Partie XX

                               DANS L'APPARTEMENT DE LYNDA.


           Lynda vivait dans un adorable petit appartement, qui autrefois était un entrepôt de couture. Après la faillite de l'entreprise, un riche entrepreneur avait tout racheté. Puis avait tout découpé pour en faire différents appartements chaleureux, que des gens de classe moyenne voire un peu moins ont pu s'offrir. Des locations très abordables pour des gens qui voulaient vivre en ville.

           Son petit salon aux murs mauve et ses grandes vitres hautes, typique de celles d'un atelier, l'éclairaient en masse la pièce.

           Plusieurs coussins étaient étalés au sol ici et là en vrac. Tandis qu'à côté se trouvait deux fauteuils, un bordeaux en velours avec dossier et accoudoir, tandis que l'autre était une sorte d'œuf dans lequel on s'enfonçait comme dans un cocon douillé.

           Cassandre assise dans ce dernier attendait son amie partie dans la cuisine ouverte par une verrière donnant sur ce petit salon cosy. Elle préparait un thé et des petits gâteaux à déguster pour leur séance commérage du jour.

-Mais tu es sûre qu'il était sérieux ? Demanda-t-elle au loin.

-Oh oui!Crois-moi.

           Lynda arriva tenant dans les mains un grand plateau bien rempli. Deux tasses, une tellière, et plusieurs assiettes de gâteaux variés tant en couleur que par leur goût. Elle posa le plateau sur la table et tout en servant le thé continua :

-J'avoue que je suis sceptique et ne comprend pas. Comment un homme si charmant, attentionné et qui s'est occupé de toi des mois durant ne peut-il pas être amoureux ?

-Je sais, souffla Cassandre dépitée et abattue.

-Excuse-moi de te dire ça, mais soit il ment, soit c'est un grand malade pour faire une telle chose.

           A ces mots, Cassandre poussa un petit rire retenu.

           En effet, il ne fallait pas être très net pour donner autant de sa personne, sans rien attendre en retour et en n'ayant aucun sentiment. Ce pouvait-il, qu'il soit simplement un ange tombait du ciel ? Cassandre se perdit dans ses pensées, cherchant désespéramment une réponse à tout cela.

-A quoi tu penses, finit par lui demander son amie ?

-A rien. Je cherche désespérément une réponse à tout cela.

-Et s'il n'y en avait tout simplement pas ?

-Est-ce possible ?

-Quoi ? Qu'il soit complètement fou ou qu'il n'y ait pas de réponse.

-Les deux, souffla-t-elle triste au fond d'elle-même.

-Tu l'aimes, n'est-ce pas ? Demanda son amie, la regardant par en dessous, tout en buvant son thé. Le regard doux et compatissant.

-Je ne pensais pas le redire un jour. Mais oui, je suis attachée à lui et je l'aime. Comment ne pas ressentir de sentiments, après tout ce qu'on a vécu lui et moi. C'est contre nature. Inhumain. Ne l'est-il pas ?

-Si. Bien sûre que si ma chérie, lui répondit son amie en venant s'asseoir près d'elle pour la prendre dans ses bras et la réconforter autant qu'elle peut.

           Après de longues heures de discussions, des litres de thé bu et un nombre incalculable de gâteaux avalés, les deux jeunes femmes conclurent sur une idée des plus absurde. Audren n'aimait que les gens tristes, les femmes qui n'étaient plus que l'ombre d'elles-mêmes. Pire encore, peut-être aimait-il les femmes qui n'étaient plus.


                                                            ***


           Cassandre rentra chez lui, plus triste que jamais. Elle n'ouvrit pas la bouche, ne lui adressa aucun mot, aucune parole, quelle soit verbale ou visuel. Elle se mura dans un silence total, qui inquiéta Audren. Il ne comprit pas ce qu'il se passait. Elle qui avait retrouvée le goût à la vie, elle qui allait tellement mieux, comment en une après midi pouvait-elle avoir changée ? A moins que cela date d'avant et qu'il ne s'en était pas rendu compte.

           Audren touchait par ce mutisme, se remit à s'occuper d'elle. Il fut au petit soin, comme il avait été quelques semaines, quelques mois auparavant.

           Cassandre fut encore plus meurtrie de la situation, et comprit que pour avoir son attention, et possiblement son amour, elle devrait demeurait à tout jamais une âme en peine.

           Le cœur en miette tel du cristal brisé, l'être effiloché tels des lambeaux, l'esprit plus tout à fait clair pareil à un champ de bataille. Cassandre s'endormit.

           Elle enchaîna les jours et les nuits, enfermée dans cette pensée noire d'obscurité, qui la mordillait chaque jour un peu plus, mettant son cœur à mal. Sa souffrance ne cessait de grandir et elle reperdit goût à la vie une fois de plus. Pour elle, les jours comme les nuits se ressemblaient toutes. Elle ne comprenait plus le sens de la vie. Le sens de SA vie.

           Lynda essaya de la secouer, de la faire réagir. Mais Cassandre restait stoïque. Sans réaction. Ruminant intérieurement sa douleur face à l'effroyable vérité. Audren ne l'aimait que lorsqu'elle était en perdition.

           Lynda lui proposa alors de faire semblant devant Audren. Mais Cassandre lui répondit qu'elle n'avait pas besoin, car elle était vraiment triste et blessée au fond d'elle-même de savoir ce qu'elle sait. Audren était un mélancolique d'une puissance incroyable et seule sa peine, sa souffrance intérieur pourrait le rendre heureux et amoureux d'elle. Alors elle décida de se sacrifier pour avoir son amour.

           Lynda tenta désespéramment de la raisonner, mais n'y arriva pas. Elle voyait bien que son amie souffrait et qu'elle ne le faisait pas réellement par conviction, ni même par amour comme lui disait son amie.

           Cassandre était dépressive à ses yeux, et cet homme finalement ne l'aidait pas tant que ça. Elle voulu, l'en éloigner, mais cela était pire. Lynda se résigna et laissa son amie auprès de l'homme, la gardant toujours à l'œil.

           Des jours, des semaines, puis des mois passèrent, Lynda observa un petit mieux chez Cassandre, et voyait que finalement, être près de lui, ne lui faisait pas tant de mal que ça. Elle s'en réjouit, même si elle voyait bien que son amie n'était plus vraiment celle qu'elle avait connu. Celle-ci était teintée d'une mélancolie en surface qu'elle ne lui connaissait pas, puis par moment quand elle n'était que toutes les deux, elle retrouvait son amie. Son espiègle complice qui rit à ses histoires cocasses et ses gaffes incessantes et qui aime s'amuser. Puis dès qu'apparaissait l'homme, Cassandre revêtit le masque de la souffrance. Lynda souriait devant ce changement d'attitude et pensa au fond d'elle-même que finalement, Cassandre avait appliqué son conseil de base. Faire mine de, se jouer de l'homme comme il se jouait un peu d'elle. Elle les regardait du coin de l'œil sans un mot, tant qu'elle retrouvait son amie comme elle était quand elles n'étaient que toutes les deux, cela lui convenait.


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