Chapitre 24, 3
La jeune femme se dirige vers la chambre de sa meilleure amie, à laquelle elle toque doucement. Aucune réponse, comme elle s'y attendait. Elle entre pourtant, s'assoit à côté du corps endormi avant de lui murmurer de se réveiller. Jane fait pour la première fois depuis longtemps son âge ainsi pris dans les bras de Morphée. L'humaine est si loin de leur monde et pourtant si bien prise entre ses griffes. Un simple frison s'empare de la peau de la sorcière alors qu'elle la touche et que les images glacées des vampires s'inscrivent dans son esprit. Ils la tueront lentement... Justine fera tout pour qu'ils ne la touchent plus jamais.
— Lève-toi Janette. Faudra qu'on parle après. Elijah est là, évite de te trimbaler en culotte.
Un simple rire étouffé et la sorcière quitte la chambre de la jeune fille. Elle ne rejoint pas directement le loup. Non elle retourne jusqu'à son armoire, prend le premier pantalon et le premier haut qui lui tombe sous la main avant de retourner dans le salon. Elle s'assoit alors à côté de lui, sur une des chaises hautes, croisant à son tour ses jambes après s'être servi un café.
— De toute manière, Isolda a choisi. La question du territoire se pose pas, j'vais devoir aller sauver les fesses de tous les loups que je croise.
— Met les choses dans le bon ordre, les loups sauveront bien plus tes fesses que tu ne sauveras les leurs.
Elle ne peut retenir un sourire à sa réponse.
Ils sont plus puissants qu'elle, c'est certain. A côté d'eux, elle n'est qu'une banale mortelle, facilement brisable, à détruire d'un geste trop brusque. Et pourtant, c'est d'elle qu'ils ont besoin. C'est elle qu'ils sont venus chercher.
Elle est l'héritier d'un pouvoir trop grand pour elle.
Elle soupire, une seconde, plongeant ses yeux loin de la vision du loup. Ses lèvres se portent à son café mais elle n'a pas l'occasion de boire que déjà Elijah se redresse, capturant sa présence dans un étaux de fer. Il ne la touche pas mais elle se sent soudainement prise au piège avec son bras lui coupant toute possibilité de se relever. Il ancre son regard dans le sien. La sorcière le soutient avec morgue. Croit-il réellement qu'elle allait baiser les yeux ? Qu'importait le feu de ses prunelles, il ne pouvait que rêver de la voir incliner la tête.
— Ecoute Justine, je n'sais pas ce que tu crois qu'il se passe entre nous. Mais si tu ne veux pas faire partie de ce que tu appelles grossièrement mon territoire, tu n'en feras pas partie. Je ne t'ai pas montré mon passé pour t'obliger à quoi que ce soit. Je l'ai fait pour essayer de te convaincre. Seulement. Certes, j'ai été plutôt insistant et brutal, mais je n'ai pas eu d'autres choix à ce moment-là. J'étais désespéré de ne serait-ce qu'imaginer à nouveau tout p...
Les traits de la sorcière se détendent. La barre têtue de son front disparait, remplacer par la compréhension. Sa main se lève, prête à saisir celle du loup.
Et il lui arrache, s'échappant à son regard.
— Tu es seule maîtresse de tes choix. Considère-nous plutôt comme des alliés libres de leurs actes, non comme des prisonniers forcés de satisfaire leur destin. Si tu veux que je disparaisse, je disparaîtrais, mais ne compte pas sur les vampires pour le faire. Et si tu n'es pas convaincu de ça... je ne devrais pas être là, à passer pour le dictateur que je ne suis pas. Je ne suis alpha que de ma meute, Justine, et tu n'en fais pas partie. Tu... tu es différente pour moi, mais tout aussi importante. Et sache que, pour ma part, je suis convaincu d'une chose. Isolda n'a rien à voir là-dedans.
Elle ne le quitte pas des yeux durant sa courte tirade. Le loup perd cette morgue qu'il avait si bien affichée. Elle sent qu'elle le touche dans ses refus et dans sa haine totale de tout ce qu'obligeait Isolda sur leur vie.
Elle baisse alors la tête et ne répond pas.
Le silence se fit lourd, presque oppressant. Elle ne parlera pas car elle ne connait que trop bien les mots qui peuvent sortir de sa bouche. Elle ne veut pas lui confier sa peur, elle ne veut pas lui murmurer ses terreurs. Elle s'enfonce dans son silence pour ne pas avoir à lui avouer trop de choses. Elle n'est pas une louve. Elle n'en a pas la force. Aurait-elle seulement la force de suivre cette prophétie écrite pour elle ? Justine n'en a aucune idée et ça aussi l'effraie. Trop de choses la terrifient.
Le silence est rompu par Jane. Elle pénètre dans la cuisine en baillant, tout juste réveillée. La jeune fille n'avait apparemment pas compris les mots que lui avaient soufflé Justine. Son t-shirt n'est pour une fois pas trop grand, offrant une vision d'ensemble sur ses longues jambes et sa culotte de grand-mère.
Elle s'approche de Justine, les yeux encore ensommeillé et vient planter une bise sonore sur la joue de sa meilleure amie.
— J'ai pas assez dormi Ju'... Pourquoi tu m'as réveillée...
— Range ton popotin Janette. On a un invité...
La concernée se retourne brutalement et Justine ne peut que parfaitement imaginer l'expression horrifiée qui s'affiche sur son visage, mélange d'un lapin terrifié et d'une tomate fraiche.
Pourtant, Jane ne bondit pas dans sa chambre et se fend simplement d'un petit salut qui manque clairement de conviction. Elle se précipite derrière le bar, récupérant un bol et un paquet de céréale.
— Elijah. Je te présente Jane, ma colocataire.
— J'avais deviné. Ravie de faire ta connaissance Jane, Justine m'a beaucoup parlé de toi.
Jane rougit jusqu'aux oreilles, plongeant dans son bol de céréale en faisant mine de ne rien entendre. Justine soupire, avant de finir par se lever, posant son café.
— Mon appart n'est pas immense mais les murs ont une bonne isolation. On devrait parler Elijah. Seul.
Jane disparait un peu plus, petite souris attirée par un trou dans l'espace-temps alors que Justine ne lui offre pas un regard.
D'un sourire, elle invite Elijah à la suivre, jusqu'à sa chambre. La sorcière s'assoit sur son lit, récupérant contre elle une peluche. L'un de ses seuls souvenirs de l'orphelinat, offert par une des dames chargées de s'occuper des enfants.
— Je ne sais pas ce qu'on a prévu pour nous Elijah, glisse-t-elle. Mais de toute façon, on ne peut pas faire grand-chose contre. Autant que je te face confiance sur quelques points.
— Merci, finit-il par dire après un léger silence. Merci d'essayer de me faire confiance. Je n'ai pas l'habitude d'avoir cette chance... les loups sont excessivement exigeants. Tu l'as peut-être déjà remarqué d'ailleurs.
Il s'avance vers elle et s'assoit à ses côtés. Il se penche en avant, posant ses coudes sur ses cuisses en liant ses doigts. Le loup tourne alors la tête vers elle et lui sourit, se voulant rassurant.
— Avant d'envisager quoi que ce soit, laissons-nous le temps et apprenons d'abord à nous connaitre d'accord ? Interroge-moi. Pose-moi toutes les questions qui te passe par la tête. J'y répondrais.
Un sourire en coin étire les lèvres de Justine. Elle baisse la tête pour tenter de retenir son rire moqueur, qui meurt dans un silence. Il la rejoint, trop prêt. Elle ne peut plus mentir en sentant son cœur s'emballer dans sa poitrine.
Les nombreux jours qu'ils ont passé ensemble avaient commencé à les rapprocher. Il ne lui laisse pas le temps d'ouvrir la bouche qu'il se laisse tomber sur le lit. Ses bras se glissent derrière sa tête, faisant gonfler des biceps que Justine n'avait que deviné sous les vêtements du loup. C'est un guerrier. Avec ses cheveux blonds un peu trop long et cette flamme dans les yeux, même un aveugle pourrait voir l'aura qui s'échappe de lui. Il a tout d'un animal sauvage, un animal dangereux qui fait pourtant aujourd'hui preuve de tant de douceur.
— Ma mère. Tu l'as connu toi pas vrai ?
Justine a revu la mort de celle qui lui a donné la vie en boucle dans son esprit. Elle a pleuré, quelques heures sans pourtant se laisser le temps de s'abandonner à son deuil. Jonathan et Jane étaient déjà là quand elle est arrivée.
– J'aimerais que tu me parles d'elle.
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