Chapitre 11

Munch Wenlock, à l'ouest-sud-ouest de Lichfield, proche du pays de Galles,

Alors que les prémices de l'aube automnale s'amorçaient à l'horizon, irisant le ciel de teintes rose orangé, les habitants de la bourgade s'apprêtaient à débuter leur journée de labeur, mais avant, la cloche de l'église tinta pour annoncer qu'ils devaient assister à la messe.

Les Danois du clan du jarl Joar le Valeureux, aux visages peints, profitèrent du fait qu'ils soient tous regroupés au même endroit pour investir la petite ville.

Le jarl ouvrit les portes en grand, interrompant le chant religieux, amusé de voir le prêtre derrière l'autel où trônaient calice et grande croix sur pied en or sertie de pierres précieuses. Le moment de surprise fut suivi par un hoquet général de peur quand les petites portes latérales furent ouvertes et que les Danois entrèrent en nombre, alors que Joar le Valeureux marchait d'un pas assuré de la nef vers le chœur, suivi par son fils et sa fille.

— Désolé de briser cette harmonie vocale, clama le jarl. Mais mieux vaut ça que vos vies, affirma-t-il en étudiant les visages indignés et effrayés des habitants.

— Vous êtes dans la maison de Dieu, hurla le prêtre. Vous n'avez aucun droit d'amener vos croyances impies en ce lieu saint.

— Du calme, grogna Joar le Jeune alors que le prêtre appelait les hommes au conflit pour les chasser.

Le jarl saisit la magnifique croix et l'étudia brièvement avant de dévisager le prêtre qui était rouge de colère. Puis Joar le Valeureux se tourna vers l'assemblée contrôlée par le nombre de ses guerriers, qui attendaient son ordre.

— Voilà comment ça va se passer, clama le jarl. Mes hommes vont passer devant chaque rangée pour récupérer vos bourses et vos bijoux.

Un grognement collectif s'éleva, mais le jarl leva la main pour stopper toute protestation.

— Quand ça sera fait, ajouta-t-il le calme revenu. Mes hommes et moi irons fouiller vos maisons, pendant que vous resterez ici pour poursuivre... Vos chants et rituels... Peu importe.

Un nouveau marmonnement d'insultes et de colère s'éleva.

— Je vous fais le serment que si vous faites ce que je dis, alors aucun d'entre vous ne mourra aujourd'hui ! tonna le jarl.

« Menteurs » clamèrent des hommes, ce qui amusa Guthred qui espérait que quelques-uns résisteraient, car il voulait s'amuser un peu, mais aucun ne bougeait.

« Démons, vous brûlerez en Enfer » feulèrent des femmes.

— Vociférez autant que vous le souhaitez, sourit Joar le Valeureux. Tant que vous resterez le cul collé à vos bancs, aucun mal ne vous sera fait ! insista-t-il. Allez, ordonna-t-il à ses hommes.

Liv alla inspecter la sacristie, tandis que Joar le Jeune vida le panier de pain et s'en servit pour récupérer les biens des chrétiens. Amusé par la similitude qu'il faisait entre sa quête et celle du prêtre, Joar leva les yeux et balaya la foule du regard. Il fut attiré par la femme brune aux longs cheveux bouclés, assise au milieu des bancs opposés, car elle était éclairée par un rayon lumineux.

— Plus vite, ordonna le jarl. Vous avez tous hâte qu'on s'en aille. De notre côté, nous avons beaucoup à faire, affirma-t-il.

Le jarl se tourna à nouveau vers le prêtre :

— Ne crois pas que je t'ai oublié, prêtre, sourit Joar le Valeureux.

— La démone a déjà tout prix, feula le prêtre en désignant Liv du menton.

— Il y a des placards sous l'autel, indiqua Liv à son père dans sa langue natale.

— La démone me dit que tu n'as peut-être pas tout donné, sourit le jarl.

Guthred plissa le regard de colère et alla pousser le prêtre, qui s'étala de tout son long.

— Comment osez-vous ? s'indigna le prêtre, peinant à s'asseoir.

— Guthred, j'ai donné ma parole à ces gens, feula le jarl en danois.

— Désolé, grogna l'intéressé d'un haussement d'épaules avant de s'accroupir pour forcer les verrous des portes.

— Ne perdons pas de temps, s'impatienta le jarl alors que sa fille lui apportait le pichet de vin qui attendait à la sacristie.

Le jarl en but une gorgée, offensant encore plus l'homme d'Église qui s'était relevé, tandis que Guthred venait de sortir deux coffres de pièces d'argent et un plus petit, contenant des pièces en or.

De son côté, Joar le Jeune ne cessait de jeter des coups d'œil à la femme qu'il avait remarquée, mais puisque son père avait promis que s'ils restaient tous assis, rien de fâcheux ne leur arriverait, il ne pouvait pas la faire se lever pour qu'elle le suive, ce qu'il espérait pourtant faire et plus encore si la belle était d'humeur câline.

« Ne rêve pas » lui souffla sa petite voix intérieure.

« Et pourtant, chevaucher cette créature doit être un pur plaisir » lui murmura son instinct de guerrier.

Joar le Valeureux regardait les allées et venues de ses guerrières et guerriers souriant de toutes leurs dents, fiers de leur récolte. Il ne rata pas l'air soucieux de son fils, qui confia le panier à Sven pour le rejoindre.

Ils échangèrent brièvement quelques mots à voix basse :

— Si je te l'accorde, d'autres hommes le voudront aussi, mais j'ai donné ma parole à ces gens ! refusa le jarl.

— Je comprends, affirma Joar le Jeune, déçu mais respectueux envers son père et seigneur.

— Si elle fait partie de ta destinée, tu retrouveras cette femme, le rassura son père en lui pressant gentiment l'épaule.

Joar le Jeune opina et tourna les talons pour remonter la nef et quitter l'église sans avoir manqué d'accrocher ce regard marron foncé, qui lui confirma qu'ils se reverraient.



Six jours plus tard, Joar le Jeune, Sven et un petit détachement de guerriers étudiaient de loin le petit village qui était établi au pied d'une petite falaise, laquelle était surplombée par ce que les hommes espéraient être un couvent.

Joar aperçut des voyageurs approcher du village à pied et il sourit en comprenant que sa destinée venait de se manifester.

— Allons-y, ordonna Joar qui voulait attaquer.

— On doit seulement observer, lui rappela Sven.

— Pas cette fois, sourit Joar qui voulait absolument repartir avec la femme aux yeux marron foncé.

Peu nombreux, ils attaquèrent avec rage, créant un sentiment de panique générale, car les habitants partirent en tous sens pour fuir.

Joar suivit sa proie qui courait comme une dératée vers la forêt. Il ne la talonna pas de trop près, car il aimait observer les mouvements de ses cheveux, qu'il trouvait magnifiques.

Presque à bout de souffle, elle jetait des regards en arrière et ne pouvait cesser de fuir le sachant derrière elle. Distraite, elle trébucha et eut le temps de se relever avec la branche qui l'avait mise à terre, car le Danois marchait vers elle, les mains levées, paumes ouvertes pour lui montrer qu'il n'était pas armé.

— Laissez les enfants, l'implora-t-elle le souffle saccadé.

Joar jeta un regard derrière la jeune femme et aperçut un groupe d'enfants effrayés, qui se pressaient les uns contre les autres, derrière un gros chêne.

— Ils ne m'intéressent pas, répondit-il en parlant Saxon.

— Je n'ai plus rien à vous donner, le supplia-t-elle comprenant qu'il était là pour elle.

— C'est toi que je veux, lui confirma-t-il, les paumes toujours levées et ouvertes.

— Non, refusa-t-elle.

— Mes hommes ne tueront personne aujourd'hui, sauf si tu refuses de me suivre, la prévint-il.

— Peu m'importe, je ne connais pas ces gens, tenta-t-elle.

— Qu'en est-il de ces enfants ? demanda Joar en pointant l'index dans leur direction.

La jeune femme sembla réfléchir à une meilleure issue. Elle ferma les yeux et pinça les lèvres avant de jeter sa branche.

— Ne me faites pas de mal, l'implora-t-elle, en l'entendant s'approcher.

— Ce n'est pas ce que je veux, répliqua-t-il avant de la saisir par le bras et la ramener vers ses hommes.




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