Chapitre 22, retour à la maison
Le soleil baigne déjà la cour de ses rayons dorés. Justine ne s'est pas rendu compte qu'elle est restée si longtemps enfermée dans cette pièce et dans les souvenirs d'Elijah. Elle n'a rien vu de la course de la lune. Elle n'a rien vu de la nuit qui avait filé à toute vitesse, emportant avec elle les peurs de la sorcière.
Au loin, le rire des enfants commence déjà à chanter. Ils lui rappellent d'autre souvenirs, trop douloureux, qui ne lui appartiennent pas. Voilà des années, l'île était déjà remplie de chants enfantins et de rires. Ils courraient tous ensemble les petits louveteaux avant que les vampires ne viennent tout détruire.
La blonde frisonne, avant d'offrir son visage aux caresses du soleil pour laver son esprit. Une légère brise vient s'enrouler dans ses mèches, porteur d'anciennes paroles.
Aujourd'hui, Elijah est censé la ramener chez elle.
Et l'Alpha tient ses promesses.
Mais le luxe dont il se pare ne plait pas à la sorcière. Pas plus que l'hélicoptère qu'Elijah a prévu pour les ramener jusqu'à la ville.
Justine a des centaines de questions sur le bord des lèvres, mais les retient dès qu'elle le voit se présenter comme un prince charmant auquel il manque bien des poils. Un rire moqueur franchit ses lèvres. Elle refuse la main tendue, grimpe dans l'hélicoptère et empoigne le casque qu'il lui tend, censé protéger ses oreilles
Elle ne peut s'empêcher de laisser son regard se perdre sur la baie de San Francisco en contrebas.
L'île de l'Aurore est là, perdue au milieu de nulle part et entourée d'une buée violine que Justine discerne comme fruit de la magie. Catherine la rend invisible, la maintenant hors du temps, loin de toutes les cartes. Voilà donc pourquoi cette île n'apparaît sur aucune carte. Les pouvoirs des sorcières entourent ce lieu saint. Ajoutés à une magie au goût d'interdit que la jeune femme reconnaît sans pourtant ne l'avoir jamais vue. Celle d'Isolda.
—Comment les vampires vous ont attaqué ? L'île aurait dû être protégée et inconnue pour eux. Comment ont-ils pu la voir ?
—L'île n'est pas restée longtemps un mystère pour les vampires. Ils l'ont découverte, et ont aussi bien vite appris qu'ils ne pouvaient pas y accéder. Du moins pas sans autorisation. Mon père avait un rêve. Il espérait pouvoir établir un traiter de paix entre toute les créatures existantes sur cette planète, plus fort encore que le parchemin car nous n'aurions pas été contraint. La guerre aurait cessé. Les loups n'auraient plus eu à se battre... Ils auraient préservé la survie de la meute. Aujourd'hui, notre existence ne se résume qu'au but ultime d'exterminer les vampires. Une fois fait... nous serons nous aussi condamné à disparaître...
Les prophéties sont faites pour se réaliser. C'est ainsi. Ce massacre nous a donné une leçon... mais nous ne devons pas nous fixer d'autre objectifs que celui que nous avons déjà.
Justine le fixe, mordant sa lèvre inférieure. Les idées d'Elijah pouvaient sembler folles... Mais la sorcière était certaine que tous les vampires n'étaient pas les monstres que les loups offraient comme ennemis mortels. Que seuls les Primordiaux, leur rage et leur haine, étaient le danger.
—J'ai vu dans mes rêves le visage d'un vampire aux yeux aussi noirs que l'Enfer volait un parchemin, lança la sorcière. Vous aviez fait une alliance il y a très longtemps pas vrai ? J'ai vu le sceau d'un Conseil... Pourquoi protéger les humains alors que cela vous mènera à votre perte Elijah. Vous pourriez prendre le contrôle du monde. Votre morsure transforme comme dans les films pas vrais ? Un coup de croc et bienvenue à un nouveau lycan ? J'ai vu Underworld tu sais. Tous les mortels ne résistent pas mais vous pourriez détruire les vampires pour de bon avec une armée de loup garou docilement asservie...
—Les fictions sont souvent très loin de la réalité, Justine, lance-t-il avant d'éclater de rire. Nos morsures tues, elles ne transforment pas. Nous ne devenons pas loups, nous naissons ainsi. Et, depuis le massacre, nous sommes en sous-effectif. Chassés comme des proies... incapable de nous regrouper. Les loups sont une famille, les meutes sont une famille. Pas un simple rassemblement.
La discussion est close.
Elijah se concentre sur le vol, l'abandonnant au paysage qui ne la touche plus. Elle ne parvient pas à s'émerveiller, obsédée par les mots qu'Elijah a soufflés. Les créatures sont toutes amenées à disparaitre. Les uns par forfais, les autres par victoire.
Le loup ne l'accompagne pas. Sitôt le moteur de l'hélicoptère éteint, Justine descends seule. Un unique regard l'accroche à Elijah, gagne son cœur. Elle laisse la portière se refermer sur elle, l'arracher à celui qu'elle n'a pas vraiment envie de quitter.
Dans la voiture, Justine à l'impression de ne pas être à sa place. De revenir à un monde qu'elle a quitté une éternité plus tôt. Sans téléphone, sans accès aux réseaux, la sorcière s'est coupée du monde et à certainement perdu travail, contacts et occasions manquées.
Elle crève d'envie de rentrer chez elle, mais se sent mal d'abandonner ainsi les loups. Elijah lui laissera certainement le temps de digérer tout ce qu'elle a appris, de faire son choix. En a-t-elle pourtant vraiment un ? Elle ne peut pas tous les laisser mourir. Elle se l'interdit.
Le chauffeur la dépose devant chez elle, dans ce quartier de mauvaise réputation où elle n'a pas eu le choix d'habiter. Un couple de junkie s'engueule à cent mètre, un chien hurle à la mort dans un appartement mal isolé et l'odeur de pise et de crasse la prends à la gorge.
Mais Justine aime cet endroit où elle a enfin trouvé un pied à terre. Ici, c'est chez elle. Son quartier, ses défauts et ses immenses qualités humaines.
Alors, enfin, la sorcière sourit.
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