19. Jouer avec son reflet
Cela fait déjà plus d'une semaine que je suis arrivé chez ma grand-mère et au fond, j'ai l'impression d'y être depuis au moins trois mois. Comme si j'y avais passé toutes mes vacances. Ça aurait été une chouette idée de venir là pour les vacances d'été l'an dernier. Je crois que je commence à me plaire ici, même si le wi-fi me manque, mais j'arrive à m'en passer. Ce n'est pas comme si je suis un accro des séries et des films ou bien même des réseaux sociaux, non, mon ordinateur me sert exclusivement à travailler. Même pas à jouer. Je l'ai acheté il y a deux ans avec ma paye de mon job étudiant du moment : Serveur. Mes pieds s'en souviennent encore.
Même dans la maison il n'y a pas beaucoup de réseau, seulement dans la chambre depuis laquelle j'envoie de temps en temps un sms à maman. Je me demande comment elle va, si elle a besoin de quelque chose ou pas.
Donc vraiment, tout ça, tout l'aspect technologie auquel j'étais attaché avant, ne me manque pas. De toute façon, si j'ai besoin d'internet, je vais au café et ça me donne un bon prétexte pour aller me battre avec Cléo qui n'est jamais mécontente de me voir. Elle peut dire ce qu'elle veut, tout son corps la trahit : à chaque fois que je passe la porte, elle sourie comme une idiote.
C'est dur d'être un sex-symbol de nos jours.
- T'en penses quoi de ce studio ? Il est sympa, non ? proposé-je
- Je trouve le loyer carrément indécent pour ce que c'est.
- Et celui-là ?
- On dirait un cagibi.
Et me voilà à lui demander un avis sur mon futur chez moi. Je ne sais même pas pourquoi je fais ça. Je veux dire, c'est quand même à moi que revient la décision finale de savoir où je vais vivre pendant deux ans, non ? Mais Cléo a l'oeil féminin que je n'ai pas et puis elle connaît plus le coin que moi aussi, donc je lui fais confiance pour me trouver un truc pas trop cher et vivable. Je n'ai pas envie de répondre au cliché de l'étudiant vivant dans un placard à balai. Après je ne demande pas non plus une villa, mais une pièce assez grande que je puisse aménager comme je le souhaite. Ça serait sympa.
- Attends ! Reviens à la page précédente. Celui-là !
- Tu es sûre ? Les murs sont...
- Fuchsia, c'est certain, mais au pire un coup de peinture par dessus et on ne verra plus rien. En plus, regarde t'es situé dans un quartier assez calme, t'as une laverie en bas de chez toi, une supérette à 50 mètres, un parc au bout de la rue et en tram c'est à 10 minutes du campus. Franchement, tu ne trouveras pas mieux, dit Cléo en nettoyant le bar
- Je vais envoyer un message et demander une visite.
- Tu ferais mieux oui ! Des petites pépites comme ça, ça part vite ! Méfie-toi qu'un autre étudiant ne te le pique pas.
Ça serait con.
- Y'a une place de libre demain, tu veux venir avec moi ? lui demandé-je
Je la vois alors poser son torchon sur le comptoir avant de me regarder avec de grands yeux scintillants.
- Non, ce n'est pas un rencard. Calme tes hormones un peu.
- Même pas drôle, mais t'as de la chance ! Demain c'est mon jour de congé, je pourrais t'accompagner. On propose à Basile de venir aussi ?
Franchement, je doute que Basile soit franchement partant pour visiter un studio. Je veux dire y'a rien de méchant dans ma démarche, mais on y va pour voir l'état des lieux et Basile, lui...
- Je pense qu'il doit avoir du travail avec ma grand-mère.
- Avoue que tu n'oses pas lui demander.
- Quoi ? Mais pas du tout !
- J'ai vu la façon dont tu le regardes Gabriel, tu meurs d'envie de lui faire sa fête et de le manger tout cru.
- Qu'est-ce que tu en sais toi d'abord ?
- Je te regarde exactement de la même façon.
Ça a le mérite d'être honnête au moins
- T'es un horrible personnage, c'est vrai, mais t'es une bombe sexuelle donc pour ce que je veux faire de toi, je n'ai pas spécialement besoin d'y voir grand-chose. Après tout, les plus grandes bêtises se font dans le noir !
Merci, mais non merci. Cette fille est décidément très surprenante.
- On t'a déjà dit que ta façon de draguer un homme est particulièrement horrible ?
- Je suis honnête.
- Ah bah oui, oui, tout à fait, on ne peut pas dire que tu y vas par quatre chemins, je te l'accorde.
- Dis-moi Gabriel, je peux te poser une question ?
- Je t'écoute.
- Tu pars à la fin du mois c'est ça ?
- Normalement, oui. Si tout se passe bien. Pourquoi ?
- Tu aimes les paris ?
Pourquoi venant de Cléo, j'ai peur d'une éventuelle arnaque ou d'un piège quelconque ?
- Ça dépend.
- Dis-moi, pour toi, à la fin du mois : Qui aura mis le grappin sur qui ? Toi sur Basile ou moi sur toi ?
J'éclate de rire tandis que Cléo se trouve à côté de moi, légèrement appuyée sur le dossier de ma chaise, alors que je baisse légèrement la tête en arrière pour la regarder droit dans les yeux.
- Je suis un trop gros poisson pour toi, ma petite fermière. Abandonne. Je ne mordrais jamais à ton hameçon.
- Tu sais ce que l'on dit ? Ne jamais dire jamais.
Elle se penche à son tour à hauteur du creux de mon oreille et me souffle tout bas
- Tu pourrais être surpris de ce que l'avenir te réserve.
Je l'admets, Cléo a un petit quelque chose d'attirant. Elle n'est pourtant pas spécialement jolie, mais on va dire qu'elle a un charme bien à elle. Et puis elle sait jouer de ses formes aussi. Ce chemisier rouge est bien trop décolleté à mon gout tandis qu'il suffit de plonger le regard pour voir la dentelle de son soutien-gorge noir débordée légèrement, mais tout de même.
En fait, Cléo est mon strict reflet dans le miroir, mais en fille. C'est ma version féminine et quelque part, ça me fait flipper. Je me dis que je dois avoir exactement le même comportement avec Basile.
- Ah Cléo ! Que vais-je faire sans toi en ville ? Je vais me sentir si seul.
- Tu as oublié un détail Gabriel dans ton plan pour me narguer.
Lequel ?
- C'est moi qui ai choisi le studio, donc je sais parfaitement où il se trouve.
Et c'est à ce moment-là que Gabriel a commencé à flipper en imaginant Cléo tous les soirs en bas de chez lui, à le regarder depuis la fenêtre.
- Stalkeuse.
Elle s'écarte en riant, retournant vers le bar tandis que je me mets discrètement à chercher un deuxième studio, juste au cas où. On n'est jamais vraiment complètement à l'abri du danger.
- Tu sais Gabriel, au fond, si je voulais vraiment te mettre dans mon lit, ça ferait longtemps que j'aurai eu l'occasion de le faire.
- Qu'est-ce que tu en sais ?
- Réponds à cette question pour moi : Il a quel goût le café aujourd'hui ?
De son petit sourire en coin souligné par son regard psychopathe, je me mets immédiatement à imaginer le pire alors que je quitte ma place pour me précipiter aux toilettes.
Pas de palpitations. Rythme cardiaque ok. Pas de fièvre. Regard normal.
Tout va bien.
Je reviens en la fusillant du regard tandis qu'elle est me regarde hilare.
- C'est trop facile de jouer avec toi. Tu ne marches pas, tu cours.
- Oh ça va hein !
La prochaine fois, je prendrai un thé glacé.
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