démesurée manifeste son degré d'attachement à mon égard, alors c'est le jackpot. J'aurai enfin la preuve inéluctable, qu'il est en fait, fou de moi sous ses airs détachés. Je ris, finalement c'était facile, même si j'aurais préféré qu'il avoue sa défaite au lieu de déglinguer la gueule de son meilleur pote. Mais après tout, comment des joueurs pourraient connaître la notion d'amitié s'ils ne cernent même pas celle de l'amour ? Aaron s'assoit sur l'herbe, me demande si je me fous de sa gueule. Je secoue la tête, sa colère est palpable, il n'admettra jamais qu'il est rongé par la jalousie, qu'il me veut.
— Putain... Je peux savoir depuis quand tu joues les filles faciles comme ça ?
Je le dévisage incrédule, ne sachant pas vraiment s'il est sérieux ou si c'est justement les propos derrière lesquels il prévoit de se cacher, auquel cas, je suis plutôt déçue.
— Mmh, déjà si tu veux savoir quoi que ce soit, il va falloir que tu m'expliques pourquoi t'as pété les plombs comme ça.
Il rit salement, fait rouler sa tête d'une épaule à l'autre avant de plonger son regard dans le mien.
— Franchement Al, ça te regarde pas. Je suis suffisamment déçu par ce que t'as fait et trahi par le manque de respect d'Owen, pour avoir envie d'en parler.
J'ai un bref mouvement de recul, le soupçon d'une hésitation devant le début de son charabia. Les choses ne se déroulent pas vraiment comme je l'avais prévu. À commencer par sa réaction dans le salon et maintenant par son baratin qui n'a pas l'air de relever de la jalousie, mais plutôt des reproches.
— Heu, ouais sauf qu'en fait, les choses ne se passent pas toujours comme tu le voudrais, et moi je suis curieuse de savoir comment j'ai bien pu te décevoir. Je crois pas que je te devais quelque chose.
Aaron me regarde d'un air véritablement blasé, je le reconnais à peine, j'en viens même à me demander si l'alcool tire pas les ficelles derrière tout ça. Il se détourne, souffle, peut-être que je m'y prends pas de la meilleure des façons, mais il ne fait aucun effort.
— Peut-être pas toi, mais Owen oui. Et puis t'es pas innocente, t'as beau prétendre que t'es restée fidèle à tes valeurs, moi je trouve que t'as changé. La Alaska que j'ai connue, elle se laissait pas draguer impunément par n'importe quel mec. Crache-t-il au risque de me voir lever les sourcils, indignée par les propos qu'il tient.
— La Alaska que t'as connue, elle t'emmerde profond ok ? D'où tu te permets de me critiquer comme ça ? Tu veux pas non plus me traiter de pute, histoire que moi je puisse enfin te qualifier convenablement de violeur ?
Aaron soupire, se laisse tomber en arrière sur le sol et fixe le ciel sans rien dire. Quand il se relève, la noirceur dans son regard se dissipe.
— C'est pas ce que je voulais dire, seulement, je comprends pas. Je croyais que tu détestais notre jeu, moi je me suis plié en quatre pendant deux ans pour éviter que t'y sois mêlée et maintenant qu'Owen t'as pris pour pion, tu commences à te laisser faire.
— Comment ça tu t'es plié en quatre ?
— Je sais pas, peut-être par respect pour ce qu'on a vécu avant, je voulais m'assurer qu'aucun joueur te choisisse. Sauf qu'Owen s'est joué de moi à la rentrée, donc tu peux comprendre que je me sois senti un peu pris pour un con en te voyant dans ses bras tout à l'heure. Je croyais qu'il te répugnait.
Son honnêteté anime un semblant d'émotion en moi. Pour une raison qui m'échappe, ça me touche. Je repense à mon entrée à Princeton, à toute la haine que je ressentais quand il a rejoint le Virginity Game. Ça me dégoûtait de le voir se joindre à des gars barrés, ne vivant que pour dépouiller des filles de leur amour-propre. Je pouvais pas le tolérer. Je le peux toujours pas, néanmoins, les aveux d'Aaron me laissent penser qu'une part de lui d'avant subsiste encore derrière tous ses masques.
— Ça explique pas que tu l'aies frappé... Tu serais pas un peu jaloux dans le fond ? Je minaude, décidée à m'en assurer.
Une lueur amusée vient tanguer dans son regard, je me demande quelles pensées traversent son esprit alors que le mien est confus, trop brouillé.
— Alors là, pas du tout. Ça faisait un moment que les choses s'accumulaient entre Owen et moi, fallait bien que ça pète à un moment, mais il a jamais été bagarreur, je t'avoue que ça me frustre de me démener dans le vide.
Aaron ricane, se redresse et se rapproche de moi. Cette proximité me laisse de marbre. J'ai l'impression qu'il ment, qu'il a forcément été guidé par la jalousie pour en venir aux poings si subitement, mais je me voile la face, en réalité, c'est moi qui voudrais que ce soit le cas.
— C'est dingue, j'ai l'impression que tes arguments, c'est un peu du vent.
J'esquisse un petit sourire pour que le tout passe mieux.
— C'est marrant, mais moi j'ai surtout l'impression que c'est ce que t'aimerais. Ton rapprochement avec Owen, il m'a mis en rogne parce que je me suis pas senti respecté. Pourquoi tu t'attendais à autre chose ?
À la façon dont il me dévisage, je me sens prise la main dans le sac, je n'ai pas d'autres issues que l'aveu ou le mensonge, comme les joueurs s'y adonnent très certainement quand on s'acharne sur eux pour avoir des réponses. C'est plutôt cocasse de m'identifier à l'un d'entre eux, je n'avais jamais pensé ainsi avant.
— Parce qu'en te voyant te jeter sur Owen sans raison, au premier abord, la seule explication plausible qui m'est venue c'est que tu sois jaloux.
— Et t'aurais aimé que ce soit le cas ?
— Oui. Ça m'aurait confirmé ta faiblesse et ta future défaite concernant notre pari. J'affirme avec cette petite fierté insolente qui l'amène à conserver ses distances sur le coup.
Mais je vois bien que ses gestes sont plus familiers, un petit quelque chose que je n'avais pas prévu s'installe presque contre mon gré.
— Désolé de te décevoir, mais je m'abaisse pas à des jeux minables comme celui-là.
— Ravie de te l'entendre dire, j'avais peur que le challenge soit trop facile.
Aaron rit, passe son bras autour de mes épaules et m'entraîne vers la maison. Je me laisse faire, la conscience anesthésiée par cette sensation trop douce qui m'enveloppe à son contact.
— Al, je crois que tu te surestimes. Me chuchote-t-il.
Je tourne la tête, nos regards se croisent. J'aimerais le repousser, mais je reste contre lui de peur qu'il ne comprenne. Peu importe les cartes qu'il a en main, je sais qu'il n'a pas besoin de se retourner cent fois les méninges pour me faire tomber. Alors qu'on arrive dans le salon bondé de monde, je le regarde du coin de l'œil, avec, dans le cœur, ce sentiment terré qui se débat et crie corps et âme. Je l'écrase, souris, il est hors de question que je flanche la première. Hors de question que j'accorde de l'importance à cette attirance traîtresse qui se déploie en moi.
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Hey hey ! Bon alors c'est un chapitre un peu plus court (contrairement aux autres en fait) ^^ parce que je vous avoue qu'après le PDV d'Owen, je me suis un peu éloignée dans ma tête de la soirée, des autres personnages etc...
Vous pensez quoi de la relation Aaron/Alaska alors ?
Plein de bisouus et d'amour sur vous, je vous souhaite tout le meilleur du monde (hihi j'ai la musique qui me vient en tête, que de belles paroles) ^^
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